" L'énigme de Catilina " de Steven Saylor.

Fiche de lecture

Extraits: - à propos des élections
                      - à propos du forum et de la curie
                      - le procès des complices de Catilina
                     - le pont Muluius
                      - les élections à Rome
                      - Rome est au bord de l'anarchie
                      - Dernier discours de Cicéron
                      - Les machinations de Catilina
                      - Portraits de Catilina et Cicéron
                      - Cicéron fait reporter les élections

A propos des élections

" Les élections consulaires sont généralement des affaires dures et vicieuses. Les deux candidats qui obtiennent finalement le plus de voix deviennent consuls pour un an. Si les deux hommes sont du même bord politique, ils s'épaulent mutuellement et leur année de mandat est souvent utile et efficace. Mais s'ils viennent de partis opposés, le Sénat discerne vite le plus fort des deux. (…) Personne ne peut détenir la même fonction deux ans d'affilée, (…) Seuls les anciens consuls peuvent devenir gouverneurs d'une province. Et un gouverneur romain peut devenir fabuleusement riche, en saignant à blanc la population locale. L'avidité et la corruption sont sans limites. (…) … toutes les voix ne sont pas égales. Le vote d'un pauvre compte moins que celui d'un riche. Le jour des élections, les citoyens se rassemblent sur le champs de Mars, entre les anciennes murailles de la Ville et le Tibre. Les électeurs sont divisés en ce que l'on appelle des centuries ; mais l'importance de ces centuries n'a rien à voir avec le nombre des électeurs qu'elles contiennent. Une centurie peut compter une centaine d'hommes, une autre un millier. Les possédants ont plus de centuries que les pauvres, quoiqu'ils soient moins nombreux. Ainsi, lorsqu'un riche vote, sa voix a beaucoup plus de poids que celle d'un pauvre. Toutefois, on a besoin du vote des pauvres. Les citoyens ordinaires ne sont pas négligés : ils sont choyés, séduits ou intimidés par toutes sortes de moyens légaux et illégaux, depuis les promesses de favoritisme jusqu'à la corruption pure et simple, (…) Pendant la campagne, les candidats multiplient les mensonges et vocifèrent de hideuses accusations contre leurs rivaux. "( SAYLOR Steven, L'énigme de Catilina, Ed. Ramsay, coll. 10/18, pp. 34-35)

 

A propos du forum et de la curie

Arrivée de Rufus, un prêtre, au cœur de Rome

" Au milieu de la foule des vendeurs, des électeurs, des politiciens et des mendiants, nous passâmes la demeure du Grand Pontife où officiait à présent le jeune César, et la maison des vestales, toute proche, scène du scandale Catilina. (…) Nous arrivâmes aux Rostres, cette tribune décorée des éperons des navires de guerre ennemis capturés, où les hommes politiques haranguent les foules, et les avocats plaident leur cause. C'est là que le jeune Cicéron avait plaidé l'affaire qui avait décidé de sa carrière, en défendant Sextus de l'accusation de parricide. (133;) Derrière les Rostres se dressait le Sénat, où Cicéron, consul de Rome, allait proposer un nouvel ajournement de l'élection consulaire, tandis que Catilina devait se défendre contre l'accusation de trouble de l'ordre publique ". (p. 193)

Discussion entre un orateur, juché sur un piédestal de bois, et un citoyen lui imposant un débat animé.

