Langue |
Latin |
Auteur |
Pétrarque |
Références |
Affrica, V, v. 18-59 |
Sujet |
Portrait de la reine Sophonisbe |
Descripteurs |
Sophonisbe, Syphax; Massinissa; |
Hypertexte |
http://agoraclass.fltr.ucl.ac.be/concordances/intro.htm#petrarque |
Extrait Latin |
tamen omnia longe
Regia preradians uincebat lumina coniunx.
20 Ille nec ethereis unquam superandus ab astris
Nec Phebea foret ueritus certamina uultus
Iudice sub iusto. Stabat candore niuali
Frons alto miranda Ioui, multumque sorori
Zelotipe metuenda magis quam pellicis ulla
Forma uiro dilecta uago. Fulgentior auro
Quolibet, et solis radiis factura pudorem,
Cesaries spargenda leui pendebat ab aura
Colla super, recto que sensim lactea tractu
Surgebant, humerosque agiles effusa tegebat
30 Tunc, olim substricta auro certamine blando
Et placidis implexa modis: sic candida dulcis
Cum croceis iungebat honos, mixtoque colori
Aurea condensi cessissent uascula lactis,
Nixque iugis radio solis conspecta sereni.
Lumina quid referam preclare subdita fronti
Inuidiam motura deis? diuina quod illis
Vis inerat radiansque decor, qui pectora posset
Flectere quo uellet, mentesque auferre tuendo,
Inque Meduseum precordia uertere marmor,
40 Africa nec monstris caruisset terra secundis.
Hec, planctu confusa nouo, modo dulce nitebant,
Dulcius ac solito; ceu cum duo lumina iuxta
Scintillant pariter madido rorantia celo,
Imber ubi nocturnus abit. Geminata superne
Leniter aerii species inflectitur arcus;
Candida purpureis imitantur floribus alme
Lilia mixta gene; roseis tectumque labellis
Splendet ebur serie mira; tum pectus apertum
Lene tumens blandoque trahens suspiria pulsu,
[5,50] Cum quibus instabilem potuit pepulisse precando
Unde nequit reuocare uirum; tum brachia quali
Iupiter arctari cupiat per secula nexu.
Hinc leues longeque manus, teretesque sequaci
Ordine sunt digiti, propriumque ebur exprimit ungues.
Tum laterum conuexa decent, et quicquid ad imos
Membrorum iacet usque pedes: illosque moueri
Mortali de more neges; sic terra modeste
Tangitur, ut tenere pereant uestigia plante,
Ethereum ceu seruet iter.
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Traduction française |
Toutefois, son épouse éclipsait toutes les splendeurs du palais. Son visage
n'aurait point été effacé par les astres du firmament, et n'aurait pas craint de lutter
avec Phébus devant un juge impartial. Son front, d'une blancheur de neige, aurait
excité l'admiration du grand Jupiter et inspiré à sa soeur jalouse plus de craintes
qu'aucune des nombreuses maîtresses de cet époux volage. Plus brillante que l'or et
faisant honte aux rayons du soleil, sa chevelure, flottant au souffle de la brise,
pendait sur son cou blanc légèrement élancé, et recouvrait alors ses épaules agiles.
Naguère cette chevelure, retenue par un cercle d'or d'un contraste charmant, était
entrelacée avec grâce. Ainsi, le blanc et le jaune formaient un agréable mélange qui
eût effacé des vases d'or remplis d'un lait blanc et la neige des montagnes visitée
par les rayons d'un soleil serein. Que dirai-je de ses yeux au bas de son beau
front? Ils auraient éveillé la jalousie des dieux, car une vertu divine résidait en eux;
d'un rayon de ses regards elle dirigeait les coeurs à son gré, elle enlevait les âmes et
les changeait en pierre, à la façon de Méduse, pour que l'Afrique fût toujours la
terre des prodiges. Ces yeux, humides de larmes, brillaient d'un éclat plus doux
qu'à l'ordinaire : tels deux astres voisins, mouillés dans un ciel pluvieux, scintillent
pareillement quand la pluie de la nuit cesse. Audessus, deux espèces d'arcs se
courbent légèrement. Ses joues imitent les lis blancs mêlés aux fleurs pourprées. Ses
dents d'ivoire cachées par des lèvres de roses, resplendissent dans une rangée
admirable. Sa poitrine découverte, légèrement gonflée, exhale ces soupirs charmants
[5,50] avec lesquels, en y joignant les prières, elle a pu pousser son époux
inconstant là d'où elle ne peut plus le ramener. Jupiter voudrait que ses bras le
serrassent d'une étreinte éternelle. Ses mains sont longues et fluettes, ses doigts
faits au tour, et ses ongles ressemblent à de l'ivoire. Ses hanches sont belles, ainsi
que tout le bas de sa personne, jusqu'à ses pieds. On dirait que ses pieds ne se
meuvent point à la façon des mortels; de leur plante délicate ils touchent si peu la
terre que leurs vestiges s'effacent comme s'ils parcouraient la route éthérée.
Trad. : Victor DEVELAY, Pétrarque, L'Afrique. Paris, Librairie des Bibliophiles, 1882
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Date : |
29-06-2007 |
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