Notice : 1. Environnement hypertexte :
L'environnement hypertexte constitué pendant la semaine concerne:
Sénèque, Des bienfaits, livre VII.
Les textes bruts pour ce livre sont disponibles dans le Dépôt ITINERA ELECTRONICA:
Sénèque, Des bienfaits, livre VII : texte latin - traduction française
L'environnement hypertexte présent clôture le traitement de l'oeuvre De Beneficiis de Sénèque. Un traité dont le texte latin a été saisi optiquement, puis, vérifié et corrigé par nos soins.
2. Steven SAYLOR, Rubicon :
Traduction française: André DOMMERGUES
Titre original : Rubicon (1999)
Editions du Masque - Collection 10/18 "Grands détectives", 2001, 318 pp. , 8,48 € (EUR)
Quatrième de couverture :
César a franchi le Rubicon et les Romains,
gouvernés par son rival Pompée, tremblent
pour l'avenir de leur cité. Patriciens et
sénateurs fuient la ville pour échapper aux
armées du proconsul, la laissant sans défense
face aux bandits et aux pillards. Dans pareil
chaos, un assassinat pourrait presque passer
inaperçu. Sauf quand la victime est un des
cousins de Pompée et que le corps est
retrouvé dans le jardin du plus fin limier de
Rome, Gordianus. L'enquêteur n'a d'autre
choix que de se charger de cette difficile
affaire. Mais dans une république agonisante,
à l'aube de la guerre civile d'où naîtra
l'Empire, les alliances politiques brouillent
les cartes, et il faudra beaucoup d'adresse
à Gordianus pour venir à bout de cette
enquête.
Cicéron, Lettres Ad Familiares , XVI, 8 et 12 :
Aux pages 100 à 117 de ce roman policier, l'auteur a placé une entrevue entre Tiron, le secrétaire bien connu de Cicéron, et Gordien, l'inspecteur chargé de l'enquête relative à un assassinat qui a eu lieu dans son propre jardin.
Nous avons saisi optiquement cet extrait; il est disponible en ligne à l'adresse suivante:
Entrevue Tiron - Gordien.
Au cours de l'entretien, il est question de lettres que Cicéron fait parvenir à son secrétaire qui est en convalescence à Patras après une longue maladie.
Une de ces lettres est citée aux pages 107 et 108 du roman "Rubicon" :
Il [Tiron] sourit, sembla réfléchir, puis sortit un petit sac de sa
tunique, dont il tira une feuille de parchemin pliée. Il
appela une servante pour lui demander de décrocher une
des lampes et de l'apporter à notre table. À la lueur de la
lampe, je lus la lettre. Elle était datée du premier jour du
mois, deux semaines auparavant.
Formiae, calendes de février.
Marcus Tullius Cicéron à Marcus Tullius Tiron, à
Patras.
Je continue de me faire du mauvais sang pour ta
santé. La maladie dont tu souffres n'est pas dangereuse,
cela me console, mais qu'elle persiste, cela m'inquiète.
L'absence de mon secrétaire si compétent me contrarie,
mais l'absence d'un être cher me contrarie plus encore.
Pourtant, bien qu'il me tarde de te voir, je te recommande
de ne pas voyager avant d'être complètement
remis, tant qu'il fera si mauvais temps. Même dans les
maisons confortables il est difficile d'échapper au froid,
et c'est pire encore en mer avec la pluie et la bise.
Comme le dit Euripide : «Le froid est le pire ennemi des
constitutions fragiles.»
César feint toujours de négocier avec Pompée tout en
jouant à l'envahisseur. Comme Hannibal dont les diplomates
précédaient les éléphants! Il déclare qu'il va laisser
la Gaule à Domitius et venir à Rome présenter sa
candidature à la charge de consul, ainsi que l'exige la
loi - mais à la seule condition que Pompée disperse
toutes les forces loyalistes récemment levées en Italie et
regagne sur-le-champ l'Espagne. César ne parle pas de
renoncer aux villes fortes dont il s'est emparé depuis
qu'il a franchi le Rubicon.
Notre espoir, c'est que les Gaulois qui se trouvent
parmi les troupes de César l'abandonnent, car ils ont
certainement de bonnes raisons de le haïr après toutes
les souffrances qu'il leur a infligées pendant la conquête
de la Gaule. Au nord, il y aurait une Gaule rebelle; à
l'ouest, les six légions de Pompée en Espagne; et à l'est,
les provinces que Pompée a pacifiées il y a longtemps et
où le Grand Homme est encore tenu en haute estime. Si
seulement le centre peut tenir assez longtemps pour
empêcher César de mettre Rome à sac!
