Notice : 1. ITINERA - HODOI : nouveaux environnements hypertextes :
Pendant la semaine écoulée, Christian RUELL a pu établir les environnements hypertextes suivants:
- LATIN :
- Érasme, Correspondance : lettre n° 222 à Thomas More (date : 1511)
- Érasme, traduction latine de : LUCIEN, Le songe ou le coq : oeuvre complète
- Valère Maxime, Des faits et des paroles mémorables, livre V
- GREC :
Les textes bruts et les traductions françaises de ces oeuvres sont disponibles, au format .TXT (latin) ou UNICODE (grec), respectivement dans les dépôts ITINERA ELECTRONICA ou HODOI ELEKTRONIKAI:
2. Lecture 1 : A propos de l'Éloge de la folie :
La Lettre n° 222 de la Correspondance d'Érasme, lettre adressée à Thomas MORE, est la préface à l'Éloge de la Folie, publiée à Strasbourg en 1511.
Dans cette lettre, Érasme s'explique au sujet des bagatelles qui sont contenues dans cette oeuvre:
[222,3] Etenim non deerunt fortasse uitilitigatores, qui calumnientur
partim leuiores esse nugas quam ut theologum deceant, partim mordaciores
quam ut Christiane conueniant modestie ; nosque clamitabunt
ueterem comediam aut Lucianum quempiam referre atque omnia
mordicus arripere. Verum quos argumenti leuitas et ludicrum
offendit, cogitent uelim non meum hoc exemplum esse, sed idem iam
olim a magnis auctoribus factitatum ; cum ante tot secula
g-Batrachomuomachian luserit Homerus, Maro Culicem et Moretum, Nucem
Ouidius ; cum Busyridem laudarit Polycrates et huius castigator
Isocrates, iniustitiam Glauco, Thersiten et quartanam febrim Fauorinus,
caluitium Synesius, muscam et parasiticam Lucianus ; cum
Seneca Claudii luserit g-apotheohsin, Plutarchus Grylli cum Vlysse
dialogum, Lucianus et Apuleius Asinum, et nescio quis Grunnii
Corocottae porcelli testamentum, cuius et diuus meminit Hieronymus.
[222,4] Proinde, si uidebitur, fingant isti me laterunculis interim animi
causa lusisse, aut si malint equitasse in arundine longa. Nam que
tandem est iniquitas, cum omni uite instituto suos lusus concedamus,
studiis nullum omnino Iusum permittere, maxime si nuge seria
ducant, atque ita tractentur ludicra ut ex his aliquanto plus frugis
referat lector non omnino naris obese, quam ex quorundam tetricis
ac splendidis argumentis? ueluti cum alius diu consarcinata oratione
rhetoricen aut philosophiam laudat, alius principis alicuius laudes
describit, alius ad bellum aduersus Turcas mouendum adhortatur,
alius futura predicit, alius nouas de lana caprina comminiscitur
questiunculas. Vt enim nihil nugacius quam seria nugatorie tractare,
ita nihil festiuius quam ita tractare nugas ut nihil minus quam
nugatus fuisse uidearis. De me quidem aliorum erit iudicium ;
tametsi, nisi plane me fallit g-philautia, Stulticiam laudauimus, sed non omnino stulte.
[222,3] Car les détracteurs pourraient bien ne pas manquer, qui
chicaneront en disant que ces bagatelles sont trop futiles pour convenir
à un théologien et d'autre part trop mordantes pour la modestie
chrétienne ; ils crieront partout que je ramène l'ancienne comédie
ou quelque Lucien, que je déchire tout à belles dents. Que ceux qui
s'offensent de la minceur du sujet, de la légèreté du ton, veuillent
bien considérer que je n'innove en rien, que de grandes autorités
m'ont donné l'exemple. Il y a des siècles qu'Homère s'est amusé à
écrire un Combat des Rats et des Grenouilles, Virgile un Moustique et un Fromage, Ovide une Noix ; Polycrate a loué Busiris, Glaucon
a écrit un éloge de l'Injustice, Favorinus de Thersite et de la
Fièvre quarte, Synésius de la Calvitie, Lucien de la Mouche
et du Parasite ; Sénèque a badiné sur l'Apothéose de Claude,
Plutarque sur l'entretien d'Ulysse avec Gryllus, Lucien et Apulée
sur l'Âne et je ne sais qui sur le testament du porcelet Corocotta, dont parle même saint Jérôme.
[222,4] Que mes censeurs se figurent donc, s'il leur plaît, que je me suis
distrait à jouer aux échecs ou à chevaucher un bâton. Quelle
injustice, en effet, alors que nous accordons à chaque système de
vies des distractions qui lui sont propres, de les refuser toutes aux
études, surtout quand il s'agit de bagatelles qui conduisent à des
choses sérieuses et que les plaisanteries sont traitées de telle sorte
qu'un lecteur doué d'un peu de flair en retire parfois plus de profit
que des dissertations lugubres et pompeuses de certains auteurs !
