[6,0] LIVRE VI. [6,1] CHAPITRE PREMIER. {559a} 1 Tous les oiseaux sans exception sont ovipares. Mais l'époque de l'accouplement n'est pas la même pour tous, non plus que l'époque de la ponte. Il y en a qui s'accouplent et qui pondent presque en tout temps : par exemple, la poule et le pigeon. La poule pond, on peut dire, durant toute l'année, si l'on en excepte deux mois, aux environs du solstice d'hiver. 2 Parmi les poules de belle race, il y en a qui font jusqu'à soixante œufs avant de couver. Cependant, les poules de belle race sont encore moins fécondes que les poules de race commune. Les poules d'Adria sont de petite taille; mais elles pondent chaque jour; elles sont méchantes, et souvent elles tuent leurs poussins. Elles sont de diverses couleurs. Quelques poules domestiques pondent jusqu'à deux fois par jour ; et on en a vu mourir en peu de temps de cet excès de fécondité. 3 Ainsi qu'on vient de le dire, les poules pondent sans interruption. Le pigeon, le ramier, la tourterelle et le vineux pondent deux œufs à chaque fois ; et le pigeon pond jusqu'à dix fois dans le cours de l'année. 4 C'est au printemps que pondent la plupart des oiseaux. Il y en a qui sont très féconds; mais on peut entendre cette fécondité de deux manières : on dit des uns qu'ils sont féconds, parce qu'ils pondent souvent, comme les pigeons; on le dit des autres, parce qu'ils font beaucoup d'œufs à la fois, comme les poules. Tous les oiseaux qui ont des serres sont peu féconds, excepté la cresserelle. C'est elle aussi qui, de tous les oiseaux armés de serres, pond le plus d'œufs; on en a vu pondre jusqu'à quatre œufs; et même encore davantage. 5 En général, les oiseaux pondent dans des nids; mais ceux qui ne volent pas beaucoup ne font pas de nids : par exemple, les {559b} perdrix et les cailles, qui pondent sur terre, en recouvrant leurs œufs de branchages. On en peut dire autant de l'alouette et de la tétrix. Ces oiseaux construisent leurs nids en plein air ; et l'oiseau que les Béotiens appellent Mérops, est le seul qui fasse son nid en se fourrant dans les trous de la terre. 6 Les grives font leurs nids, comme les hirondelles, avec de la boue, sur le sommet des arbres. Elles les placent les uns à la suite des autres; ils se tiennent de façon que leur continuité fait une chaîne de nids. La huppe est la seule, parmi les oiseaux qui font des nids séparés, à n'en pas faire ; elle se fourre dans les vieux troncs d'arbres, et elle pond ses œufs sans rien apporter dans les trous qu'ils présentent. Le Circus niche dans les maisons, ou dans les roches. La Tétrix, qu'à Athènes on appelle l'Ourax, ne pond, ni sur terre, ni sur les arbres, mais sur les plantes rampantes qu'elle trouve à terre. [6,2] CHAPITRE II. 1 L'œuf de tous les oiseaux est uniformément revêtu d'une enveloppe dure, lorsqu'il est fécondé et que rien ne l'a altéré ; seulement, les poules ont parfois des œufs mous. Les œufs des oiseaux sont formés de deux parties de couleur différente ; la partie la plus extérieure est blanche ; la partie centrale est jaune. Entre les œufs des oiseaux d'eau et de marais et les œufs des oiseaux habitant des lieux secs, il y a cette différence que, toute proportion gardée, les œufs des oiseaux d'eau ont beaucoup plus de jaune que de blanc. 2 La couleur des œufs varie avec les espèces ; tantôt les œufs sont blancs, comme les œufs de pigeon et de perdrix ; tantôt ils sont jaunes, comme ceux des oiseaux de marécages. D'autres sont mouchetés de points, comme ceux de pintades et de faisans. Les œufs de cresserelle sont rouges, comme du vermillon. L'œuf présente cette différence qu'il est pointu par un bout, et gros par l'autre ; quand il sort, c'est par le gros bout d'abord. Les œufs longs et pointus donnent des mâles; ceux qui sont arrondis et qui ont un cercle vers la pointe, sont des femelles. 3 Les œufs viennent à éclosion et à maturité par l'incubation des oiseaux. {560a} Parfois, ils éclosent aussi tout seuls, comme en Égypte, où on les enfouit dans le fumier. On prétend qu'à Syracuse un ivrogne, ayant mis des œufs en terre sous sa natte, resta si longtemps à boire, sans désemparer, que les œufs arrivèrent à éclosion. On a même mis des œufs dans des vases qu'on chauffait ; ils y étaient couvés; et les petits en sortaient spontanément. 4 La semence des oiseaux est blanche, comme celle des autres animaux. Après l'accouplement, la femelle l'attire dans la partie supérieure du diaphragme. D'abord, l'œuf se montre petit et blanc; ensuite, il devient rouge et couleur de sang. En grossissant, il devient tout entier jaune et roux. A mesure qu'il se développe de plus en plus, il se divise ; le jaune se place au milieu, et le blanc l'entoure extérieurement. Enfin, quand l'œuf est complet, il se détache, et il sort de la façon suivante : à ce moment, de mou qu'il était, il change pour prendre de la fermeté ; mais quand il sort, il n'a pas encore toute sa consistance. Une fois sorti, il l'acquiert sur-le-champ; et il devient ferme, à moins qu'il n'ait souffert de quelque maladie. 5 On a vu parfois un œuf qui était tout d'abord ce que l'œuf devient, en général, après un certain temps. Il était extérieurement jaune, comme le poussin aussi l'est plus tard. On a même trouvé des œufs de ce genre dans un coq qu'on avait ouvert, sous le diaphragme, là où les poules ont leurs œufs ; ces œufs étaient tout entiers jaunes, et leur grosseur était celle des autres œufs. Mais on regarde ces phénomènes comme des monstruosités. 6 D'ailleurs, on se trompe quand on prétend que les œufs clairs sont des restes et des débris des œufs antérieurement venus de l'accouplement; ce n'est pas exact, puisqu'on a vu déjà plus d'une fois de jeunes femelles de coqs et d'oies pondre des œufs-clairs, sans avoir jamais été couvertes. Les œufs-clairs sont plus petits et moins délicats, et, en même temps, plus liquides que les œufs fécondés ; mais ils sont en plus grand nombre. Quand on les met à couver sous l'oiseau, la partie liquide ne devient pas plus épaisse ; mais le jaune et le blanc restent absolument ce qu'ils étaient. Il y a bien des oiseaux qui produisent des œufs-clairs : la poule, la perdrix, le pigeon, le paon, l'oie, el l'oie-renard. 7 Par la chaleur, quand les femelles couvent, les poussins sortent de la coquille plus vite qu'en hiver. Ainsi, dans l'été les petits poussins éclosent en dix-huit {560b} jours ; c'est parfois vingt-cinq qu'il en faut en hiver. Ceci n'empêche pas que les diverses espèces d'oiseaux diffèrent les unes des autres en ce qu'elles sont plus ou moins aptes à l'incubation. Quand il tonne au moment où la femelle couve, les œufs tournent et sont perdus. 8 Les œufs que l'on appelle quelquefois des queues de chiens, ou œufs de queue, sont plus fréquents en été. Quelques personnes appellent encore les œufs-clairs des œufs de zéphire, parce que, vers l'époque du printemps, les oiseaux semblent rechercher et recevoir les vents. On peut faire aussi que les œufs deviennent clairs en touchant les femelles d'une certaine manière avec la main. 9 Les œufs-clairs peuvent devenir féconds ; et ceux mêmes qui sont issus de l'accouplement peuvent passer d'une espèce à une autre, si, avant que le jaune ne se change en blanc, la femelle, qui a des œufs-clairs ou des œufs venus d'une fécondation antérieure, est couverte par un autre mâle. Les œufs-clairs deviennent alors féconds ; et les œufs antérieurs sont fécondés par l'oiseau qui a couvert en dernier lieu. Mais si l'œuf commence déjà à tourner au blanc, rien ne change plus, ni les œufs-clairs, qui ne deviennent pas féconds, ni les œufs fécondés, qui ne se changent pas en l'espèce du mâle qui a couvert. 10 Si l'accouplement vient à faire défaut quand les œufs sont encore très petits, les œufs, bien qu'existant déjà, ne grossissent pas; mais si l'accouplement se répète, le développement est rapide. 11 Le jaune et le blanc de l'œuf sont de nature différente ; ce n'est pas la couleur seule qui les distingue; ce sont aussi leurs propriétés diverses. Ainsi, le jaune est durci par le froid ; le blanc ne l'est pas, et il n'en devient que plus fluide. Au contraire, le blanc se durcit au feu ; le jaune n'y durcit pas, et il reste mou, à moins qu'on ne le brûle tout à fait. Il s'épaissit et se dessèche davantage en le faisant bouillir plutôt qu'en le mettant dans le feu. 12 Le blanc et le jaune sont renfermés chacun dans une membrane qui les isole l'un de l'autre. Les globules, en forme de grêlons, qui se trouvent au commencement du jaune, ne contribuent pas du tout au développement du poussin, comme quelques-uns le supposent. Il y en a un en bas ; un autre, en haut. Une remarque qu'on peut faire sur le jaune et le blanc, c'est que si, après les avoir ôtés de la coquille, {561a} on les réunit en assez grand nombre sur un plat, qu'on met sur un feu doux et pas trop fort, on voit tout le jaune se réunir au milieu, et le blanc faire un cercle tout autour. 13 Les jeunes poules commencent à pondre dès la première apparition du printemps ; elles pondent plus que les vieilles; mais leurs œufs sont moins gros. En général, les femelles dépérissent quand elles ne couvent pas ; et elles souffrent. Après l'accouplement, les femelles frissonnent; elles se secouent, et jettent de la poussière autour d'elles. Elles en font encore autant quelquefois quand elles pondent. Les femelles de pigeon relèvent alors le croupion; celles des oies se plongent dans l'eau. 14 Les conceptions régulières et les productions d'œufs-clairs sont plus fréquentes et plus faciles chez la plupart des oiseaux, par exemple la perdrix, quand ils sont en amour, et qu'ils recherchent l'accouplement. Il suffit en effet que la perdrix soit sous le vent du mâle pour qu'elle conçoive ; et dès ce moment, on ne peut plus les employer à la chasse ; car la perdrix semble avoir l'odorat très fin. 15 La production de l'œuf après l'accouplement, et la production du petit qui sort de l'œuf parvenu à maturité, n'ont pas lieu pour tous les oiseaux dans le même espace de temps. Cet intervalle varie avec la grosseur même des parents. Ainsi d'ordinaire, l'œuf de poule est dix jours à se former et à être parfaitement fait. 16 Il faut un peu moins de temps pour l'œuf de pigeon. La femelle, dans cette espèce, peut retenir son œuf au moment même du travail. Si quelque chose la trouble, elle dérange elle-même son nid ; si on lui arrache une plume, ou si elle éprouve quelque autre mal, ou quelque gêne, elle se retient; et sur le point de pondre, elle s'arrête. 17 Une autre particularité des pigeons dans l'accouplement, c'est qu'ils se baisent l'un l'autre, quand le mâle s'apprête à monter sur la femelle. Le vieux pigeon ne la monterait pas pour la première fois sans l'avoir baisée; mais ensuite, il la monte sans l'avoir baisée préalablement. Les jeunes ne la montent jamais sans l'avoir baisée tout d'abord. Ce que les pigeons ont encore de particulier, c'est que les femelles se montent mutuellement, à défaut de mâle, après s'être baisées comme des mâles; ne pouvant rien émettre les unes dans les autres, elles pondent des œufs en plus grand nombre que les œufs féconds; mais il n'en sort jamais de petits, et tous les œufs ainsi produits sont des œufs-clairs. [6,3] CHAPITRE III. {561b} 1 Tous les oiseaux sans exception viennent tous d'un œuf de la même manière; mais le temps nécessaire à leur formation complète varie selon les espèces, ainsi qu'on l'a déjà dit. Dans les poules, il suffît de trois jours et de trois nuits pour que le poulet commence à s'annoncer. Dans les grands oiseaux, il en faut plus; dans les plus petits, il en faut moins. 2 Durant cet intervalle, le jaune est déjà monté peu à peu dans le haut de l'œuf, qui est sa pointe, là où est le principe de l'œuf, et où l'œuf se brise. Dans le blanc, il y a une espèce de point sanguinolent, qui est le cœur. Ce point bat et s'agite, parce qu'il est animé. Il en part deux vaisseaux, dans le genre des veines, pleins de sang, contournés en spirale, et qui, à mesure que l'animal se développe, s'étendent à chacune des deux tuniques environnantes. 3 Déjà une membrane à fibres sanguines entoure le blanc vers la même époque, et l'isole des vaisseaux veineux. Peu de temps après, le corps commence à se distinguer, d'abord extrêmement petit et tout blanc. On y reconnaît la tête, qui se montre ; et les yeux y sont très saillants et gonflés. Cet état subsiste longtemps; car les yeux se rapetissent un peu plus tard, et ils s'affaissent. La partie inférieure du corps se distingue à peine, comparée à la partie supérieure. 4 Des deux vaisseaux qui partent du cœur, l'un se dirige vers l'enveloppe circulaire ; l'autre se dirige vers le jaune, où il sert comme d'ombilic. Le poussin sort donc du blanc ; et sa nourriture vient du jaune, à travers l'ombilic. A dix jours, le petit animal tout entier est parfaitement distinct, ainsi que toutes les parties qui le constituent. Il a encore la tête plus grosse que le reste du corps ; et les yeux, qui ne voient pas encore, sont plus gros que la tête. Vers ce même temps, les yeux, si on les enlève, sont plus forts que des pois et de couleur noire. La peau qui les couvre étant enlevée, on n'y trouve qu'un liquide blanc et froid, très brillant au jour; il n'y a aucune partie solide. 