Portes-tu l'écharpe jaune qu'elle t'a donnée quand tu
es parti en Cilicia ? demande Térentia. Fais de ton mieux
pour te protéger du froid.
Cette lettre, dont la formulation est de S. SAYLOR, s'inspire de deux lettres "réelles" de Cicéron: Ad familiares, XVI, lettres 8 et 12 :
Lettre 8 :
Magnae nobis est sollicitudini ualetudo tua; nam, tametsi, qui ueniunt, g-akinduna
g-men, g-chroniohtera g-de nuntiant, tamen in magna consolatione ingens inest
sollicitudo, si diutius a nobis afuturus est is, cuius usum et suauitatem
desiderando sentimus. Ac tamen, quamquam uidere te tota cogitatione cupio, tamen
te penitus rogo, ne te tam longae nauigationi et uiae per hiemem nisi bene
firmum committas neue nauiges nisi explorate. Vix in ipsis tectis et oppidis
frigus infirma ualetudine uitatur, nedum in mari et uia sit facile abesse ab
iniuria temporis.
g-Psuchos g-de g-leptoh g-chrohti g-polemiohtaton, inquit Euripides: cui tu quantum
credas, nescio; ego certe singulos eius uersus singula testimonia puto. Effice, si me diligis,
ut ualeas et ut ad nos firmus ac ualens quam primum uenias.
Ama nos et uale. Q- f. tibi salutem dicit.
Traduction :
Votre santé nous inquiète beaucoup. Les arrivants s'accordent à dire que le mal
n'est pas dangereux, mais peut traîner en longueur.
C'est une consolation et à la fois une cause de tourment, si je dois longtemps encore
être privé d'une compagnie dont votre absence me fait sentir plus vivement l'utilité
et les charmes.
Toutes mes pensées sont avec vous. Mais, je vous conjure de ne point vous exposer,
faible encore, à une si longue navigation, et à un voyage d'hiver.
Ne vous embarquez qu'à bon escient. Avec une santé faible à peine peut-on se
garantir du froid dans de bonnes habitations, et au milieu des villes.
Jugez s'il est facile de se préserver de ses atteintes en voyage et sur mer.
"Le froid est le grand ennemi des peaux délicates", dit Euripide.
Mais fait-il autorité pour vous? Je regarde, moi, ses vers comme autant d'axiomes.
Soignez-vous, soignez-vous, si vous m'aimez, et revenez-nous
vaillant le plus tôt possible. Adieu : aimez-moi toujours.
Le fils de Quintus vous embrasse.
Lettre 12 :
Quo in discrimine uersetur salus mea et bonorum omnium atque unuersae rei
publicae, ex eo scire potes, quod domos nostras et patriam ipsam uel diripiendam
uel inflammandam reliquimus: in eum locum res deducta est, ut, nisi qui deus uel
casus aliquis subuenerit, salui esse nequeamus. Equidem, ut ueni ad urbem, non
destiti omnia et sentire et dicere et facere, quae ad concordiam pertinerent;
sed mirus inuaserat furor non solum improbis, sed etiam iis, qui boni habentur,
ut pugnare cuperent me clamante nihil esse bello ciuili miserius. Itaque, quum
Caesar amentia quadam raperetur et oblitus nominis atque honorum suorum
Ariminum, Pisaurum, Anconam, Arretium occupauisset, urbem reliquimus: quam
sapienter aut quam fortiter, nihil attinet disputari; quo quidem in casu simus,
uides. Ferunter omnino condiciones ab illo, ut Pompeius eat in Hispaniam,
delectus, qui sunt habiti, et praesidia nostra dimittantur; se ulteriorem
Galliam Domitio, citeriorem Considio Noniano - his enim obtigerunt - traditurum;
ad consulatus petitionem se uenturum, neque se iam uelle absente se rationem
haberi suam; se praesentem trinum nundinum petiturum. Accepimus condiciones, sed
ita, ut remoueat praesidia ex iis locis, quae occupauit, ut sine metu de iis
ipsis condicionibus Romae senatus haberi possit. Id ille si fecerit, spes est
pacis, non honestae - leges enim imponuntur - , sed quiduis est melius quam sic
esse, ut sumus; sin autem ille suis condicionibus stare noluerit, bellum paratum
est, eiusmodi tamen, quod sustinere ille non possit, praesertim quum a suis
condicionibus ipse fugerit, tantummodo ut eum intercludamus, ne ad urbem possit
accedere, quod sperabamus fieri posse; delectus enim magnos habebamus
putabamusque illum metuere, si ad urbem ire coepisset, ne Gallias amitteret,
quas ambas habet inimicissimas praeter Transpadanos, ex Hispaniaque sex legiones
et magna auxilia Afranio et Petreio ducibus habet a tergo: uidetur, si insaniet,