 " - La réforme agraire de Rullus aurait tout amélioré ! insistait l'orateur.
- Absurdité criait le citoyen. C'est l'un des pires projets de loi jamais pondus dans l'histoire de notre législation, et Ciceron a bien fait de parler contre.
- Ciceron est simplement le porte-parole des Optimates ". ( p. 194)
" Je déteste Catilina. Lui et son entourage dilettantes de bonne famille, gâtés et irresponsables ! Ils avaient la chance de pouvoir mener des vies décentes et ils ont tout gâché eux-mêmes, en s'endettant au-delà du possible auprès de citoyens plus sérieux. Leur proposition radicale d'effacer les dettes, ce n'est pas pour les masses comme ils le prétendent, mais bien pour se tirer d'embarras eux-mêmes et pour piller les biens de ceux qui ont le droit de garder ce que leurs ancêtres et eux-mêmes ont acquis. Si des vauriens comme Catilina finissent à la rue, ils n'auront eu que ce qu'ils méritent. Mais si les électeurs de Rome ont perdu leur bon sens au point de voter pour leurs idées folles… ". (p. 195)

 La curie romaine (lieu de réunion du sénat)

 " Une vaste volée de marches conduit au portique du bâtiment du Sénat, où de hautes colonnes bordent l'entrée. (…) Contiguë au bâtiment du sénat, une autre construction abrite divers services de l'Etat…Les portes de bois en étaient largement ouvertes, étant donné la chaleur. (…) A l'intérieur, un vaste couloir central courait sur toute la longueur du bâtiment et séparait des séries de petites portes, à droite et à gauche. Ces pièces étaient pleines de rouleaux, rangés dans des casiers le long des murs ou empilés sur des tables (p. 215).

 

Le procès des complices de Catilina

Ce jour-là, après un bref débat, le Sénat décréta tous les accusés coupables.[…] Le 5 décembre, jour des nones, le Sénat se réunit à nouveau, pour décider cette fois de la punition à infliger aux neuf accusés reconnus coupables de crime contre la sûreté de l'État.
[…]Silanus, en tant que consul désigné, parla le premier. La seule peine possible, face à de tels crimes, était, à ses yeux, le " châtiment suprême ",[…]puis ce fut le tour de César. […]Il fit remarquer que la loi permettait à un citoyen romain condamné d'échapper à la mort par l'exil et il mit en garde les Pères Conscrits (pp. 380-381)

 

Le pont Mulvius, là où les Allobroges ont été arrêtés

 " Juste au nord de Rome, la voie Cassienne bifurque en deux directions. La plus petite des deux branches, au sud, contourne les collines du Vatican et du Janicule pour aller rejoindre la voie Aurélienne, qui pénètre au cœur- même de la Ville par les anciens ponts, puis traverse le grand marché aux bestiaux pour déboucher sur le Forum. L'arrivée par la voie Aurélienne est toujours impressionnante : on découvre le Tibre scintillant, ponctué de petits bateaux, avec ses rives bordées de quais et d'entrepôts ; le bruit des sabots sur les ponts ; la ligne d'horizon de la grande cité, dominée par le temple de Jupiter, sur la colline du Capitole. Puis c'est une lente progression à travers les différents marchés et l'extraordinaire spectacle du Forum, avec son magnifique ensemble de temples et de palais. Il aurait été tentant d'entrer par là dans Rome, pour célébrer par avance l'accession de Meto au statut de citoyen romain, mais un sage pragmatisme me fit éviter cette solution : en fin d'après-midi, le trafic par la voie Aurélienne risquait d'être paralysé ; avec un chariot, je craignais de rester coincé sur l'un des ponts ou parmi les étals des marchés.

Nous prîmes donc la branche principale de la voie Cassienne, qui rejoint la voie Flaminienne dans les faubourgs nord de Rome, avant de franchir le Tibre sur le pont Milvius1. L'entrée dans Rome par cet accès est moins spectaculaire, car la ville et la campagne s'y interpénètrent, de sorte que le voyageur se trouve d'abord dans les faubourgs les plus extérieurs, puis soudain au cœur même de la grande ville, avant de savoir ce qui lui arrive. On passe les terrains d'exercice du champ de Mars, à droite, puis les grandes enceintes électorales, puis on pénètre dans la ville proprement dite par la porte Flaminia. Notre parcours éviterait le Forum par le nord et nous conduirait directement à la maison d'Eco, sur la colline de l'Esquilin, avec beaucoup moins d'embarras que si nous avions choisi la voie Aurélienne. (pp. 154-155).

l) La via Aurelia, œuvre d'un membre de la famille des Aurelii, était la route de la côte ligure. Elle se prolongeait ensuite jusqu'en Provence. Elle franchissait le Tibre par les ponts Aemilius et Sublicius, et aboutissait au Forum Boarium, lieu primitif du marché de Rome, au pied du Vélabre et du Palatin. (N. d. T.)

