[1,13] Lettre 13. A Ausone. 1. La joie, habituellement, est éloquente et exaltante ; elle dédaigne les étroites limites d'un cœur fermé ; quant à toi, mon ami, d’heureux événements t’ont fait oublier d’écrire. Sur ce point, je ne suis pas en mesure de t’imiter alors que le divin discours de notre maître Gratien m'a comblé d'espoir et de joie. Devant ton indolence, je n'ai donc pas hésité à engager le dialogue, soit par devoir soit par le plaisir que j'éprouve, comme me le suggérait aussi bien notre amitié, que le bonheur général. 2. Et, maintenant, si c’est possible, conserve-moi ton attention jusqu'à nouvel ordre. Janus ouvrait la porte aux premières calendes de l’année. Nous autres, Sénateurs, étions venus tôt à la curie, avant que la lumière du jour n’ait dissipé l'obscurité de la nuit. Par hasard, une rumeur nous fut transmise qu'un discours de notre bien-aimé empereur était arrivé en pleine nuit. Et c'était vrai, car le messager se tenait devant nous, fatigué de ses nuits d'insomnie. On se précipita alors que l’aube n’était pas encore là : on prononça les oracles du Siècle Nouveau à la lueur des flambeaux. Que dire de plus ? Nous avons reçu la lumière que jusqu'à ce moment nous attendions. 3. Raconte, me diras-tu — car c’est un point important à connaître — les sentiments de nos Pères sur ce discours. Laisse la nature te dire avec quels suffrages on entend des paroles affectueuses et ardemment espérées. Nous savons ouvrir les bras au bien qu'on nous prodigue. Si tu m'en croies, je souffre maintenant encore du trop-plein de cette joie ressentie. Le bon Nerva, l’énergique Trajan, l’irréprochable Antonin, le très reponsable Marc-Aurèle, furent aidés par leur époque, car on ne connaissait pas alors d'autre moralité. Mais maintenant, la louange est due à la nature de cet empereur, aux dons des temps passés. Pourquoi, en renversant l'ordre des choses, devrions-nous voir leur action comme un modèle de vertu et la sienne comme la survivance d’une époque révolue ? 4. Veuille la Fortune assurer ses bienfaits et du moins conserver ce bien-aimé à la nation romaine. Que nul enchantement ne sape la félicité publique. Tu as tout entendu mais n'y as goûté que du bout des lèvres ; les actes de notre curie t’en diront bien plus. Quand tu auras consulté de plus longs développements, tu devras imaginer combien les souhaits formulés à notre endroit par les pensées d'un seul, dépassent en richesse le déluge de nos applaudissements. Adieu. [1,14] Lettre 14. A Ausone. Tu me demandes de longues lettres : c'est là envers nous une preuve de véritable amitié. Mais moi qui connais la pauvreté de mon esprit, j'aime mieux m'astreindre à une laconique brièveté que d'étaler sur une file de plusieurs pages la maigreur d'un style sans verve. Il n'est pas étonnant que la veine de mon élocution se soit amoindrie, depuis le temps qu'elle ne s'est nourrie de la lecture de tes volumes de prose ou de poésie. Pourquoi donc demander de longs intérêts à mon éloquence, toi qui n'as placé sur elle aucun prêt littéraire ? Ta Moselle vole dans bien des mains et dans les plis de bien des toges, grâce à tes vers divins qui l'immortalisent ; mais elle n'a fait que passer sous nos yeux. Pourquoi, je te le demande, voulais-tu me priver de cet ouvrage ? Tu me regardais, ou comme un ignorant qui ne pouvait le juger, ou comme un malveillant qui ne savait pas le louer. Et tu faisais ainsi grandement injure ou à mon esprit ou à mon caractère. Moi, cependant, malgré ton interdit, j'ai su bientôt pénétrer jusqu'à cette œuvre mystérieuse : et je voudrais taire ce que j'en pense, je voudrais me venger de toi par un juste silence ; mais l'admiration pour le livre dissipe le ressentiment de l'outrage. Autrefois, quand je suivis les étendards des princes éternels, je connus ce fleuve, comparable à plusieurs, mais qui n'est pas comparable à beaucoup d'autres. Et maintenant tes vers, par leur éclat et leur surprenante majesté, l'ont rendu plus grand que le Mélo