[1,0] HISTOIRE DES ANIMAUX D'ARISTOTE - LIVRE PREMIER. [1,1] CHAPITRE PREMIER. § 1. (486b) (5) Entre les parties dont les animaux sont formés, il y en a qui ne sont pas complexes; ce sont celles qui peuvent se diviser en parties similaires, comme les chairs, qui se divisent toujours en chairs ; il y en a d'autres, au contraire, qui sont complexes, comme toutes celles qui se divisent en parties non similaires; et telles sont, par exemple, la main, qui ne se divise pas en plusieurs mains; ou le visage, qui ne se divise pas non plus en plusieurs visages. § 2. De ces parties non composées, il en est qu'on n'appelle pas seulement des parties, mais qu'on appelle plus proprement des membres ; ce sont en général (10) les parties qui, formant un tout complet, renferment encore en elles d'autres parties distinctes. C'est ce qu'on peut voir pour la tête, pour la jambe, pour la main, pour le bras pris dans son ensemble, pour la poitrine, puisque chacune de ces parties composent un tout, et qu'en outre, elles contiennent en elles d'autres parties encore. § 3. Toutes les parties non similaires se composent à leur tour de parties similaires : la main, par exemple, est composée de chair, de nerfs et d'os. § 4. II y a (15) des animaux chez qui toutes les parties sont mutuellement semblables ; il en est aussi chez lesquels elles sont fort différentes. Les parties sont spécifiquement les mêmes, comme le nez et l'œil d'un homme sont de même espèce que le nez et l'œil d'un autre homme; comme sa chair est semblable à la chair; et ses os, aux os. On en peut dire autant des chevaux, ou de tels autres animaux que nous trouvons (20) d'espèce identique les uns aux autres; car la ressemblance qui se manifeste de l'animal entier à un autre animal entier, se reproduit également entre chacune de leurs parties, les unes relativement aux autres. § 5. Toutefois ces parties, tout en étant pareilles dans tous les animaux d'un même genre, diffèrent néanmoins selon qu'elles sont plus grandes ou moins grandes. Quand je dis genre, j'entends par exemple, l'oiseau et le poisson. Ces deux êtres ont entre eux une différence de genre ; et chacun d'eux, dans leur genre particulier, ont encore d'autres différences, puisqu'il y a plusieurs espèces (25) de poissons et d'oiseaux. § 6. Dans ces genres mêmes, ce qui fait ordinairement les différences les plus sensibles entre presque toutes les parties, (5) outre les contrariétés de modifications dans la couleur et dans la forme, c'est que ces modifications affectent davantage certaines parties et qu'elles affectent moins les autres. C'est ainsi que ces différences se marquent par leur nombre plus grand ou plus petit, par les proportions de leur grandeur ou de leur petitesse, et en général par l'excès ou le défaut, c'est-à-dire le plus ou le moins. § 7. Il y a des animaux dont la chair est molle, d'autres dont la chair est dure ; (10) ceux-ci ont un long bec (comme les grues); chez ceux-là, le bec est court. Ici, le plumage est abondant; là, il est presque nul. Même dans certains genres, les parties sont différentes selon les espèces : ainsi, les uns ont des ergots, tandis que les autres n'en ont pas; les uns ont des crêtes, qui manquent aux autres. En un mot, ou la plupart des parties qui composent la masse entière (15) de l'animal peuvent être les mêmes ; ou elles peuvent différer par des qualités contraires, et des dimensions plus ou moins fortes. Le plus et le moins dans ces dimensions constitue ce qu'on peut appeler l'excès des unes et le défaut des autres. § 8. Dans quelques animaux, ce n'est pas l'identité des parties sous le rapport de l'espèce, ni l'identité selon le plus ou moins de grandeur, qu'il faut remarquer; c'est l'identité par simple analogie. Et, par exemple, l'os est analogue à l'arête, (20) l'ongle à la corne, la main à la pince, la plume à l'écaille, etc. ; car ce qu'est la plume dans l'oiseau, l'écaille l'est dans le poisson. Non seulement les parties dont se composent les animaux diffèrent entre elles, ou se ressemblent, comme on vient de le dire; mais elles se ressemblent encore ou diffèrent par leur position; car beaucoup d'animaux ont bien les mêmes parties, mais ces parties ne sont pas posées de même : par exemple, les mamelles sont placées (25) pour les uns sur la poitrine; pour les autres, elles sont placées entre les cuisses. § 9. Les parties similaires sont tantôt molles et liquides; tantôt, sèches et solides. Les parties liquides sont liquides d'une manière absolue, ou du moins tant qu'elles restent dans leur disposition naturelle; et tels sont le sang, la lymphe, la graisse, le suif, la moelle, le sperme, la bile, le lait, dans les animaux qui sécrètent ces matières, la chair et les (5) matières analogues. Dans une autre classe, on peut indiquer aussi les excrétions, telles que le phlegme, et tout ce que rejettent les intestins et la vessie. Les parties sèches et solides, ce sont, par exemple, les nerfs, la peau, les veines, les cheveux, les os, les cartilages, les ongles, les cornes. D'ailleurs, on se sert du même mot qui exprime la partie, quand, par sa forme, le tout doit être appelé aussi de la corne. Les parties molles et liquides, sèches et solides, sont encore tout ce qui correspond aux parties qu'on vient d'énumérer. (10) § 10. Les différences des animaux se montrent dans leur genre de vie, dans leurs actions, dans leur caractère, aussi bien que dans leurs parties. Traçons-en d'abord une esquisse générale; et plus tard, nous insisterons plus spécialement sur chaque genre. Les différences qui regardent la manière de vivre, (15) les actes et le caractère, tiennent à ce que les uns vivent dans l'eau ; et les autres, sur la terre. § 11. Parmi les animaux aquatiques, il y a deux espèces à distinguer. La première vit dans l'eau et s'y nourrit; elle absorbe le liquide et le rejette ; si elle vient à en manquer, elle ne peut plus vivre. C'est le cas de la plupart des poissons. La seconde espèce se nourrit aussi dans l'eau et y passe sa vie; (20) mais cependant elle ne respire pas l'eau; elle respire l'air et se reproduit hors du liquide. § 12. Bon nombre de ces derniers animaux sont pourvus de pieds, comme la loutre, le castor et le crocodile; ou aussi, pourvus d'ailes, comme la mouette et le plongeon. Quelques-uns se nourrissent également dans l'eau et ne peuvent vivre dehors ; (25) et pourtant, ils n'absorbent ni l'air, ni l'eau, comme l'ortie de mer et l'huître. Parmi les animaux aquatiques, les uns vivent dans la mer; les autres, dans les rivières; ceux-ci, dans les lacs; ceux-là, dans les mares, comme la grenouille et le cordyle. Les animaux marins habitent, tantôt la haute mer, tantôt les rivages et les rochers. § 13. Quant aux animaux terrestres, il y en a qui reçoivent l'air et le rejettent; c'est ce qu'on appelle aspirer et expirer; on observe ce phénomène dans (30) l'homme, et dans tous les animaux terrestres qui ont des poumons. D'autres au contraire n'absorbent pas l'air; mais ils vivent et trouvent leur nourriture sur le sol, comme la guêpe, l'abeille et les autres insectes. Par insectes, j'entends tous les animaux qui ont des sections dans leur corps, que ces sections soient sous le ventre seulement, ou qu'elles soient à la fois sous le ventre et aussi sur le dos. § 14. Ainsi qu'on vient de le dire, (487b) un grand nombre d'animaux terrestres tirent leur nourriture de l'eau; mais pas un seul animal aquatique, ou absorbant l'eau de mer, ne trouve sur terre ses aliments. Quelques animaux en petit nombre vivent d'abord dans l'eau, et changent ensuite de forme pour vire dehors; telles sont les empis ou mouches de rivière, d'où naissent les taons. § 15. Il est des animaux qui restent toujours en place; il en est d'autres qui en changent. Ceux qui restent immobiles sont dans l'eau; mais pas un seul animal terrestre n'est immobile. Dans l'eau, il y en a beaucoup qui continuent à vivre là où ils naissent, comme bien des espèces de coquillages. Même il semble que l'éponge a une sorte de (10) sensibilité; et ce qui le prouverait, c'est qu'elle est plus difficile à