5 Voilà pour les yeux et la tête, qui sont à ce moment dans l'état qu'on vient de dire. {562a} 6 En ce même temps, les viscères sont déjà très sensibles ; et l'on discerne l'estomac et les intestins. Les veines qu'on voit partir du cœur à l'ombilic, se reconnaissent déjà. De ce nombril, part une première veine qui se dirige à la membrane dont le jaune est entouré ; le jaune, à ce moment, est déjà fluide, et plus abondant qu'il ne semblerait naturellement devoir l'être. Une seconde veine se rend à la membrane commune qui entoure le poussin, et au liquide qui est entre les deux. 7 En effet,à mesure que le petit grossit peu à peu, une partie du jaune va en haut ; l'autre partie va en bas ; entre elles deux, il y a le liquide blanc. Au bas du jaune, est placé encore le blanc, comme il était antérieurement. Mais au dixième jour, le blanc est au plus bas, en très petite quantité, gluant, épais et jaunâtre. 8 Voici donc quelle est la position de toutes les parties à cette époque : tout d'abord, la première et la dernière membrane de l'œuf, par rapport à la coquille ; ce n'est pas la membrane de la coquille précisément, mais c'est celle qui est juste au-dessous. C'est là que se trouve le fluide blanc. Puis, vient le poussin, et la membrane qui l'isole en l'enveloppant, pour empêcher qu'il ne soit dans le liquide. Sous le poussin, est le jaune, dans lequel se rend l'une des deux veines ; l'autre se rend au blanc, qui l'environne. Le tout, enveloppé dans une membrane, humectée par un liquide qui ressemble à de la lymphe. Ensuite, une membrane s'applique directement sur l'embryon, comme on l'a dit, afin qu'il soit séparé du liquide. 9 Au-dessous de l'embryon, est le jaune, enfermé dans une autre membrane, où aboutit le nombril, qui vient du cœur et de la grande veine. Il en résuite que l'embryon n'est dans aucun des deux liquides. 10 Vers le vingtième jour, on l'entend piauler au-dedans de l'œuf et se mouvoir, si l'on enlève une partie de la coquille ; et il est déjà tout couvert de duvet, quand l'œuf se rompt après les vingt jours. Le poussin a la tête posée sur la cuisse droite, vers son flanc; et l'aile est par-dessus la tête. 11 A ce moment, se montre la membrane en forme de chorion qui vient immédiatement après celle de la coquille, {562b} et où se rend un des deux ombilics. Le poussin est désormais tout formé ; et l'on voit aussi l'autre membrane, qui sert de chorion, et qui entoure le jaune, où se rend l'autre ombilic. Tous les deux partaient du cœur et de la grande veine. Vers le même temps, l'ombilic qui se rend au chorion extérieur tombe et se sépare de l'animal, tandis que celui qui aboutit au jaune s'attache à l'intestin grêle du poussin. Il pénètre déjà profondément dans le poussin beaucoup de jaune; et dans son estomac, il y a un résidu qui est jaune aussi. 12 Le poussin, à cette même époque, rend un excrément vers le chorion extérieur, et il en a également dans l'estomac. L'excrément rejeté au dehors est blanc; et au-dedans, il y a aussi quelque chose de blanc. A la fin, le jaune, qui allait toujours en diminuant de plus en plus, est complètement épuisé; et il a été absorbé entièrement dans le poussin. Il l'a été si bien qu'en ouvrant un poulet dix jours après qu'il est éclos, on trouve encore quelque reste du jaune dans son intestin. Mais il s'est détaché du cordon ombilical; la partie intermédiaire n'existe plus, et elle a disparu tout entière. 13 Pendant tout le temps dont on vient de parler, le poussin est endormi; si on le secoue, il s éveille, ouvre les yeux, et se met à piauler. Le cœur s'élève en même temps que le cordon ombilical; ce qui prouve que le poussin respire déjà. 14 Telle est donc la manière dont, chez les oiseaux, le petit naît et sort de l'œuf. 15 Les oiseaux font quelquefois des œufs qui restent clairs, bien qu'ils proviennent d'un accouplement, et qui ne produisent rien, malgré l'incubation des femelles. On peut observer le fait sur les pigeons plus particulièrement. i6 Les œufs qui renferment des jumeaux ont deux jaunes; entre les deux et pour empêcher qu'ils ne se mêlent, s'interpose une légère couche de blanc ; quelquefois les jaunes n'ont pas cette séparation, et ils se confondent, en se touchant. On a vu des poules ne pondre toujours que des œufs doubles; et c'est sur ces œufs qu'on a observé les transformations du jaune. Une poule, qui avait pondu dix-huit œufs, en fît sortir autant de poussins doubles, sauf les œufs de queue ou d'urine. Tous les autres étaient féconds, si ce n'est que l'un des jaunes doubles était plus grand, {563a} l'autre plus petit; et que le dernier produit était difforme et monstrueux. [6,4] CHAPITRE IV. 1 Tous les oiseaux de l'espèce du pigeon, tels que le ramier et la tourterelle, pondent assez ordinairement deux œufs. Le plus que puissent en pondre la tourterelle et le ramier, c'est trois. Ainsi qu'on l'a déjà dit, le pigeon pond en toute saison; le ramier et la tourterelle pondent au printemps, pas plus de deux fois. Mais ils ne font la seconde couvée que quand ils ont détruit la première ; car il y a beaucoup de ces oiseaux qui détruisent leurs couvées eux-mêmes. 2 Ils pondent comme on vient de dire ; quelquefois, il leur arrive de faire trois œufs ; mais ils n'élèvent jamais plus de deux petits ; parfois même, ils n'en élèvent qu'un seul. Celui des œufs qu'ils abandonnent est toujours clair. 3 La plupart des oiseaux n'engendrent pas dès leur première année. Mais tous, une fois qu'ils ont commencé à produire, ont naturellement des œufs jusqu'à la fin, pour ainsi dire ; mais ces œufs sont si petits chez quelques oiseaux qu'il n'est pas facile de les voir. 4 Ordinairement, le pigeon pond mâle et femelle, le mâle étant le plus souvent pondu avant l'autre; après un jour d'intervalle, où la femelle a pondu, elle se repose; et ensuite, elle répond l'autre de ses œufs. Le mâle couve alternativement pendant le jour, et la femelle pendant la nuit. Le premier pondu des œufs arrive à maturité, et il éclot, dans les vingt jours. Le petit pique et perce l'œuf un jour avant de sortir de la coquille. Pendant quelque temps, le père et la mère le réchauffent, de la même manière qu'ils ont échauffé les œufs. 5 La femelle est plus méchante que le mâle pendant qu'elle élève ses petits, comme le sont les femelles de toutes les espèces après qu'elles ont mis bas. Les pigeons pondent jusqu'à dix fois par an, parfois même jusqu'à onze; ceux d'Égypte pondent jusqu'à douze fois annuellement. Le pigeon s'accouple, mâle et femelle, au bout de moins d'un an ; car ils peuvent s'accoupler à six mois. On prétend que les ramiers et les tourterelles s'accouplent même et produisent à trois mois; et l'on en donne pour preuve leur multiplicité. 6 Les femelles portent quatorze jours; et elles couvent pendant quatorze autres. En un même nombre de jours, les petits volent déjà assez bien pour {563b} qu'on ait de la peine à les prendre. On assure que le ramier vit quarante ans, et que les perdrix en vivent plus de seize. La femelle du pigeon fait de nouveaux petits dans les trente jours après la ponte précédente. [6,5] CHAPITRE V. 1 Le vautour fait son nid sur des rochers inaccessibles; et voilà comment il est si rare de voir son nid et ses petits. De là vient aussi qu'Hérodore, père du sophiste Bryson, affirme que les vautours viennent d'un autre pays, qui nous est inconnu; et la preuve qu'il en donne, c'est que personne n'a jamais vu le nid du vautour, et que cependant ils arrivent tout à coup en masse, à la suite des armées. Il est vrai qu'il est difficile de voir leur nid; mais on en a vu cependant. 2 Les vautours pondent deux œufs. Les autres oiseaux carnassiers ne pondent pas plus d'une fois par an, autant qu'on peut le voir. L'hirondelle est la seule, parmi les carnassiers, à faire deux pontes dans l'année. Si l'on crève les yeux aux petits des hirondelles, quand ils sont jeunes, ils en guérissent; et la vue leur revient. [6,6] CHAPITRE VI. 1 L'aigle fait trois œufs; mais il n'en fait éclore que deux, ainsi qu'il est dit dans les vers attribués à Musée : « L'aigle pond trois œufs; il en fait éclore deux et n'élève qu'un seul aiglon. » C'est bien là en effet ce qui se passe le plus ordinairement; mais on a déjà vu des aigles avoir trois petits. Quand l'un des deux aiglons est assez grand, l'aigle le chasse, parce qu'elle a trop de peine à le nourrir. On prétend que, dans le même temps, l'aigle reste sans manger, parce qu'elle ne peut plus enlever les petits des animaux; ses serres se déforment en quelques jours, et son plumage blanchit. Les aigles deviennent alors cruels à leurs petits. L'offraie reçoit et nourrit l'aiglon qui a été chassé. 2 L'aigle couve environ trente jours; c'est d'ailleurs la durée de l'incubation chez les gros oiseaux, tels que l'oie et l'outarde. Les oiseaux de grandeur moyenne ne couvent guère que vingt jours, tels que le milan et l'épervier. Le plus souvent, le milan n'a que deux œufs ; quelquefois néanmoins il a jusqu'à trois petits ; le milan dit Aegolios en a parfois jusqu'à quatre. 3 Le corbeau n'a pas seulement {564a} deux oeufs, comme on le dit; il en couve davantage, pendant vingt jours à peu près. Le corbeau expulse aussi ses petits. Il y a d'autres biseaux encore qui en font autant ; et bien souvent, ceux qui ont plusieurs petits en chassent un. 4 D'ailleurs, toutes les espèces d'aigles ne se conduisent pas de même à l'égard de leurs petits; c'est surtout le pygargue qui est dur pour les siens. Les aigles noirs, au contraire, nourrissent leurs petits avec grand soin. Quoi qu'il en soit, on peut dire que tous les oiseaux à serres recourbées expulsent leurs petits hors du nid, en les frappant, dès qu'ils sont en état de voler. Presque tous les autres, nous le répétons, font à peu près de même; ou du moins, après avoir nourri leurs petits quelque temps, ils n'en prennent plus le moindre soin. Il faut excepter la corneille, qui s'en occupe encore pendant quelque temps. Lorsqu'ils volent déjà, elle les nourrit, en volant à côté d'eux. [6,7] CHAPITRE VII. 1 On a prétendu quelquefois que le coucou n'est que l'épervier transformé, parce que l'épervier, auquel le coucou ressemble, disparaît quand le coucou se montre. Mais toutes les autres espèces d'éperviers cessent d'être vus, si ce n'est pendant quelques jours, dès que le coucou se met à chanter. Le coucou ne se montre que très peu en été ; il disparaît tout à fait en hiver. 2 L'épervier a les serres recourbées; le coucou ne les a pas; sa tête ne ressemble pas non plus à celle de l'épervier; mais les deux, sa tête et ses ongles, ressembleraient moins à l'épervier qu'au pigeon. Sa couleur seule se rapproche de celle de l'épervier; et encore le bariolage de l'épervier se compose plutôt de lignes; celui du coucou est composé de points. 3 La grosseur et le vol du coucou le rapprochent de cette petite espèce d'éperviers qui, d'ordinaire, disparaît vers le même temps où se montre le coucou. On les a observés plus d'une fois à la même époque, et l'on a vu un coucou dévoré par un épervier; ce qui ne se produit jamais entre oiseaux de la même espèce. 4 On ajoute que personne n'a jamais vu les petits du coucou ; il pond cependant; mais il n'a pas fait de nid pour cela; il pond assez souvent dans le nid d'oiseaux plus petits que lui, après avoir dévoré leurs œufs; et de préférence, dans le nid du ramier, dont il mange aussi les œufs. {564b} Parfois, la femelle du coucou a deux œufs; le plus ordinairement, elle n'en a qu'un. Elle le dépose également dans le nid de la fauvette, qui fait éclore le petit et qui l'élève. C'est surtout à ce moment que le coucou est gras et d'une chair délicate. Les petits des éperviers sont aussi de très bon goût à manger et très gras. Il y a une de leurs espèces qui niche dans les lieux déserts et dans les rochers les plus escarpés. [6,8] CHAPITRE VIII. 1 Chez la plupart des oiseaux, les mâles, ainsi que nous l'avons dit pour les pigeons, couvent alternativement, en relayant la femelle, tout le temps qu'elle met à se procurer sa nourriture. Les femelles des oies couvent seules ; et elles restent tout le temps accroupies sur leurs œufs, du moment qu'elles ont commencé à couver. 2 C'est dans les endroits marécageux et garnis d'herbes que les oiseaux aquatiques font leurs nids; et c'est ainsi que, tout en demeurant sans bouger sur leurs œufs, ils peuvent se donner quelques aliments, et ne pas rester absolument sans manger. 3 Les femelles des corneilles sont aussi seules à couver; et elles ne cessent pas un instant d'être sur les œufs; les mâles leur apportent à manger; et ils les nourrissent soigneusement. La femelle du pigeon prend la couvée à la tombée du jour; elle y passe toute la nuit, jusqu'au moment où elle mange ; et le mâle couve le reste du temps. 4 Les perdrix font deux tas de leurs œufs; la femelle se met sur l'un; le mâle se met sur l'autre. Après l'éclosion, chacun élève respectivement les petits de sa propre couvée; et quand le mâle fait sortir les petits pour la première fois, il s'accouple avec eux. [6,9] CHAPITRE IX. 1 Le paon vit jusqu'à vingt-cinq ans environ; en général, il procrée à l'âge de trois ans, époque à laquelle il prend aussi les vives couleurs de son plumage. L'éclosion de ses petits a lieu en trente jours, ou un peu plus. Il ne pond qu'une seule fois par an; il pond une douzaine d'œufs, ou un peu moins. Mais il ne pond qu'à deux ou trois jours d'intervalle, et non pas de suite. Les femelles qui pondent pour la première fois ne font guère que huit œufs. 2 Les paons produisent aussi des œufs clairs. Ils s'accouplent vers l'époque du printemps ; et la femelle pond très vite après l'accouplement. {565} 3 Le paon perd ses plumes avec la chute des premières feuilles qui tombent ; et il recommence à reprendre son plumage quand les arbres reprennent aussi leur verdure. Ceux qui élèvent des paons donnent leurs œufs à couver à des poules, parce que le mâle peut les briser, en volant sur la femelle quand elle couve. 