Le XXIe siècle est né le 11 septembre 2001. Une ère nouvelle de l'humanité. Ca y est: le monde ne sera plus jamais en guerre, mais il sera désormais guerre tout court. Guerre et non-guerre, ce sera désormais la même chose. A compter du 11 septembre 2001, tout sera guerre, même la paix. La paix ne sera plus le contraire de la guerre, elle en sera son contexte, son milieu naturel, son écosystème, son décor, son fond d'écran, son background. Guerre et paix ne seront plus le contraire l'un de l'autre (c'était bon du temps manichéen des blocs Est-Ouest), mais ils seront imbriqués l'un dans l'autre, comme les deux faces connues d'une même réalité. La paix sera une sorte de cas particulier de guerre. La guerre sera dorénavant partout et nulle part. La guerre se fera dans une poubelle gare de l'Est, et au-dessus de nos têtes dans les airs. Elle sera permanente. Ouverte 24 heures sur 24, comme CNN. Jour et nuit. Elle sera faite de pauses, mais ne connaîtra pas de répit. Ce sera une guerre aveugle, mais précise. Floue, mais ciblée. Car jamais la distorsion n'a été si grande entre le flou des causes et la précision des coups. La première hyperguerre mondiale a commencé. C'est une guerre où tous les prétextes sont bons et où les actes servent a posteriori de déclaration. Appelons ça une hyperguerre. Un monde dans lequel le contexte normal, naturel, des sociétés n'est plus la paix mais la guerre. Une hyperguerre, ce n'est pas une guerre comme les guerres mondiales, avec des camps qui s'opposent C'est une guerre non euclidienne non répertoriée, sans règles et sans autres principe que sa propre logique. L'hyperguerre n'est pas localisable dans l'espace. Pas plus que dans le temps. Elle est une sorte de chef-d'oeuvre du terrorisme, un "best of" , un "worst of" plutôt: détournements d'avion, bombes, crashs aériens, kamikazes. C'est tout le XXe siècle qui fut résumé en quelques minutes le 11 septembre 2001. Ce sera donc là l'acte de naissance du XXIe siècle, comme 1914 le fut pour le XXe. Mais ce ne sont plus des Etats qui font la guerre, cest la guerre qui fait les Etats. Des Etats inédits, sortis de nulle part, qui ne sont pas des Etats-nations, pas des Etats territoriaux, avec des citoyens, et des frontières, et des gouvernements, non: ce sont des Etats virtuels, des Etats-guerre éparpillés, diffùs, des Etats-pieuvres ramifiés, des Etats-communautés dont les seules frontières sont idéologiques. Ces Etats, comme le virus du sida, évoluent, s'adaptent, mutent, s'inventent et se réinventent chaque jour. Ils se réduisent parfois à un seul individu qui, déguisé en bombe humaine, est à lui seul une idéologie, une armée, un danger. Apres les nommes d'Etat, voici les Hommes-Etats. L'Etat politique se confond avec l'état biologique. On nous rebat les oreilles toute la journée avec Pearl Harbor: rien à voir. Car Pearl Harbor fut un épisode d'une guerre. Le 11 septembre 2001 est la définition d'une autre. Le point de départ d'une ère nouvelle de l'humanité. Oui: l'humain est affecté partout sur la planète, car l'hyperguerre, par la menace perpétuelle qiielle fait planer, se nourrit des psychoses qu'elle provoque. La psychose, c'est la continuation de la guerre par d'autres moyens. Elle ronge l'individu, gangrène son psychisme, le déstructure. C'est une guerre du «peut-être / peut-être pas» dont l'orreur est avant tout horreur potentielle. Par conséquent, une guerre qui peut avoir un début, mais pas de fin. L'hyperguerre est faite pour durer. Elle se plaùit dans la totalité: celle de l'Univers et de l'éternité.