détacher, à ce qu'on prétend, quand on ne sait pas dissimuler le mouvement par lequel on la saisit. Il y a même aussi des animaux aquatiques qui sont attachés et qui se détachent, comme certaine espèce de ce qu'on nomme les orties de mer, qui, dans la nuit, se détachent du rocher pour aller chercher leur pâture. § 16. Beaucoup qui sont détachés sont néanmoins immobiles, comme les huîtres et (15) ce qu'on appelle les holothuries. Certains animaux aquatiques nagent, comme les poissons, les mollusques, et ceux dont l'écaille est molle, ainsi qu'elle l'est dans les langoustes; certains autres ont la faculté de marcher, comme l'espèce des crabes, qui, tout en étant naturellement aquatiques, n'en marchent pas moins sur terre. § 17. Les animaux terrestres peuvent tantôt voler, comme les oiseaux et les abeilles, qui d'ailleurs diffèrent les uns des autres (20) à bien des égards; et tantôt, ils se meuvent sur terre, soit qu'ils marchent, soit qu'ils rampent, soit qu'ils se roulent. Aucun animal n'est simplement volatile, de même que le poisson n'est doué que de la faculté de nager. En effet, les animaux qui ont des ailes membraneuses peuvent aussi marcher; la chauve- souris a des pieds, de même que le phoque a également des pieds, quoique mal conformés. Il y a encore quelques oiseaux qui ont des pieds très mauvais, (25) et que, pour cette raison, on appelle apodes, ou sans pieds. Par contre, ce genre d'oiseaux vole à merveille; et toutes les espèces qui leur ressemblent ont en général des ailes excellentes et des pieds très faibles, comme l'hirondelle et le martinet. § 18. Du reste, tous ces oiseaux, ayant les mêmes allures et le même plumage, se rapprochent beaucoup d'aspect entre eux. L'apode se montre en toute saison, tandis que le martinet (30) ne se montre qu'en été, quand il pleut: c'est alors qu'on le voit et qu'on le prend. D'ailleurs, c'est un oiseau qu'on aperçoit rarement. Il y a beaucoup d'animaux qui ont à la fois les deux qualités de pouvoir marcher et de pouvoir nager. § 19. Des différences se présentent aussi dans le genre de vie des animaux et dans leurs actes. Ceux-ci vivent en troupe; (488b) ceux-là sont solitaires, soit qu'ils marchent sur terre, soit qu'ils volent ou qu'ils nagent; d'autres ont indifféremment les deux genres de vie. Ceux qui vivent en troupe, tantôt sont organisés en sociétés fixes, tantôt ils sont errants. Les animaux vivant en troupe sont, par exemple, dans les volatiles, le genre des colombes, la grue, le cygne, (5) etc. Ceux qui sont munis d'ongles crochus ne vivent jamais en troupe. § 20. Parmi les poissons qui vivent en pleine mer, il y en a un bon nombre qui vivent en troupe, comme les dromades, les thons, les pélamydes, les amies ou bonitons. L'homme vit également des deux façons, ou en troupe, ou solitaire. Les animaux qui forment des sociétés sont ceux qui ont à faire un travail identique et commun; mais tous les animaux vivant en troupes ne forment pas des sociétés dans ce but. Au contraire, l'homme, l'abeille, (10) la guêpe, la fourmi, la grue forment des sociétés de ce genre; et de ces sociétés, les unes ont un chef, tandis que les autres n'en ont pas. Ainsi, la grue et l'espèce des abeilles ont un chef, tandis que les fourmis et tant d'autres n'en ont pas. § 21. Les animaux vivant en troupe et les solitaires, tantôt restent dans les mêmes lieux, et tantôt ils en changent. Les uns sont carnivores, (15) les autres frugivores; les uns mangent de tout ; les autres ont une pâture toute spéciale, comme les abeilles et les araignées. Les abeilles font leur nourriture du miel, et de quelques autres matières aussi douces; les araignées vivent des mouches qu'elles chassent. § 22. II y a des animaux qui se nourrissent de poissons. Il y en a qui sont chasseurs; (20) d'autres font provision d'aliments; d'autres n'ont pas ce soin. Les uns ont des demeures; d'autres n'en ont pas. Ainsi la taupe, le rat, la fourmi, l'abeille en ont; mais la plupart des insectes et des quadrupèdes s'en passent. Ceux-ci, comme le lézard et le serpent, vivent dans des trous; ceux-là, comme le cheval et le chien sont toujours à la surface de la terre. Les uns (25) se creusent des tanières; les autres ne s'en font pas. Les uns vivent toujours dans les ténèbres, comme la chouette et la chauve-souris; les autres, à la clarté du jour. § 23. De plus, tels animaux sont privés; tels autres sont sauvages. Les uns sont toujours privés, comme l'homme et le mulet; d'autres restent toujours sauvages, comme la panthère et le loup; d'autres encore sont susceptibles de s'apprivoiser très vite comme l'éléphant. A un autre point de vue, (30) toutes les espèces qui sont privées peuvent être sauvages aussi, comme les chevaux, les bœufs, les cochons, les moutons, les chèvres et les chiens. § 24. Il y a des animaux qui émettent des sons; d'autres sont muets. Parmi ceux qui ont une voix, les uns l'articulent; les autres produisent des bruits que les lettres ne peuvent représenter. Ceux-ci sont bavards; ceux-là sont silencieux; ceux-ci ont un chant; ceux-là n'en ont pas; mais une qualité commune à tous, (489a) c'est qu'ils chantent ou jasent bien davantage au temps de l'accouplement. Les uns se plaisent dans les champs, comme le ramier; d'autres, sur les montagnes, comme la huppe; d'autres vivent familièrement avec l'homme, comme le pigeon. Les uns sont lascifs, comme les perdrix et les coqs ; (5) les autres sont plus retenus, comme le corbeau et les espèces analogues, qui ne s'accouplent que de loin à loin. Parmi les animaux marins, les uns vivent en haute mer; les autres, sur les bords; d'autres, dans les rochers. Certains animaux se défendent et attaquent; certains autres se bornent à se garder; les animaux qui attaquent sont ceux qui dressent des pièges et qui se défendent quand ils sont attaqués; ceux qui se gardent (10) sont ceux qui ont en eux-mêmes un instinct qui les avertit du mal qui les menace. § 25. Le caractère des animaux n'offre pas moins de différences. Les uns sont doux et ne s'irritent presque jamais ; ils ne résistent pas ; tel est le bœuf. D'autres, au contraire, sont enclins à la fureur, à la résistance ; et l'on ne peut rien leur apprendre; tel est le sanglier. (15) Ceux-ci sont prudents et craintifs, comme le cerf et le lièvre; ceux-là sont vils et traîtres, comme les serpents. D'autres sont nobles, courageux et fiers, comme le lion. D'autres sont franchement féroces et rusés, comme le loup. J'entends par noble, en parlant d'un animal, celui qui sort d'une race bien douée; et j'entends par franc celui qui n'a rien perdu de la nature (20) qui lui est propre. § 26. Tel animal est plein d'activité et de malice, comme le renard ; tel autre, comme le chien, est plein de cœur, d'attachement et de fidélité. D'autres sont doux et faciles à apprivoiser, comme l'éléphant; d'autres, comme l'oie, sont timides et de bonne garde. D'autres sont jaloux et vaniteux, comme le paon. Entre tous les animaux, l'homme (25) seul a le privilège de la réflexion. Beaucoup d'animaux autres que lui ont également la faculté de se souvenir et d'apprendre; mais l'homme seul a le don de se ressouvenir à volonté. § 27. Nous reviendrons plus tard avec plus de précision encore sur ce qui regarde les diverses espèces d'animaux, et aussi sur le caractère et la façon de vivre de chacune de ces espèces. [1,2] CHAPITRE II. § 1. Tous les animaux ont certaines parties qui leur sont communes : celle par où ils prennent (30) leur nourriture, et celle où ils la reçoivent. Ces parties se ressemblent ou diffèrent entre elles, selon ce qu'on a déjà exposé, par la forme, par la dimension, par l'analogie et par la position. Mais outre ces parties que nous venons d'indiquer, la plupart des animaux ont aussi d'autres parties communes, qui leur servent à rejeter le résidu de la nourriture. (489b) Je dis la plupart, parce que tous n'ont pas cet organe. La partie qui sert à prendre la nourriture s'appelle la bouche: celle qui sert à la recevoir s'appelle l'intestin. Les autres parties ont des dénominations diverses. § 2. Le résidu excrété étant de deux