4 C'est aussi pour le même motif que, dans quelques espèces d'oiseaux sauvages, les femelles chassent les mâles pour pondre et pour couver. On donne aux poules tout au plus deux œufs de paon à couver; car elles ne peuvent guère en couver et en faire éclore davantage. Pour que la couveuse ne cesse pas l'incubation en descendant du nid, on a soin de mettre de la nourriture auprès d'elle. 5 Les oiseaux ont, vers l'époque de l'accouplement, les testicules manifestement plus gros. Les plus lascifs, comme les coqs et les perdrix, les ont alors plus développés ; et il les ont aussi toujours plus gros. Les testicules sont moins développés chez ceux qui ne s'accouplent pas continuellement. 6 Voilà donc comment les oiseaux portent et produisent leurs petits. [6,10] CHAPITRE X. 1 Il a été dit plus haut que les poissons ne sont pas toujours ovipares. Les sélaciens sont, il est vrai, vivipares; mais tout le reste des poissons est ovipare. Les sélaciens même ne sont vivipares qu'à la condition d'avoir produit des œufs dans leur intérieur, et ils nourrissent leurs petits au dedans d'eux-mêmes, excepté toutefois la grenouille. 2 On a également dit plus haut que les poissons ont des matrices de diverses sortes. Les ovipares ont des matrices divisées en deux, et placées en bas; celles des sélaciens se rapprochent davantage des matrices des oiseaux. La différence qu'elles présentent avec les matrices d'oiseaux, c'est que, chez quelques-uns, les œufs ne sont pas près du diaphragme, mais au milieu, le long du rachis. C'est de ce point que les œufs descendent, après s'y être développés. 3 L'œuf des poissons n'est jamais de deux couleurs ; il n'en a toujours qu'une seule, plutôt blanche que jaune, soit dès le début, soit quand le petit y paraît. 4 La formation du petit qui doit sortir de l'œuf des poissons n'est pas non plus la même que chez les oiseaux. La différence consiste en ce que l'œuf des poissons n'a pas ce second ombilic qui aboutit à la membrane placée sous la coquille. Des deux cordons, il n'en a qu'un seul, celui qui se rend au jaune, dans les oiseaux. 5 Le reste de la formation du petit sortant de l'œuf se passe chez les poissons comme chez les oiseaux. Ainsi, le petit se forme au sommet de l'œuf, et les veines prennent également leur point de départ au cœur. La tête, les yeux {565b} et les parties supérieures du corps sont également très grosses, à l'origine, chez les uns comme chez les autres. A mesure que le petit se développe, l'œuf va toujours en diminuant; à la fin, il disparaît et il est absorbé en dedans, tout comme ce qu'on appelle le poussin chez les oiseaux. 6 L'ombilic est attaché aussi un peu plus bas que le corps du ventre. Tant que le poisson est petit, le cordon ombilical est long; quand le poisson grossit, ce cordon devient plus court, et à la fin tout petit, jusqu'à ce qu'il rentre, ainsi qu'on l'a expliqué pour les oiseaux. 7 L'embryon et l'œuf sont renfermés dans une membrane commune ; au-dessous de cette première membrane, il y en a une autre, qui enveloppe spécialement l'embryon. Entre les deux membranes, il y a un liquide. Les petits poissons se nourrissent dans le ventre des femelles absolument de la même manière que se nourrissent les poussins des oiseaux. Seulement, la nourriture est blanche pour les uns, tandis qu'elle est jaune pour les autres. 8 On peut voir, d'après les dessins anatomiques, quelle est la forme de la matrice. Il y a des différences dans les poissons de la même espèce, les uns par rapport aux autres. Par exemple, il y en a pour les chiens de mer, et entre eux, et relativement aux sélaciens plats. Ainsi, dans quelques-uns, les œufs sont posés, au milieu de la matrice, près du rachis; par exemple, dans les petits-chiens de mer, ainsi qu'on l'a déjà dit. Une fois développés, les œufs sortent et s'en vont. 9 La matrice étant divisée en deux, et attachée au diaphragme, comme chez tous les animaux de cette même espèce, les œufs vont dans chacune de ces deux parties. La matrice de ces chiens de mer et celle des autres chiens marins présente, à peu de distance en avant du diaphragme, comme des mamelles blanches, qui ne se montrent pas quand il n'y a pas encore d'embryons. 10 Les petits-chiens et les raies ont des espèces de coquilles qui renferment un liquide analogue à celui de l'œuf. La forme de cette coquille se rapproche de la forme des becs de flûte ; et il y a dans les coquilles des vaisseaux filiformes. Chez les petits-chiens, que l'on appelle parfois aussi chiens-poulains, les petits sortent quand la coquille se rompt et tombe; mais dans les raies, une fois qu'elles ont pondu, le petit sort de la coquille, qui s'est rompue. 11 Le chien de mer, l'Épineux, a ses œufs en haut des mamelles sous le diaphragme ; et quand l'œuf descend, le petit se montre sur l'œuf ainsi détaché. La formation du petit est la même pour les chiens de mer appelés les renards. {566a} 12 Les chiens de mer qu'on nomme les chiens-lisses ont, comme les petits-chiens, leurs œufs entre les deux parties de la matrice. Attachés sur les deux parois de la matrice qu'ils tapissent, les œufs descendent; les petits se forment en ayant leur cordon ombilical sur la matrice, de telle sorte que, quand les œufs sont absorbés, il semble que l'embryon est tout à fait pareil à celui des quadrupèdes. Le cordon ombilical de la matrice, qui est fort long, est attaché à sa partie inférieure; et chaque cordon est comme suspendu à une cavité ou cotylédon ; le cordon tient au milieu de l'embryon, là où est le foie. Quand on l'ouvre en le fendant, on y trouve une nourriture analogue à celle de l'œuf, bien qu'il n'y ait plus d'œuf à ce moment ; mais il y a un chorion et des membranes qui entourent chacun des embryons en particulier, comme chez les quadrupèdes. 13 Les embryons, quand ils sont tout récents, ont la tête en haut; quand ils sont plus forts, et tout à fait développés, elle est en bas. Les mâles sont à gauche, et les femelles sont à droite; bien qu'on trouve aussi tout à la fois des femelles et des mâles dans la même moitié. Les fœtus disséqués montrent, ainsi que chez les quadrupèdes, des viscères très grands, comme le foie, et pleins de sang. 14 Tous les sélaciens ont à la fois des œufs en haut près du diaphragme, les uns plus gros, les autres plus petits, mais toujours nombreux ; et déjà, des embryons en bas. C'est là ce qui a pu donner à croire qu'ils pondent et qu'ils s'accouplent chaque mois, parce que tous les œufs ne sortent pas à la fois, mais à plusieurs reprises et pendant un temps assez long. Ceux qui sont dans le bas de la matrice y mûrissent et achèvent de s'y former. 15 Les autres chiens de mer mettent leurs petits dehors et les reprennent en eux-mêmes, comme le font les rhines et les torpilles. On a observé une torpille qui portait en elle jusqu'à quatre-vingts embryons. Le chien Épineux est le seul des chiens-marins qui ne reprenne pas ses petits, à cause de leur épine; et parmi les poissons aplatis, la pastenague et la raie ne reprennent pas leurs petits, à cause de la dureté de leur queue. La grenouille marine ne peut pas non plus les reprendre, à cause de la grosseur de leur tête et de leurs piquants. C'est aussi, comme on l'a dit plus haut, le seul de ces poissons qui ne soit pas vivipare. {566a} 16 Telles sont les différences qu'on peut remarquer entre tous ces animaux, les uns par rapport aux autres ; et telle est aussi la génération venant des œufs. 17 A l'époque de l'accouplement, les poissons mâles ont les canaux tellement pleins de la liqueur séminale que, en les pressant un peu, on fait sortir du sperme blanc. Les vaisseaux sont doubles, prenant leur origine au diaphragme et à la grande veine. Ace moment déjà, les vaisseaux sont, dans les mâles, aisément distingués de la matrice des femelles. Passé ce moment, les vaisseaux ne sont plus aussi distincts, si ce n'est pour ceux qui ont l'habitude de les observer. Chez quelques poissons, ils s'effacent quelquefois entièrement, comme on l'a dit pour les testicules des oiseaux. 18 Les vaisseaux du sperme et ceux de la matrice présentent encore d'autres différences entre eux. Les premiers s'attachent aux reins, tandis que, chez les femelles, les vaisseaux sont mobiles et recouverts d'une membrane légère. C'est encore d'après les dessins anatomiques qu'il faut étudier les vaisseaux des mâles et leur disposition. 19 Les sélaciens ont des superfétations ; et ils portent six mois tout au plus. Parmi les chiens marins, celui qu'on appelle l'Étoile, porte le plus fréquemment de tous. Il pond deux fois par mois; et l'accouplement commence au mois de Maemactérion. Les autres chiens de mer, si l'on excepte le petit chien, ne pondent que deux fois par an; le petit-chien ne pond qu'une seule fois. Quelques-uns de ces poissons pondent au printemps; la rhine fait aussi une dernière portée à l'automne, vers le coucher d'hiver de là Pléiade; sa première portée est au printemps. C'est la dernière ponte qui réussit le mieux. 20 Les torpilles pondent vers la fin de l'automne. Les sélaciens quittent la haute mer et les eaux profondes, pour venir pondre près de terre, parce qu'ils y trouvent de la chaleur et plus de sécurité pour leurs petits, qu'ils craignent de perdre. 21 On n'a point d'exemple que des poissons se soient accouplés en dehors de leurs congénères ; il semble que la rhine et la raie sont les seules à présenter cette anomalie ; car il y a un poisson surnommé la rhine-raie qui a la tête et le devant d'une raie, et le derrière d'une rhine, comme issu de toutes les deux. 22 Ainsi, les chiens de mer et les poissons analogues, tels que le chien-renard, le chien-marin, les poissons aplatis, la torpille, la raie, la raie-lisse et la pastenague, sont vivipares, {567a} après avoir fait des œufs, de la façon qu'on vient de dire. [6,11] CHAPITRE XI. 1 Le dauphin et la baleine, ainsi que les autres cétacés, qui ont un tuyau, ou évent, au lieu de branchies, sont vivipares. La scie, ou pristis, et le bœuf-marin le sont également. Il ne paraît pas qu'aucun de ces animaux ait d'œuf; mais ils ont immédiatement un embryon qui, en se développant, devient l'animal qu'ils produisent, comme on le voit chez l'homme et chez tous les quadrupèdes vivipares. 2 En général, le dauphin ne produit qu'un seul petit; rarement, deux. La baleine en a ordinairement deux au plus; mais elle en a deux plus souvent qu'un. Le marsouin est comme le dauphin, auquel il ressemble en petit. Il habite le Pont. Le marsouin diffère du dauphin, d'abord en ce qu'il est moins gros; il a aussi le dos plus large; et sa couleur est bleu foncé. Bien des gens soutiennent que le marsouin n'est qu'une variété du dauphin. 3 Tous les poissons pourvus d'un évent et qui reçoivent l'air, peuvent respirer, puisqu'ils ont un poumon. On voit le dauphin, tout en dormant, tenir son museau hors de l'eau ; et quand il dort, il ronfle. Le dauphin et le marsouin ont du lait; leurs petits les tètent; et tant que les petits ne sont pas trop grands, ils les font rentrer dans leur intérieur. 4 Les petits des dauphins prennent une croissance très rapide. En dix ans, ils acquièrent leur développement complet. La femelle porte dix mois. Elle produit en été, et jamais dans aucune autre saison. Quelquefois, le dauphin disparaît durant la canicule, pour une trentaine de jours. Ses petits le suivent pendant très longtemps ; et cet animal aime beaucoup sa progéniture. Le dauphin a une longue existence; on en a vu vivre jusqu'à vingt-cinq ans et même trente. Les pêcheurs coupent la queue de quelques-uns et les laissent aller, assurés de connaître par là quel âge ils peuvent avoir. 5 Le phoque doit compter parmi les animaux amphibies; il ne reçoit pas le liquide; mais il respire, et il dort. Il fait ses petits à terre, sur les bords de l'eau, comme un animal terrestre; mais il reste la plus grande partie du temps dans la mer, et il en tire sa nourriture. Aussi, doit-on en parler en traitant des animaux aquatiques. Le phoque est vivipare immédiatement en lui-même ; il produit des petits tout vivants; il a le chorion et toutes les autres excrétions, comme la brebis. {567b} Il a un ou deux petits, trois au plus. Il est pourvu de mamelles; et ses petits le tètent, comme le font les quadrupèdes. Ainsi que l'homme, il produit par toutes les saisons de l'année, mais surtout au temps où naissent les premières chèvres. 6 Quand les petits ont douze jours, il les mène à la mer plusieurs fois par jour, afin de les y accoutumer peu à peu. Les jeunes phoques s'y roulent en rampant; car ils ne marchent pas, parce qu'ils ne peuvent pas s'appuyer sur leurs pieds. Le phoque se ramasse et se porte ainsi, parce qu'il est charnu et très souple, ses os étant de simples cartilages. Il est difficile de tuer le phoque d'un seul coup, à moins de le frapper à la tempe; et cela tient à l'épaisseur de la chair dans le reste du corps . 7 La voix du phoque rappelle le mugissement du bœuf. La femelle a la matrice pareille à celle de la raie ; et le reste de cette partie de son organisation se rapproche de celle de la femme. 8 Voilà donc quelle est la génération des animaux aquatiques qui font des petits vivants, soit dans leur intérieur, soit au dehors; et voilà aussi ce que sont les petits qu'ils produisent. [6,12] CHAPITRE XII. 1 Les poissons ovipares ont la matrice divisée en deux parts et placée inférieurement, ainsi qu'on l'a déjà dit. Tous les poissons à écailles sont ovipares, comme le loup, le muge, le capiton, l'Étélis, et tous ceux qu'on nomme des poissons blancs, et lisses, excepté toutefois l'anguille. 2 Les œufs de tous ces poissons sont comme des grains de sable. On le voit bien dans leur matrice, qui est si pleine d'œufs que, dans les petits poissons, on dirait qu'il n'y a que deux œufs seulement, parce que, dans ces animaux, la matrice est si petite et si mince qu'on peut à peine la discerner. 