posse opprimi, modo ut urbe salua. Maximam autem plagam accepit, quod is, qui
summam auctoritatem in illius exercitu habebat, T- Labienus, socius sceleris
esse noluit: reliquit illum et nobiscum est, multique idem facturi esse
dicuntur. Ego adhuc orae maritimae praesum a Formiis: nullum maius negotium
suscipere uolui, quo plus apud illum meae litterae cohortationesque ad pacem
ualerent; sin autem erit bellum, uideo me castris et certis legionibus
praefuturum. Habeo etiam illam molestiam, quod Dolabella noster apud Caesarem
est. Haec tibi nota esse uolui, quae caue ne te perturbent et impediant
ualetudinem tuam. Ego A- Varroni, quem quum amantissimum mei cognoui, tum etiam
ualde tui studiosum, diligentissime te commendaui, ut et ualetudinis tuae
rationem haberet et nauigationis et totum te susciperet ac tueretur: quem omnia
facturum confido; recepit enim et mecum locutus est suauissime. Tu, quoniam eo
tempore mecum esse non potuisti, quo ego maxime operam et fidelitatem desideraui
tuam, caue festines aut committas, ut aut aeger aut hieme nauiges: numquam sero
te uenisse putabo, si saluus ueneris. Adhuc neminem uideram, qui te postea
uidisset quam M- Volusius, a quo tuas litteras accepi: quod non mirabar; neque
enim meas puto ad te litteras tanta hieme perferri. Sed da operam, ut ualeas et,
si ualebis, quum recte nauigari poterit, tum nauiges. Cicero meus in Formiano
erat, Terentia et Tullia Romae. Cura, ut ualeas. IIII K- Februar. Capua.
Traduction :
D'un mot jugez à quelle extrémité nous sommes réduits, moi, tous les gens
de bien, et la république entière. Nous fuyons, laissant nos maisons et la patrie
elle-même, exposées aux horreurs du pillage ou de l'incendie. Oui, les choses
en sont à ce point qu'à moins d'intervention divine ou d'un coup du sort
rien ne peut nous sauver.
Depuis le moment où j'ai mis le pied dans Rome, je n'ai eu qu'une pensée, la
concorde; je n'ai cessé de la prêcher, d'y travailler. Mais je ne sais quelle rage
s'est emparée de toutes les têtes. J'ai beau crier qu'il n'y a rien de pis que
la guerre civile. On veut se battre; les prétendus gens de bien, tout comme les
méchants. Dans son fatal aveuglement, César, emporté par une sorte
de démence et perdant la mémoire de son nom, et des honneurs dont on l'a comblé,
César vient d'occuper Ariminium, Pisaure, Ancône, Arrétium, et nous, nous quittons
la ville. Est-ce sagesse, est-ce courage? c'est ce que je n'examine pas ici.
Vous voyez quelle position! Or voici les conditions de César : que Pompée passe en Espagne; que les levées qu'on a faites, et nos garnisons soient licenciées: à ce prix,
il promet de remettre la Gaule ultérieure à Domitius et la citérieure à Considius Nonianus,
à qui elles sont échues; de venir solliciter en personne le consulat, de renoncer à toute
prétention de candidature, lui absent, et de faire en personne les trois demandes
d'usage. On accepte tout, pourvu seulement qu'au préalable ses troupes évacuent les points
occupés, et que les délibérations du sénat soient libres. S'il y consent, la paix est possible;
paix peu honorable. On nous fait la loi. Mais il n'y a rien de pis que la position actuelle.
S'il revient sur ses propres conditions, nous sommes prêts à la guerre;
guerre qu'il soutiendrait difficilement sous le poids d'une rétractation. Tout dépend de
l'arrêter, de lui fermer l'accès de la ville. Et l'on espère y réussir. Nos levées sont
nombreuses, et nous croyons qu'il appréhende, par une marche sur Rome, de perdre les
deux Gaules, où il est en exécration partout, excepté chez les Transpadans.
De plus il a sur ses derrières six légions d'Espagne et nos nombreux auxiliaires sous les
ordres d'Afranius et de Pétréius. Il semble donc, en supposant que sa folie l'emporte,
qu'il peut être accablé, si l'on parvient seulement à couvrir Rome.
Déjà il vient de recevoir un coup terrible. T. Labiénus, qui a tant d'influence dans son
armée, n'a pas voulu se rendre son complice. Il l'a quitté; il s'est joint à nous. Cet
exemple aura, dit-on, de nombreux imitateurs.