natures, les animaux qui ont des organes destinés à recevoir l'excrétion liquide, en ont également pour l'excrétion sèche; (5) mais tous les animaux qui ont cette dernière n'ont pas l'autre excrétion. Ainsi, tous les animaux qui ont une vessie ont tous un intestin; mais ceux qui ont un intestin n'ont pas tous une vessie. Du reste, le nom de vessie s'applique à la partie qui reçoit l'excrétion liquide, et le nom d'intestin, à la partie qui reçoit l'excrétion sèche. § 3. Outre ces parties que possèdent beaucoup d'animaux, il y a la partie par laquelle ils émettent leur semence. (10) Parmi ceux qui ont la faculté de se reproduire, on distingue l'animal qui fait l'émission en lui-même, et celui qui la fait dans un autre. Celui qui la fait en lui-même s'appelle femelle; celui qui la fait dans un autre s'appelle mâle. Dans quelques espèces, il n'y a ni mâle ni femelle; et la forme des organes chargés de cette fonction diffère d'une espèce à l'autre. Certaines espèces ont une matrice; d'autres n'en ont pas. § 4. Les parties qu'on vient d'énumérer sont les plus nécessaires; aussi, elles se trouvent les unes dans tous les animaux, et les autres, au moins dans la plupart. [1,3] CHAPITRE III. § 1. Un seul et unique sens est commun à tous les animaux sans exception : c'est le toucher. L'organe dans lequel ce sens réside naturellement, n'a pas reçu de nom spécial, parce que, dans les uns, l'organe est identique, et que, dans les autres, c'est une partie simplement analogue. § 2. (20) Pareillement, tout animal sans exception a un fluide dont il ne peut être privé, soit naturellement, soit par violence, sans périr sur-le-champ; et il y a de plus la partie où ce fluide est renfermé. Chez les uns, la partie liquide est le sang, et le vaisseau est la veine; chez d'autres, c'est un fluide et un vaisseau équivalents. Lorsque ces matières sont imparfaites, c'est ce qu'on appelle la fibre et la lymphe. § 3. Quant au sens du toucher, il est placé dans une partie similaire, par exemple, dans la chair, ou dans quelque chose (25) qui la remplace. En général, chez les animaux qui ont du sang, le toucher est dans les parties sanguines ; et pour ceux qui n'en ont pas, dans la partie correspondante. Si pour tous les animaux, le toucher réside évidemment dans les parties similaires, les facultés actives résident dans les parties non-similaires; et, par exemple, l'élaboration des aliments a lieu dans la bouche; la fonction du mouvement pour changer de lieu se fait par les pieds, par les ailes, et par les organes qui y correspondent. (30) Il faut ajouter que certains animaux ont du sang, tels que les hommes, les chevaux et tous les animaux, qui, bien que d'une organisation complète, ou n'ont pas de pieds, ou en ont deux, ou en ont quatre. Au contraire, d'autres animaux, tels que l'abeille ou la guêpe, n'ont pas de sang; et parmi les animaux marins, tels sont la seiche et le crabe, et tous ceux qui ont plus de quatre pieds. [1,4] CHAPITRE IV. § 1. Les animaux sont vivipares, ovipares ou vermipares. L'homme, le cheval, (490a) le phoque et tous les animaux qui ont des poils, sont vivipares. Parmi les animaux marins, les cétacés, tels que le dauphin et les sélaciens ainsi appelés, sont vivipares également. § 2. De ces animaux marins, les uns ont le tuyau-souffleur et n'ont pas de branchies, comme le dauphin et la baleine. Le dauphin a le tuyau sur le dos, tandis que la (5) baleine l'a sur le front. D'autres ont des branchies apparentes, comme les sélaciens, les chiens de mer et les Batos. § 3. Parmi les germes qui sont complets, on appelle œuf ce qui contient deux parties : l'une qui sert d'abord à former l'animal, et l'autre où il trouve sa nourriture, une fois qu'il est produit. C'est un ver, lorsque, d'un animal complet, sort un autre animal également complet, l'embryon s'articulant et (10) se développant lui-même. § 4. Parmi les vivipares, il y en a qui font des œufs à l'intérieur d'eux-mêmes, comme les sélaciens; d'autres, comme l'homme et le cheval, font dans leur propre sein de petits animaux. § 5. Pour certains animaux, quand le germe qui s'est complètement formé se produit au jour, c'est un être vivant qui en sort; pour d'autres, c'est un œuf; pour d'autres, c'est un ver. § 6. Tantôt les œufs ont une enveloppe de coquille, comme ceux (15) des oiseaux, et ils sont de deux couleurs; tantôt leur enveloppe est molle, comme ceux des sélaciens, et ils n'ont qu'une couleur unique. § 7. Quant aux vers, les uns se meuvent aussitôt après leur naissance ; les autres sont immobiles. § 8. Mais ce sont là des sujets que nous traiterons avec plus de détails, quand nous nous occuperons de la Génération des Animaux. [1,5] CHAPITRE V. § 1. Certains animaux ont des pieds; d'autres n'en ont pas (5) ; et parmi ceux qui ont des pieds, il n'y a que l'homme et l'oiseau qui en aient deux. D'autres en ont quatre, comme le lézard et le chien; d'autres en ont davantage, comme la scolopendre et l'abeille. Mais dans tous les animaux, le nombre des pieds est toujours pair. § 2. Parmi les animaux qui nagent, tous ceux qui sont privés de pieds ont des nageoires, comme les poissons. Quelques-uns ont quatre (25) nageoires, dont deux en haut dans les parties supérieures, et deux en bas dans les parties inférieures, comme la dorade et le loup de mer. D'autres n'ont que deux nageoires seulement; et ce sont les poissons allongés et lisses, comme l'anguille et le congre. § 3. Il y a des poissons qui sont absolument dépourvus de nageoires, comme la murène; ceux-là se servent de l'eau, comme les serpents se servent de la terre; et ils se meuvent (30) de la même façon dans le liquide. § 4. Parmi les sélaciens, il y en a qui n'ont pas de nageoires; et ce sont ceux qui sont larges et pourvus de queue, comme la raie et la pastenague; ceux-là nagent grâce à leur largeur. Mais la grenouille de mer a des nageoires, ainsi qu'en ont tous les poissons dont la largeur ne va pas en s'amincissant. § 5. Ceux qui ont des apparences de pieds, comme les mollusques, se servent à la fois de ces pieds et de leurs nageoires; (35) et ils nagent plus rapidement sur le ventre, comme la seiche, le calmar et le polype; mais aucun des deux premiers ne peut marcher, comme le polype. § 6. Les crustacés, comme la langouste, nagent avec leur queue; mais ils nagent plus vite dans le sens de la queue, à cause des nageoires qu'elle porte. Le cordyle nage avec les pieds et la queue; et sa queue (5) ressemble à celle du Silure (ou Glanis), autant qu'une petite bête ressemble à une grande. § 7. Parmi les volatiles, les uns ont des plumes, comme l'aigle et l'épervier; d'autres ont des membranes, comme l'abeille et le hanneton; d'autres ont des ailes semblables à du cuir, comme le renard-volant et la chauve-souris. § 8. Tous les volatiles qui ont du sang ont des ailes de plume; les volatiles à ailes de cuir ont aussi du sang. Tous ceux qui n'ont pas de sang ont, comme les insectes, des ailes de duvet. § 9. (10) Les volatiles à ailes de plume et à ailes de cuir, ont deux pieds ou n'ont pas de pieds; et l'on affirme qu'en Éthiopie on trouve des serpents qui sont organisés de même. Les volatiles qui ont des ailes à plume s'appellent des oiseaux ; les deux autres espèces de volatiles n'ont pas reçu un nom spécial et unique, qui les comprendrait toutes les deux. § 10. Parmi les volatiles qui n'ont pas de sang, les uns ont un fourreau pour leurs ailes : ce sont les coléoptères, comme les hannetons et les scarabées. Les autres n'ont pas de fourreau ; et ils ont tantôt deux ailes et tantôt quatre. § 11. Les quatre ailes appartiennent à ceux qui sont d'une certaine grandeur, et qui ont un dard en arrière; ceux qui ne sont pas grands et qui ont le dard en avant, n'ont que deux ailes. § 12. Pas un seul coléoptère n'a de dard. Ceux des insectes (20) dont le dard est en avant n'ont que deux ailes, comme la mouche, le myope, le taon et le cousin. § 13. Tous les animaux privés de sang sont plus petits que ceux qui ont du sang, à l'exception de quelques animaux marins, qui, bien que privés de sang, n'en sont pas moins