3 Plus haut, il a été question de l'accouplement de tous les poissons. La plupart des espèces ont mâles et femelles; on ne sait pas au juste ce qu'il en est pour le rouget et le serran, puisque les poissons de ce genre ont tous des œufs. Les œufs des poissons se forment à la suite de l'accouplement ; mais cet accouplement n'est pas toujours nécessaire pour qu'ils en aient. C'est ce qu'on peut observer sur quelques poissons de rivière. Les phoxins, par exemple, ont des œufs presque aussitôt après leur naissance, et quand ils sont encore tout petits. 4 Les poissons jettent leurs œufs, et les mâles, comme on le dit, les dévorent en grande partie; et une grande partie se perd aussi dans l'eau. {568a} Il n'y a de sauvés que ceux qui ont été déposés dans les lieux mêmes où la femelle les pond. Si tous les œufs venaient à bien, chaque espèce de poissons deviendrait innombrable. La plupart de ces œufs restent inféconds; et il n'y a de fécondés que ceux sur lesquels le mâle répand sa liqueur séminale. A cet effet, lorsque la femelle pond, le mâle qui la suit répand la semence sur les œufs; tous ceux qui la reçoivent produisent des petits; les autres deviennent ce que veut le hasard. 5 C'est là aussi ce qui se passe pour les mollusques ; lorsque la seiche femelle a déposé ses œufs, le mâle les arrose de sa laite. Il est bien probable que ce phénomène se reproduit dans les autres espèces de mollusques ; mais jusqu'à présent on ne l'a observé que pour les seiches. 6 Les poissons fraient près du bord ; les goujons frayent près des rochers ; et l'œuf qu'ils produisent est large, et en grains de sable. II en est de même aussi des autres, qui recherchent la terre, parce que les abords en sont chauds, qu'ils y trouvent plus de nourriture, et que leurs petits ne peuvent pas y être dévorés par les poissons plus gros. Voilà comment, dans la mer du Pont, c'est à l'embouchure du Thermodon que la plupart des poissons viennent déposer leur frai. Le lieu est à l'abri des vents; il est chaud, et il a des eaux douces. 7 En général, les poissons ovipares ne produisent qu'une fois l'an, sauf les petites phycides, qui pondent deux fois. Dans cette espèce, le mâle diffère de la femelle, en ce qu'il est plus noir et en ce qu'il a de plus fortes écailles. Les autres poissons produisent leurs œufs dans la vulve et les jettent par là; mais le poisson qu'on appelle l'aiguille s'ouvre quand la saison du frai est arrivée; et les œufs sortent de son corps. C'est que ce poisson a, sous le ventre et l'abdomen, une ouverture, comme les serpents dits aveugles. Après qu'il a pondu, il continue de vivre ; et la plaie se cicatrise. 8 La sortie de l'œuf, l'éclosion, a lieu de la même manière, soit que le poisson produise son œuf à l'intérieur, soit qu'il le produise au dehors. Le petit est toujours au sommet de l'œuf, et il est entouré d'une membrane. Ce qui se distingue d'abord, ce sont les yeux qui sont grands et en forme de boules. Ceci prouve bien que les poissons ne se forment pas, ainsi qu'on l'a prétendu, comme les animaux qui sortent de larves. Loin de là, ce sont, dans ces derniers, les parties inférieures qui sont d'abord les plus fortes ; la tête et les yeux ne le deviennent que plus tard. 9 Quand l'œuf tout entier est absorbé, {568b} les poissons paraissent des têtards. Comme ils ne prennent d'abord aucune nourriture, ils ne se développent que grâce au liquide qu'ils trouvent dans l'œuf et qu'ils en tirent; ensuite, ils se nourrissent d'eau douce de rivière, jusqu'à leur complet développement. 10 Quand la mer du Pont est agitée, elle rejette dans l'Hellespont une certaine substance qu'on nomme le Fucus ; cette substance est jaune. On prétend que c'est une fleur naturelle, le Fucion. On la voit au début de l'été. Les huîtres et les petits poissons qui fréquentent ces lieux en font leur nourriture. Les habitants de ces bords disent aussi que c'est de cette matière que la pourpre tire son bouquet. [6,13] CHAPITRE XIII. 1 Les poissons d'étangs et de rivières ont en général des petits, vers leur cinquième mois ; et il n'en est pas qui ne pondent dès la première année. Ainsi que les poissons de mer, ceux-là non plus ne jettent jamais leur frai tout à la fois, ni les femelles les œufs, ni les mâles la liqueur séminale; mais toujours les unes gardent des œufs en plus ou moins grande quantité ; toujours les autres gardent de la liqueur. 2 Ils pondent à des époques régulières; ainsi, la carpe pond ses œufs en cinq ou six fois; et elle les dépose surtout au moment du lever des astres. Le chalcis pond trois fois ; tous les autres ne pondent qu'une seule fois par année. Ils jettent leurs œufs sur les bords des rivières et des étangs, entre les roseaux, comme le font les phoxins et les perches. Les glanis et les perches jettent des œufs liés entre eux en une masse continue, comme les grenouilles; et le frai ainsi enroulé se tient si bien que, pour celui de la perche, qui forme un large ruban, les pêcheurs d'étangs le prennent sur les roseaux en le dévidant. 3 Les glanis les plus gros pondent dans les eaux profondes ; d'autres, dans des fonds d'une brasse; les plus petits pondent dans des eaux basses, et surtout sous les racines de saule, ou de tel autre arbre, près des roseaux ou de la mousse. 4 Parfois, les poissons s'unissent entre eux, un très grand avec un petit; et approchant réciproquement les canaux {569a} qu'on appelle parfois leurs ombilics, d'où sort la génération, les femelles rejettent leurs œufs; et les mâles, leur liqueur séminale. Tous les œufs qui ont été imprégnés de cette liqueur deviennent tout à coup plus blancs, et grossissent, on peut dire, dès le jour même. très peu de temps après, les yeux des poissons se montrent ; car dans tous les poissons aussi bien que dans les autres animaux, c'est cet organe qui se montre tout d'abord le plus et qui est le plus grand. Tous les œufs que la liqueur séminale n'a pas touchés restent, comme dans les poissons de mer, inutiles et inféconds. 5 Quant aux œufs fécondés, après que les poissons ont grandi, il s'en détache une sorte d'étui ; c'est la membrane qui renfermait l'œuf et le petit poisson. Une fois que la liqueur séminale s'est mêlée à l'œuf, le composé qui en résulte devient très collant, sur les racines où il s'attache, ou dans tous les endroits auxquels les femelles ont pondu. Là où la ponte a été la plus abondante, le mâle garde et soigne les œufs, tandis que la femelle va pondre ailleurs. 6 Le développement du glanis dans les œufs est extrêmement lent ; et le mâle fait une garde assidue pendant quarante ou cinquante jours, pour que la progéniture ne soit pas dévorée par les poissons qui viennent à passer. Après le glanis, le développement le plus lent est celui de la carpe; cependant, les petits qui sont sauvés ne tardent pas non plus à s'échapper. Dans quelques espèces plus petites, il suffit de trois jours pour que les jeunes poissons soient apparents. 7 Les œufs qu'a touchés la liqueur séminale grossissent dès le jour même, et continuent plus tard à grossir. Ceux du glanis sont comme des grains de vesce noire ; ceux de la carpe et des poissons semblables sont comme des grains de millet. 8 Telle est la façon dont ces poissons, la carpe et le glanis, conçoivent et produisent. 9 Le chalcis pond, dans les eaux profondes, des œufs en grande quantité et rassemblés en groupes. Le poisson nommé le Tilon dépose ses œufs sur des bords exposés à tous les vents; il les jette aussi par groupes. La carpe, le baléros, et tous les autres poissons d'eau douce, peut-on dire, se pressent dans les eaux sans profondeur, pour y jeter leur frai, il n'est pas rare de voir treize ou quatorze mâles suivre une seule femelle. Quand la femelle a jeté ses œufs et qu'elle les a quittés en s'éloignant, les mâles, qui la suivent, répandent leur semence dessus. La plus grande partie des œufs périssent; {569b} la femelle se déplaçant pour les pondre, le frai se disperse, entraîné par le courant de l'eau, quand il ne tombe pas sur quelque matière solide. 10 Il n'y a que le glanis qui fasse ainsi la garde sur ses œufs. Peut-être aussi le mâle de la carpe en fait-il autant, quand il rencontre une masse de son frai particulier; alors, dit-on, il garde de même ses œufs. 11 Tous les poissons mâles ont de la liqueur séminale, excepté l'anguille; l'anguille n'a ni l'un ni l'autre, c'est-à-dire, ni liqueur séminale, ni œuf. Les muges quittent la mer pour remonter dans les étangs et dans les rivières; l'anguille, tout au contraire, les quitte pour passer dans la mer. [6,14] CHAPITRE XIV. 1 La majeure partie des poissons viennent d'œufs, ainsi qu'on l'a expliqué. Il y a cependant des poissons qui naissent de la vase et du sable, et qui sont de ces mêmes espèces qui proviennent d'accouplement et d'œufs. On les trouve dans bien des marais ; mais plus spécialement, dans un marais qui existe aux environs de Gnide, à ce qu'on rapporte. Ce marais était absolument à sec pendant la canicule; et tout le limon y était desséché. L'eau commençait à y reparaître avec les premières pluies ; et quand l'eau revenait, on y trouvait de petits poissons. Ils étaient de l'espèce des muges, qui ne se reproduisent pas par accouplement; et leur grosseur était celle des petiies maenides. Ces poissons-là n'ont ni œuf ni liqueur séminale. 2 Dans certains fleuves d'Asie qui ne s'écoulent pas dans la mer, on trouve également de petits poissons, de la grosseur de ceux qu'on fait frire, mais d'une autre espèce, qui viennent aussi de la même façon. On soutient quelquefois que tous les muges se forment de cette manière; mais c'est là une erreur ; car on peut observer, dans cette espèce, que les femelles ont des œufs, et les mâles, de la liqueur séminale ; seulement, il est vrai qu'une certaine espèce de muges vient de la vase et du sable. 3 Qu'il y ait quelques espèces de poissons qui ne proviennent ni d'œufs ni d'accouplement, mais spontanément, ces faits le prouvent évidemment; mais on peut dire que tous ceux qui ne sont ni ovipares, ni vivipares, doivent venir, les uns de la vase, les autres du sable et de la pourriture surnageant à la surface de l'eau, comme par exemple ce qu'on appelle la mousse de l'aphye, qui vient de la terre sablonneuse. Cette Aphye ne peut ni se développer, ni se reproduire. 4 Après quelque temps, {570a} elle disparaît et périt; et il en survient une autre, de telle sorte que, sauf un petit intervalle de temps, on peut dire qu'elle est de toute saison. Elle commence en automne, au lever de l'Ourse, et elle dure jusqu'au printemps. Ce qui prouve bien que parfois cette Aphye sort de la terre, c'est que les pêcheurs n'en prennent jamais quand il fait froid, mais qu'ils la prennent quand il fait beau, comme si elle sortait de terre pour aller chercher la chaleur. En la tirant du fond de l'eau, et en raclant plusieurs fois la terre, l'aphye est plus abondante et meilleure. Les autres Aphyes sont moins bonnes, parce qu'elles croissent alors trop vite. 5 Les Aphyes se produisent dans les endroits ombragés et marécageux, lorsque, les beaux jours étant venus, la terre s'échauffe; par exemple, à Salamine, au voisinage d'Athènes, au tombeau de Thémistocle et à Marathon ; car dans ces lieux-là, il se forme de l'écume. L'aphye se trouve dans les endroits qui offrent ces conditions, et aussi, dans les belles saisons. En certains pays, elle se forme quand il tombe beaucoup d'eau du ciel ; et elle se montre dans l'écume que fait l'eau de pluie. C'est même de là que lui vient le nom d'écume. Quelquefois aussi, elle est portée sur la surface de la mer par un beau temps ; et on y voit ballotter de petites larves, comme celles du fumier; l'écume s'y ballotte ainsi, partout où l'aphye a pu se former à la surface. 6 Cette sorte d'Aphye vient donc de la mer en bien des endroits ; elle est surtout bonne et très abondante, quand il se trouve que l'année est humide et chaude. L'autre Aphye est le produit des poissons. Celle qu'on appelle la goujonne vient des petits mauvais goujons qui se fourrent dans la terre. L'aphye de Phalère produit les Membrades, qui elles-mêmes produisent les Thrichides ; et les Trichides produisent les Trichies. 7 II n'y a que l'aphye ressemblant à celle du port d'Athènes qui donne naissance à ce qu'on nomme les sardines. Il y a encore une autre Aphye qui vient des maenides et des muges. L'écume inféconde est liquide et ne subsiste que peu de temps, ainsi qu'on l'a déjà dit. A la fin, il ne reste que la tête et les yeux du poisson ; {570b} mais les pêcheurs ont trouvé le moyen de la transporter; car une fois salée, elle se conserve plus longtemps. [6,15] CHAPITRE XV. 1 Les anguilles ne viennent pas d'accouplement, et elles n'ont pas d'œufs. On n'en a jamais pris une qui eût de la liqueur séminale, ou qui eût un œuf ; on n'en a jamais trouvé une qui, disséquée, présentât à l'intérieur les canaux du sperme ou ceux de la matrice ; mais parmi les animaux qui ont du sang, cette espèce tout entière ne prend naissance, ni d'un accouplement, ni d'un œuf. 2 Ce qui prouve bien qu'il en est ainsi, c'est que, dans les étangs bourbeux où l'on a mis toute l'eau à sec et d'où l'on a retiré toute la vase, les anguilles se reforment dès que tombe l'eau de pluie. Elles ne reparaissent pas dans les chaleurs, pas plus que dans les étangs qu'on ne vide point ; il n'y a que l'eau de pluie qui les fasse vivre et qui puisse les nourrir. Il est donc évident que ce n'est, ni l'accouplement, ni des œufs qui les font naître. 