Langue |
Latin |
Auteur |
Pétrarque |
Références |
Lettres à Boccace [partim], XI |
Sujet |
A propos de la passion d'apprendre jusque tard dans la vie |
Descripteurs |
apprendre; vieillesse; vie; savoir; mort; |
Hypertexte |
http://agoraclass.fltr.ucl.ac.be/concordances/intro.htm#petrarque |
Extrait Latin |
(53) Quod nisi sic esset, non illa pertinax ad extremum tam laudata foret industria
multorum, preter enim quod Cato latinas literas iam senescens et grecas uero iam
senex didicit; quod Varro ad centesimum uite annum, legendo semper ac scribendo,
perueniens, uitam prius quam amorem deposuit studiorum; quod Liuius Drusus
senio ac cecitate confectus iuris ciuilis interpretationem utilissimam rei
publice non omisit; (54) quod Appius Claudius iisdem pressus incommodis eadem
fuit perseuerantia; quod Homerus apud Grecos idem passus, idem prestitit alioque
rerum licet in genere, par industrie genus exhibuit; quod Socrates iam senior musice
operam dedit; (55) quod Chrisippus ceptum iuuentute media opus acutissimum
ultima uix explicuit senectute; quod oratorium Ysocrates, tragicum Sophocles,
uolumen utrunque nobilissimum, ille quartum et nonagesimum, hic prope
centesimum agens annum scripsit; (56) quod studii amor ingens et Carneadem
senem cibi et Archimedem uite reddidit negligentem; quod Cleantem apud illos
amor idem cum inopia primum, post cum senio, apud nos Plautum compulit cum
paupertate simul ac senectute luctari; quod Pithagoram, quod Democritum, quod
Anaxagoram, quod Platonem per omnes terras perque omnia maria, periculorum
immemores ac laborum, non habendi, ut multos, sed discendi ardor impulit; (57)
quod Plato ipse senex, supremo eodemque natali suo die uel literis incumbens, uel,
ut alii uolunt, scribens, philosophie amicum spiritum exalauit; quod Philemon
meditabundus ac libro incumbens, sociis illum expectantibus, pyeriam animam
emisit, etsi de hoc alia ridiculosior fama est; quod ad extremum, is qui persepe michi
nominandus occurrit, Solon, semper noui aliquid addiscens, senuit atque obiit nec
generosum discendi desiderium mors extinxit.
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Traduction française |
S'il n'en était pas ainsi, on n'aurait pas tant loué le zèle de plusieurs qui persévérèrent
jusqu'à la fin.Caton, je ne l'ai point oublié, apprit les lettres latines en commençant à
vieillir et les lettres grecques déjà vieux. Varron, parvenu à sa centième année en
lisant eten écrivant toujours, quitta la vie plutôt que l'amour de l'étude. Livius
Drusus, affaibli par l'âge et la cécité, ne cessa pas d'interpréter le droit civil, au grand
profit de la république. Appius Claudius, accablé des mêmes incommodités, eut la
même persévérance. Homère, chez les Grecs, également vieux et aveugle, en fit
autant, et, quoique dans un autre genre d'études, montra un genre d'application
semblable. Socrate, déjà vieux, s'adonna à la musique. Chrysippe acheva à peine dans
une extrême vieillesse un ouvrage très difficile qu'il avait commencé au milieu de sa
jeunesse. Isocrate, âgé de quatre-vingt-quatorze ans, et Sophocle de près de cent ans,
ont écrit d'une façon très remarquable, l'un un discours, l'autre une tragédie. Un
grand amour de l'étude fit négliger au vieux Carnéade sa nourriture, et à Archimède
sa vie. Le même amour poussa Cléanthe, chez les Grecs, à lutter d'abord contre les
privations, ensuite contre la vieillesse; il obligea Plaute, chez nous, à lutter en même
temps contre la pauvreté et la vieillesse. Pythagore, Démocrite, Anaxagore, Platon,
furent entraînés, par le désir ardent non de posséder, comme tant d'autres, mais
d'apprendre, à travers toutes les mers et tous les continents, oublieux des dangers et
des fatigues. Platon lui-même, le dernier jour de sa vie, qui était celui de sa naissance,
rendit son âme amie de la philosophie, soit en lisant, soit, comme d'autres le
prétendent, en écrivant. Philémon, méditant et penché sur un livre, rendit son âme
poétique pendant que ses compagnons l'attendaient, quoiqu'on ait répandu sur sa
mort un autre bruit ridicule. Enfin Solon, dont le nom s'offre souvent à ma pensée,
vieillit et mourut en apprenant toujours quelque chose de nouveau, et la mort
n'éteignit point sa noble passion d'apprendre.
Trad. : Victor DEVELAY, Lettres de François Pétrarque à Jean Boccace. Paris, Flammarion, 1891 |
Date : |
10-07-2007 |
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