[5,0] LIVRE CINQUIÈME. [5,1] Constantinople, orgueilleuse de ses richesses, habituée aux perfidies, corrompue dans sa foi, redoute tous les hommes à cause de ses trésors, et est également redoutable à tous pour ses artifices et son infidélité. Si elle était exempte de ces vices, son climat doux et salubre, la fertilité de son sol et les avantages de sa position la rendraient préférable à tous les autres lieux pour la propagation de la foi. Elle a auprès d'elle le Bras de Saint-George, qui est une mer pour l'abondance des poissons et pour la qualité salée de ses eaux, et comme un fleuve pour la largeur, attendu qu'on peut le traverser d'une rive à l'autre, et sans aucun péril, sept ou huit fois en une journée. Au delà est la Romanie, très vaste territoire, hérissé de montagnes couvertes de rochers, qui s'étend vers le midi jusqu'à Antioche, et confine vers l'orient à la Turquie. Après avoir entièrement appartenu aux Grecs, ce pays est maintenant possédé en grande partie par les Turcs, qui en les expulsant ont dévasté toute la contrée : dans les places fortes que les Grecs conservent encore, ils partagent les revenus avec les Turcs. Telles sont les conditions auxquelles ils retiennent encore quelque chose de ce qu'avait affranchi la valeur des Français qui allèrent conquérir Jérusalem ; et sans doute ce lâche peuple eût tout perdu, s'il ne se rachetait sans cesse avec de l'or, se défendant à l'aide des troupes qu'il enrôle chez divers peuples. Il ne cesse cependant d'éprouver des pertes ; car les forces étrangères ne sauraient suffire à défendre celui qui n'a point de force en lui-même : mais possédant beaucoup, il ne peut perdre tout à la fois. Nous en vîmes, un premier exemple dans la ville de Nicomédie, qui, maintenant obstruée de ronces et de broussailles, montre, par ses ruines superbes, et son antique gloire et la lâcheté de ses maîtres actuels. En vain elle avait pour la défendre un certain affluent de la mer, qui, remontant du Bras de Saint-George, vient se terminer dans cette ville, après un cours de trois journées de marche. De ce point partent trois routes se dirigeant vers Antioche, inégales en longueur et dissemblables aussi en mérite. Celle qui prend à gauche est la plus courte, et si l'on n'y trouvait pas d'obstacles, on la parcourrait en trois semaines. Après douze journées de marche, elle passe à Iconium, très noble cité, résidence du soudan, et au delà, à cinq journées de marche, on quitte le territoire des Turcs pour entrer dans celui des Francs. Une armée vigoureuse, fortifiée par la foi et comptant sur son nombre, mépriserait ces obstacles : mais en hiver les neiges qui couvrent les montagnes suffiraient à l’effrayer. La route de droite est meilleure, et offre plus de ressources ; mais ceux qui la suivent y trouvent une triple cause de retard, dans les anfractuosités des bords de la mer, et dans les fleuves et les torrents, fort dangereux en hiver et qui remplacent les neiges et les Turcs. La route du milieu a moins d'avantages et moins d'inconvénients que chacune des deux autres : plus longue et plus sûre que la plus courte, elle est aussi plus courte et plus sûre, mais en même temps plus pauvre que la plus longue. [5,2] Les Allemands qui avaient marché devant nous s'étaient séparés : le plus grand nombre, marchant avec l'empereur par la gauche, s'était dirigé vers Iconium, sous de sinistres auspices. Les autres prirent à droite avec le frère de l'empereur, et tout aussi tourna malheureusement contre eux. Pour nous, le sort nous jeta dans la route du milieu, et nous eûmes ainsi moins des inconvénients des deux autres routes. Après que nous eûmes laissé Nicée sur notre gauche, et comme nous étions établis sur les bords du lac de cette ville, des bruits qui circulèrent d'abord chez les Grecs, nous apprirent que les Allemands marchaient en hâte vers nous, et étaient