[35,0] LIVRE XXXV. [35,1] I. Placé sur le trône de Syrie, et redoutant pour sa puissance, nouvelle encore, les périls de l'oisiveté, Demetrius résolut de reculer les bornes de son empire, et d'étendre sa puissance par des guerres contre ses voisins. Irrité contre Ariarathe, roi de Cappadoce, qui avait dédaigné la main de sa soeur, il accueille la prière d'Oropherne, frère de ce prince, injustement détrôné, et, s'applaudissant de trouver un spécieux prétexte de guerre, il résolut de lui rendre sa couronne. Oropherne fut ingrat ; et, s'unissant aux habitants d'Antioche, alors soulevés contre Demetrius, il entreprit de renverser le prince qui voulait le replacer sur son trône. Instruit de ce complot, Demetrius ne le fit point mourir, pour tenir Ariarathe en respect par la crainte des attaques de son frère ; mais il le fit saisir et garder à Séleucie. Sans s'effrayer de cette découverte, Antioche persista dans sa révolte. Protégés par Ptolémée, roi d'Égypte, par Attale, roi d'Asie, par Ariarathe, roi de Cappadoce, contre les attaques de Demetrius, ils engagent un certain Bali, jeune homme de la plus basse naissance, à réclamer le trône de Syrie, comme l'héritage de ses pères ; et, pour rendre l'affront plus sanglant, ils lui donnent le nom d'Alexandre, et le proclament fils du roi Antiochus. Demetrius avait soulevé tant de haines, que tous reconnurent dans son rival, non seulement l'autorité de roi, mais même ses prétentions à une illustre origine. Ainsi, par un surprenant retour de fortune, oubliant sa bassesse passée, et appuyé des forces de presque tout l'Orient, Alexandre vient combattre Demetrius, et lui enlève et le trône et la vie. Au reste, Demetrius ne se montra pas sans courage contre ces attaques : dans une première rencontre, il avait vaincu les rois ligués, et, attaqué de nouveau, il massacre dans la bataille des milliers de soldats. Mais il succomba enfin en combattant avec un grand courage an plus fort de la mêlée. [35,2] II. Au commencement de cette guerre, Demetrius avait envoyé près de Gnidius, son hôte, ses deux fils avec de riches trésors, pour les soustraire aux périls de la guerre, et, si le sort le voulait, se ménager en eux des vengeurs. Demetrius, l'aîné de ces princes, parvenu à l'adolescence, et instruit des débauches d'Alexandre, que son élévation inattendue et le prestige d'une grandeur étrangère enchaînaient, parmi ses courtisanes, dans l'oisiveté d'un palais, l'attaque à l'improviste avec le secours des Crétois. Effaçant par des services nouveaux l'outrage qu'elle avait fait à son père, Antioche se livre à lui. Attirée par sa jeunesse, l'armée de son père, sacrifiant à ses premiers serments l'empire d'un maître orgueilleux, se déclare, pour lui : renversé par le caprice du sort aussi vite qu'il s'était élevé, Alexandre, vaincu dès le premier combat, expia de son sang, et la mort de Demetrius, et l'affront d'Antiochus, dont il s'était dit le fils.