Les élections à Rome

 " …Juste en bordure de la voie Flaminienne, entre le secteur construit du champ de Mars et les espaces plus ouverts sur le nord se trouve la Villa Publica. L'enceinte fortifiée en est fort ancienne, comme les bâtiments qui se trouvent à l'intérieur. Outre les bureaux des censeurs qui tiennent le registre des électeurs, la Villa Publica est à Rome ce qu'un vestibule est à une maison : les ambassadeurs étrangers sont logés là, de même que les généraux romains avant la cérémonie du triomphe. C'est aussi l'endroit où les candidats se retirent en attendant les résultats d'une élection.
A côté de la Villa Publica il y a une autre enceinte fortifiée, appelée très simplement l'Enclos à moutons. Le jour des élections, des cordes y sont tendues pour diviser l'espace intérieur en couloirs. Pour voter, les électeurs sont guidés à travers l'Enclos comme des moutons dans un parc. La métaphore est assez facile à comprendre. (…)"
" (…)Il ne me fallut pas longtemps pour constater des signes de corruption manifestes. Je reconnus dans la foule plusieurs individus douteux, que je voyais se déplacer entre les chefs de centurie, souriant et serrant des mains, et tendant de petits sacs qui ne pouvaient être que remplis de pièces. (…)"
" (…)Tout à coup un tumulte de cris s'éleva quelque part et s'approcha de nous. Je me tournai pour voir arriver Cicéronet son collègue, Caius Antonius. Cicéron était entouré de 5 gardes armés et tenait sa toge ouverte pour bien montrer la cuirasse qu'il portait, dernier rappel aux électeurs de la traîtrise présumée de Catilina. …" (pp. 228-229)

 

Un partisan de Cicéron met en garde Gordien, le héros du roman : l'anarchie est aux portes de Rome !

 " L'Etat est au bord d'une catastrophe terrible, Gordien. Certaines factions sont résolues à détruire la République une fois pour toutes. Imagine le Sénat noyé de sang. Imagine un retour des proscriptions, lorsque tout citoyen pouvait être décrété, sans aucune justification, ennemi de l' Etat ; rappelle toi les bandes parcourant les rues de la Ville et apportant les têtes coupées au Forum, pour recevoir leur récompense des caisses du dictateur Sylla. Cette fois, les ennemis de l' Etat sont déterminés non à le changer, quel que soit le prix du sang à payer, mais à l'anéantir. Tu possèdes une ferme aujourd'hui, Gordien : veux-tu qu'elle te soit arrachée par la force ? Cela arrivera, sois-en sûr ; dans cet ordre nouveau, qu'ils veulent imposer, tout ce qui est établi sera jeté bas, dans la poussière. "

Saylor Steven, " L'énigme de Catilina " , 1997, éd. Ramsay, coll. 10/18, p. 29.

 

La fin du discours de Cicéron

"Ce matin même, devant le Sénat, j'ai révélé toute l'affaire mais maintenant, citoyens, je vais vous exposer brièvement les faits, afin que chacun d'entre vous puisse connaître par lui-même les dangers qui ont été encourus, décelés et victorieusement combattus, au nom de Rome et par la grâce des dieux.
[…]Après avoir rappelé la fuite de Catilina,[…] il raconta la manœuvre de Publius Lentulus auprès des Allobroges, les messagers interceptés au pontMilvius, leur interrogatoire devant le Sénat, la confusion des conspirateurs devant les témoignages irréfutables des lettres.
[…]La péroraison de son discours atteignit des sommets aujourd'hui, sous le regard terrible de Jupiter.[…]C'est Jupiter lui-même qui les a mis en échec. Jupiter voulait que le Capitole fût sauvé, et tous les temples, et la ville entière, et toi, peuple de Rome ![…]Adressez vos prières d'amour et de reconnaissance à celui qui nous a tous sauvés, au destructeur des ennemis de Rome, à Jupiter tout-puissant !"(p. 372)