poursuivis ; et bientôt nous vîmes paraître des députés envoyés par leur empereur auprès du roi, et qui nous rapportèrent, en pleurant, que les Allemands s'étaient réfugiés à Nicée, ce à quoi nous ne nous attendions nullement, et qui détruisit toutes nos espérances. [5,3] En apprenant ces nouvelles, les nôtres furent frappés de stupeur, et s'affligèrent grandement de la défaite si prompte d'une si forte armée et de ce triomphe si facilement remporté sur nos compagnons par les ennemis de Dieu et les nôtres. On leur demanda des détails et les causes qui avaient amené un si grand malheur; mais ils ne répondirent que vaguement et sans précision ; car dans une telle confusion il n'y a ni ordre ni mesure, et l'on ne peut attribuer de cause à ce qui n'a été précédé d'aucun fait qui semble suffisant. Ces malheurs toutefois avaient bien eu un commencement et une fin, comme nous l'apprîmes ensuite par les récits de ceux qui parvinrent à échapper au désastre. D'abord ils s'accusaient eux-mêmes, et non sans justice; car se confiant beaucoup trop en leurs propres forces, ils avaient offensé Dieu très souvent, et même plus souvent que de coutume. En second lieu, ils ne parlaient qu'avec exécration de l'idole de Constantinople, qui leur ayant donné un traître pour les guider dans leur marche, travailla, autant qu'il était en son pouvoir, à détruire la foi des Chrétiens, et à renforcer les Païens, en cherchant à refroidir la ferveur des nôtres, et en ranimant le courage de leurs ennemis intimidés. [5,4] Conduits donc à Nicée par leur guide, les Allemands avaient reçu l'ordre de se charger de vivres pour huit jours, afin de pouvoir arriver ainsi à Iconium. Les huit jours écoulés et les provisions épuisées, ils se crurent aussi parvenus au terme de leur voyage ; mais les montagnes et les rochers au milieu desquels ils étaient enfoncés eussent dû leur faire conjecturer la longueur indéfinie de leur route. Séduits cependant par leur conducteur, ou plutôt par leur bourreau, souffrant de plus en plus et de jour en jour durant trois jours consécutifs, ils s'engagèrent encore plus avant dans des montagnes où l'on ne trouvait point de chemin. Enfin, tenant déjà pour ensevelie cette armée encore toute vivante, une nuit le traître s'enfuit en suivant des sentiers qui lui étaient connus, et alla inviter une immense multitude de Turcs à venir s'enrichir de butin. Le lendemain au point du jour, tandis que les porte-bannières, déjà fort irrités contre leur guide, le cherchaient et ne le trouvaient pas, tout à coup ils reconnurent que les Turcs avaient occupé les escarpements des montagnes, et regrettèrent vivement que celui qu'ils cherchaient se fût enfui, sans recevoir la juste récompense de son crime. [5,5] Bientôt l'empereur fut instruit de ce qui se passait, tant par les rapports des siens que par l'éclat du jour. Dans cette position difficile il consulte aussitôt ses sages, mais trop tard, puisqu'il ne s'agit plus de choisir entre un mal et un bien, mais plutôt entre divers maux le moindre. Il fallait se porter en avant, ou rétrograder; mais la faim, l'ennemi et les labyrinthes inconnus de ces montagnes s'opposaient également à une marche en avant, et d'autre part la faim et la crainte du déshonneur empêchaient aussi de reculer. Si ce dernier parti présentait quelque chance de succès dans la tentative d'évasion, ce ne pouvait être qu'un opprobre ; mais dans l'autre parti on trouvait une mort certaine, sans gloire et sans espoir de faire connaître la vérité. Que fera donc le courage de ces hommes à jeun? Se réfugieront-ils dans le zèle du service de Dieu, lorsqu'ils ne peuvent rien pour eux-mêmes? S'avanceront-ils inutilement, pour trouver aussitôt la mort, tandis qu'en se conservant ils pourront encore servir Dieu ? Certes ils préféreraient une mort glorieuse à une vie honteuse ; mais si la honte