énormes, comme certains mollusques. Les plus grands animaux de ce genre se trouvent dans les pays les plus chauds ; et dans la mer, (25) les animaux sont toujours plus grands que sur terre et dans les eaux douces. § 14. Tous les animaux qui peuvent se mouvoir se meuvent par quatre points, ou plus. Les animaux qui ont du sang n'ont que ces quatre points; tel est l'homme, qui a deux mains et deux pieds. L'oiseau a deux ailes et deux pieds aussi. § 15. Les quadrupèdes et les poissons ont, les uns quatre pieds; les autres, quatre (30) nageoires. Ceux qui n'ont que deux nageoires, ou qui même n'en ont pas du tout, comme le serpent, n'en ont pas moins les quatre points, puisque les flexions du corps sont au nombre de quatre, ou de deux, avec deux nageoires. § 16. Tous les animaux qui, n'ayant pas de sang, ont plus de quatre pieds, qu'ils soient d'ailleurs volatiles ou qu'ils marchent sur terre, se meuvent par plus de quatre points de mouvement, comme l'animal qu'on nomme l'éphémère, qui a tout ensemble quatre pieds et (491a) quatre ailes; car celle bête a non seulement cette particularité d'existence qui lui a valu le nom qu'elle porte; mais de plus, elle a cette autre particularité d'être un volatile avec quatre pieds. § 17. Tous les quadrupèdes et les polypèdes se meuvent d'ailleurs d'une manière semblable : leur mouvement est diamétral; et tous (5) les animaux ont, pour leur locomotion, deux pieds qui la commandent tour à tour; il n'y a que le crabe seul qui ait quatre pieds de devant. [1,6] CHAPITRE VI. § 1. Les autres genres d'animaux les plus étendus et leurs divisions principales sont les oiseaux, les poissons et les cétacés. Tous ces animaux ont du sang. § 2. Un autre genre (10) est celui des testacés, qu'on appelle huîtres ou coquillages. Puis, le genre des animaux à coquilles molles (crustacés), pour lesquels il n'y a pas de nom unique qui les comprenne tous, tels que les langoustes, les cancres et les écrevisses; puis le genre des mollusques, comme la seiche, le grand et le petit calmar. Un autre genre est celui des insectes. § 3. Ces quatre genres sont tous privés de sang; et tous ceux d'entre eux qui ont des pieds (15) en ont un grand nombre. Parmi les insectes, quelques-uns sont volatiles. § 4. Les animaux autres que ceux-là ne forment pas de grandes classes ; car il n'y a plus pour eux de genre qui contienne plusieurs espèces. Parfois, l'espèce est simple et n'offre pas de différences spécifiques, comme pour l'homme, par exemple; d'autres fois, le genre renferme bien plusieurs espèces; mais elles n'ont pas reçu de nom particulier. § 5. Tous les quadrupèdes, qui ne sont pas (20) pourvus d'ailes, ont du sang; mais les uns sont vivipares; et les autres, ovipares. Les vivipares ne sont pas tous pourvus de poils; mais tous ceux des quadrupèdes qui sont ovipares ont des écailles, qui jouent un rôle semblable aux écailles des poissons. § 6. Le genre des serpents est sans pieds, quoique, par sa nature, il ait du sang et vive sur terre; leur peau est écailleuse. Tous les serpents (25) sont ovipares, excepté la vipère, qui est vivipare. § 7. D'ailleurs, tous les vivipares n'ont pas de poil; et c'est ainsi qu'il y a des vivipares parmi les poissons; mais les animaux qui sont pourvus de poils sont tous vivipares. Il faut du reste prendre aussi pour une espèce de poils ces poils en forme d'épines que portent les hérissons de terre et les porcs-épics. Ces épines en effet remplissent la fonction (30) de poils, mais non pas de pieds, comme celles des hérissons de mer. § 8. Dans le genre des quadrupèdes vivipares, il y a une foule d'espèces; mais elles n'ont pas reçu de nom ; on les désigne chacune pour ainsi dire comme on le fait pour l'homme, et l'on dit : le lion, le cerf, le cheval, le chien, et ainsi de suite. Cependant il y a un surnom (491b) commun pour le genre des animaux à queue de crins, qu'on appelle lophoures, comme le cheval, l'âne, le mulet, le bidet, le bardeau, et même les bêtes appelées hémiones en Syrie. Ces bêtes ont reçu ce nom à cause de leur ressemblance avec le mulet, bien que ce ne soit pas tout à fait la même espèce, puisque les hémiones s'accouplent et sont féconds entre eux. § 9. Nous aurons pour cette raison (5) à considérer chacun des animaux à part, pour étudier la nature de chacune de leurs espèces. § 10. Du reste, nous n'avons fait jusqu'à présent que tracer une simple esquisse, comme on vient de voir, pour donner un avant-goût des objets que nous traiterons et de la manière dont nous les traiterons. Plus tard, nous examinerons les choses plus en détail, afin de saisir d'abord les différences (10) réelles qui divisent les animaux et les conditions qui sont communes à tous. Ensuite, nous devrons nous efforcer de découvrir les causes de tous ces faits; car c'est ainsi qu'on peut se faire une méthode conforme à la nature, une fois qu'on possède l'histoire de chaque animal en particulier, puisqu'alors on voit aussi évidemment que possible à quoi il faut appliquer sa démonstration et sur quelle base elle s'appuie. § 11. Notre premier soin sera d'étudier les (15) parties dont se composent les animaux; car c'est là la plus grande et la première différence entre eux, selon qu'ils ont telles parties ou qu'ils ne les ont pas, selon la position et l'ordre de ces parties, ou selon qu'ils ont les premières différences qui ont été déjà mentionnées par nous : la forme de ces parties, leurs dimensions plus ou moins grandes, l'analogie, et la contrariété de leurs dispositions. § 12. Nous nous appliquerons donc tout d'abord à l'étude des parties (20) dont l'homme se compose; car de même qu'on estime la valeur des monnaies en les rapportant à celle qu'on connaît le mieux, de même il faut en faire autant pour toute autre chose. C'est l'homme qui nécessairement nous est le mieux connu de tous les animaux. Il suffit du témoignage de nos sens pour savoir quelles sont ses parties; mais cependant, pour ne rien omettre dans la suite de notre description et pour joindre à raison (25) aux données de l'observation sensible, nous parlerons en premier lieu des parties qui forment les organes de l'homme, et ensuite, des parties similaires. [1,7] CHAPITRE VII. § 1. Les parties principales entre lesquelles on peut diviser l'ensemble de notre corps entier sont : la tête, le cou, le tronc, les deux bras, les deux jambes; j'entends par le tronc toute la concavité qui s'étend du cou (30) jusqu'aux parties honteuses. § 2. Dans les parties de la tête, celle qui est couverte de cheveux s'appelle le crâne. Dans le crâne, la partie antérieure est la fontanelle, qui ne se produit que postérieurement, puisque c'est l'os de notre corps qui se solidifie le dernier. La partie du crâne placée en arrière est l'occiput; et la partie placée entre l'occiput et la fontanelle est le sommet du crâne. § 3. Sous la fontanelle, est placé le cerveau; et l'occiput (492a) est vide. Le crâne entier est un os complètement sec, arrondi, et enveloppé d'une peau qui n'a pas de chair. Chez les femmes, il n'y a qu'une suture, qui est circulaire; chez les hommes, il y a trois sutures, qui d'ordinaire se réunissent en une seule; cependant on a déjà vu un crâne d'homme qui n'avait (5) aucune espèce de suture. § 4. Le sommet du crâne est le centre et le point de séparation des cheveux. Chez quelques-uns, ce point est double ; et ces sujets ont alors deux sommets de la tête; non pas qu'il y ait deux os, mais il y a seulement deux points de séparation pour les cheveux. [1,8] CHAPITRE VIII. § 1. La partie de la tête placée au-dessous du crâne s'appelle le visage, expression qui s'applique à l'homme seul (10) parmi tous les animaux, puisqu'on ne dit pas le visage d'un poisson, ni d'un bœuf. La partie du visage placée sous la fontanelle et au-dessus des yeux est le front. Les hommes qui ont un grand front sont plus lents que les autres; ceux qui ont un front petit sont très vifs; ceux dont le front est large ont des facultés extraordinaires; ceux dont il est rond sont d'une humeur facile. § 2. Au-dessous du front sont les deux sourcils. (15) Quand les sourcils