3 On s'est imaginé cependant qu'elles se reproduisaient, parce que, dans quelques anguilles, on a trouvé parfois de petits vers; et l'on a cru que de ces vers provenaient les anguilles, mais c'est là une erreur. Les anguilles viennent de ce qu'on appelle les Entrailles de la terre, qui se forment spontanément dans la vase et dans la terre humide. On en a vu tantôt se débarrasser de la peau de ces vers, et tantôt paraître évidemment dans ces vers, quand on les déchire et qu'on les ouvre. 4 Ces prétendues Entrailles de la terre se trouvent dans la mer et dans les eaux douces, aux lieux où se produisent de grandes pourritures. Ces lieux sont, dans la mer, ceux où s'accumulent les algues; et dans les rivières et les étangs, le long de leurs bords ; car la chaleur, en y devenant plus intense, développe la putréfaction. 8 Voilà ce qu'il en est de la production des anguilles. [6,16] CHAPITRE XVI. 1 Les poissons ne frayent pas tous à la même époque, ni de la même manière; ils ne portent pas tous le même espace de temps. Avant l'accouplement, il se forme des troupes de mâles et de femelles; mais ils s'accouplent deux par deux, quand arrive le temps de la copulation et de la ponte. 2 Quelques-uns ne portent que trente jours ; d'autres portent encore moins ; mais tous portent un nombre de jours divisible par semaines. Ceux qui portent le plus longtemps sont les poissons qu'on appelle quelquefois Marinos. La sarge femelle est fécondée vers le mois de Posidon ; {571a} elle porte trente jours. Parmi les muges, ceux qu'on nomme Grosse-lèvre et le Morveux portent dans la même saison, et aussi longtemps que la Sarge. 3 Tous les poissons souffrent de la gestation; et c'est surtout à ce moment qu'ils sortent de l'eau ; on les voit se précipiter furieusement vers la terre ; et durant tout ce temps, ils sont dans un mouvement continuel, jusqu'à ce qu'ils aient jeté leur frai. C'est le muge qui semble le plus agité de tous; une fois les œufs pondus, ils se calment. Beaucoup de poissons cessent de porter quand il se produit des larves dans leur ventre ; car il s'en produit de petites et de vivantes qui expulsent les futures portées. 4 Les portées ont surtout lieu au printemps pour les poissons qui vont par bandes ; et pour la majeure partie, c'est vers l'équinoxe du printemps. Pour les autres, l'époque de l'année n'est plus la même ; c'est l'été pour les uns ; pour les autres, c'est l'équinoxe d'automne. Le premier à pondre, parmi tous ces poissons, c'est l'athérine; et il pond près de terre. Le dernier, c'est le Capiton. La preuve de cette distinction, c'est qu'on voit, d'abord le frai de l'un, et que le frai de l'autre ne se montre qu'en dernier lieu. 5 Le muge est aussi un des premiers à pondre. La saupe fraye, dans la plupart des pays, au début de l'été; elle fraye aussi à l'automne en certains endroits. L'aulopias, qu'on nomme aussi l'authias, fraye en été. Après ces poissons, viennent la dorade, le loup, le mormyre, et tous ceux qu'on appelle dromades, ou coureurs. Les derniers à pondre, parmi les poissons qui vont en troupes, sont le surmulet et le coracin. 6 Ces derniers poissons pondent vers l'automne; le surmulet pond dans la vase ; et c'est là ce qui fait qu'il pond tard ; car la vase reste froide bien longtemps. Le coracin pond plus tard encore que le surmulet, se transportant dans les algues, bien qu'il vive d'ordinaire dans les endroits rocheux. Il porte d'ailleurs très longtemps. Les maenides pondent après le solstice d'hiver. La plupart des autres poissons de mer frayent en été ; et ce qui semble le prouver, c'est qu'on n'en prend pas à cette époque. 7 La maenide est le plus fécond de tous les poissons ; et parmi les sélaciens, c'est la grenouille de mer. Mais ces grenouilles sont peu nombreuses, parce qu'elles sont très exposées à périr, la femelle déposant ses œufs en masse et près de terre. En général, les sélaciens sont les moins féconds, {571b} parce qu'ils sont vivipares; mais ils se conservent précisément à cause de leur grosseur. 8 Le poisson nommé l'aiguille est aussi un de ceux qui pondent tard. Beaucoup de ces poissons sont déchirés par leurs œufs avant de les perdre ; s'ils ne peuvent pas les garder, ce n'est point à cause du nombre ; c'est plutôt à cause de la grosseur. Comme pour les araignées-phalanges, les œufs sont répandus autour de la femelle de l'aiguille; elle pond ses petits près d'elle, et ils s'enfuient dès qu'on les touche. L'athérine se frotte le ventre sur le sable pour pondre ses œufs. 9 Les thons se fendent aussi comme l'aiguille, par l'excès de graisse; ils vivent deux ans. Les pêcheurs affirment ce fait en disant que, quand les thons-femelles manquent une année, les thons manquent également l'année suivante. Il semble, d'ailleurs, avoir un an de plus que les pélamydes. 10 Les thons et les maquereaux s'accouplent à la fin du mois d'Élaphébolion; et ils pondent dans les premiers jours d'Hécatombéon. Leurs œufs sont renfermés dans une sorte de poche. Les petits thons ont une croissance très rapide ; car lorsque ces poissons ont pondu dans le Pont, il sort de l'œuf ce que les uns appellent des Scordyles, mais ce que les gens de Byzance appellent des Auxides, parce qu'elles se développent en quelques jours. Ces Scordyles sortent avec les thons en automne ; et elles reviennent au printemps, étant déjà des Pélamydes. 11 En général, tous les poissons grossissent très vite ; mais tous ceux du Pont grossissent plus vite encore que les autres. De jour en jour, on peut voir grandir, par exemple, les Amies, ou Bonitons. D'une manière générale, on doit dire que, pour les mêmes poissons, mais dans des lieux qui ne sont pas les mêmes, les époques ne sont pas les mêmes non plus, ni pour l'accouplement, ni pour la gestation, ni pour l'éclosion des petits, ni pour leur bon développement. C'est ainsi que, dans certains pays, ceux qu'on appelle les coracins ne jettent leurs œufs qu'à l'époque de la moisson. Mais, dans la majorité des cas, les conditions que nous avons indiquées sont celles qui se produisent. 11 Les congres ont des œufs comme les autres ; mais on ne peut pas observer le fait également bien*dans tous les lieux; et leur portée n'est pas facile à voir, à cause de leur graisse. La portée est en longueur comme chez les serpents ; mais en mettant la bête sur le feu, on voit bien nettement les choses. La graisse se brûle et se fond, tandis que les œufs sautent et font du bruit en éclatant. Si, de plus, on les touche et si on les écrase entre les doigts, la graisse est molle, tandis que les œufs sont durs. {572a} Il y a bien quelques congres qui n'ont que de la graisse et pas du tout d'œufs. D'autres, au contraire, n'ont pas de graisse ; et leur œuf est comme on vient de le dire. [6,17] CHAPITRE XVII. 1 En ce qui concerne les animaux ovipares qui nagent, qui volent, ou qui marchent sur terre, nous avons dit à peu près tout ce qu'on peut dire de l'accouplement, de la gestation, de l'éclosion, et des autres fonctions analogues à celles-là; nous allons traiter de ces mêmes fonctions en ce qui regarde les animaux terrestres vivipares, et en ce qui regarde l'homme. 2 On a déjà parlé de l'accouplement, soit d'une façon particulière, soit d'une manière générale et commune pour tous les animaux. Une observation qu'on peut appliquer à tous sans exception, c'est que l'accouplement provoque en eux le plus prodigieux désir, et un plaisir non moins grand à s'y livrer. Les femelles sont surtout terribles à leur première portée ; et les mâles, vers l'époque de l'accouplement. Les chevaux, par exemple, se mordent entre eux ; ils renversent et ils poursuivent leurs cavaliers. 3 C'est alors aussi que les sangliers sont les plus redoutables, quoique, à ce moment, l'accouplement les affaiblisse beaucoup; ils se livrent entre eux des combats formidables, se cuirassant à l'avance et se préparant la peau la plus dure possible et la plus épaisse, en se frottant contre les arbres, en se roulant cent fois dans la boue et en la laissant sécher sur eux. Ils se battent avec tant de rage, quand ils sortent de leurs bouges, que bien souvent les deux bêtes meurent à la fois. Les taureaux, les béliers, les boucs ne sont pas moins agités; vivant d'abord en paix dans le même pâturage, vers l'époque de l'accouplement, ils se séparent et se font une guerre acharnée. Le chameau mâle lui-même devient intraitable dans ce moment; et il ne souffre pas plus l'approche de l'homme que celle d'un autre chameau ; quant au cheval, on sait que le chameau est en tout temps en guerre avec lui. 4 Les bêtes sauvages éprouvent les mêmes influences. Les ours, les loups, les lions sont, dans ces moments, plus que jamais, terribles à tout ce qui les approche ; s'ils se battent moins entre eux que d'autres, c'est que ce ne sont pas des animaux qui vivent en troupes. Les femelles des ours sont furieuses quand elles ont des oursins; les chiennes ne le sont pas moins pour leurs petits chiens. 5 Les éléphants aussi deviennent farouches au temps de l'accouplement ; et ceux qui en élèvent dans les Indes le savent si bien, à ce qu'on dit, qu'ils ne les laissent pas couvrir leurs femelles ; car, à ces moments-là, ils entrent en fureur, renversant {572b} leurs cabanes, d'ailleurs assez mal construites, et causant une foule d'autres dégâts. On dit encore qu'on peut les rendre plus doux, en leur donnant une nourriture copieuse. On les fait aussi approcher par d'autres éléphants qui les refrènent et les soumettent, et auxquels on apprend à les frapper pour les réduire. 6 Les animaux qui peuvent s'accoupler souvent, sans être astreints à une saison unique, et par exemple ceux qui vivent avec l'homme, comme les porcs et les chiens, sont évidemment moins sujets à ces transports, à cause de la fréquence des rapprochements. Parmi les femelles, ce sont les juments, avant toutes les autres, et après elles, les vaches, qui se montrent les plus ardentes à l'accouplement. Les femelles des chevaux en deviennent folles, ou comme on dit, hippomanes ; de là vient que, quand on veut flétrir les gens beaucoup trop livrés aux plaisirs de l'amour, on leur inflige ce surnom d'hippo-mânes, qu'on tire uniquement de la jument, parmi toutes les autres femelles. 7 On dit aussi qu'à ces époques, elles sont affolées par le vent. C'est ce qui fait que dans l'île de Crète, on n'empêche en rien la saillie des cavales. Une fois couvertes, elles se mettent à fuir loin des autres chevaux ; leur mal est celui que, pour les femelles des sangliers, on appelle avoir la fureur du sanglier. D'ailleurs, elles ne courent jamais ni vers lest, ni vers l'ouest ; mais toujours au nord ou au sud. Quand elles sont atteintes de cette furie, elles ne souffrent pas que personne s'approche d'elles, jusqu'à ce qu'elles tombent épuisées de fatigue, ou qu'elles se plongent dans la mer. 8 Elles laissent alors couler un corps pareil à celui qu'on appelle aussi du nom d'hippomane dans le poulain qui vient de naître. Ce corps ressemble à l'ovaire de la truie; et c'est une substance très recherchée pour la fabrication des remèdes. Aux époques de l'accouplement, les juments se penchent les unes sur les autres plus qu'elles ne le font d'ordinaire ; elles agitent à tout instant leur queue ; et la voix qu'elles ont alors est très différente de celle qu'elles ont à tout autre moment. Alors aussi, il s'écoule de leurs parties génitales un liquide qui se rapproche de la semence des mâles, mais qui est beaucoup plus léger. C'est ce liquide que parfois on appelle l'hippomane, et qui n'est pas l'excroissance qui vient au jeune poulain. Il est d'ailleurs, à ce qu'on dit, fort difficile de recueillir ce liquide, qui ne coule qu'en petite quantité. Les juments urinent souvent quand elles sont en chaleur, et elles jouent les unes avec les autres. 9 Voilà donc ce qu'on peut observer sur les chevaux à l'époque de l'accouplement. 10 Les vaches ont la fureur du taureau ; et la passion qui les pousse est si violente que les bouviers ne peuvent les maîtriser, ni les prendre. On voit sans peine, pour les vaches comme pour les juments, {573a} qu'elles brûlent de s'accoupler, par le gonflement de leurs parties génitales, et par la fréquence de leurs urines. Les vaches vont même jusqu'à monter sur les taureaux ; elles les suivent sans cesse, et sont toujours à leurs côtés. Ce sont les bêtes les plus jeunes, juments ou vaches, qui sont les premières en chaleur avant les autres ; et leur ardeur est d'autant plus vive que le temps est beau, et qu'elles sont en pleine santé. 11 Les juments, quand elles sont tondues, sont beaucoup plus calmes, et elles portent la tête basse. Les mâles distinguent, rien qu'à l'odeur, les femelles avec lesquelles ils ont pâturé, bien qu'ils n'aient été avec elles que quelques jours avant de s'accoupler. Si d'autres juments viennent se mêler à celles-là, ils les font retirer en les mordant ; et ils vont paître séparément, chacun avec ses femelles. On donne à chaque cheval une trentaine de juments, ou un peu plus. Si quelque autre mâle s'approche, le cheval réunit ses juments sur un seul point ; il en fait le tour en courant, et il va combattre son rival en allant au-devant de lui. Si quelque jument bouge, il la mord et la retient. 12 Quand arrive la saison de l'accouplement, le taureau vient paître avec les vaches, et il se bat avec les autres taureaux, bien qu'auparavant ils vécussent ensemble. On dit alors d'eux qu'ils dédaignent le troupeau, et souvent les taureaux d'Épire restent trois mois de suite sans y reparaître. 13 C'est qu'en général, dans toutes les espèces sauvages ou du moins dans la plupart, les mâles ne pâturent pas avec les femelles avant l'époque où ils doivent s'accoupler; mais ils se séparent dès qu'ils en ont l'âge ; et les mâles mangent à part des femelles. 