s'attache également à l'une et l'autre de ces déterminations, sans doute il vaut mieux se conserver honteusement pour de nouveaux exploits, que finir honteusement et sans aucun remède. [5,6] Cédant à de telles considérations, les Allemands font alors ce qu'ils n'ont point coutume de faire : ils se retirent, condamnant cette retraite dans leur esprit, mais pliant sons l'empire des circonstances et avec l'espoir de réparer leurs malheurs; ils font donc ce qui leur est possible ; ils font ce qu'ils doivent faire. Tous s'arment donc de patience contre la faim. Ils n'avaient avec eux que des hommes épuisés de besoin, des chevaux mourant d'inanition, et un certain comte illustre, nommé Bernard, résistait seul avec les siens aux ennemis acharnés à leur poursuite. Tandis donc qu'ils rétrogradaient ainsi en bon ordre, leur marche était encore ralentie par ceux qui allaient de tous côtés cherchant des vivres, et en outre la fatigue et la disette les affaiblissaient de plus en plus. Les Turcs les tâtaient de temps en temps, et s'étant assurés de leur faiblesse, ils devinrent de jour en jour plus pressants et plus hardis. Enfin, tandis que l'illustre comte, digne de nos éloges et de nos larmes, attendait sans cesse les hommes fatigués et soutenait les faibles, l'armée traversa une certaine montagne, et comme la nuit survint, le comte demeura lui-même en arrière. Les Turcs l'enveloppèrent en ce même lieu, en se tenant à une certaine distance, et lui lançant des flèches, lui tuèrent des hommes plus facilement qu'ils n'avaient espéré, sans courir eux-mêmes aucun danger ; car le comte n'avait ni arcs ni arbalètes, et les chevaux de ses hommes d'armes, épuisés de faim et de fatigue, avaient perdu toute agilité. Les Turcs ne voulaient pas en venir aux mains; et de son côté le comte n'avait pas d'armes pour se défendre de loin, et les chevaux n'ayant pas mangé ne pouvaient porter ses hommes contre les ennemis. Déplorable situation de cette ardente jeunesse qui, couverte de peaux de moutons en guise de boucliers, tirant souvent le glaive et s'élançant avec courage contre l'ennemi, rencontrait en son chemin la mort volant au devant d'elle ! [5,7] Lorsque le saint pape avait défendu d'emmener des chiens et des faucons, et imposé même aux chevaliers la forme de leurs armes et de leurs vêtements, il en avait ordonné très sagement et très utilement pour les intérêts de tous, et ceux qui n'avaient pas obéi à ses commandements avaient agi en insensés et s'étaient rendus inutiles. Plût à Dieu qu'il eût aussi donné de pareils ordres pour les hommes de pied, et que, retenant les faibles, il eût donné à tous les hommes forts au lieu de la besace le glaive, et l'arc au lieu du bâton! car les faibles et les hommes sans armes sont toujours un fardeau pour les leurs et une proie facile pour les ennemis. Le lendemain, lorsqu'on demanda le comte, qui avait coutume de se présenter toujours spontanément pour travailler à la défense de ses compagnons, on apprit que la veille au soir il n'avait pas rejoint l'armée, et qu'il était mort en chemin avec tous les siens, sous les flèches des Turcs. Tous déplorèrent la mort de celui dont la vigueur et les conseils leur avaient inspiré le plus de confiance, d'autant plus qu'ils se voyaient tous menacés d'une mort semblable. Tous ceux qui le purent cependant s'armèrent alors et pressèrent leur marche, tourmentés plus vivement que jamais par la faim et par les ennemis. Les Turcs en vinrent bientôt à ne plus rien craindre de loin, lorsqu'ils eurent reconnu que les Allemands n'avaient point d'arcs et que leurs chevaux ne pouvaient courir. Alors non seulement ils harcelèrent ceux qui étaient les derniers, mais même ils lancèrent leurs flèches sur ceux qui marchaient les premiers et sur ceux du milieu. Je ne saurais décrire tous les désastres de cette marche, dans laquelle l'empereur