sont droits, c'est le signe d'une grande douceur; quand ils se courbent vers le nez, c'est un signe de rudesse. Infléchis vers les tempes, ils indiquent un esprit d'imitation moqueuse et de raillerie ; abaissés, ils indiquent un caractère envieux. § 3. Sous les sourcils sont placés les yeux. Naturellement, ils sont deux. Les parties de chaque œil sont les paupières, l'une en haut, l'autre en bas, garnies sur leur bord de poils (20), qui sont les cils. La partie centrale et liquide de l'œil par laquelle on voit est la pupille ; la partie qui l'entoure est noire ; et la partie extérieure à celle-ci est blanche. Une disposition commune aux deux paupières, supérieure et inférieure, ce sont les deux coins, l'un du côté du nez, l'autre du côté des tempes. Quand ces coins sont allongés, c'est le signe d'un caractère mauvais; quand leur chair est dentelée (25) comme les peignes, du côté du nez, cela indique une nature vicieuse. § 4. Toutes les espèces d'animaux ont des yeux, à l'exception des crustacés, ou de tel autre genre, aussi imparfait. Tous les vivipares en ont, excepté la taupe. On peut bien dire tout à la fois qu'elle a une sorte d'yeux, ou nier tout à fait qu'elle en ait. D'une manière absolue, elle ne (30) voit pas, et elle n'a pas certainement d'yeux qui soient apparents. Mais en lui enlevant la peau, on reconnaît qu'elle a la place des yeux, et les parties noires de l'œil, dans le lieu et à la position que la nature assigne aux yeux qui saillissent au dehors. On dirait que ceux de la taupe ont été mutilés au moment de la naissance, et que la peau a poussé par dessus. § 5. En général, le blanc de (492b) l'œil est pareil chez tous les hommes. Mais la partie qu'on appelle le noir offre de nombreuses différences. Chez les uns, elle est noire en effet; chez d'autres, elle est d'un bleu foncé; chez d'autres, d'un brun sombre; chez quelques-uns, elle est grise comme l'œil des chèvres. Cette dernière couleur est le signe d'un excellent caractère; et c'est aussi la couleur la plus favorable à une vue perçante. (5) Il n'y a que chez l'homme, ou plutôt c'est chez lui surtout, que la couleur des yeux varie tant. Les autres animaux n'ont qu'une seule couleur. Parfois les chevaux ont l'un des deux yeux de couleur bleue. § 6. Il y a des yeux qui sont grands ; d'autres sont petits; les meilleurs sont les yeux moyens. Tantôt les yeux sont très saillants; tantôt ils sont renfoncés; tantôt ils sont dans une position moyenne. Ce sont les yeux les plus renfoncés qui, dans tout animal, (10) ont la vue la plus perçante. La position moyenne indique un caractère excellent. § 7. Il y a des gens dont les yeux clignotent; d'autres, chez qui ils sont fixes, et d'autres dont les yeux ne sont, entre les deux, ni fixes ni mobiles. Cette disposition moyenne est encore l'indication d'une nature très bonne. Les uns ont des yeux impudents; et chez les autres, les yeux n'ont pas d'expression constante. [1,9] CHAPITRE IX. § 1. La partie de la tête par laquelle on entend, est l'oreille ; mais on ne respire pas par l'oreille ; et Alcméon n'est pas dans le vrai, quand il prétend que c'est par les oreilles que les chèvres (15) respirent. § 2. Des deux parties de l'oreille, l'une n'a pas de nom; l'autre s'appelle le lobe. Dans sa totalité, l'oreille est formée de cartilage et de chair. Le dedans de l'oreille est de sa nature pareil aux colimaçons; et le dernier os où le son pénètre, comme dans la cavité dernière, ressemble à l'oreille. § 3. L'oreille n'a pas d'orifice dans le cerveau; mais elle en a un (20) dans le voile du palais; et une veine partant du cerveau se rend à l'une et l'autre oreille. C'est aussi la disposition des yeux; ils communiquent avec l'encéphale; et ils sont tous deux placés sur une petite veine. § 4. De tous les animaux qui ont des oreilles, l'homme est le seul chez qui elle soit immobile; car parmi les animaux doués de l'organe de l'ouïe, les uns ont des oreilles; les autres n'en ont pas; et ils n'ont (25) à l'extérieur que le conduit auditif, comme tous les volatiles et les animaux à écailles. § 5. Tous les vivipares, excepté le phoque, le dauphin et les diverses espèces de sélaciens, ont des oreilles; car les sélaciens sont aussi des vivipares. Le phoque a des trous à l'extérieur qui lui permettent d'entendre. Le dauphin entend également, mais sans oreilles. (30) Tous les animaux remuent donc leurs oreilles; et l'homme est seul à ne pas les mouvoir. § 6. Les oreilles dans l'homme sont placées à la circonférence, sur la même ligne que les yeux; elles ne sont pas au-dessus, ainsi que dans quelques quadrupèdes. Il y a des oreilles sans poils; il y en a de velues; d'autres tiennent le milieu. Ce sont ces dernières qui ont l'ouïe la meilleure; mais tout cela n'indique rien pour le caractère. Il y a des oreilles grandes, petites, moyennes; quelquefois elles sont très proéminentes, (493a) ou ne le sont pas du tout, ou sont entre les deux. § 7. Les oreilles moyennes sont le signe d'un très bon caractère; les grandes oreilles, les oreilles relevées annoncent la loquacité et la sottise. La partie comprise entre l'œil, l'oreille et le sommet de la tête, s'appelle la tempe. § 8. (5) La partie du visage qui sert de passage à l'air, c'est le nez; c'est par le nez qu'on aspire et qu'on expire. C'est aussi par le nez que se fait l'éternuement, qui est l'expulsion de l'air accumulé; et c'est le seul parmi les vents de notre corps d'où on a tiré des présages sacrés. § 9. Mais il est certain que l'aspiration et l'expiration se font en même temps dans la poitrine, et que, sans (10) la poitrine, il serait impossible d'aspirer ou d'expirer par les narines seules, parce que c'est de la poitrine que l'aspiration et l'expiration viennent par le gosier, et qu'elles n'ont lieu par aucune partie de la tête. On peut vivre d'ailleurs sans faire usage de la respiration du nez. § 10. C'est aussi cet organe qui a le sens de l'odorat, et l'odorat n'est que la perception de l'odeur. Le nez peut se mouvoir; et il n'est pas immobile, (15) comme l'est particulièrement l'oreille. Une des parties du nez est un diaphragme, qui est un cartilage ; l'autre partie est un conduit qui est vide; car le nez a deux divisions. Dans l'éléphant, le nez est long et très fort; et il s'en sert comme d'une main. Il attire par cette sorte de main la nourriture (20) liquide ou sèche dont il a besoin; il la saisit et il la porte à sa bouche. Il est le seul des animaux à avoir cette conformation. § 11. L'homme a deux mâchoires; la partie de ces mâchoires qui s'avance davantage, c'est le menton ; l'autre qui est plus en arrière, c'est la mâchoire proprement dite. Tous les animaux ne remuent que la mâchoire inférieure, excepté le crocodile de rivière, qui est le seul à mouvoir la mâchoire d'en haut. § 12. Après (25) le nez, viennent les deux lèvres, qui sont de la chair d'une grande mobilité. La partie comprise en dedans des mâchoires et des lèvres, c'est la bouche, qui a elle-même deux parties, le palais et le pharynx. § 13. La langue a la perception du goût; et cette sensation a lieu surtout au bout de la langue; quand l'objet est posé sur la langue à sa partie plus large, la sensation est moins vive. La langue sent d'ailleurs aussi toutes les qualités des corps que sent le reste de la chair, la dureté, le chaud, (30) le froid ; et elle les sent tout aussi bien que les saveurs. § 14. La langue peut être large ou étroite, ou de grandeur moyenne. La langue de grosseur moyenne est préférable, et la prononciation est alors la plus nette possible; elle est encore, ou libre, ou embarrassée comme chez les bègues et les gens qui grasseyent. La chair de la langue est molle et spongieuse. L'épiglotte est une partie de la langue. L'amygdale dans la bouche est (493b) double; les gencives sont multipliées. Ces diverses parties sont charnues. En dedans des gencives, sont les dents, qui sont en os. En arrière de la bouche, il y a une autre partie qui porte le voile du palais et qui a la forme d'un grain de raisin; c'est un pilier couvert de veines. Si cette partie chargée de liquide vient