Parcours :  13

Commentaires, Textes témoins et Prolongements



Horace, Satires, II,3, 312-320: quoi que fasse Mécène, n'est-il pas vrai que tu veux rivaliser avec lui, toi, si différent, si inférieur? Comme en l'absence d'une grenouille, un veau avait écrasé du pied ses petits et qu'un seul avait pu se sauver, celui-ci raconte à sa mère comment une bête énorme a broyé ses frères. Elle de demander quelle en était la taille, et, s'enflant: "Etait-elle aussi grosse que cela?... plus grosse de moitié?... plus grosse encore d'autant?" Comme elle s'enflait de plus en plus: "Non, pas même si tu crevais, dit le petit, tu n'arriverais à l'égaler". C'est là ton portrait assez ressemblant. (Traduction Fr. Villeneuve, coll. Budé)

Fournir le texte de la fable correspondante de La Fontaine, I, 3 "La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le boeuf" .

I. A. Krylov (1769-1844), Fables, 8 "La grenouille et le boeuf":

La grenouille, voyant dans la prairie un boeuf,
S'imagina pouvoir l'égaler en grosseur.
Car elle était fort envieuse.
La voici qui s'étire et s'enfle et se travaille.
"Regarde, soeur Couac-Couac! De sa taille approchè-je?
Dit-elle à son amie. - Eh non, de loin, ma chère!
- Vois comme maintenant je me suis dilatée.
Hein? Qu'en dis-tu?
J'ai dû faire l'appoint. - Oh non, si peu que rien...
- Et maintenant? - Pareil". Se dilatant toujours,
Ma fantasque commère eut pour tout résultat,
Sans s'égaler en rien au boeuf,
Qu'elle éclata sous l'effort et creva.

Au monde on voit souvent un tel ménage.
Eh oui, tel boutiquier veut le même avantage
Qu'un citoyen de haut étage,
Et le menu fretin qu'un noble de lignage.

(Traduction de M. Colin, Les Belles Lettres, Paris, 1978; la moralité, jointe plus tard, en 1815, serait peut-être une allusion à Napoléon)

Comparer les fables , place de la morale, narration, discours direct...

Trouver une morale pour aujourd'hui, comme un fabuliste latin du Moyen Age l'a fait pour son époque.

Eudes de Cheriton (XIIIe s.), Fables, LXII: "Contra magna appetentes ex inuidia"

Rana uidit Bouem in prato incedentem. Cogitauit si posset. ... Sic sunt plerique qui uident episcopos, abbates, archidiaconos, quasi boues cum magna pompa incedentes. Cogitant qualiter possent ita magni fieri et in tantum conantur quod in anima uel corpore moriuntur.
(Dans P. Hervieux, Les fabulistes latins... t.IV, p.233)

Moralitas: noli te inflare ne crepes. (chez un autre fabuliste)


TEXTE 3: Ceruus ad fontem Esope, 102 Le cerf à la source et le lion
Un cerf pressé par la soif arriva près d'une source. Après avoir bu, il aperçut son ombre dans l'eau. Il se sentit fier de ses cornes, en voyant leur grandeur et leur diversité; mais il était mécontent de ses jambes, parce qu'elles étaient grêles et faibles. Il était encore plongé dans ces pensées, quand un lion apparut qui le poursuivit. Il prit la fuite, et le devança d'une longue distance; car la force des cerfs est dans leurs jambes, celle des lions dans leur coeur. Tant que la plaine fut nue, il maintint l'avance qui le sauvait; mais étant parvenu à un endroit boisé, il arriva que ses cornes se prirent aux branches et que, ne pouvant plus courir, il fut pris par le lion. Sur le point de mourir, il se dit en lui-même: "Malheureux que je suis! Ce sont mes pieds, qui devaient me trahir, qui me sauvaient; et ce sont mes cornes, en qui j'avais toute confiance, qui me perdent". C'est ainsi que souvent dans le danger les amis que nous suspectons nous sauvent, et ceux sur qui nous comptons fermement nous trahissent.
(Traduction E. Chambry, coll. Budé)
Fournir le texte de la fable de La Fontaine, VI, 9 "Le cerf se voyant dans l'eau" .
Comparer les fables , place de la morale, narration, discours direct...
Titres donnés par des fabulistes latins du Moyen Age. ( P. HERVIEUX, Les fabulistes latins. Depuis le siècle d'Auguste jusqu'à la fin du moyen âge, Paris, 1893-1899, 4 vol.)
De ceruo fatuo -De ceruo et canibus -Contra superbos -De ceruo et cornibus eius -De ceruo qui ob suorum cornuum magnitudinem est captus.
Exemples de morales parfois "moralisantes" trouvées chez ces mêmes fabulistes:
- Sic quae nos perdunt vitiorum monstra probamus et bona uirtutum maxima despicimus. - Approbat subsequens fabula quod stultorum consuetudo est laudare quae sunt mala et inutilia sibi et aliis et uituperare bona et utilia.
La fable est aussi présente dans les débuts de la littérature française, dans des ysopets ou isopets - nom tiré d'Esope - un début de fable et un exemple de morale:
- "Du cerf qui prisoit ses cornes et desprisoit ses jambes" Lez une grant fontaine / Sus gravier, clere et saine S'est un cerf arresté, / En l'yave se mira Ses cornes regarda / Où moult ot de biauté..( Ysopet II, Fable XXXII, extrait)
- Nul ne doit chose despiter / Qui peut valoir et profiter, Ne chose aussi chiere tenir / Dont dommage il puet venir. Souvent fuyons ce qui nous vault / Et de nostre bien ne nous chault, Et qui te porte utilité / Ne dois pas avoir en *vilté *mépris, de uilis Ne quiers pas tousjours ton plaisier, / Profiter et toy *aisier ... *se mettre à l'aise (Ysopet I, Fable, XLIV dans A.C.M. ROBERT, Fables inédites, Paris, 1825, 2 vol.)

Responsable académique : Alain Meurant     Analyse : Jean Schumacher     Design & réalisation inf. : Boris Maroutaeff
Dernière mise à jour : 29/10/1999