d'Égypte, plus frais que le Tanaïs des Scythes, plus limpide que le Fucin, notre compatriote. Je ne croirais jamais les merveilles que tu racontes de l'origine et du cours de la Moselle, si je ne savais en toute assurance que tu ne mens pas, même en vers. Où as-tu découvert ces essaims de poissons dont les noms sont aussi variés que les couleurs, dont la grosseur diffère autant que le goût, et que tu as parés, au delà des dons de la nature, du vernis de cette poésie ? A ta table, où tu m'invitais souvent, j'ai admiré la plupart des autres mets rares qui étaient alors au prétoire ; mais je n'y ai jamais vu cette espèce de poissons. Quand donc sont-ils nés dans ton livre, ces poissons qui n'ont jamais été sur tes plats ? Tu crois que je plaisante et que je veux rire. Puissent les dieux me donner le bonheur de plaire à mes maîtres, comme il est vrai que je place ton poème au rang des livres de Virgile ! Mais je veux cesser d'oublier ma douleur et d'insister sur ton éloge, de peur que ce ne soit encore ajouter à ta gloire que de t'admirer quand je suis l'offensé. Répands donc à ton gré les volumes, et excepte-moi toujours : je n'en jouirai pas moins de tes œuvres, mais par la complaisance d'autrui. Adieu. [1,15] Lettre 15. A Ausone. 1. Je vous ai écrit une lettre brève et succincte car je n’avais rien d’intéressant à mentionner et, qu’en l’absence d’événements, il n’est pas utile de disserter. Mais en temps opportun le discours de Palladius, notre professeur de rhétorique, a rallongé le contenu de ma lettre. Ce discours, apprécié par la plupart des éminents littéraires, ne vous est sans doute pas inconnu. Aussi, puisque un compte rendu satisfera à la fois mon sens des responsabilités et vos intérêts, j’ai rédigé un texte honnête de ce que j’avais entendu avant que ses paroles n’échappent à mes oreilles, une fois la réunion terminée et mon appréciation encore fraîche. 2. L’éloquence de notre hôte athénien a remué les auditeurs latins par son découpage artistique, la richesse de son invention, la profondeur de ses pensées et par la clarté de ses paroles. J’exprime ma propre opinion, c’est un homme aussi distingué comme orateur qu’en personne. A ce moment, nos camarades locaux, qui sont fréquemment en désaccord entre eux sur d’autres sujets, portèrent un jugement unanime en faveur de cet homme. Je crois sincèrement, à moins que mon appréciation défaille, qu’il provient d’une famille de rhéteurs, car son intelligence est pleine de ressources. Ce n’est pas uniquement l’apparence ou l’aspect qui marque les descendants qui font honneur à leurs ancêtres ; la nature a des terrains plus sûrs pour en réclamer le droit. Bien parler et bien penser sont héréditaires, et ne proviennent pas de documents légaux. On enseigne ce talent à d’autres ; lui le possède de naissance. 3. Je n’ai pas cru devoir rester muet à ce sujet, mon seigneur, car je ne crois rien de plus important que mon affection à votre égard et qu’à mon tour je ne regretterai jamais l’estime dans laquelle vous me tenez. En fin de compte, je cherche à promouvoir l’intérêt de Palladius afin que ses talents notoires ne restent pas cachés du public. Prenez soin de votre santé et puisque vous pouvez écrire comme bon vous semble, montrez-en la volonté. Adieu. [1,16] Lettre 16. A Ausone. Souvent ton amitié m'engage avec instance à t'écrire aussitôt que je reçois les lettres qu'une tendre inclination te porte à m'adresser, et toujours aussi je me suis fait un devoir de répondre sur l'heure à chacune au moment où elle m'était remise, parce que le but de ma réponse et les mutuelles obligations de notre amour ne me permettaient pas un plus long retard. Aujourd'hui encore je m'empresse de te déclarer que je t'offre et te rends des actions de grâces pour l'heureuse nouvelle que tu n'as pas voulu me laisser ignorer. Je t'ai déjà parlé de cela et d'autres choses dans une lettre précédente ; mais, si les messagers t'ont fait tenir exactement cet écrit, ce n'est qu'un surcroit