14 Les truies, quand elles sont en chaleur, ce qu'on appelle en grec d'un mot particulier, vont jusqu'à attaquer les hommes. Pour les chiennes, on désigne aussi cet état par un mot spécial de chaleur. Ainsi donc, les parties génitales se gonflent dans les femelles, quand elles désirent l'accouplement ; et en ce même endroit, il se produit un liquide. A cette époque également, les juments distillent aussi une liqueur blanchâtre. 15 D'ailleurs, ces évacuations mensuelles, chez celles qui en ont, ne sont jamais aussi abondantes dans aucune espèce que chez la femme. Dans les brebis et les chèvres, quand la saison de l'accouplement est venue, ce flux se montre avant qu'elles ne soient couvertes ; mais après qu'elles l'ont été, les flux mensuels apparaissent encore, et ils cessent bientôt, jusqu'à ce que la femelle soit sur le point de mettre bas. {573b} Ils recommencent ensuite, et les bergers reconnaissent alors que la bête va faire ses petits. Quand* elle a mis bas, l'évacuation devient considérable ; elle est d'abord mêlée d'un peu de sang ; et ensuite, il y en a beaucoup. 16 La vache, l'ânesse, la jument, ont un flux plus abondant que d'autres femelles ; mais c'est à cause de leur grosseur; car ce flux est, proportion gardée, beaucoup moins fort. La vache, quand elle est en chaleur, n'a qu'une évacuation très faible, d'un demi-cotyle environ, ou un peu plus. Le moment le plus propice pour l'accouplement est celui de cette évacuation, qui purifie la bête. La jument est, entre les femelles de tous les quadrupèdes, celle qui met bas le plus aisément, et qui se purifie le plus complètement de ses évacuations, en même temps qu'elle perd le moins de sang, comparativement à sa grosseur. 17 Dans les vaches et les juments, le flux ne se montre que tous les deux mois, ou quatre mois, ou six mois. Il n'est pas facile de le connaître, à moins de les suivre de très près et d'être accoutumé à ces observations. Aussi, bien des gens croient-ils qu'elles n'ont pas de menstrues. Les femelles des mulets n'ont point de flux menstruel ; seulement, l'urine de la femelle est alors plus épaisse. 18 Généralement, l'excrément de la vessie est plus épais dans les quadrupèdes que chez l'homme. Pour les brebis et pour les chèvres, l'urine des femelles est encore plus épaisse que celle des mâles. Pour l'âne au contraire, l'urine des femelles est plus claire ; et l'urine de la vache est plus acide que celle du bœuf. Chez tous les quadrupèdes, les femelles ont des urines plus épaisses, après la parturition ; et elles le sont encore davantage chez celles où le flux est le moins considérable. Le lait des femelles, quand elles viennent de s'accoupler, devient une sorte de pus; mais il reprend toutes ses qualités, quand elles ont mis bas. Quand les brebis et les chèvres sont pleines, elles engraissent et mangent bien plus. Il en est de même pour les vaches, et dans toutes les espèces de quadrupèdes. [6,18] CHAPITRE XVIII. 1 On peut dire, d'une manière générale, pour tous les animaux que le printemps est, de toutes les saisons, celle qui les pousse surtout à l'accouplement. Néanmoins, tous les animaux sans exception ne s'accouplent pas à la même époque ; mais ils s'accouplent toujours de façon que leurs petits puissent être nourris à l'époque la plus convenable. 2 Ainsi, les truies portent quatre mois ; et la portée la plus forte est de vingt petits; seulement, quand elles en font tant, elles ne peuvent les élever tous. En vieillissant, elles produisent toujours avec autant de fécondité ; mais elles sont plus difficiles à se laisser couvrir. Elles conçoivent par un seul accouplement ; et cependant, {574a} on doit les faire monter plus d'une fois, parce que, après l'accouplement, elles rejettent ce qu'on appelle quelquefois la Caprie. Toutes sont sujettes à rejeter cette liqueur ; mais il en est qui rejettent en même temps la liqueur séminale. 3 Lorsque, durant la gestation, des petits ont été blessés, et que leur grosseur est amoindrie, c'est ce qu'on nomme des arrière-porcs; et cet accident se produit dans toutes les parties de la matrice. Lorsque la truie a mis bas, elle donne la première mamelle au petit qui est venu le premier. 4 Quand la truie est en chaleur, il ne faut pas lui donner immédiatement le mâle ; et il faut attendre qu'elle ait les oreilles pendantes. Si elle ne les a point, c'est qu'elle doit être en chaleur de nouveau. Si le mâle la couvre quand elle est en pleine chaleur, un seul accouplement suffit, comme on vient de le dire. 5 Pendant que le mâle couvre, il est bon de lui donner de l'orge ; mais quand la truie a mis bas, il faut lui donner de l'orge bouillie. Il est des truies qui, dès la première fois, ont des petits superbes; d'autres ont besoin de se fortifier encore pour avoir de beaux produits, soit mâles, soit femelles. Quelques personnes assurent que, si la truie perd un de ses yeux, elle meurt ordinairement très vite. Mais, en général, les truies vont jusqu'à quinze ans environ, quelques-unes vont même presque tout à fait à vingt ans. [6,19] CHAPITRE XIX. 1 II faut trois ou quatre accouplements pour que la brebis soit fécondée; s'il vient à pleuvoir après l'accouplement, elle avorte. Il en est de même encore pour les chèvres. La portée ordinaire de la brebis est de deux petits; parfois, on lui en a vu trois, et même jusqu'à quatre. La gestation est de cinq mois pour la brebis et pour la chèvre; aussi, dans les climats qui sont chauds, où elles se portent bien, et où la nourriture est abondante, elles ont deux portées par an. 2 La chèvre vit jusqu'à huit ans à peu près ; la brebis en vit dix ; mais généralement, elles vivent moins. Les chefs de troupeaux font exception ; et ils vont jusqu'à quinze ans. Dans chaque troupeau, les bergers dressent un mâle à être à la tête des autres mâles; et il se met à les conduire, quand le berger l'appelle par son nom; on l'y habitue dès le premier âge. Dans les contrées de l'Ethiopie, les brebis vivent douze ou treize ans ; les chèvres en vivent dix et onze. 3 Dans les espèces de la brebis et de la chèvre, l'animal couvre et est couvert tant qu'il vit. Une nourriture abondante fait que les brebis et les chèvres ont des jumeaux, et aussi, quand le père bélier ou bouc, ou la mère, ont été eux-mêmes des jumeaux. C'est d'abord la nature des eaux qui fait que les petits sont mâles ou femelles ; car il y a des animaux qui font des mâles, ou tels autres qui font des femelles. 4 Mais c'est aussi l'accouplement qui peut causer ces différences. Quand, au moment de l'accouplement, {574b} c'est le vent du nord qui règne, ce sont plutôt des mâles que les mêmes bêtes produisent; tandis que, par le vent du sud, ce sont plutôt des femelles. Les animaux qui produisaient des femelles peuvent changer et produire des mâles ; il suffit de tourner la tète de l'animal pendant l'accouplement, de façon qu'il regarde au nord. Les femelles habituées à recevoir le mâle le matin, ne reçoivent pas les béliers qui viennent le soir. 5 Les petits sont blancs on noirs, selon que les veines que le bélier a sous la langue sont blanches ou noires. Ils sont blancs, si elles sont blanches, et noirs si elles sont noires. Les petits sont des deux couleurs, si les raies sont des deux couleurs aussi; ils sont roux, si elles sont rousses. Si l'on sale l'eau que boivent les brebis, elles sont en état d'être fécondées plus tôt. Il faut saler leur eau, avant qu'elles n'aient mis bas et après, et renouveler cette opération au printemps. 6 Les bergers ne donnent point de chef aux troupeaux de chèvres, parce que le naturel de ces animaux ne les laisse jamais en place, et qu'ils sont d'une vivacité et d'une mobilité extrêmes. Lorsque les plus vieilles brebis sont ardentes à l'accouplement, dans la saison régulière, les bergers y trouvent le signe d'une bonne année pour le coït des brebis; si ce sont les plus jeunes, ils augurent que l'année sera mauvaise. [6,20] CHAPITRE XX. 1 Les espèces de chiens sont nombreuses. Les chiens de Laconie peuvent couvrir, et les femelles être couvertes, à huit mois; et c'est aussi vers ce même âge que quelques-uns lèvent déjà la patte pour uriner. La chienne est fécondée par un seul accouplement; et ce qui le prouve bien évidemment, ce sont les accouplements furtifs de ces animaux ; le mâle y féconde la femelle en ne la couvrant qu'une fois. 2 La chienne de Laconie porte la sixième partie de l'année, c'est-à-dire soixante jours, bien qu'il y ait parfois un, deux, ou trois jours, de plus ou de moins. Ses petits chiens, une fois nés, sont douze jours sans voir clair. Après qu'elle a mis bas, elle reste six mois sans recevoir le mâle, et elle ne le reçoit pas plus tôt. Quelques chiennes portent pendant le cinquième de l'année, c'est-à-dire soixante et douze jours, et leurs petits sont sans voir pendant les quatorze premiers jours. D'autres encore portent le quart de l'année, c'est-à-dire trois mois entiers ; et les petits de celles-là sont aveugles pendant dix-sept jours. 3 II semble que ce soit durant le même temps que les chiennes sont en chaleur. Les flux menstruels des chiennes durent sept jours, ainsi que le gonflement simultané des parties génitales. Pendant tout ce temps, elles n'acceptent pas l'accouplement; elles ne l'admettent que dans les sept jours suivants. {584a} En général les chiennes, autant qu'on en peut juger, sont en chaleur durant quatorze jours; il y en a même quelques-unes chez lesquelles cette affection dure seize jours. 4 L'évacuation qui a lieu à la parturition sort en même temps que les petits. Cette évacuation est épaisse et phlegmateuse ; et la quantité, après que l'animal a mis bas, n'est pas en proportion avec son corps. Les chiennes ont généralement du lait cinq jours avant de mettre bas; parfois, c'est sept jours ; d'autres fois, ce n'en est que quatre. Leur lait est bon, dès qu'elles ont mis bas. La chienne de Laconie en a trente jours après qu'elle a été couverte. D'abord, il est épais ; mais avec le temps, il s'éclair-cit; comparé pour l'épaisseur à celui des autres animaux, le lait des chiens vient après celui des porcs et des lièvres. 5 Ce qui indique aussi pour les chiennes que le moment est venu où elles peuvent être couvertes, c'est que les mamelles prennent, comme dans l'espèce humaine, un certain gonflement et une certaine élasticité. Toutefois, si l'on ne fait pas d'observations fréquentes, il est difficile de reconnaître ce symptôme, qui est très faible. On ne le remarque, d'ailleurs, que sur la femelle, et le mâle n'a rien de pareil. D'ordinaire, les mâles urinent en levant la patte, quand ils ont six mois. Quelques chiens ne le font que plus tard, quand ils ont huit mois comptés; quelques-uns aussi le font même avant les six mois révolus. A vrai dire, c'est quand ils ont déjà la force de s'accoupler qu'ils urinent ainsi. Toutes les femelles urinent en s'accroupissant; on en a vu pourtant quelques-unes lever aussi la patte pour uriner. 6 La chienne a tout au plus douze petits; habituellement, ce n'est que cinq ou six. On en cite une qui n'avait qu'un seul petit; mais d'ordinaire, les chiennes de Laconie en ont jusqu'à huit. Les femelles peuvent s'accoupler, ainsi que les mâles, durant toute leur vie. Une qualité particulière des chiens de Laconie, c'est que, quand on les fatigue beaucoup, ils sont plus vigoureux à l'accouplement que ceux qui ne font rien. Dans cette espèce des chiens de Laconie, le mâle vit dix ans; la femelle va jusqu'à douze. La plupart des autres chiennes vivent quatorze ou quinze ans; parfois même, vingt ans. Aussi a-t-on bien raison de justifier Homère d'avoir fait mourir à vingt ans le chien d'Ulysse. {585b} Comme les mâles des chiens de Laconie travaillent davantage, les femelles sont, dans cette race, capables de vivre plus longtemps qu'eux. Dans les autres races, la chose n'est pas aussi évidente; mais les mâles, néanmoins, vivent plus que les femelles. 7 Le chien ne perd de ses dents que celles qu'on appelle Canines; mais à quatre mois, les mâles et les femelles perdent également celles-là. Aussi, comme ce sont les seules qu'ils perdent, le fait donne lieu à deux opinions contraires. Ces dents étant les seules à tomber, les uns prétendent que le chien ne perd jamais de dents, parce qu'il est difficile de voir les canines; les autres, voyant que le chien perd ces sortes de dents, s'imaginent qu'il perd aussi toutes les autres. Du reste, on juge de leur âge par l'aspect des dents : quand les chiens sont jeunes , ils les ont blanches et pointues ; plus âgés, ils les ont noires et émoussées. [6,21] CHAPITRE XXI. 1 Le bœuf-mâle rend la vache pleine par une seule monte; il la couvre si violemment que la vache fléchit de tout son corps; s'il manque cet assaut, la vache reste vingt jours sans s'offrir à un accouplement nouveau. Les vieux taureaux ne saillissent pas le même jour plusieurs fois la même vache, à moins qu'il n'y ait longtemps qu'ils n'aient sailli. Mais les plus jeunes montent plusieurs fois la même vache, et en montent plusieurs les unes après les autres, tant ils ont de vigueur. 2 Le bœuf est d'ailleurs le moins lascif des mâles. Le taureau qui saillit est celui qui a vaincu les autres; mais quand il s'est épuisé par de fréquentes saillies, le vaincu revient à la charge, et souvent il l'emporte. A un an, les mâles peuvent couvrir, et les femelles, être couvertes; et dès la première fois; il peut y avoir un résultat; mais en général, ce n'est qu'à vingt mois; et l'on est même généralement d'accord à dire que c'est à deux ans. 3 La femelle porte neuf mois; et elle met bas le dixième. On soutient même quelquefois qu'elle porte dix mois Jour pour jour. Ce qui naît avant ces temps révolus, comme on vient de le dire, n'est qu'un avorton, et ne peut vivre, bien que le moment où la bête a mis bas n'ait été avancé que de très peu. Le petit ne vit pas, parce que les cornes de ses pieds sont molles et informes. La portée habituelle est d'un seul petit; rarement, il y en a deux. La femelle met bas et le mâle peut couvrir, durant toute la vie. 4 La femelle vit ordinairement quinze ans ; les mâles en vivent autant, quand ils sont coupés. Il y en a qui vivent jusqu'à vingt ans et même davantage, si le corps est bien nourri. On dresse {566a} les bœufs coupés à être chefs du troupeau à la tête duquel on les met, comme on le fait pour les moutons; et ceux-là vivent plus vieux, parce qu'ils ne fatiguent pas, et parce qu'ils ont un fourrage qui n'a pas été foulé. 