lui-même fut blessé de deux flèches : tandis que les uns se hâtaient, les plus faibles demeuraient en arrière, et les flèches, tombant comme la grêle au milieu de cette foule, frappaient de mort ceux qui n'avaient point d'armes. [5,8] Enfin ils arrivèrent ainsi et presque mourants à Nicée. Pressés par la faim, ils coururent alors à la recherche des vivres, et les Grecs, comme il leur était facile en de telles circonstances, les leur vendaient excessivement cher, leur demandant même leurs épées et leurs cuirasses, et non de l'or, afin de dépouiller entièrement l'armée. La plupart des hommes, ayant perdu et leurs forces et leurs effets, et voulant retourner dans leur patrie, se rendirent à Constantinople; mais avant qu'ils eussent pu obtenir ou des marchés ou des moyens de transport pour passer la mer, plus de trente mille d'entre eux, à ce que nous avons entendu dire, moururent de faim. L'empereur se voyant privé de toute assistance humaine, mais comptant toujours sur celle de Dieu, et s'armant de constance, se rendit auprès du roi, et lui demanda de s'associer avec lui pour le service de Dieu. Les députés envoyés en avant par lui trouvèrent le roi, comme nous l'avons déjà dit, sur les bords du lac de Nicée, et lui rapportèrent les choses que nous avons racontées, lui demandant de marcher à la rencontre de l'empereur, qui venait sur leurs traces, et de lui prêter secours et conseil dans sa détresse. Le roi s'affligea des malheurs de son compagnon comme s'ils lui eussent été personnels, et, prenant avec lui une nombreuse escorte de barons, pour se rendre aux vœux de l'empereur, il marcha promptement à sa rencontre. Ils s'embrassèrent l'un l'autre, et se donnèrent ses baisers, tout mouillés des larmes de la compassion. Enfin ils arrêtèrent que le roi attendrait l'empereur dans le château dit Lupar, et que ce dernier, après avoir pris des vivres à Nicée, viendrait le rejoindre. [5,9] Les Grecs commencèrent alors à vouloir refuser aux nôtres l'usage des marchés ; mais ces derniers ne pouvaient voir ainsi l'abondance devant eux, et demeurer dans le besoin. La plupart d'entre eux se dispersèrent donc, et enlevèrent ce qu'ils eussent plus volontiers acheté, tandis que d'autres, comme pour être plus justes, se bornaient à acheter le butin, puisqu'aussi bien ils n'avaient pas d'autres moyens de pourvoir à leur subsistance. Les nôtres arrivèrent ainsi au château de Lupar, et, selon les conventions, y attendirent les Allemands, que les Grecs, pendant ce temps, massacraient ou dépouillaient journellement de leurs .effets, afin que la sauterelle dévorât les restes de la chenille. Enfin l'empereur et les chevaliers fatigués, ne pouvant s'échapper, quoique les ennemis ne fussent qu'en petit nombre, résistèrent vigoureusement les armes à la main, et, descendant sur le chemin, s'avancèrent péniblement, mais en combattant avec courage. Les pauvres, qui n'étaient pas empêchés par leurs bagages de prendre la fuite, se hâtèrent de rejoindre le roi, ne craignant point, grâce à leur misère, l'avidité des ennemis. L'empereur envoya des députés au roi pour le supplier de venir au plus tôt à sa rencontre avec un corps de chevaliers, soit pour enterrer les cadavres de ses morts, soit pour conserver un reste de vie à ceux qui n'avaient pas encore succombé. Le connétable Ives de Nesle, comte de Soissons, fut chargé par le roi de s'y rendre en toute hâte ; mais les Grecs ayant pris la fuite, il n'eut aucune peine à dégager les Allemands. Et certes, comme les Allemands nous le dirent plus tard, si le connétable n'était arrivé aussi promptement, ils se trouvaient tous au lieu même et au moment de leur dernière heure. Hélas ! quel déplorable sort, que ces Saxons, ces Bataves féroces, et tous ces autres Allemands, devant qui trembla jadis toute la puissance de Rome, comme nous le lisons dans les antiques histoires, aient