L'un ravaude longuement un discours à l'éloge de la rhétorique
ou de la philosophie ; un autre énumère les vertus de quelque
prince ; un autre encore exhorte à partir en guerre contre les Turcs ; un autre prédit l'avenir ; un autre imagine de petits problèmes inédits sur le poil des chèvres. Rien n'est plus frivole que de traiter des bagatelles avec sérieux, mais rien n'est plus charmant que de traiter des bagatelles de façon à se révéler aussi peu frivole que possible. C'est aux autres à me juger ; à moins cependant que l'amour-propre ne m'égare, j'ai loué la Folie, mais d'une manière qui n'est pas tout à fait folle.
Le terme uitilitigatores a attiré notre attention. Nous avons interrogé la base de données CLCLT-5 (CETEDOC Library of Christian Latin Texts, CD-ROM version 5) qui renferme des données depuis les origines de la latinité jusqu'à sa fin et avons obtenu une seule réponse à l'interrogation faite :
Pline l'Ancien, Histoire naturelle, Préface :
... ergo securi etiam contra uitilitigatores, quos Cato eleganter ex uitiis et litigatoribus composuit - quid enim illi aliud quam litigant aut litem quaerunt? - , exequemur reliqua propositi...
Érasme paraît donc avoir "emprunté" ce terme à Pline l'Ancien.
3. Lecture 2 : La fureur amoureuse d'après Plutarque :
PLUTARQUE, Oeuvres morales, traité De l'Amour, ch. XVI décrit de la façon suivante les effets de la passion amoureuse:
τὴν δ´ ἐρωτικὴν μανίαν τοῦ ἀνθρώπου καθαψαμένην ἀληθῶς
καὶ διακαύσασαν οὐ μοῦσά τις οὐκ ’ἐπῳδὴ θελκτήριος‘ οὐ τόπου
μεταβολὴ καθίστησιν· ἀλλὰ καὶ παρόντες ἐρῶσι καὶ ἀπόντες
ποθοῦσι καὶ μεθ´ ἡμέραν διώκουσι καὶ νύκτωρ θυραυλοῦσι
καὶ νήφοντες καλοῦσι τοὺς καλοὺς καὶ πίνοντες
ᾄδουσι. καὶ οὐχ ὥς τις εἶπεν αἱ ποιητικαὶ φαντασίαι διὰ
τὴν ἐνάργειαν ἐγρηγορότων ἐνύπνι´ εἰσίν, ἀλλὰ μᾶλλον
αἱ τῶν ἐρώντων, διαλεγομένων ὡς πρὸς παρόντας,
ἀσπαζομένων, ἐγκαλούντων. ἡ γὰρ ὄψις ἔοικε τὰς μὲν
ἄλλας φαντασίας ἐφ´ ὑγροῖς ζωγραφεῖν, ταχὺ μαραινομένας
καὶ ἀπολειπούσας τὴν διάνοιαν· αἱ δὲ τῶν ἐρωμένων
εἰκόνες ὑπ´ αὐτῆς οἷον ἐν ἐγκαύμασι γραφόμεναι διὰ
πυρὸς εἴδωλα ταῖς μνήμαις ἐναπολείπουσι κινούμενα καὶ
ζῶντα καὶ φθεγγόμενα καὶ παραμένοντα τὸν ἄλλον χρόνον.
Mais que la fureur amoureuse s'empare véritablement
d'un homme et le consume, il n'y a ni Muse, ni
charme magique, ni déplacement, qui puissent le maîtriser.
Près de la créature aimée, un tel homme exprime ses transports,
loin d'elle il se livre aux regrets : il la poursuit pendant
le jour, la nuit il reste en plein air à sa porte; à jeun
il implore la beauté qu'il aime, à table il la chante. Comme
quelqu'un l'a dit, les fictions poétiques, en raison de leur
vivacité, sont moins des rêves de gens éveillés que ne le sont
les fantaisies des amoureux. Ceux-ci se figurent voir la personne
qu'ils aiment, ils se figurent qu'ils l'embrassent, qu'ils
se plaignent tendrement d'elle. Pour ce qui est de la vue,
il semble qu'elle peigne, en général, les objets sur un fond
humide d'où ils s'effacent bientôt sans laisser de souvenir
dans la pensée, mais les images dont les amants sont pénétrés
se tracent comme à l'encaustique. De plus elles vivent
dans leur coeur, elles s'y meuvent, elles y parlent,
elles s'y conservent toujours. ...
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