[2,1b] Epeircté est une montagne qui s'élève auprès de Panorrne {Palerme} , elle a plusieurs milles de tour. Depuis le pied jusqu'à la cime, ce ne sont que des roches escarpées ; la pente en est raide jusqu'à une certaine hauteur, où commençant à devenir plus douce, elle conduit au sommet. Cest là que la nature présente une situation favorable dont avaient profité les anciens rois de Sicile pour y bâtir une forteresse. Le nombre et la beauté des maisons, qui étaient sur le reste de la montagne, pouvaient la faire passer pour une ville. Au pied, du côté la mer, îl y avait un port capable de recevoir toutes sortes de vaisseaux, il était formé par quantité de rochers dïsposés naturellement. L'entrée en était large, la mer y était profonde et la hauteur de la montagne qui l'environnait mettait les bâtiments à l'abri des tempêtes. La ville commandait au port, de manière qu'il était aisé d'empêcher les vaisseaux étrangers d'aborder. On ne pouvait faire aucune descente de ce côté, l'autre n'était pas moins sûr, n'y ayant que deux chemins pour s'y rendre, tous deux fort étroits et qu'il était aisé de garder. Un des avantages de ce lieu était de fournir pour les troupeaux d'excellents pâturages. Plusieurs ruisseaux distribués de tous côtés et la pureté de l'air qu'on y respirait faisaient assez connaître que les Dieux protégeaint le pays d'une manière plus particulière. Sur le bord du chemin, du côté du port, on voyait une statue de Cérès qui la représentait dans un char traîné par des serpents ailés et portant une couronne d'épines. Afin qu'en entrant dans la ville on put reconnaître la divinité qui y présidit, il y avait au pied de la statue ces vers où le poète faisait ainsi parler la déesse : [2,1c] "Si dans le monde entier on connaît mes autels, Si, par mon secours, de sauvages mortels, Quittant les premiers fruits de l'avare nature, Ont goûté les douceurs d'une autre nourriture Peuples reconnaissants, j'exige pour retour Vne paix éternelle en ce charmant séjour. Le destin m'appella dans cette île fertile, J'acceptai volontiers cet agréable asyle, Qu'on le respecte au moins, qu'à jamais de ce lieu Ssoient bannis du Dieu Marss les drapeaux odieux. Qu'on n'y connaisse plus les cris ni les alarmes Que le coutre et la faulx soient vos uniques armes. Ce que j'ordonne est juste et j'en attends l'effet Est-ce trop demander pour un si grand bienfait Que si quelqu'un troublé d'une fureur nouvelle A mes ordres jamais se déclare rebelle, J'en tirerai vengeance, et de ma propre main Portant les premiers coups dans son perfide sein J'établirai mes droits en punissant l'injure On verra tout pour moi s'armer dans la nature Ma fille doit le jour au Dieu de l'univers et pour frères Neptune et le Dieu des enfers."