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Date :     17-02-2012

Sujets :
Lecture : MUSONIUS et la science intempestive (L. JERPHAGNON) ; Lecture : CELSE et le profil d'un chirurgien ; Lecture : CICÉRON : si tu ne sais pas d'où tu viens, tu seras toujours un enfant ; ITINERA ELECTRONICA : 7 nouveaux environnements hypertextes : Adamnan d'Iona, René Descartes, Grégoire de Tours, Nicolas de Cues, Nithard, Raoul Glaber, Stace ;

Notice :

1. Lecture : MUSONIUS et la science intempestive (L. JERPHAGNON) :

Livre : Lucien JERPHAGNON, Connais-toi toi-même ... et fais ce que tu aimes.
Paris, Albin Michel, 2012, 377 pp.

Extrait : pp. 27-29:

" ... Dernier épisode : on est au VIe siècle, sous Justinien. Derniers feux de l'empire, derniers efforts pour la reconquête territoriale et la réunification de ce que les siècles ont dispersé. Cela même se traduit sur tous les plans : militaire, policier, juridique, et bien sûr religieux, l'unité religieuse garantissant, dans la tradition romaine, l'unité politique. Redoutant le danger que représentait selon lui le prestige de la pensée païenne, Justinien décrète en 529 la fermeture de l'école d'Athènes et, trois ans plus tard, il confisque les biens des platoniciens.
«Nous interdisons, dit le texte, qu'aucun enseignement soit professé par ceux qui sont malades de la folie sacrilège des Hellènes » – entendez : la philosophie et le droit. A la conversion, Damascios et les derniers penseurs préférèrent l'exil chez les Perses.
Cette liste ne se prétend pas exhaustive. Étrangère aux différends de personne à personne, comme il arriva plus d'une fois, elle retient tout juste les conflits entre deux entités. D'une part, les pouvoirs politiques, toujours décidés à faire prévaloir dans la pensée commune les valeurs, les fantasmes, les automatismes de leur choix, toutes choses devant aller de soi indéfiniment. D'autre part, il y avait ces intellectuels aussi divers que les écoles de pensée dont ils se réclamaient, et qui attestaient qu'une autre vision du monde était possible, génératrice de comportements différents. Engendrée par les philosophes, une autre organisation du monde se profilait, là où précisément tout était censé aller de soi et pour toujours. Cela, des pouvoirs apparemment aussi divers que la Rome républicaine, la Rome des Césars, l'empire chrétien d'Orient, l'avaient pareillement compris. Tous avaient évalué la portée de semblables initiatives, et leurs conséquences pratiques, ce qui chaque fois s'était traduit en termes de périls qu'il fallait conjurer par décret. Née de l'étonnement, la sagesse des penseurs pouvait-elle apparaître rassurante aux yeux de dirigeants ? A tout le moins, pour reprendre le mot de Tacite que je cite en exergue, rappelant l'aventure du stoïcien Musonius, qui, en pleine crise de régime, se mêlait aux soldats pour les moraliser, et s'en était tiré de justesse, il était fatal que la philosophie apparût hors de saison, intempestiua sapientia. Au reste, ne l'est-elle pas toujours ? Socrate l'a su mieux que personne. ..."

Témoignage :

Tacite, Histoires, III, 81 :

[3,81] Miscuerat se legatis Musonius Rufus equestris ordinis, studium philosophiae et placita Stoicorum aemulatus; coeptabatque permixtus manipulis, bona pacis ac belli discrimina disserens, armatos monere. id plerisque ludibrio, pluribus taedio: nec deerant qui propellerent proculcarentque, ni admonitu modestissimi cuiusque et aliis minitantibus omisisset intempestiuam sapientiam. obuiae fuere et uirgines Vestales cum epistulis Vitellii ad Antonium scriptis: eximi supremo certamini unum diem postulabat: si moram interiecissent, facilius omnia conuentura. uirgines cum honore dimissae; Vitellio rescriptum Sabini caede et incendio Capitolii dirempta belli commercia.