à s'enflammer, c'est ce qu'on appelle le grain, et elle étouffe le malade. [1,10] CHAPITRE X. § 1. (5) Le cou est placé entre le visage et le tronc; sa partie supérieure est le larynx, et sa partie postérieure est l'œsophage. La partie du cou, cartilagineuse et antérieure, par où passent la voix et la respiration, s'appelle la trachée-artère. La partie charnue est l'œsophage; elle est située intérieurement, un peu en avant de la colonne dorsale. La partie qui est le derrière du cou s'appelle la nuque. Telles (10) sont les parties du corps jusqu'au tronc. § 2. Le tronc lui-même a des parties, dont les unes sont par devant; les autres, par derrière. Parmi les parties antérieures, on distingue la poitrine, qui a deux mamelles; le mamelon est double également; c'est par là que le lait distille chez les femmes. La mamelle est d'une chair molle. Les hommes aussi ont (15) du lait; mais chez l'homme, la chair des mamelles est ferme et dure, tandis que, chez la femme, elle est spongieuse et remplie de pores. § 3. Après le tronc, dans les parties de devant, vient le ventre; le centre ou la racine du ventre, c'est le nombril. Au-dessous de cette racine du ventre, vient le flanc qui est double; la partie au-dessous de l'ombilic ou nombril est simple; et c'est ce qu'on appelle l'abdomen, dont (20) l'extrémité est le pubis. La partie au-dessus du nombril est l'hypocondre. La partie commune à l'hypocondre et au flanc est la cavité qui renferme les intestins. § 4. La ceinture dans les parties postérieures est ce qu'on appelle le rein, qui tire son nom de ce qu'il semble être en effet une sorte de rainure. Dans les parties qui servent à l'expulsion des excréments, on distingue d'une part la fesse, qui sert à s'asseoir; et de l'autre, la cavité dans laquelle s'articule et roule la cuisse. § 5. Une partie spéciale (25) au sexe femelle, c'est-la matrice; et dans le sexe mâle, c'est la verge, le membre honteux, en dehors du tronc et en bas. La verge a deux parties; son extrémité qui est charnue, toujours sans poil, pour ainsi dire lisse et égale, s'appelle le gland. La peau placée autour du gland n'a pas de nom particulier; et quand on la coupe, elle ne peut plus se rejoindre, non plus que la joue et la paupière. La partie commune à cette peau et au gland est ce qu'on appelle le bourrelet. § 6. (30) Le reste de la verge est un cartilage, qui peut se gonfler beaucoup, qui sort et qui rentre, autrement que chez les animaux à queue garnie de crins. Au-dessous du membre honteux, se trouvent les deux testicules; et la peau qui les environne est ce qu'on nomme le scrotum. Les testicules ne sont pas précisément de la chair; mais ils ne sont pas non (494a) plus très éloignés d'en être. § 7. Du reste, nous reviendrons plus tard sur toutes ces parties, pour dire avec des détails plus précis quelle en est l'organisation. § 8. Les parties honteuses de la femme sont tout le contraire de celles des hommes; elles sont creuses sous le pubis ; et elles ne ressortent pas au dehors comme celles des hommes. L'urètre est en dehors (5) de la matrice; il est destiné à servir de conduit au sperme chez le mâle. D'ailleurs, c'est pour les deux sexes, mâle et femelle, le canal par où sort l'excrément liquide. § 9. Une partie commune du cou et de la poitrine, c'est la gorge ; une partie commune du côté, du bras et de l'épaule, c'est l'aisselle; de la cuisse et du bas-ventre, c'est l'aine ; de la cuisse et des fesses, en dedans, c'est le périnée; de la cuisse et (10) des fesses, en dehors, c'est le pli de la fesse. § 10. On vient de voir quelles sont les parties du tronc par devant. Le derrière de la poitrine est le dos. Les parties du dos sont les deux omoplates, et l'épine dorsale ou rachis. Les reins sont au-dessous du thorax à l'opposé du ventre. De haut en bas, sont rangées huit côtes de chaque côté. (15)Nous n'avons en effet aucun témoignage de quelque valeur sur les prétendus Ligyens qui n'auraient que sept côtes. [1,11] CHAPITRE XI. § 1. On distingue dans le corps de l'homme le haut et le bas, le devant et le derrière, la droite et la gauche. Les parties de gauche et de droite sont presque pareilles, dans les parties qui les composent, et elles sont toutes (20) les mêmes, si ce n'est que les parties gauches sont plus faibles. Mais les parties de derrière ne ressemblent pas à celles de devant; les parties d'en bas ne ressemblent pas à celles d'en haut. La seule ressemblance des parties placées au-dessous de l'hypogastre avec le visage, c'est qu'elles sont charnues ou maigres, comme il l'est lui-même; les jambes sont dans le même rapport avec les bras. Quand on a les bras courts, les cuisses sont également courtes d'ordinaire; (25) si l'on a de petits pieds, on a aussi de petites mains. § 2. En fait de membres, l'homme a deux bras; et chaque bras comprend l'épaule, le haut du bras, le coude ou olécrâne, l'avant-bras et la main. § 3. Dans la main, on distingue la paume, et les doigts au nombre de cinq; dans les doigts, on distingue encore la partie qui peut fléchir, l'articulation; et celle qui ne fléchit pas, la phalange. Le gros doigt, le pouce, n'a qu'une articulation; (30) les autres en ont deux. La flexion d'ailleurs se fait toujours en dedans, aussi bien pour le bras que pour les doigts. C'est au coude que se fait la flexion du bras. L'intérieur de la main, la paume, est charnu; et elle est partagée par plusieurs raies. Chez ceux qui doivent vivre longtemps, (494b) une ou deux de ces raies traversent toute la main; chez ceux dont la vie doit être courte, il y a deux raies, qui ne traversent pas la main entière. § 4. L'articulation de la main et du bras est le poignet, ou carpe ; le dessus de la main est composé de muscles et n'a pas reçu de nom spécial. § 5. Le membre autre que le bras est également double; c'est la jambe. On distingue, dans la jambe, (5) la cuisse, ou fémur, qui a deux têtes; la rotule qui a un siège mobile ; et la jambe proprement dite, qui a deux os. La partie antérieure de la jambe est le devant de la jambe; la partie postérieure est le gras de la jambe, qui est une chair pleine de muscles ou de veines. Tantôt cette partie est très relevée vers le jarret, chez ceux qui ont des fesses volumineuses; chez ceux qui ont au contraire de petites fesses, elle est plutôt abaissée. § 6. L'extrémité du devant de la jambe (10) est la cheville, qui est double à chaque jambe. § 7. Dans la jambe, c'est le pied qui a le plus grand nombre d'os. La partie postérieure du pied est le talon; la partie antérieure est divisée en cinq doigts. Le dessous du pied, ou poitrine du pied, est charnu; le dessus du pied, dans les parties supérieures, est musculeux, et il n'a pas de nom spécial. § 8. Dans chaque doigt du pied, on distingue (15) l'ongle et la jointure; l'ongle n'est jamais qu'à l'extrémité du doigt; et tous les doigts n'ont de flexion qu'en dedans. § 9. Quand on a l'intérieur du pied plein et non creux, et qu'on marche en l'appliquant tout entier, c'est un signe qu'on est rusé et capable de tout. § 10. Le genou et sa flexion appartiennent à la fois à la cuisse et à la jambe. [1,12] CHAPITRE XII. § 1. Toutes les parties que nous venons d'énumérer sont communes au mâle et à la femelle. (20) La position de toutes ces parties en haut et en bas, en avant et en arrière, à droite et à gauche, est de toute évidence ; et l'observation la plus simple nous fait connaître celles qui sont extérieures. Nous devons néanmoins en parler, par la même raison qui nous a porté à nous occuper de tout ce qui précède, afin que ce qui va suivre soit plus complet; et nous comptons ainsi les parties, (25) afin d'être moins exposé à oublier celles qui ne sont pas disposées chez le reste des animaux de la même façon que chez l'homme. § 2. C'est dans l'homme que les parties du haut et du bas se rapprochent plus directement que chez tous les autres animaux des lieux qui, dans la nature, indiquent le haut et le bas. Dans l'homme en effet (30) le haut et le bas sont en rapport étroit avec le haut et le bas de l'univers; chez lui encore, le devant et le derrière, la