Extrait Grec |
782 βροτοῖς ἅπασι κατθανεῖν ὀφείλεται,
783 κοὐκ ἔστι θνητῶν ὅστις ἐξεπίσταται
784 τὴν αὔριον μέλλουσαν εἰ βιώσεται·
785 τὸ τῆς τύχης γὰρ ἀφανὲς οἷ προβήσεται,
786 κἄστ´ οὐ διδακτὸν οὐδ´ ἁλίσκεται τέχνηι.
787 ταῦτ´ οὖν ἀκούσας καὶ μαθὼν ἐμοῦ πάρα
788 εὔφραινε σαυτόν, πῖνε, τὸν καθ´ ἡμέραν
789 βίον λογίζου σόν, τὰ δ´ ἄλλα τῆς τύχης.
790 τίμα δὲ καὶ τὴν πλεῖστον ἡδίστην θεῶν
791 Κύπριν βροτοῖσιν· εὐμενὴς γὰρ ἡ θεός.
792 τὰ δ´ ἄλλ´ ἔασον πάντα καὶ πιθοῦ λόγοις
793 ἐμοῖσιν, εἴπερ ὀρθά σοι δοκῶ λέγειν.
794 οἶμαι μέν. οὔκουν τὴν ἄγαν λύπην ἀφεὶς
795 πίηι μεθ´ ἡμῶν {τάσδ´ ὑπερβαλὼν τύχας,
796 στεφάνοις πυκασθείς}; καὶ σάφ´ οἶδ´ ὁθούνεκα
797 τοῦ νῦν σκυθρωποῦ καὶ ξυνεστῶτος φρενῶν
798 μεθορμιεῖ σε πίτυλος ἐμπεσὼν σκύφου.
799 ὄντας δὲ θνητοὺς θνητὰ καὶ φρονεῖν χρεών·
[800] ὡς τοῖς γε σεμνοῖς καὶ συνωφρυωμένοις
801 ἅπασίν ἐστιν, ὥς γ´ ἐμοὶ χρῆσθαι κριτῆι,
802 οὐ βίος ἀληθῶς ὁ βίος ἀλλὰ συμφορά. |
Traduction française |
Écoute-moi donc : tous les hommes sont condamnés à mourir, et il n'est aucun d'eux
qui sache s'il vivra le lendemain. Ce qui dépend de la fortune nous est caché ; rien ne
peut nous en instruire, l'art même est impuissant à le découvrir. En vertu de ces
maximes, et instruit par moi, livre-toi à la joie, au plaisir de boire ; regarde comme à
toi la vie de chaque jour, et le reste comme dépendant de la fortune. Honore aussi
Vénus, qui donne aux mortels les plaisirs les plus doux, car c'est une aimable déesse.
Laisse là tes autres soins, et crois-en mes conseils s'ils te paraissent bons, comme je les
crois : ainsi, fais trêve à cette excessive tristesse, bois avec moi, franchis cette porte, et
couronne-toi de fleurs. Je suis certain que le bruit des coupes te tirera de ce noir
chagrin qui resserre ton cœur. Mortels, nous devons prendre les sentiments de notre
condition mortelle ;
[800] car pour les caractères tristes et austères, la vie, à mon jugement, est moins une
vie qu'une misère.
Trad. : M. ARTAUD, Tragédies d'Euripide. Première série. Paris, Charpentier, 1842 |