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Du texte à l'hypertexte

Cicéron, Plaidoyer pour Cluentius

juges

 


 


Texte latin :

 
[61] LXI. 169. Unum etiam mihi reliquum eius modi crimen est, iudices, ex quo illud perspicere possitis quod a me initio orationis meae dictum est: quicquid mali per hosce annos A- Cluentius uiderit, quicquid hoc tempore habeat sollicitudinis ac negotii, id omne a matre esse conflatum. Oppianicum ueneno necatum esse quod ei datum sit in pane per M- Asellium quendam, familiarem illius, idque Habiti consilio factum esse dicitis. In quo primum illud quaero, quae causa Habito fuerit cur interficere Oppianicum uellet. Inimicitias enim inter eos fuisse confiteor; sed homines inimicos suos morte adfici uolunt aut quod {eos} metuunt aut quod oderunt. 170. Quo tandem igitur Habitus metu adductus tantum in se facinus suscipere conatus est? quid erat quod iam Oppianicum poena adfectum pro maleficiis et eiectum e ciuitate quisquam timeret? quid metuebat? ne oppugnaretur a perdito? an ne accusaretur a damnato? an ne exsulis testimonio laederetur? Si autem quod oderat Habitus inimicum, idcirco illum uita frui noluit, adeone erat stultus ut illam, quam tum ille uiuebat uitam esse arbitraretur, damnati, exsulis, deserti ab omnibus? quem propter animi importunitatem nemo recipere tecto, nemo adire, nemo adloqui, nemo aspicere uellet? 171. Huius igitur Habitus uitae inuidebat? Hunc si acerbe et penitus oderat, non eum quam diutissime uiuere uelle debebat? huic mortem maturabat inimicus, quod illi unum in malis erat perfugium calamitatis? Qui si quid animi et uirtutis habuisset, ut multi saepe fortes uiri in eius modi dolore, mortem sibi ipse conscisset, huis quam ob rem id uellet inimicus offerre quod ipse sibi optare deberet? Nam nunc quidem quid tandem illi mali mors attulit? nisi forte ineptis fabulis ducimur ut existimemus illum ad inferos impiorum supplicia perferre ac plures illic offendisse inimicos quam hic reliquisse: a socrus, ab uxorum, a fratris, a liberum Poenis actum esse praecipitem in sceleratorum sedem ac regionem. Quae si falsa sunt, id quod omnes intellegunt, quid ei tandem mors eripuit praeter sensum doloris?

Traduction française :

 
[61] LXI. Il me reste, juges, à réfuter un dernier chef d'accusation, qui va mettre dans le plus grand jour une vérité que j'ai énoncée en commençant : c'est que tous les maux dont Cluentius a fait depuis quelques années la triste expérience, tout ce qu'il éprouve encore aujourd'hui de persécutions et d'alarmes, tout, dis-je, est l'ouvrage de sa mère. Oppianicus, dites-vous, est mort empoisonné. Le poison lui a été donné dans du pain par M. Asellius son ami, et c'est Cluentius qui est l'auteur du complot. Je demanderai d'abord quel motif avait Cluentius d'attenter aux jours d'Oppianicus? J'avoue qu'il existait entre eux d'anciennes inimitiés; mais, si on désire la mort de son ennemi, c'est parce qu'on le craint ou parce qu'on le hait. Et quelle crainte pouvait donc engager Cluentius à commettre un tel crime? que pouvait-on redouter encore d'Oppianicus, portant, dans un honteux exil, la peine de ses forfaits? les attaques d'un ennemi terrassé? les accusations d'un condamné ? les dépositions d'un banni? Si c'est par haine qu'il n'a pas voulu le laisser vivre, était-il donc assez fou pour donner le nom de vie à la malheureuse existence d'un criminel retranché de la société, repoussé du monde entier, d'un méchant si décrié par la noirceur de son âme, que personne n'aurait voulu ni le recevoir sous son toit, ni l'aborder, ni lui adresser la parole, ni même le regarder? Et c'est d'une telle vie que Cluentius aurait été jaloux ! Lui eût-il voué la haine la plus cruelle et la plus implacable, il devait lui souhaiter de subir longtemps une semblable vie. Un ennemi eût hâté le trépas de celui qui n'avait, dans l'excès de sa misère, d'autre asile que le trépas! Eh! si ce grand coupable eût eu dans l'âme un peu de cette force dont plus d'un homme courageux a fait preuve dans de pareilles infortunes, c'est lui-même qui se serait donné la mort. Pourquoi un ennemi lui eût-il offert ce qu'il devait appeler de tous ses voeux? Car enfin, quel mal la mort a-t-elle pu lui faire? à moins qu'ajoutant foi à des fables puériles, nous ne pensions qu'il souffre dans les enfers les supplices des scélérats ; qu'il y a trouvé plus d'ennemis qu'il n'en a laissé sur la terre ; que les mânes irrités de sa belle-mère, de ses femmes, de son frère, de ses enfants, l'ont précipité dans l'affreux séjour du crime et des tourments. Si ce sont là des chimères, comme personne n'en doute, qu'a donc pu lui enlever la mort, si ce n'est le sentiment de la douleur?




 

 


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Dernière mise à jour : 2/02/2005