droite et la gauche sont selon l'ordre naturel. Quant aux autres animaux, ils n'ont pas ces distinctions; ou s'ils les ont, elles sont en eux bien plus confuses. § 3. Par exemple, tous les animaux ont la tête en haut relativement à leur corps; mais l'homme est le seul, ainsi qu'on l'a dit, qui, dans sa perfection, (495a) ait cette partie en rapport avec l'axe du monde. § 4. Après la tête, vient le cou ; et ensuite, la poitrine et le dos : l'une en avant, et l'autre par derrière. A ces parties, succèdent continûment le ventre, le pubis, les parties honteuses, le siège : puis encore, la cuisse et la jambe, et enfin les pieds. Les (5) jambes ont aussi la flexion en avant, sens où se fait également la marche, et où les pieds sont les plus mobiles et ont leur flexion. Le talon est le derrière du pied; et de chacun des deux côtés, sont placées les chevilles. § 5. Sur les côtés du corps, à droite et à gauche, sont les bras, qui ont leur flexion en dedans, de telle sorte que (10) les parties convexes des jambes et des bras se correspondent dans l'homme le plus complètement possible. § 6. Les sens et leurs organes, les yeux, le nez, la langue sont chez l'homme placés du même côté, c'est-à-dire en avant. L'ouïe, et son organe, les oreilles, sont placés de côté, mais sur la même ligne circulaire que les yeux. L'écartement des yeux est dans l'homme, comparativement à sa grandeur, moindre que chez tous les autres animaux. Le sens le plus développé chez l'homme, c'est le toucher; et en second lieu, le goût. Pour les autres sens, il est inférieur à bien des animaux. [1,13] CHAPITRE XIII. § 1. Les parties du corps humain qu'on distingue extérieurement, à première vue, (20) sont disposées comme on vient de le dire ; ce sont elles qui sont le plus ordinairement nommées, et qui sont les plus connues, par suite de l'habitude où l'on est de les voir. Les parties intérieures sont tout le contraire; car ce sont ces parties-là qui, pour l'homme, sont les moins connues. Aussi doit-on, en y rapportant les parties des autres animaux, savoir quelles sont celles dont elles se rapprochent le plus naturellement. § 2. Tout d'abord dans la tête (25) se trouve le cerveau, l'encéphale, placé dans la partie antérieure. Du reste, il en est de même dans tous les autres animaux qui sont pourvus de cet organe; et ces animaux-là sont tous ceux qui ont du sang, et aussi les mollusques. § 3. Proportionnellement, c'est l'homme qui a le cerveau le plus gros et le plus humide. Deux membranes l'enveloppent : l'une (30) plus solide, du côté de l'os; l'autre, posée sur le cerveau lui-même, est plus faible que la première. § 4. Chez tous les animaux, l'encéphale est double; et après le cerveau, vient, à la dernière place, ce qu'on appelle le cervelet, qui a une composition tout autre, soit au toucher, soit à la vue. Le derrière de la tête dans tous les animaux est vide et creux, variant selon la grosseur (495b) de chacun d'eux. Certains animaux ont la tête fort grosse, tandis que la partie inférieure de leur face est petite ; et ce sont tous ceux qui ont la face ronde. D'autres ont la tête petite, et de longues mâchoires; et tous les animaux à queue garnie de crins ont cette conformation. § 5. L'encéphale n'a pas de sang (5) chez aucun animal; et dans sa masse, il n'a point de veines. Quand on le touche, il est naturellement froid. Dans presque tous les animaux, il a un petit creux dans son centre ; et la méninge qui l'enveloppe est sillonnée de vaisseaux. La méninge qui enveloppe le cerveau est une membrane dans le genre de la peau. Au-dessus du cerveau, est la fontanelle, (10) qui est l'os le plus mince et le plus faible de toute la tête. § 6. De l'œil, trois conduits se rendent à l'encéphale ; le plus grand et le moyen vont jusqu'au cervelet; et le plus petit va dans le cerveau même; le plus petit conduit est le plus rapproché du nez. Les deux plus grands dans l'un et l'autre œil sont parallèles (15), et ne se rencontrent pas. Les conduits moyens se rejoignent, disposition qu'on remarque surtout chez les poissons; car ces conduits moyens sont plus près du cerveau que les grands conduits. Les plus petits conduits s'éloignent le plus complètement l'un de l'autre, et ne se touchent jamais. § 7. Au dedans du cou, se trouve l'organe appelé l'œsophage, l'isthme, qui tire son nom (20) de sa longueur et de son étroitesse. Là aussi, se trouve la trachée-artère. Dans tous les animaux qui ont une trachée, cette artère est placée en avant de l'œsophage ; et la trachée-artère existe dans les animaux qui ont aussi des poumons. La trachée-artère est un cartilage, qui, par sa nature, a peu de sang, bien qu'elle soit entourée d'un grand nombre de petites veines. Elle est placée dans (25) la partie supérieure de la bouche, à la communication de la bouche et du nez, de telle sorte que, quand en buvant on y attire une partie du liquide, c'est par cette communication qu'il ressort de la bouche dans les narines. § 8. Entre ces ouvertures, la trachée a cet organe qu'on nomme l'épiglotte, destinée à recouvrir l'ouverture de la trachée-artère, qui se rend (30) à la bouche. L'extrémité de la langue se rattache à la trachée, qui, de chaque côté, descend jusqu'entre les deux poumons; et de là, elle se partage dans chacune des deux parties dont le poumon se compose. § 9. Dans tous les animaux qui ont un poumon, il tend toujours à être divisé en deux parties. Dans les vivipares, cette division n'est pas toujours pareillement sensible; et c'est chez l'homme qu'elle l'est (496a) le moins. Chez lui, le poumon n'a pas plusieurs lamelles, comme dans quelques vivipares; il n'est pas uni; mais il a des inégalités. § 10. Dans les ovipares, tels que les oiseaux; et dans les quadrupèdes ovipares, chacune des deux parties sont très séparées l'une de l'autre, et l'on dirait (5) qu'il y a deux poumons. De la trachée, qui est unique, sortent deux canaux qui se rendent dans chacune des deux parties du poumon. Elle se rattache aussi à la grande veine (cave), et à ce qu'on appelle l'aorte. Quand on souffle dans la trachée-artère, le souffle se répand dans toutes les cavités du poumon. Ces cavités ont des cellules cartilagineuses, qui se réunissent en pointe; (10) et de ces cellules, partent des trous qui traversent toute l'étendue du poumon; et de plus petites cellules succèdent à de plus grandes. § 11. Le cœur se rattache aussi à la trachée-artère par des ligaments, graisseux, cartilagineux et fibreux; et là où le cœur se rattache à l'artère, il est creux. Si l'on souffle dans l'artère, on voit le vent passer dans le cœur, où il entre. Chez quelques animaux, (15) le phénomène n'est pas très-sensible; mais sur des animaux plus grands, il devient de toute évidence. § 12. Telle est donc la fonction de la trachée-artère; cette fonction consiste uniquement à recevoir l'air et à le rejeter, sans que la trachée-artère puisse recevoir ou renvoyer quoi que ce soit d'autre, ou solide ou liquide; dans ce dernier cas, on souffre jusqu'à ce qu'en toussant on ait rejeté le corps qui y était descendu. § 13. L'œsophage est rattaché (20) par en haut à la bouche ; il côtoie la trachée- artère ; et il y est soudé, ainsi qu'à la colonne vertébrale, par des ligaments membraneux. Après avoir traversé le diaphragme, il finit à l'estomac. II est de nature charnue ; et il est tendu dans sa longueur et sa largeur. § 14. L'estomac de l'homme ressemble à celui du chien; il n'est pas (25) beaucoup plus grand que l'intestin; et l'on dirait que c'est un intestin un peu plus large. Puis vient l'intestin simple, qui est enroulé, et qui est de largeur ordinaire. L'estomac inférieur ressemble à celui du porc ; il est large; et la partie qui va de l'estomac au siège est épaisse et courte. § 15. L'épiploon est suspendu au milieu du ventre. (30) Il est de sa nature une membrane graisseuse chez l'homme, aussi bien que dans tous les autres animaux qui n'ont qu'un seul estomac, et qui ont les deux rangées de dents. § 16. Sur les intestins, est le mésentère ; il est membraneux, large et gras. Il part de la grande veine et de l'aorte ; il