 

Les machinations de Catilina

 

Gordien, le héros de l'histoire, parle avec Marcus Caelius, chargé d'espionner Catilina au bénéfice de Cicéron. Caelius dévoile les activités de Catilina.

 "- C'est le seul homme [Cicéron] qu'il [Catilina] craigne à Rome, et il a, n'est-ce pas, des raisons de lui en vouloir.
- Mais comment sais-tu tout cela, Marcus Caelius ?
- Il y a eu une réunion des conspirateurs au début de ce mois…(...)
- Trop, c'est trop, Caelius ! Tu es en train de me dire que Catilina trame une conspiration pour assassiner Cicéron et que tu as assisté à cette réunion secrète ?
(…)Dis-moi d'autres choses sur la réunion à laquelle tu as assisté, dis-je doucement.
- C'était dans sa maison du Palatin, une splendide demeure bâtie par son père, et la seule chose qui lui reste de son héritage, à part son nom. Cela a commencé comme un souper, mais, après avoir mangé, nous nous sommes retirés dans une pièce reculée de la maison. Les esclaves ont été renvoyés, et l'on a fermé la porte. Si je te disais les noms des sénateurs et des patriciens qui étaient là…
- Inutile.
Caelius hocha la tête.
- Catilina n'a rien à envier à Cicéron lorsqu'il parle avec passion. Il s'attarda sur la détresse commune à beaucoup de ceux qui étaient présents et désigna l'oligarchie au pouvoir comme source de leur misère ; il promit un nouvel Etat, sanctifié par le sang de l'ancien ; il parla d'abolition des dettes et de confiscations des biens des fiches. Lorsqu'il eut fini, il apporta un bol de vin et invita chaque conjuré à s'entailler le bras pour y verser un peu de son sang.(…)
Caelius tendit son bras et me montra la cicatrice.
- Le bol circula parmi nous et chacun y but. Nous prêtâmes serment de secret...
- Que tu es en train de violer, en ce moment.
- Un serment contre Rome n'est pas un serment pour un vrai Romain.(…)
- Et Catilina t'a accepté parmi ses partisans, bien qu'il sût ta relation avec Cicéron ?
- Oui. Pendant un moment, j'ai véritablement été sous son charme ; je l'ai convaincu de ma loyauté parce qu'elle était réelle à ce moment-là - jusqu'à ce que je voie clair en lui, jusqu'à ce que j'apprenne qu'il projetait d'assassiner Cicéron. J'allai alors trouver celui-ci pour tout lui répéter. Il me demanda de rester dans la confidence de Catilina (…). Les déplacements de ce dernier sont surveillés, mais il a des moyens de sortir de la ville sans être observé. Son principal allié, en dehors de Rome, est un ancien soldat, Gaïus Manlius, qui vit à Faesulae1 ; Catilina a besoin d'un refuge secret entre cette ville et Rome, qui nesoit pas la villa de l'un de ses partisans, mais un endroit où ses ennemis ne songeront jamais à vérifier sa présence". (p. 45).

 1)Actuelle ville de Fiesole.

 

Dans cet extrait, Eco, le fils de l'enquêteur Gordien, donne son point de vue sur les intentions de Catilina

 "… Je ne suis pas sûr que Catilina ait voulu la mort de Cicéron avant les élections, car s'il les avait remportées, les choses auraient pu aller très différemment.
Mais à présent, ses partisans sont unanimes sur ce point : il faut éliminer Cicéron, en partie par vengeance, en partie pour donner une leçon aux Optimates et à leurs partisans. …" (S. Saylor, L'énigme de Catilina, p. 302).  