5 Le bœuf est dans toute sa force à cinq ans, et voilà comment on a pu louer Homère d'avoir dit, dans ses vers, qu'un taureau de cinq ans vaut un bœuf de neuf ans ; car l'un et l'autre sont de force égale. Le bœuf perd ses dents à deux ans; il les perd non pas toutes à la fois, mais comme le cheval. Quand il a mal aux pieds, il ne perd pas la corne ; mais seulement ses pieds enflent beaucoup. Le lait n'est bon que quand l'animal a mis bas ; car auparavant il n'a pas de lait; et le premier lait qu'a la vache, devient, quand il est caillé, aussi dur qu'une pierre; et cela ne manque pas, si l'on n'y mêle pas de l'eau. 6 Les vaches de moins d'un an ne reçoivent pas le mâle, sauf des exceptions monstrueuses. On a même vu des taureaux et des vaches s'accoupler à quatre mois. l'accouplement commence dans les mois de Thargélion et de Skirrhophorion le plus ordinairement ; mais quelques vaches se laissent couvrir jusqu'en automne. Quand il y a beaucoup de vaches pleines, et qu'elles recherchent l'accouplement, c'est un signe certain, à ce qu'on croit, de froideur et de pluie. Les vaches s'affectionnent entre elles comme les juments, mais moins vivement. [6,22] CHAPITRE XXII. 1 Le cheval mâle commence à saillir dès l'âge de deux ans ; et c'est à cet âge aussi que la femelle peut commencer à être couverte. Il y a cependant peu d'exemples de ce genre, et les produits qui en viennent sont plus petits et plus faibles. En général, c'est à trois ans, pour les mâles et les femelles, qu'a lieu l'accouplement; et jusqu'à vingt ans, les produits sont de plus en plus forts. 2 La jument porte onze mois; et elle met bas dans le douzième. Il n'y a pas un nombre de jours fixe pour que le cheval emplisse la jument; parfois un seul jour suffit; d'autres fois, il en faut deux ou trois, ou même quelquefois plus. L'âne montant sa femelle l'emplit plus vite que le cheval; mais la saillie du cheval n'est pas accablante comme celle du taureau. 3 Après l'homme, c'est le cheval, mâle et femelle, qui est le plus lascif des animaux. Les jeunes chevaux s'accouplent avant l'âge quand le pâturage est bon, et que la nourriture est très abondante. En général, la jument n'a {576b} qu'un poulain ; quelquefois, elle en a deux ; mais c'est le plus. On cite une jument qui a eu deux mulets; mais c'est une sorte de prodige. Le cheval peut saillir même à trente mois ; et par conséquent, ses bons produits coïncident avec l'âge où il cesse de perdre ses dents. On en a même vu saillir au moment où ils les perdaient, à ce qu'on assure, à moins qu'ils ne soient naturellement inféconds. 4 Le cheval a quarante dents ; à trente mois, il perd les quatre premières, deux en haut, deux en bas. Un an après, il en perd également quatre, deux en haut, deux en bas; et après une année encore, il en perd encore quatre autres de la même façon, À quatre ans et six mois, il n'en perd plus. On a vu une fois un cheval perdre toutes ses dents ensemble, dès les premières; c'est, au contraire, avec les dernières qu'un autre les a toutes perdues ; mais ce sont là des cas fort rares, 5 C'est donc presque toujours à quatre ans et six mois que le cheval est le plus apte à saillir. Les chevaux les plus vieux sont aussi les plus féconds ; et ceci n'est pas moins vrai des femelles que des mâles. Les chevaux montent indifféremment leurs mères et leurs filles ; et le haras passe pour complet quand ils saillissent leurs propres produits. Les Scythes montent leurs juments, bien qu'elles soient pleines, dès que l'embryon a remué ; et ils prétendent que les juments n'en ont que plus de facilité à mettre bas. 6 Tous les autres quadrupèdes se couchent pour mettre bas; et voilà pourquoi les petits sortent toujours sur le côté ; mais le cheval femelle, quand le moment de la délivrance approche, se met droit sur ses jambes pour produire son poulain. 7 La plupart des chevaux vivent dix-huit à vingt ans ; quelques-uns vont à vingt-cinq et trente ; et quand on soigne bien les bêtes, elles peuvent aller même jusqu'à cinquante ans. Mais, en général, la vie la plus longue du cheval est de trente ans; en général aussi, la vie de la femelle n'est que de vingt-cinq. On en a vu qui ont vécu jusqu'à quarante. Si les chevaux vivent ordinairement moins que les femelles, c'est à cause des saillies; ceux qu'on élève chez soi vivent moins aussi que ceux des haras. 8 La femelle prend toute sa croissance, longueur et hauteur, en cinq ans; il en faut six pour le mâle. Dans les six années qui suivent, le corps acquiert toute son ampleur, et l'nimal profite jusqu'à vingt ans. Les femelles se forment avant les mâles; mais dans le ventre de la mère, les mâles se forment, au contraire, avant elles, absolument comme dans l'espèce humaine. Le même phénomène se retrouve chez d'autres animaux qui font plus d'un petit. 9 Le mulet tète, dit-on, jusqu'à six mois; mais ensuite, la mère ne donne plus sa mamelle, parce que le petit lui fait mal en la tirant. Le cheval tète un peu plus tard. Le cheval et le mulet sont dans toute leur vigueur, après la chute des premières dents. Une fois qu'ils les ont toutes perdues, il n'est plus facile de savoir leur véritable âge ; aussi dit-on qu'on a une marque exacte tant que le cheval n'a pas perdu ses dents, mais qu'on n'en a plus quand il les a perdues. 10 Généralement, c'est surtout par la canine, après la chute des dents qui tombent, que l'on connaît l'âge du cheval. Dans les chevaux de selle, la canine est petite à cause du mors, qui l'use, puisque c'est près de cette dent qu'il est posé ; pour les chevaux qu'on ne monte pas, la canine est grosse et dégagée; dans les jeunes, elle est pointue et petite. 11 Le mâle saillit en toute saison, et durant sa vie entière; la femelle peut être saillie tant qu'elle vit, mais non point en toute saison, si on ne l'attache pas, ou si on ne lui met pas telle autre entrave. Mais quoi qu'on fasse, il n'y a pas de saison bien marquée où ils ne puissent saillir ou être sailli. Cependant l'accouplement ne saurait avoir lieu à toute époque indifféremment, sans leur ôter la faculté d'élever les petits qu'ils ont. Dans un haras d'Oponte, on a vu un cheval saillir encore à quarante ans ; mais il fallait l'aider à lever ses jambes de devant. 12 Les juments commencent à être saillies au printemps; quand la jument a mis bas, elle ne se laisse pas remplir immédiatement après; mais elle met quelque intervalle ; elle mieux serait d'attondre quatre ou cinq ans après la première portée. Mais il faut tout au moins laisser passer l'année, {577b} et faire une sorte de jachère. Si la jument met de l'intervalle dans ses portées, comme on vient de le dire, l'ânesse, au contraire, porte continuellement. 13 Il y a des juments tout à fait stériles; d'autres peuvent concevoir; mais elles ne peuvent rien produire. On prétend reconnaître ces dernières à ce que, si l'on dissèque les fœtus, on leur trouve à côté des reins d'autres corps analogues aux reins, de telle sorte qu'il semble que les reins sont au nombre de quatre. 14 Quand la jument a mis bas, elle dévore aussitôt le chorion ; et elle mange aussi l'excroissance qui se montre au front des poulains, et qu'on appelle l'Hippomane. Cette excroissance est un peu moins grosse qu'une figue, de forme large, arrondie, et noire. Si l'on se hâte de la prendre avant la jument, et que la jument en sente l'odeur, elle en est toute transportée, et cette odeur la rend furieuse. Aussi, les femmes qui font des breuvages recherchent-elles cette substance et en font-elles provision. 15 Si un âne vient à saillir une jument déjà montée par un cheval, ce second accouplement détruit l'embryon antérieurement conçu. 16 Les palefreniers des haras ne mettent pas un cheval à la tête des autres pour les conduire, comme on le fait pour les troupeaux de bœufs, parce que la nature des chevaux n'est pas tranquille, mais qu'elle est très vive et très mobile. [6,23] CHAPITRE XXIII. 1 L'âne peut saillir, et l'ânesse être saillie, à trente mois. C'est alors que tombent les premières dents. Les secondes tombent six mois après ; puis, les troisièmes et les quatrièmes tombent après le même intervalle. Ce sont les quatrièmes qu'on appelle les Marques. On cite une ânesse qui est devenue pleine à un an, et dont le petit a pu vivre. L'ânesse rejette la semence dès qu'elle a été saillie, à moins qu'on ne l'en empêche. Aussi a-t-on soin de la frapper après l'accouplement et de la faire courir. 2 Elle met bas au bout de douze mois. Le plus souvent elle n'a qu'un ânon; et naturellement, elle n'en doit avoir qu'un; mais quelquefois, elle en a jusqu'à deux. L'âne, en montant une jument, fait périr, ainsi qu'on vient de le dire, le germe qu'elle a reçu du cheval ; mais le cheval ne fait pas avorter celui de l'âne, quand une jument a été précédemment remplie par un âne, qui l'a couverte. 3 L'ânesse a du lait au dixième mois de la gestation ; et après qu'elle a mis bas, elle peut être couverte dès le septième jour; c'est même à ce jour-là qu'elle devient pleine le plus sûrement, bien qu'elle puisse aussi concevoir plus tard. Si par hasard elle n'a pas eu de poulain avant de perdre la marque, elle n'a plus chance de devenir pleine, ni de porter durant le reste de sa vie. {578a} Lorsqu'elle est sur le point de mettre bas, l'ânesse n'aime pas à être vue par l'homme, ni à mettre bas en plein jour ; mais on la met dans l'obscurité, pour qu'elle s'y délivre. 4 Elle peut produire durant sa vie entière, pourvu qu'elle ait produit avant de perdre la marque. L'âne vit plus de trente ans, et la femelle vit plus longtemps encore que le mâle. Quand un cheval a couvert une ânesse, ou qu'un âne a couvert une jument, il y a bien plus d'avortements que quand ce sont des sujets de même espèce qui s'accouplent entre eux, le cheval avec la jument et l'âne avec l'ânesse. 5 Le temps de la gestation, quand le cheval et l'âne se croisent, se règle sur le mâle ; je veux dire qu'elle dure alors tout ce qu'elle aurait duré si le petit venait d'individus de même espèce. Pour la grandeur, l'aspect et la force, le produit ressemble davantage à la femelle. 6 Si l'on continue le croisement, et si les animaux ne restent pas un intervalle de temps assez long sans s'accoupler, la femelle ne tarde pas à devenir stérile. Aussi, les gens qui s'occupent de ces soins, ne font pas des croisements continus; mais ils y mettent quelque intermittence. La jument ne reçoit pas l'âne, et l'ânesse ne reçoit pas le cheval, si l'âne n'a point tété une jument. On a donc soin de faire téter les juments par des ânes qu'on appelle Nourrissons de juments; et ces ânes-là, au pâturage, couvrent les juments et les forcent à les recevoir, tout comme des étalons. [6,24] CHAPITRE XXIV. 1 Le mulet saillit, et s'accouple, après la première perte des dents ; il peut même encore à sept ans être fécond, et l'on a vu nattre un bardot d'un mulet qui avait couvert une jument; mais après sept ans, le mulet ne saillit plus. On a vu également une mule devenir pleine, mais sans pouvoir amener à terme. 2 Dans cette partie de la Syrie qui est au delà de la Phénicie, les mules sont couvertes et mettent bas; mais cette espèce, toute ressemblante qu'elle est, est différente. Les animaux qu'on appelle des bardots sont les produits d'une jument qui a été malade pendant la gestation. C'est à peu près ce que sont les nains dans l'espèce humaine ; et dans les porcs, l'arrière-faix des porcs. Le bardot, comme les nains, a une verge très grande. 3 Le mulet vit de longues années. On en cite un qui a atteint l'âge de quatre-vingts ans; il était à Athènes, à l'époque où l'on bâtissait le Temple ; on le laissait libre à cause de sa vieillesse ; mais il se faisait atteler avec les autres, et les accompagnant côte à côte, il excitait ses compagnons à l'ouvrage. Un décret prescrivit aux marchands de grains de ne pas le chasser quand il viendrait manger à leurs coffres. La mule vieillit plus tard que le mulet; et quelquefois on essaie d'expliquer cette différence en disant que la mule se purge par les urines qu'elle rend, et que le mulet vieillit plus tôt parce qu'il respire l'odeur de cette urine. 4 Voilà ce que nous avions à dire sur la génération de ces animaux. Quant à savoir si ces quadrupèdes sont plus jeunes ou plus vieux, les gens chargés de les soigner le reconnaissent en tirant un peu la babine; si la peau ainsi tirée revient vite, la bête est jeune; si elle reste un peu longtemps toute plissée, c'est que la bête est vieille. [6,25] CHAPITRE XXV. 1 La chamelle porte dix mois, et elle n'a jamais qu'un seul petit; car le chameau est une espèce qui n'en peut avoir qu'un. Quand le petit a un an, on le sépare des chamelles. La chamelle vit bien au delà de cinquante ans. Elle met bas au printemps; et elle a du lait jusqu'à une nouvelle gestation. La chair de la chamelle est excellente ; et son lait, le plus agréable de tous. On le boit en y mêlant de l'eau, deux parties contre une, ou trois contre une. 2 L'éléphant peut couvrir, ou la femelle être couverte, pour la première fois à vingt ans. Après que la femelle a élé couverte, la gestation est d'un an et six mois, selon les uns, ou de trois ans selon les autres. Ce qui fait que ce désaccord sur le temps de la gestation est possible, c'est qu'il n'est pas facile de voir l'accouplement. La femelle met bas en s'accroupissant sur ses jambes de derrière ; et il est évident qu'elle souffre beaucoup. Le petit, dès qu'il est né, tette avec sa bouche, et non avec sa trompe. Il marche aussi, et il voit clair, immédiatement après sa naissance. 