[1,0] LETTRE Ire. AU COLLEGE DES CARDINAUX. Dans cette lettre, Jean Hus se plaint d'avoir été faussement dénoncé et demande humblement à être dispensé de l’obligation de comparaître en personne. Jean Hus, dans le même but, fit à Jean XXIII un appel qui a été recueilli dans son histoire avec le témoignage de l’Académie de Prague. [1,1] J’écris avec l'humble soumission et le respect qui convient à vos ordres. Révérends Pères en Christ, vous qui êtes revêtus d’un caractère apostolique, qui brillez comme de grandes lumières pour éclairer les nations, et qui êtes élevés en puissance afin d’effacer les péchés du monde, d’arracher les âmes aux pièges de Satan, et de venir en aide à ceux qui souffrent au nom de Christ, j’ai recours humblement à vos paternités, incapable que je suis de supporter le fardeau qui pèse sur moi. Les maux dont je suis accablé datent du temps où l’on se retira de l’obéissance de Grégoire XII. Je conseillais alors avec succès l’adhésion au collège des cardinaux pour l'union de notre sainte mère l’Eglise, dans mes prédications devant les barons, les princes, le clergé et le peuple. Il s’ensuivit que le révérend Père en Christ Sbynko, archevêque de Prague, adversaire du sacré collège, fît afficher un mandement aux portes des églises, par lequel il défendait à tous les maîtres de l’Université de Prague qui avaient adhéré au sacré collège, et en particulier à moi, d’exercer aucun acte du ministère sacerdotal, sous prétexte que les maîtres de l’Université avaient retiré leur obéissance à notre Saint-Père Grégoire XII et au Saint-Siège. Mais il faut juger des faits sur leurs résultats, et il arriva que l’archevêque fut contraint, par les décrets du concile de Pise, à approuver la conduite des maîtres : telle fut l’origine première de l’accusation portée contre moi et de toutes mes peines. [1,2] Le sacré collège des cardinaux ayant promis beaucoup de grâces à ses adhérents, j’ai gardé le souvenir de ses promesses et j’y ai cru comme il faut croire aux promesses de ceux qui sont les colonnes de l’Eglise. J’implore donc Vos Révérences et je les conjure à genoux de jeter un regard de bonté sur mon infortune, afin d’être dispensé du devoir de comparaître en personne et des autres obligations pénibles qui en seraient les suites. Je suis innocent de ces choses dont mes adversaires m’accusent ; j’en prends à témoin Notre-Seigneur Jésus-Christ. Je suis prêt à paraître en présence de l’Université de Prague, de tous les prélats, de tout le peuple qui est venu m’écouter, et à rendre devant eux, de vive voix et par écrit, raison pleine et entière de la foi que je garde en mon cœur, et à la confesser même au péril du feu. Vos Révérences pourront s’assurer de cette confession par des actes publics et par le témoignage de l’Université de Prague.