[3,81] LXXXI. Aux députés s'était joint Musonius Rufus, chevalier romain, qui se piquait de philosophie et professait les maximes du portique. Mêlé parmi les soldats, il allait dissertant sur les biens de la paix et les dangers de la guerre, et faisait la leçon à des disciples armés. Il fit rire les uns, fatigua le plus grand nombre ; et il ne manquait pas de gens qui allaient courir sur lui et le fouler aux pieds, si lui-même, cédant aux avis des plus sensés et aux menaces des autres, n'eût laissé là sa morale intempestive. Vinrent ensuite les vierges Vestales avec des lettres de Vitellius à Antoine : il y demandait "qu'une trêve d'un seul jour suspendit le combat décisif ; pendant cet intervalle tout pourrait se concilier." Les Vestales furent congédiées avec honneur. On répondit à Vitellius que le meurtre de Sabinus et l'incendie du Capitole avaient rompu tout commerce entre les deux partis.


2. Lecture : CELSE et le profil d'un chirurgien :

Celse, De la médecine, VII , 1 :

… <4> Esse autem chirurgus debet adulescens aut certe adulescentiae propior; manu strenua, stabili, nec umquam intremescente, eaque non minus sinistra quam dextra promptus; acie oculorum acri claraque; animo intrepidus; misericors sic, ut sanari uelit eum, quem accepit, non ut clamore eius motus uel magis quam res desiderat properet, uel minus quam necesse est secet; sed perinde faciat omnia, ac si nullus ex uagitibus alterius adfectus oriatur. …

. . . Il faut que le chirurgien soit jeune ou voisin encore de la jeunesse ; il doit avoir la main exercée, ferme, jamais tremblante, et se servir aussi facilement de la gauche que de la droite; sa vue sera nette et perçante, son cœur inaccessible à la crainte ; et, dans sa pitié, se proposant avant tout de guérir le malade, loin de se laisser ébranler par ses cris au point de montrer plus de précipitation que le cas ne l'exige ou de couper moins qu'il ne faut, il réglera son opération comme si les plaintes du patient n'arrivaient pas jusqu'à lui. . . .


3. Lecture : CICÉRON : si tu ne sais pas d'où tu viens, tu seras toujours un enfant :

Dans le journal LE MONDE, édition du 9 février 2012, a paru un article intitulé : "En renonçant aux humanités classiques, la France renonce à son influence".

Adresse sur la Toile :
http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/02/08/en-renoncant-aux-humanites-classiques-la-france-renonce-a-son-influence_1640427_3232.html

Nous avons numérisé la page de cet article :
http://itinera.fltr.ucl.ac.be/actualites/monde_humanites.pdf

A un moment donné, il y est dit :

" ... Pour Cicéron, si tu ne sais pas d'où tu viens, tu seras toujours un enfant. C'est-à-dire un être sans pouvoir, sans discernement, sans capacité à agir dans le monde ou à comprendre son fonctionnement ..."

Il n'a pas été difficle de retrouver le texte de Cicéron ainsi cité :

Cicéron, L'Orateur, XXXIV, 119-121 :

[34] XXXIV. (119) De materia loquor orationis etiam nunc, non de ipso genere dicendi. Volo enim prius habeat orator rem de qua dicat, dignam auribus eruditis, quam cogitet quibus uerbis quidque dicat (aut quo modo) - quem etiam, quo grandior sit et quodam modo excelsior, ut de Pericle dixi supra, ne physicorum quidem esse ignarum uolo. Omnia profecto, cum se a caelestibus rebus referet ad humanas, excelsius magnificentiusque et dicet et sentiet. (120) Cum illa diuina cognouerit, nolo ignoret ne haec quidem humana. Ius ciuile teneat, quo egent causae forenses cotidie. Quid est enim turpius quam legitimarum et ciuilium controuersiarum patrocinia suscipere, cum sis legum et ciuilis iuris ignarus? Cognoscat etiam rerum gestarum et memoriae ueteris ordinem, maxime scilicet nostrae ciuitatis, sed etiam imperiosorum populorum et regum inlustrium; quem laborem nobis Attici nostri leuauit labor, qui conseruatis notatisque temporibus, nihil cum inlustre praetermitteret, annorum septingentorum memoriam uno libro conligauit. Nescire autem quid ante quam natus sis acciderit, id est semper esse puerum. Quid enim est aetas hominis, nisi ea memoria rerum ueterum cum superiorum aetate contexitur? Commemoratio autem antiquitatis exemplorumque prolatio summa cum delectatione et auctoritatem orationi adfert et fidem. (121) Sic igitur instructus ueniet ad causas, quarum habebit genera primum ipsa cognita. Erit enim ei perspectum nihil ambigi posse in quo non aut res controuersiam faciat aut uerba: res aut de uero aut de recto aut de nomine, uerba aut de ambiguo aut de contrario. Nam si quando aliud in sententia uidetur esse aliud in uerbis, genus est quoddam ambigui quod ex praeterito uerbo fieri solet, in quo quod est ambiguorum proprium res duas significari uidemus.