de lettres, qui ne peut l'être à charge. J'aime mieux d'ailleurs te rompre les oreilles par mes redites, que te rien faire perdre par mon silence. Ainsi les honneurs d'Hesperius, mon frère, me font tressaillir de joie ; mais sa taciturnité me blesse. Car, si l'expérience lui a prouvé tout l'amour que j'ai pour lui, il convenait qu'il m'écrivit pour devancer la renommée, dont les bruits longtemps incertains ne me donnaient qu'une vague confiance en ma félicité. Il devait donc m'annoncer lui-même notre commun bonheur, afin que les assurances de sa lettre ne laissassent aucun doute en ma pensée. Mais, dis-tu, sa modestie l'a retenu : il a craint de se vanter de ses succès. A-t-on jamais rougi de parler de soi à soi-même ? D'où vient qu'il a différé de m'apprendre une chose qu'il savait nous intéresser justement l'un et l'autre ? Du reste, si j'ai eu tant à cœur d'exhaler ces plaintes, j'y mets aussi volontiers des bornes ; parce qu'il ne convient à l'amour que j'ai pour vous ni de taire mon chagrin, ni de vous reprocher outre mesure la douloureuse atteinte portée à mon amitié. Adieu. [1,17] Lettre 17. A Ausone. L’assemblée de Sicile a choisi Ambroise, l’un des hommes les plus en vue des tribunaux publics de la province, pour l’envoyer à nos seigneurs et maîtres, avec diverses injonctions jugées nécessaires au bien public. Si tu le patronnes, je crois qu’il obtiendra un résultat fructueux de ses efforts. C’est pourquoi je te demande de favoriser cet excellent homme, soit pour le mérite de son ambassade soit parce que je le soutiens ; il est en effet convaincu que ton appui facilitera l’examen de ses requêtes. Adieu. [1,18] Lettre 18. A Ausone. Je pourrais célébrer ta gloire dans des lettres continuelles ; mais je ne croirais pas encore, vu l'exigence du sujet, m'acquitter suffisamment de mon devoir : tant s'en faut que je te reproche ma peine et mon exactitude. Mais, s'il est convenable que j'agisse avec cette déférence, il est de ton humanité aussi de soutenir notre zèle par une égale condescendance. Tu vas voir où tend ce langage. Depuis longtemps tu ne nous envoies rien à lire. Je suis tout entier, diras-tu, sous la dépendance des travaux du prétoire. Cela est vrai. Tu es le digne chef de la justice suprême. Mais, pour les forces supérieures de ton esprit, une haute fortune n'est pas un fardeau : applique-toi donc aussi à des travaux qui, loin d'apporter quelque fatigue aux hommes occupés, les soulagent souvent, au contraire, de la fatigue elle-même. Adieu. [1,19] Lettre 19. A Ausone. Ceux qui ont perdu confiance en eux-mêmes acceptent mes lettres afin de les utiliser comme recommandation. Le cas présent est différent, car j’ai donné un mot à mon frère Potitus à la condition que ce soit lui qui le recommande. Car lui, tout autant que moi, est l’un des tes meilleurs amis. Quand il t’aura fait bénéficier de sa présence, je crains que mon excuse ne soit pas pardonnable. Mais si, par expérience, je connais bien ton indulgence, je pense que tu ne m’en voudras pas de rester en arrière, en voyant cette autre personne qui aura fait le voyage, mais que tu l’accueilleras plutôt comme si nous étions deux. Adieu. [1,20] Lettre 20. A Ausone. Ce fut une bonne et sage pensée de nos ancêtres, entre autres du même temps, d'avoir rapproché, en les construisant, les deux temples de l'Honneur et de la Vertu : ils avaient deviné ce que nous voyons en toi, que les récompenses de l'honneur ne vont pas sans les mérites de la vertu. Près de ces monuments on trouve aussi le temple et la fontaine consacrés aux Muses, parce que c'est souvent par l'étude des lettres qu'on se fraie un chemin aux magistratures. Ces institutions de nos pères sont des arguments en faveur de ton consulat ; car c'est à la gravité de tes mœurs et à l'éclat de ton enseignement que tu dois les honneurs de la chaise curule. Beaucoup, à l'avenir, dirigeront leurs efforts vers les beaux-arts, vers la vraie gloire, vers la saine littérature ; mais lequel