Extrait Grec |
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Traduction française |
Quand même tu aurais à vivre trois mille ans, et trois fois dix mille ans, dis-toi bien
que lon ne peut jamais perdre une autre existence que celle quon vit ici-bas, et quon
ne peut pas davantage en vivre une autre que celle quon perd. A cet égard, la plus
longue vie en est tout à fait au même point que la plus courte. Pour tout le monde, le
présent, le moment actuel est égal, bien que le passé quon laisse en arrière puisse
être très inégal. Ainsi, ce quon perd nest évidemment quun instant imperceptible.
On ne peut perdre daucune façon ni le passé ni lavenir ; car une chose que nous ne
possédons pas, comment pourrait-on nous la ravir ? Voici donc deux considérations
quil ne faut jamais perdre de vue : la première, que tout en ce monde roule
éternellement dans le même cercle, et quil ny a pas la moindre différence à voir
toujours des choses pareilles, ou cent ans de suite, ou deux cents ans, et même
pendant la durée infinie ; la seconde, que celui qui a le plus vécu et celui qui aura dû
mourir le plus prématurément font exactement la même perte ; car ce nest jamais
que du présent quon peut être dépouillé, puisquil ny a que le présent seul quon
possède, et quon ne peut pas perdre ce quon na point.
Trad. : J. Barthélémy Saint-Hilaire, Pensées de Marc-Auréle, Paris, Baillière, 1876 |