 

Conversation entre Gordien et Catilina

Catilina critique les Optimates qui monopolisent le pouvoir à Rome:

 "(…) Il est vrai, Crassus et moi avons nos différences, mais nous affrontons un même ennemi : l'oligarchie qui gouverne Rome. Tu vois qui je veux dire : ce petit cercle de familles incestueuses qui garde les rênes du pouvoir si jalousement et ne reculera devant rien pour briser toute opposition. Tu sais comment ils se sont baptisés, non ? Les " Meilleurs " ! C'est ainsi qu'ils s'appellent sans la moindre gêne, comme si leur supériorité était si évidente que la modestie ne serait qu'une affectation. En dehors de leur cercle, tout n'est à leurs yeux que populace : l'Etat, disent-ils, ne doit être dirigé que par des Optimates, sans aucune concession aux autres partis, car quelle meilleure façon de gouverner un État que de le placer dans les mains exclusives de ceux qui sont de toute façon les " Meilleurs " ? Oh, cette morgue d'autosatisfaction insupportable ! Et Cicéron qui est rentré complètement dans leur jeu (...)
- Nous parlions de Crassus, pas de Cicéron, je crois. Catilina soupira et s'installa plus confortablement dans l'eau.
- Marcus Crassus est une trop grande puissance pour appartenir à aucun parti, fût-il celui des Optimates. Il est son propre parti à lui seul, si bien qu'il se trouve souventaux prises avec eux. Tu as raison, il n'a aucune sympathie pour mes plans en matière d'accroissement des richesses, qui devront être réalisés si la République veut survivre ; mais Crassus se fiche comme d'une guigne de la survie de la République. Tout ce qu'il souhaite, c'est la voir mourir, pourvu que le dictateur qui suivra inévitablement s'appelle Marcus Crassus. D'ici là, lui et moi aurons plus d'une occasion de nous liguer contre les Optimates. De plus, nos relationsremontent assez loin dans le temps, aux jours où nous servions tous les deux le parti syllanien.
- Tu veux dire que, comme Crassus, tu as aussi profité des proscriptions sous la dictature de Sylla, lorsque les biens de ses ennemis étaient confisqués et mis aux enchères publiques ?" (pp. 132-133)

 

Portraits de Catilina et Cicéron.
(Crédit: Nadège Dazy)

 

Catilina : " Il vient d'une ancienne famille patricienne, mais il n'a pas de fortune : tout juste le genre d'aristocrate qui soutient les programmes les plus radicaux avec redistribution des richesses, annulation des dettes, démocratisation des emplois publics et des fonctions sacerdotales. La classe conservatrice n'est pas très favorable à ce type de programme (…) "