rencontrera un aussi heureux disciple ou un débiteur de si bonne mémoire ? Nous n'ignorons pas que le grand Alexandre, dont la fortune dépassa les vœux, ne fit rien pour honorer son Stagirite ; et cette chlamyde, prise parmi les dépouilles des Étoliens, et qui fut le seul présent donné à Quintus Ennius, est une tache pour Fulvius. Le second Africain n'a point payé le prix de son éducation libérale à Panétius, ni Rutilius à Opillus, ni Pyrrhus à Cynéas, ni Mithridate de Pont à son Métrodore. Mais aujourd'hui notre empereur très érudit, prodigue de richesses et d'honneurs, te décerne les récompenses avec usure, et te rend au delà même du taux des intérêts. Quand ma joie est si grande, comment me justifier de ne pouvoir être auprès de toi ? Je crains bien qu'interprétant mal mes excuses, tu croies peu à la sincérité de mes compliments. Je voulais accourir et me présenter à ta vue ; mais, privé de forces, longtemps épuisé par la maladie, j'ai dû éviter les longs trajets, les gites incommodes, les approches de l'hiver, le déclin des jours, toutes les occasions d'une rechute funeste. Si mon cœur t'est connu, je te conjure d'être indulgent pour moi, et d'admettre avec bonté cette justification. C'est au hasard à décider si je conserverai tes bonnes grâces ; il me suffit aujourd'hui d'échapper au péril de t'offenser. Adieu. [1,21] Lettre 21. A Ausone. Je me réjouis de valoir plus pour toi que tous les autres, ton énergie est telle que, spontanément, tu prends soin de mon problème, n’attends pas de demande, mais suis la simple idée que tu te fais de mes désirs. J'ai reçu les quatre passeports qui seront infiniment pratiques pour les allers et retours des miens. Que les dieux te récompensent d’une telle faveur, et, puisque rien ne peut être ajouté à des bienfaits qui, en se perfectionnant, ont atteint leur sommet, puissent-ils t’assurer ce qu'ils ont mis en ta possession. Adieu. [1,22] Lettre 22. A Ausone. Je me réjouis à profusion puisque le nouvel an est en hâte de t’avoir pour consul ! Mais, devant rester bref, je témoignerai plus largement ma joie de ces nouvelles dans une seconde lettre. Pour l’instant, je dois aborder un autre sujet. Le clarissime Patruinus, en se préparant à ta convocation, a pensé qu’il lui serait avantageux d’avoir mon attestation pour le soutenir. J’ai pensé que cela ne lui servirait à rien. Néanmoins, je n’ai pas voulu faillir à cela, sachant que ton opinion à son égard ne changerait pas, que je lui écrive ou non, cependant je manquerais à ma tâche en ne l’aidant pas. Aussi, veux-je te demander une chose, c’est qu’il gagne ta bienveillance pour la tâche qu’il a entreprise, au-delà du profit qu’il tirera d’apparaître devant toi, de te rencontrer et de t’honorer. Adieu. [1,23] Lettre 23. A Ausone. Après ton long silence, je ne désirais pas moins que je n'espérais de toi de longues lettres : car c'est là un des retours ordinaires de l'instabilité des choses humaines, que l'abondance succède à la disette. Je le croyais, et je me suis trompé : car une courte page, qu'on vient de remettre entre mes mains, est tout ce que j'ai reçu de toi. Elle était, il est vrai, semée de sel attique et parfumée de thym, mais en si faible dose qu'elle était plutôt faite pour amuser mes ennuis que pour assouvir ma faim. Eh quoi! si je te demandais des mets de prince, un repas de Saliens, des viscérations, un festin public, tu me présenterais donc un second service, une maigre chère sur des plats étroits ? Rappelle à ton souvenir ce que disent les Grecs à ce sujet : « De faibles aliments suffisent pour préserver de la mort, mais non pour nous procurer une robuste santé. » Penses-tu que je ne te parlerai pas de tes occupations ? Tu es questeur, je ne l'ai pas oublié ; tu participes au conseil royal, je le sais ; tu juges les suppliques, tu rédiges les lois, je le reconnais : ajoute à cela mille autres choses encore ; et jamais il n'arrive que le travail affaiblisse ton esprit, que les soucis altèrent ta