de notre temps si misérablement succombé sous les artifices des lâches Grecs ! Je rapporterai aussi, quand il en sera temps, la chute des Français ; et ce sera un double sujet de cruelles lamentations, et les deux peuples auront en cela de quoi pleurer à jamais, si les fils ne vont venger la mort de leurs pères. Quant à nous, qui avons eu à souffrir des crimes des Grecs, c'est de la justice divine que nous attendons la vengeance, espérant que nos peuples sauront, selon leur usage, ne pas supporter longtemps des insultes aussi déshonorantes. C'est par là que nous nous consolons dans la tristesse de nos cœurs; et afin que nos descendants n'ignorent point les criminelles perfidies des Grecs, nous continuerons le récit de nos infortunes. [5,10] L'empereur donc ayant été amené auprès des tentes du roi, et s'étant établi sur la rive opposée d'un certain fleuve, le roi passa ce fleuve en bateau, et rempli de courage, de piété et de force, versant des larmes, il se rendit à pied auprès de l'empereur pour le consoler. Celui-ci, tel qu'un homme échappé au naufrage, et qui vient d'atteindre au port, accueillit les paroles du roi avec une vive reconnaissance, lui demanda bien humblement les choses dont il avait besoin, et se mettant à parler de ses malheurs, il les raconta au roi avec une assez grande fermeté de cœur. « Seigneur roi, lui dit-il, que la nature m'a donné pour voisin et pour parent, que Dieu m'a conservé pour me protéger dans une pressante nécessité, je n'entreprendrai point de vous raconter mes infortunes, car il est bien inutile de dire à quelqu'un ce qu'il voit suffisamment par lui-même. Mes maux sont grands sans doute ; mais sachez que je ne m'irrite point contre Dieu, mais contre moi. Dieu est juste en effet ; moi seul et mon peuple nous sommes insensés. Lorsque je conduisais hors de mon royaume une armée nombreuse et chargée d'argent, si j'eusse rendu de justes actions de grâces au dispensateur de ces biens, peut-être celui qui me les avait donnés me les eût aussi conservés. Au moment d'entrer dans des contrées barbares, si j'eusse réformé ma vie présente, et donné satisfaction pour le passé, en versant des larmes avec piété, Dieu n'eût pas puni en moi les vices qu'il trouvait à reprendre. Lorsque j'espérais de triompher des Turcs, si je ne me fusse pas enorgueilli de mes forces, si j'eusse mis humblement ma confiance dans le Dieu des armées, Dieu n'eût pas châtié mon insolence. Et cependant je suis encore sain et sauf, par sa grâce; je possède encore des richesses, et je persiste à vouloir me consacrer à son service, croyant que je ne serais point échappé à tant de périls, riche encore et en bonne santé, si Dieu n'eût prévu que je pourrais encore être bon à quelque chose pour son service. Désormais donc je ne veux plus me séparer de votre société ; accueilli par vous, je ne veux être placé ni le premier ni le dernier, car je ne pourrais repousser seul les ennemis que je rencontrerais, ni soutenir les efforts de ceux qui viendraient sur les derrières, sans faire tort à ceux des nôtres qui seraient au milieu. A ces conditions, que mes tentes soient placées partout où vous le voudrez. Je vous demande seulement de permettre que mes compagnons d'armes se réunissent aux vôtres. » Après que l'empereur, encore tout agité de ses récentes douleurs, eut prononcé ces paroles, dont l'évêque de Metz donna l'interprétation, et porté dans tous les cœurs une émotion manifestée par des larmes, le roi, de l'avis des évêques et des barons, adjoignit à l'empereur ses deux oncles, le comte de Maurienne et le marquis de Montferrat, ses parents, l'évêque de Metz et le comte Renaud, frère de celui-ci, et quelques autres hommes encore, et, afin de l'avoir toujours dans son voisinage, et de pouvoir prendre ses conseils, le roi décida en outre que l'empereur et lui logeraient toujours ensemble.