" Et puis il y avait Cicéron. Aucun de ses ancêtres n'avait jamais occupé de fonctions électives ; il était le premier de sa famille à parcourir la carrière des honneurs, ce que l'on appelle un "homme nouveau". Or aucun homme nouveau n'a jamais réussi à se faire élire consul, de mémoire de Romain. L'aristocratie levait le nez sur lui, méprisant son éloquence et ses succès auprès de la foule. Cicéron est un astre naissant, une comète venue de nulle part, et il est aussi vaniteux qu'un paon. A sa façon, il devait apparaître aussi menaçant pour l'ordre établi que Catilina, dans un autre genre. Et il aurait pu l'être, si ses principes ne s'étaient pas révélés aussi souples. Catilina et Antoine formèrent une alliance, que l'on donna rapidement gagnante. Les riches étaient bien embarrassés : ils ne pouvaient pas digérer Cicéron, mais ils avaient peur de Catilina (…) (Il était accusé) d'une panoplie complète de crimes en tout genre. Il y avait naturellement les accusations habituelles de corruption électorale, achats de voix et autres pots-de-vin ; ces accusations étaient probablement vraies. Cicéron y ajouta les anciennes accusations de prévarication datant du mandat de Catilina en Afrique. Puis vinrent les accusations et les insinuations les plus venimeuses, rumeurs de scandales sexuels, incestes, assassinats (…) On dit que, dans les jours terribles de la dictature de Sylla, Catilina a été l'un de ses exécutants les plus actifs, tuant les ennemis du dictateur et apportant leurs têtes pour la récompense. On dit qu'il a commencé par liquider son beau-frère de cette façon : la sœur de Catilina voulait faire tuer son époux et il l'aurait fait de sang-froid, s'arrangeant ensuite pour faire inscrire le malheureux sur les listes de proscription (…) On dit que la nouvelle épousée refusaient le mariage s'il y avait déjà un héritier dans la maison, et que Catilina aurait tué son fils en cette occasion. Pour ce qui est de la jeune femme, il se trouve qu'elle est la fille de l'une des anciennes maîtresses de notre homme - et il y en a même pour dire qu'elle est sa propre fille ! (…) Catilina est un patricien et Cicéron un homme nouveau ; (…) … l'élection venue, Cicéron a été vainqueur à une écrasante majorité. Ce fut un triomphe personnel retentissant dans le parcours d'un homme sans ancêtres ; il menait sa carrière avec sa seule force et son seul talent (…) Les années précédentes, une avalanche de procès avait interdit toute candidature à Catilina (…) Cette année, Catilina est de nouveau en lice. " (SAYLOR Steven, L'énigme de Catilina, Ed. Ramsay, coll. 10/18, pp. 36-37-38-39)

 

Cicéron a fait reporter les élections

 "- L'élection a été annulée !
- Annulée ?
Il hocha gravement la tête.
- Par le tout-puissant Cicéron Bouche d'or en personne. Il a réuni le Sénat et l'a convaincu d'ajourner l'élection. Pourris d'optimates !
- Mais pourquoi ? Quelle a été la raison ?
- La raison, ou plus exactement le prétexte, a été que Catilina prépare un terrible complot pour liquider le Sénat - comme si la plupart d'entre eux ne méritaient pas qu'on leur coupe la gorge - et qu'il n'est pas prudent, dans ces conditions, de tenir une élection. Tout cela s'est passé il y a quelques jours, mais tu vis dans une grotte ou quoi ? On a envoyé des messagers dans toute l'Italie pour prévenir les gens de ne pas se déplacer maintenant, les élections étant retardées. Beaucoup ne l'ont pas cru, pensant qu'il s'agissait d'une combine pour nous tenir à l'écart de la politique. Cela ressemble bien à l'une de ces magouilles que les Optimates aiment,non? On est donc tous venus! Devant un tel rassemblement, les sénateurs étaient prêts à tenir l'élection, mais la veille, on a vu des éclairs à l'horizon alors que le ciel était tout bleu (...) Alors voilà : les gens quittent Rome, reviennent, ne savent pas où rester. La dernière chose que j'ai entendue est que l'élection consulaire aurait lieu après-demain.
- Quoi ?
- Ouais, le même jour que l'élection pour les préteurs. C'est pourquoi je suis revenu aujourd'hui. J'imagine qu'au lieu de l'organiser dans deux jours, ils vont essayer de la faire demain, pour nous tromper. Mais on ne va pas se laisser faire par ces gredins d'optimates : je serai au champ de Mars demain, dès l'aube, devant les enceintes électorales,... (p. 157)
(...)- Naturellement, tout le monde ne peut pas rester à Rome indéfiniment, dit-il. C'est pourquoi tu vois tous ces mouvements, dans tous les sens. Les gens du peuple ont besoin de revenir à leurs fermes, n'est-ce pas ? Il leur faut se soucier d'assurer leur subsistance et celle de leur famille.
(...) Plus loin, de gros nuages de fumée et de poussière montaient du champ de Mars, où des milliers d'électeurs venus de toute l'Italie avaient installés leurs campements (p. 158)"

 

Page suivante

Retour au menu