3 Les femelles des sangliers sont couvertes au commencement de l'hiver; elles mettent bas au printemps, en se retirant dans les lieux les plus inaccessibles, surtout dans les roches à pic, dans les fondrières, et les bois les plus ombragés. Habituellement, le mâle reste trente jours avec les femelles. Le nombre des petits et le temps de la gestation sont les mêmes que pour les porcs domestiques. La voix des sangliers est à peu près celle des porcs ; si ce n'est que la femelle se fait entendre plus souvent, et le mâle plus rarement. Les sangliers, quand ils sont châtrés, deviennent plus gros ; mais ils deviennent aussi plus farouches ; et c'est ainsi {579a} qu'Homère a pu dire : « Il nourrissait, sur une litière, un sanglier qui ressemblait moins à une bête nourrie de grains qu'à une roche couverte de bois. » Ce qui fait qu'il y a des sangliers châtrés, c'est qu'il y en a qui, dans leur jeunesse, sont atteints aux testicules d'une démangeaison maladive ; et en se frottant contre les arbres, ils écrasent leurs testicules, qui les font souffrir. [6,26] CHAPITRE XXVI. 1 La biche est couverte, ainsi qu'on l'a dit plus haut, en essayant le plus souvent de se soustraire; car parfois la femelle ne peut supporter le mâle à cause de sa raideur. Quelquefois cependant, elles se laissent couvrir sans résistance, comme le font les brebis. Quand les biches sont en chaleur, elles s'évitent les unes les autres. 2 Le mâle aime à changer; et il ne reste pas avec une seule femelle ; après très peu de temps d'intervalle, il en recherche et en couvre d'autres. l'accouplement a lieu après le lever de l'Ârcturus, dans les mois de Boédromion et de Maemactérion ; la biche porte huit mois; il faut peu de jours pour qu'elle soit pleine, et un seul mâle couvre plusieurs femelles. 3 En général, la biche n'a qu'un faon; on en a vu pourtant, mais en bien petit nombre, en avoir deux. Elles déposent leurs petits dans le voisinage des chemins, par la crainte qu'elles ont des bêtes fauves. Les faons grandissent très vite. Dans les autres temps, la biche n'a pas de menstrues ; mais après qu'elle a mis bas, il y a une évacuation qui est de la nature du phlegme. 4 Elle a l'habitude de conduire ses faons dans ses stations. On entend par là le lieu qu'elle choisit comme un asyle, où elle peut fuir; c'est d'ordinaire un roc à pic, qui n'est abordable que d'un seul côté, et où elle peut se défendre contre les chasseurs qui la poursuivent. 5 On fait bien des contes sur la prétendue longévité du cerf; mais il n'y a rien de bien clair dans tout ce qu'on débite à ce sujet. La gestation des mères, la croissance des faons n'annoncent pas un animal qui doive vivre bien longtemps. 6 Dans la montagne qu'on appelle Élaphouse, et qui est en Asie, dans L'arginuse, où est mort Alcibiade, toutes les biches ont l'oreille fendue, de telle sorte qu'on les reconnaît sans peine, si elles viennent à changer de lieu. Les petits même dans le ventre de la mère ont déjà ce signe particulier. 7 Les biches ont quatre tettes aussi bien que les vaches. Dès qu'elles sont devenues pleines, les mâles s'en vont à part et restent entre eux. L'ardeur qui les pousse à s'accoupler fait que chacun d'eux, quand il est solitaire, {579b} creuse des trous dans le sol, et brame comme les boucs. Leurs fronts tout souillés de terre sont noirs comme ceux des boucs le sont aussi. 8 Cet état persiste jusqu'à l'époque des pluies; et plus tard, ils retournent à leurs pâturages. La cause de ces transports, c'est que cet animal est très lascif, et qu'il devient très gras et très lourd. Cet embonpoint excessif leur survient en été ; ils ne peuvent plus courir; et ils sont pris même par des chasseurs qui sont à pied, à la seconde ou à la troisième lancée. Ils vont se jeter dans l'eau à cause de la chaleur, afin d'y mieux respirer. 9 Au moment de la saillie, leur chair devient mauvaise et d'une odeur repoussante, dans le genre de celle des boucs. En hiver, ils deviennent maigres et faibles ; c'est au printemps qu'ils ont toute leur vigueur à la course. Dans leur fuite, ils font des pauses de temps à autre, et ils s'arrêtenl pour se reposer, jusqu'à ce que le chasseur qui les poursuit soit tout près; alors ils se remettent à fuir. Il est probable qu'ils sont obligés à ces temps d'arrêt, à cause de la souffrance intérieure qu'ils éprouvent. L'intestin du cerf est si mince et si faible que, même en frappant légèrement l'animal, le tissu du dedans se déchire, bien que la peau reste parfaitement intacte. [6,27] CHAPITRE XXVII. 1 Les femelles des ours reçoivent les mâles ainsi qu'on l'a dit plus haut, non point en les laissant monter sur elles, mais en restant couchées à terre. L'ourse porte trente jours ; elle a un ou deux petits, cinq tout au plus. L'ourson qui naît est très petit en proportion du corps de la mère ; il est moins gros qu'une belette, un peu plus gros qu'un rat; il est sans poil; il ne voit pas clair; ses pattes sont à peine formées, non plus que presque tous ses membres. 2 l'accouplement des ours a lieu dans le mois d'Élaphébolion; la femelle met bas vers l'époque où ces animaux se cachent et s'enfouissent. Dans cette saison, la femelle et le mâle deviennent excessivement gras. Quand la femelle a élevé ses petits, ils reparaissent au troisième mois du printemps. 3 La femelle du porc-épic se cache aussi, et porte trente jours tout comme l'ourse, à laquelle elle ressemble encore à d'autres égards. Il est très difficile de prendre une ourse qui soit pleine. [6,28] CHAPITRE XXVIII. 1 On a dît plus haut que le lion s'accouplait par derrière, et qu'il urinait par derrière aussi. Il ne couvre pas, et la femelle ne produit pas, en toute saison; cependant, c'est chaque année, et c'est au printemps que la lionne met bas. {580a} Le plus souvent, elle n'a que deux lionceaux ; le plus qu'elle en a, c'est six; parfois, elle n'en a qu'un seul. 2 On dit que la lionne, en mettant bas, perdait sa matrice ; c'est là un conte puéril, quoique souvent répété. Il est venu de ce que les lions étant rares, celui qui a imaginé cette rêverie n'avait aucune idée des choses. L'espèce des lions est en effet très rare ; elle ne se trouve pas en beaucoup de pays ; et dans toute l'Europe, il n'y en a qu'entre L'achélous et le Nessus. 3 Les petits lionceaux naissent si faibles que c'est à peine si, à deux mois, ils peuvent marcher. En Syrie, les lionnes portent cinq fois. La première portée est de cinq, et ensuite les autres portées diminuent d'un successivement ; à la fin, les lionnes ne portent plus, et elles finissent par être stériles. 4 La lionne n'a pas de crinière; le lion seul en a une. Le lion ne perd de ses dents que les quatre qu'on appelle canines, deux en haut, deux en bas. C'est à six mois qu'il les perd. 5 L'hyène a une couleur qui se rapproche de celle du loup; mais elle est plus velue, et elle a une crinière tout le long du rachis. Ce qu'on dit de ses parties génitales qui seraient à la fois celles du mâle et de la femelle, est parfaitement faux. La verge du mâle ressemble à celle des loups et des chiens ; et ce qu'on prend pour une vulve de femelle est placé au-dessous de la queue, assez semblable à une vulve de femelle par sa forme, mais sans la moindre ouverture. Au-dessous de ce prétendu organe, se trouve l'issue pour les excréments. 6 L'hyène femelle a également cette marque qui rappelle la vulve d'une femelle ; elle l'a bien aussi sous la queue, mais il n'y a non plus aucune ouverture. Après cette marque, vient l'ouverture pour les excrétions; et au-dessous de cette ouverture, la véritable vulve. L'hyène femelle a également une matrice, comme toutes les femelles des espèces organisées de cette façon. On prend d'ailleurs très rarement des hyènes femelles ; sur onze hyènes prises par un chasseur, il ne se trouvait qu'une seule femelle. 7 Les lièvres s'accouplent par derrière, comme on l'a déjà dit; le lièvre est un des animaux qui urinent par derrière. Ils couvrent, et les femelles sont couvertes, en tous temps ; les femelles déjà pleines se laissent couvrir de nouveau ; elles produisent tous les mois ; elles n'ont pas tous leurs petits à la fois, mais irrégulièrement, à quelques jours d'intervalle. {580b} 8 La femelle a du lait avant de mettre bas; aussitôt qu'elle est délivrée, elle se laisse couvrir, et elle reçoit le mâle, bien que les petits la tettent encore. Pour l'épaisseur, son lait est tout près de celui de la truie. Les petits du lièvre naissent aveugles, comme ceux de presque tous les animaux qui ont des pieds fendus. [6,29] CHAPITRE XXIX. 1 La femelle du renard est couverte par le mâle, montant sur elle. Ses petits ne voient pas en naissant, non plus que ceux de l'ourse, et ils sont encore plus difformes. Quand la femelle est près de mettre bas, elle change si bien de place, qu'il est très rare d'en prendre une qui soit pleine. Une fois qu'elle a mis bas, elle réchauffe ses petits en les léchant avec sa langue, et elle les forme. Elle en a tout au plus quatre. 2 La louve porte et produit tout à fait comme la chienne, pour le temps de la gestation, et pour le nombre des petits. Comme les petits de la chienne, les siens non plus ne voient pas clair en naissant. Le mâle et la femelle n'ont qu'une saison pour s'accoupler; et la femelle met bas au début de l'été. 3 On débite sur la génération du loup un dicton qui ressemble bien à une fable. On prétend que toutes les louves, sans exception, mettent bas, chaque année, dans l'espace de douze jours. L'explication mythologique qu'on en donne, c'est que, dans un même nombre de jours, elles accompagnèrent Latone, du pays des Hyperboréens à Délos, quand elle se transforma en louve par crainte de Junon. Si c'est bien là, ou si ce n'est pas là réellement la durée de la gestation, on n'a pas pu le vérifier jusqu'à ce jour ; c'est une simple assertion. Mais il ne semble pas qu'elle soit exacte, pas plus qu'il n'est vrai que la louve ne mette bas qu'une seule fois dans sa vie. 4 Les chats et les ichneumons font autant de petits que les chiens, et leur nourriture est la même. Ils vivent six ans environ. La panthère a des petits qui sont aveugles en naissant, comme en a le loup; elle en produit quatre tout au plus. Les chacals-femelles deviennent pleines comme les chiennes ; et elles ont des petits qui sont aveugles; elles en ont deux, trois ou quatre. Le chacal a le cou allongé vers la queue; mais il est moins haut. {581a} 5 On trouve en Syrie des animaux qu'on appelle des mulets, qui sont d'une autre espèce que celle des mulets issus de l'accouplement du cheval et de l'âne. Leur aspect est pareil, comme celui des ânes sauvages qu'on désigne par ce nom, à cause d'une certaine ressemblance qu'ils ont avec les ânes domestiques. Ces mulets ont, ainsi que les ânes sauvages, une vitesse supérieure ; ils se reproduisent entre eux. Ce qui le montre bien, c'est qu'on en amena quelques-uns en Syrie, du temps de Pharnace, père de Pharnabaze, et que la race y subsiste toujours. Aujourd'hui, il y en a encore trois ; mais jadis ils étaient, dit-on, au nombre de neuf. [6,30] CHAPITRE XXX. 1 La multiplicité des rats et la promptitude avec laquelle ils se reproduisent, sont vraiment étonnantes, entre tout le reste des animaux. Une femelle pleine avait été laissée par hasard dans un tonneau de millet; et peu de temps après, on trouva un nombre de cent vingt rats quand on ouvrit le tonneau. On ne peut pas se faire une idée de la reproduction des rats qui parcourent les champs, et du ravage qu'ils y causent. 2 Dans bien des localités, la quantité de rats des champs est si prodigieuse qu'il ne reste pour ainsi dire rien de tout le blé qu'on y récolte. La destruction qu'ils produisent est incroyablement rapide; et l'on a vu des cultivateurs de domaines peu étendus qui, jugeant la veille qu'il était temps de moissonner, ont trouvé le lendemain que tout était dévoré, lorsque, de grand matin, ils ont amené les moissonneurs. 3 La disparition des rats ne se comprend guère davantage. En quelques jours, il n'en reste plus un seul ; ils deviennent invisibles, tandis que, peu de jours auparavant, on ne savait comment s'en défaire, en enfumant leurs trous, en les bouleversant, en les chassant, et en lâchant des porcs, qui fouillent leurs nids. Les renards les chassent aussi, sans parler des belettes sauvages, qui les détruisent encore plus ; mais rien ne peut triompher de leur fécondité et de la rapidité avec laquelle ils se reproduisent. Il n'y a que les pluies qui puissent en avoir raison, quand elles surviennent; et alors, ils disparaissent non moins vite. 4 On prétend que, dans la Perse, il y a une contrée où, quand on ouvre une femelle, on trouve que les petites femelles embryonnaires sont déjà pleines. On dit aussi, et l'on affirme sérieusement, qu'il suffit aux femelles de lécher du sel pour devenir pleines sans accouplement. {581b} 5 En Egypte, les rats ont le poil si dur qu'on le prendrait pour les piquants du hérisson de terre. Il y a encore d'autres rats qui marchent sur deux pieds, parce qu'ils ont les parties antérieures du corps très petites, et que celles de derrière sont fort grandes. Ces rats pullulent aussi beaucoup. Il y a, d'ailleurs, bien d'autres espèces de rats en grand nombre.