[34] XXXIV. Je parle ici des matériaux du discours, et non de la mise en oeuvre, car je veux que l'orateur se soit assuré d'un fond intéressant pour des auditeurs éclairés, avant de s'occuper de la forme. La chose avant les mots. Je voudrais même, que, pour éclairer son esprit, et agrandir le cercle de ses idées, il eût, comme Périclès que j'ai déjà cité, une teinture des sciences naturelles. Comment descendrait-il des choses du ciel aux choses d'ici-bas, sans en rapporter une habitude de grandeur et d'élévation qui se reproduirait dans sa pensée et son langage? Mais que ces sublimes considérations ne lui fassent pas négliger des notions plus applicables aux transactions "sublunaires". Qu'il connaisse à fond le droit civil, dont l'usage au barreau est de tous les jours. Quand toutes les contestations s'y décident par les lois, ou par la jurisprudence, quoi de plus honteux que d'entreprendre la défense d'un client sans rien connaître à la jurisprudence ni aux lois? Notre orateur sera versé dans les annales de l'antiquité, et surtout dans celles de son pays. Il saura quels peuples ont dominé sur la terre, et quels rois se sont fait un nom célèbre. L'ouvrage de notre cher Atticus a rendu ce travail facile. Rigoureusement fidèle à l'ordre chronologique, il a su renfermer dans un seul volume, sans rien omettre d'essentiel, l'histoire de sept cents ans. Ignorer ce qui s'est passé avant nous, c'est se condamner à une éternelle enfance. Qu'est-ce que la vie de l'homme, si l'on ne rattache au présent la mémoire des temps qui ne sont plus? Les souvenirs de l'antiquité, l'autorité de ses exemples, sont, pour le discours, une source inépuisable d'intérêt; et rien ne dispose mieux les esprits à la confiance et au respect.


4. ITINERA ELECTRONICA & environnements hypertextes :

Christian RUELL, l'infatiguable, a frappé fort : 7 nouveaux environnements hypertextes ont vu le jour :

  • Adamnan d'Iona (vers 624 - 704), Des Lieux saints, livre II [Traduction française reprise au site de Philippe Remacle]
  • René Descartes (1596 - 1650), Les Méditations métaphysiques, Méditation VI [Traduction française reprise au site de la BIBLIOTHECA AUGUSTANA]
  • Grégoire de Tours (539 - 594), Histoire des Francs, livre I [Traduction française reprise au site de Philippe Remacle]
  • Nicolas de Cues (1401 - 1464), De la docte ignorance, livre III [Traduction française reprise au site de J.M. NICOLLE]
  • Nithard (vers 800 - 845), Histoire des dissensions des fils de Louis le débonnaire, livre III [Traduction française reprise au site de Philippe Remacle]
  • Raoul Glaber (985 - après 1047), Chronique, livre V [Traduction française reprise au site de Philippe Remacle]
  • Stace, Silves, livre III

Les textes bruts de ces oeuvres sont disponibles dans le Dépôt ITINERA ELECTRONICA.


Jean Schumacher
17 février 2012


 
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Dernière mise à jour : 17/02/2002