est sillonné de veines (496b) nombreuses et épaisses, qui s'étendent le long des intestins, et qui, commençant en haut, descendent jusqu'au bas. § 17. Telle est donc l'organisation de l'œsophage ou estomac, de la trachée-artère et du ventre. [1,14] CHAPITRE XIV. § 1. Le cœur a trois cavités; il est placé plus haut (5) que le poumon, à la bifurcation de la trachée-artère; il a une membrane grasse et épaisse, là où il se rattache à la grande veine et à l'aorte ; il repose sur l'aorte ; et sa pointe est tournée vers la poitrine, comme dans tous les animaux qui ont une poitrine ; (10) car dans tous les animaux, qu'ils aient ou qu'ils n'aient pas cet organe, la pointe du cœur est toujours dirigée en avant; mais on peut souvent s'y tromper, parce qu'elle s'affaisse dans la dissection. La convexité du cœur est en haut; ordinairement la pointe est charnue et épaisse; et il y a des muscles dans ses cavités. § 2. Dans tous les autres animaux qui ont une poitrine, la position du cœur (15) est au milieu de cet organe ; chez l'homme, il est plus à gauche, à peu de distance de la ligne qui divise les mamelles, incliné vers la mamelle gauche, dans le haut de la poitrine. Le cœur de l'homme n'est pas grand; dans sa totalité, il n'est pas allongé; il serait plutôt arrondi, si ce n'est que son extrémité se termine en pointe. § 3. Comme nous venons de le dire, il a trois (20) cavités; la plus grande est à droite; la plus petite est à gauche; et la cavité de grandeur moyenne est dans le milieu. Toutes ces cavités, y compris les deux plus petites sont en communication avec le poumon; c'est ce que l'insufflation démontre clairement pour une des cavités d'en bas. § 4. (25) Par sa plus grande cavité, le cœur se rattache à la grande veine, près de laquelle est aussi le mésentère ; et par sa cavité moyenne, il se rattache à l'aorte. § 5. Des canaux vont du cœur au poumon; et ces canaux se ramifient, comme la trachée-artère, accompagnant ceux qui viennent de la trachée, dans toute l'étendue (30) du poumon. Les canaux partant du cœur occupent le dessus; entre la trachée et le cœur, pas un seul de ces vaisseaux n'est commun; mais par la connexion, ils reçoivent l'air, et ils l'envoient jusqu'au cœur. L'un de ces canaux se rend à la cavité droite; et l'autre, à la cavité gauche. § 6. Plus loin, nous nous occuperons de la grande veine et de l'aorte, (497a) prises chacune à part; et nous les étudierons aussi toutes les deux à la fois, dans ce qu'elles ont de commun. § 7. C'est le poumon qui a le plus de sang de tous les organes, dans les animaux qui ont un poumon, et qui sont vivipares, soit en eux-mêmes, soit au dehors. Dans sa masse entière, le poumon est spongieux; et les vaisseaux de la grande veine accompagnent chaque bronche. Mais ceux qui croient (5) que le poumon est vide de sang ont été trompés, en ne regardant que les poumons enlevés aux animaux d'où le sang s'était échappé en totalité, aussitôt qu'ils avaient été découpés. § 8. Entre tous les viscères, le cœur est le seul à avoir du sang ; car le poumon n'en a pas précisément en lui-même; il n'en a que dans les veines qui le traversent. Au contraire le cœur a du sang en lui-même, puisqu'il en a dans chacune de ses cavités. Le sang le plus léger (10) est dans la cavité du milieu. § 9. Au-dessous du poumon, est la ceinture du tronc, et ce qu'on appelle les reins, qui tiennent aux côtes, aux hypocondres et à l'épine dorsale. Dans son milieu, le diaphragme est mince et membraneux. Il est traversé de part en part de veines, qui, dans le corps de l'homme, (15) sont très fortes en proportion de sa taille. § 10. Sous le diaphragme, à droite est le foie ; à gauche, est la rate. La position de ces organes est toujours la même dans tous les animaux qui en sont pourvus, quand ils sont conformés d'une manière naturelle et qu'ils ne présentent pas de monstruosité; car on a déjà vu quelquefois des quadrupèdes où ces organes étaient dans une position absolument inverse. Le foie et la rate se rattachent (20) au bas de l'estomac par l'épiploon. § 11. A la voir, la rate de l'homme est étroite et longue comme celle du porc. Ordinairement et dans presque tous les animaux, le foie est sans bile, sans fiel; dans quelques-uns, il y en a, le foie de l'homme étant d'ailleurs arrondi et pareil à celui du bœuf. Cette absence de fiel peut se remarquer (25) sur les victimes, de même que, dans une région aux environs de Chalcis en Eubée, les moutons n'ont pas de fiel. Au contraire, à Naxos, la plupart des quadrupèdes ont une si grande quantité de fiel que les étrangers qui y font des sacrifices en sont tout effrayés, croyant que c'est un présage qui leur est personnel, et ne sachant pas que c'est la nature particulière de ces bêtes. § 12. Le foie se rejoint à la grande (30) veine ; mais il ne communique pas avec l'aorte; car la veine qui sort de la grande veine traverse le foie tout entier, au point où sont ce qu'on appelle les portes du foie. La rate ne se rattache absolument qu'à la grande veine ; car une veine partant de celle-là vient dans la rate. § 13. Après ces organes viennent les reins, ou rognons, qui sont situés près de la colonne dorsale directement, et qui ressemblent beaucoup, dans leur nature, à ceux du bœuf. Dans tous les animaux qui ont des rognons, le droit est toujours plus élevé (497b) que le gauche; il a moins de graisse, et il est plus sec. Cette conformation est dans tous les autres animaux semblable à ce qu'elle est chez l'homme. Des vaisseaux, partant de la grande (5) veine et de l'aorte, se rendent dans les reins, mais non dans leur cavité; car les reins ont une cavité dans leur centre, plus grande chez les uns, plus petite chez les autres, excepté pourtant chez le phoque, qui a les reins pareils à ceux du bœuf, et les plus compacts de tous. § 14. Les vaisseaux qui se rendent dans les reins se perdent dans le corps des reins mêmes; et la preuve qu'ils (10) ne les traversent pas, c'est que les reins n'ont pas de sang, et que le sang ne s'y coagule jamais. § 15. Les reins ont, ainsi qu'on vient de le dire, une petite cavité; et de cette partie creuse des reins, deux canaux assez petits se rendent dans la vessie, ainsi que d'autres canaux très forts et parallèles, qui partent de l'aorte. Du milieu de chacun des deux reins, une veine grosse et musculeuse part (15) pour se diriger le long du rachis même, en passant par un espace très étroit. Ensuite, ces deux veines disparaissent dans chacune des hanches et reparaissent de nouveau, s'étendant sur la hanche. § 16. Ces divisions des veines descendent dans la vessie ; car la vessie est placée tout à fait la dernière. Elle est suspendue aux canaux qui se dirigent des reins le long (20) de la tige qui se rend à l'urètre. La vessie est presque tout entière enveloppée, dans sa rondeur, de petites membranes légères et fibreuses, qui se rapprochent, on peut dire, de l'organisation du diaphragme du thorax. La vessie dans l'homme est d'une médiocre grandeur. § 17. Auprès du col de la vessie, (25) s'attache le membre honteux, qui est nerveux et cartilagineux. L'orifice le plus extérieur s'ouvre dans le membre même. Un peu plus bas, l'un des conduits se rend aux testicules; l'autre, à la vessie. De ce membre, pendent les testicules chez les mâles nous dirons plus loin quelle en est l'organisation, quand nous traiterons des organes communs (30) aux différentes espèces. § 18. Dans la femme, tout est naturellement pareil à ce qu'on voit dans l'homme; la seule différence consiste dans la matrice. On peut voir quelle en est la forme apparente d'après le dessin qui est dans les ouvrages d'Anatomie. La position de la matrice est dans les intestins; et la vessie est placée derrière la matrice. § 19. Nous aurons encore, dans ce qui va suivre, à parler des matrices des animaux en général ; (35) les matrices ne sont pas les mêmes dans tous, et elles ne sont pas disposées de même. (498a) Mais en ce qui concerne les parties intérieures et extérieures du corps de l'homme, on vient de voir ce qu'elles sont, comment elles sont, et quelle en est l'organisation.