bienveillance, qu'un long usage épuise ta veine. Si tu ne coupes jamais, par un intervalle de repos, tes affaires de la journée, tu n'es pas homme à interrompre ton sommeil avant le jour pour donner quelques instants à l'amitié. Le Comique, cependant, ne te semble-t-il pas un bon modèle, quand il dit : "Que j'aimerais qu'il fût de mode aussi de s'occuper de ses amis, même pendant, la nuit ? " Mais où vais-je, en mon pauvre langage, discourir si longtemps ? Je dois prendre exemple sur ta dernière épître, comme sur toutes tes actions. C'est sans doute à cause de tes nombreuses occupations, que tu refuses les longues lettres. Oui, j'ai deviné juste. Je comprends, en effet, que tu ne veuilles pas avoir beaucoup à lire, ayant à peine le temps de dicter quelques mots. Adieu. [1,24] Lettre 24. A Ausone. Si l'amour de l'Histoire naturelle dont Pline est l'auteur, te possède, en voici les livres, dont j'ai fait faire pour toi une copie à la hâte. Le copiste, je pense, en négligeant l'exactitude, déplaira à ta riche érudition : mais sa négligence ne doit pas m'être imputée ; car j'ai mieux aimé obtenir ton approbation par la célérité du présent, que par l'examen du travail d’autrui. Adieu. [1,25] Lettre 25. A Ausone. Quoique souvent il y ait de la sincérité dans l'éloge qu'on fait d'un fils à son père, je ne sais comment il arrive que cet éloge perde de son mérite, parce qu'on y voit un désir de plaire au personnage. Je cherche donc avec embarras comment je dois m'y prendre pour te parler aujourd'hui d'un homme honorable, de Thalassius, ton gendre. Si je ne loue qu'avec réserve son beau caractère, je passerai pour un envieux ; si je le vante comme il le mérite, je serai bien près de la flatterie. J'imiterai donc la concision des jugements de Salluste. Tu as là un homme digne de toi, et, grâce à toi, d'une famille consulaire ; la fortune de son glorieux beau-père l'a trouvé plus grand que ses bienfaits, la pureté et la sainteté de son âme l'ont élevé à la hauteur de ses dignités. Adieu. [1,26] Lettre 26. A Ausone. Je me repose dans ton cas sur la confiance que tu m’inspires. Pendant longtemps, maintenant, tu as écrit chichement, mais je ne suivrai pas ton exemple, car je sais qu’un homme placé au pinacle des devoirs et en conséquence concerné par des sujets divers et importants ne manque moins que l’occasion de le faire. En effet, il est naturel, dans ce cas, qu’une négligence non intentionnelle soit pardonnée. Toujours certain, comme d’habitude, de ton amitié, je ne me dérobe pas à mes demandes habituelles ; je considérerais comme un honneur et une faveur remarquables qu’au-delà de ton affection pour moi, quelque avantage pût être accordé à mon ami, le porteur de cette missive. Adieu. [1,27] Lettre 27. A Ausone. Tu veux savoir ce que je fais. J’attends chaque jour ta lettre d’un genre que tu as eu la capacité de me promettre et qui exprime l’affection que tu m’as toujours portée. Mais je me réjouis vraiment des nouvelles actuelles, puisque je sais qu’aucune occasion n’est laissée à mon adversaire et qu’en outre, tu es destiné à un sort que je t’ai toujours souhaité, la bonne fortune que tu mérites. Aussi, puisque nos inquiétudes ont changé, laisse-moi profiter d’une lettre tant désirée pour m’encourager et me démontrer, en accord avec notre ancienne et grande amitié durable, que tu m’es totalement dévoué. Adieu. [1,28] Lettre 28. A Ausone. Notre respect mutuel et notre ancienne amitié m’assurent que ton pouvoir signifie ma force. Ce sentiment convient à la fidélité de ton caractère, car jamais dans le passé tu ne t’es montré infidèle à des expressions de ce genre. Laisse seulement la Fortune être généreuse de ses bienfaits et favoriser nos vœux. Mais assez de ces longs discours, de peur que des compliments démesurés détruisent la vérité la plus haute. Si tu as besoin de savoir quoi que ce soit à mon sujet, mon frère Claudius, un homme dédié à ton service et bien conscient de mon dévouement pour toi, t’en informera. Adieu.