Je commande encore la côte depuis Formies. Je ne veux pas de poste plus important, afin
de donner plus de poids à mes lettres et à mes conseils de paix. Mais je prévois qu'en cas
de guerre, j'aurai le commandement d'un camp et d'un certain nombre de légions.
J'ai le chagrin de voir Dolabella dans les rangs de César. Je tenais à vous donner ces détails ;
mais n'allez pas vous en laisser affecter au point de retarder encore votre convalescence.
- Je vous ai recommandé de la manière la plus pressante à A. Varron que j'ai toujours trouvé
excellent pour moi et plein d'amitié pour vous. Je l'ai prié de s'occuper de votre santé, de votre
traversée, de tout ce qui vous touche enfin; je ne doute pas qu'il n'y mette de l'intérêt. Il me
l'a promis, et m'a dit à ce sujet les choses les plus aimables. Puisque je n'ai pu vous avoir quand
j'avais le plus besoin de vos services et de votre dévouement, gardez-vous aujourd'hui de toute
précipitation, et ne vous exposez pas, malade encore, ou dans la saison d'hiver, aux dangers
d'une navigation. Je ne vous reprocherai jamais d'arriver trop tard, si vous revenez bien portant.
Depuis M. Volusius qui m'a remis une lettre de vous, je n'ai vu personne. C'est tout simple.
Comment mes lettres vous arriveraient-elles par une si mauvaise saison? Ne vous occupez que
de votre santé. Ne vous mettez en route que quand elle sera bonne et la navigation facile. Cicéron
est à ma maison de Formies. Térentia et Tullie sont à Rome. Portez-vous bien.
Le 4 des kalendes de février, à Capoue.
Pour composer "sa" lettre, S. SAYLOR a butiné les deux lettres de Cicéron et en a extrait le contenu de sa lettre.
3. Sénèque : L'homme illettré et l'homme mal vêtu :
Tiré du De beneficiis, V, 13:
Quaedam etiamsi uera non sint, propter similitudinem eodem uocabulo comprehensa
sunt. Sic pyxidem et argenteam et auream dicimus : sic illitteratum, non
ex toto rudem, sed ad litteras altiores non perductum : sic qui male uestitum et
pannosum uidit, nudum se uidisse dicit.
Traduction :
Il est des choses que, bien que non identiques, nous comprenons
sous la même dénomination, à cause de leur similitude. C'est ainsi que nous
donnons le même nom à une boîte d'or ou à une d'argent; c'est ainsi que nous appelons
illettré, non seulement l'homme qui ne sait rien du tout, mais celui qui ne s'est pas élevé
jusqu'à la haute littérature; ainsi, quand on a rencontré un homme mal vêtu et couvert
de haillons, on dit qu'on l'a vu tout nu.
4. Démétrius le Cynique: boucles d'oreilles et vêtements "légers" (Sénèque, De beneficis, VII,9) :
Video uniones, non singulos singulis auribus comparatos : iam enim
exercitatae aures oneri ferendo sunt; iunguntur inter se, et insuper alii binis
superponuntur : non satis muliebris insania uiros subiecerat, nisi bina ac terna
patrimonia auribus singulis pependisseut. Video sericas uestes, si uestes uocandae
sunt, in quibus nihil est quo defendi aut corpus, aut denique pudor
possit : quibus sumptis, mulier parum liquido nudam se non esse iurabit. Haec
ingenti summa ab ignotis etiam ad commercium gentibus arcessuntur, ut matronae
nostrae, ne adulteris quidem, plus sui in cubiculo, quam in publico ostendant.
Traduction :
Je vois des perles qui ne sont pas uniques pour chaque oreille; car
déjà les oreilles sont accoutumées à porter des fardeaux. On les
accouple deux à deux, et, par-dessus, on en met d'autres. Les
hommes ne se croiraient pas assez asservis à la folie des femmes,
s'ils ne suspendaient deux ou trois de leurs patrimoines à
chaque oreille de leur maîtresse. Je vois des vêtements de soie,
si l'on doit nommer vêtement ce qui ne protège ni le corps, ni
la pudeur; des habillements avec lesquels une femme ne pourrait
jurer qu'elle n'est pas nue. Voilà ce qu'on cherche à grand
prix, ce qu'on va demander à des nations dont le commerce
nous était inconnu, afin que, dans leur chambre à coucher,
nos matrones ne puissent pas montrer à leurs amants plus
qu'elles ne montrent au public".
Jean Schumacher
LLN, 5 septembre 2003
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