Extrait Latin |
Non dissimile Platonis illud est quod aiebat, se gratias agere naturae: primum, quod
homo natus esset potius, quam mutum animal; deinde, quod mas potius, quam
foemina; quod Graecus, quam Barbarus; postremo, quod Atheniensis, et quod
temporibus Socratis. Dici non potest, quantam mentibus caecitatem, quantosque
pariat errores ignoratio ueritatis. Ego plane contenderim, numquam quidquam
dictum esse in rebus humanis delirius. Quasi uero si aut Barbarus, aut mulier, aut
asinus denique natus esset, idem ipse Plato esset, ac non ipsum illud, quod natum
fuisset.
...
Quanto sanius faceret, si gratias agere se diceret, quod ingeniosus, quod docilis natus
esset, quod in iis opibus, ut liberaliter erudiretur. Nam quod Athenis natus est, quid
in eo beneficii fuit? An non plurimi extiterunt in aliis ciuitatibus excellenti ingenio
atque doctrina uiri, qui meliores singuli, quam omnes Athenienses fuerunt? Quanta
hominum millia fuisse credamus, qui et Athenis nati, et temporibus Socratis, indocti
tamen, ac stulti fuerunt? Non enim aut parietes, aut locus in quo quisque est effusus
ex utero conciliat homini sapientiam. Quid uero attinuit Socratis se temporibus
natum gratulari? Num Socrates ingenia discentibus potuit commodare? Non uenit in
mentem Platoni Alcibiadem quoque et Critiam eiusdem Socratis assiduos auditores
fuisse; quorum alter hostis patriae acerrimus fuit, alter crudelissimus omnium
tyrannorum.
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Traduction française |
Platon disait quelque chose de semblable, quand il rendait grâce à la nature de ce
qu'elle l'avait fait naître raisonnable plutôt que bête, homme plutôt que femme, Grec
plutôt que barbare, et enfin de ce qu'elle l'avait rendu citoyen d'Athènes et
contemporain de Socrate. On ne saurait dire jusqu'où va l'égarement d'un esprit qui
s'est une fois éloigné de la vérité. Pour moi je soutiens qu'il n'y eut jamais rien de si
extravagant que cette parole de Platon. S'il était né ou barbare ou femme ou âne, il
n'aurait pas été Platon.
...
N'aurait-il pas mieux fait de dire qu'il remerciait la nature de ce qu'il avait de l'esprit,
de la docilité pour apprendre, ou bien pour se faire instruire? Car quel avantage
était-ce d'être né dans Athènes plutôt que dans une autre ville? N'y a-t-il pas eu dans
d'autres villes des hommes qui ont excellé en esprit et en science, et dont un seul a
surpassé tous les Athéniens en mérite? Combien y a-t-il eu d'Athéniens au temps de
Socrate qui n'ont été que des ignorants et des insensés ! Le lieu de la naissance ne
contribue en rien à la sagesse. Le temps n'y contribue pas davantage, et il n'y avait
pas sujet de se vanter d'être venu dans celui de Socrate. Ce philosophe donnait-il de
l'esprit à ceux qui n'en avaient point? Platon avait-il oublié qu'Alcibiade et Critias ont
été les plus fidèles disciples de Socrate, et que cependant l'un a déclaré la
guerre à sa patrie, et l'autre a opprimé la liberté de ses concitoyens ?
Trad. : J.-A.-C. BUCHON, Choix de monuments primitifs de l'église chrétienne. Paris, Delagrave, 1882 |