Lecture : Richard de Bury (1287 - 1345) à propos du privilège de perennité que confèrent les livres : Richard de Bury, Philobiblon, I : ... In libris mortuos quasi uiuos inuenio; in libris futura praeuideo; in libris rei bellicae disponuntur; de libris prodeunt iura pacis. Omnia corrumpuntur et intabescunt in tempore; Saturnus quos generat deuorare non cessat: omnem mundi gloriam operiret obliuio, nisi Deus mortalibus librorum remedia prouidisset. Alexander, orbis domitor, Iulius et urbis et orbis inuasor, qui et Marte et arte primus in unitate personae assumpsit imperium, fidelis Fabricius et Cato rigidus hodie caruissent memoria, si librorum suffragia defuissent. Turres ad terram sunt dirutae; ciuitates euersae; putredine perierunt fornices triumphales; nec quicquam reperiet uel Papa uel rex quo perennitatis priuilegium conferatur commodius quam per libros. Reddit auctori uicissitudinem liber factus, ut quamdiu liber supererit auctor manens athanatos nequeat interire, teste Ptolemao in prologo Almagesti: "non fuit", inquit, "mortuus qui scientiam uiuificauit". ... ... Dans les livres je vois les morts comme vivants ; dans les livres je prévois l'avenir ; dans les livres les choses de la guerre se règlent ; des livres sortent les droits de la paix. Tout se corrompt et se détruit avec le temps ; Saturne ne cesse de dévorer ceux qu'il engendre, et toute la gloire du monde périrait dans l'oubli, si Dieu n'avait donné, comme remède, le livre aux mortels. Alexandre, ce dominateur de l'univers, César, cet usurpateur de la république et du monde, qui, grâce à Mars et à son astuce, fut le premier qui réunit l'empire sous l'obéissance d'un seul, le fidèle Fabricius, le rigide Caton, seraient inconnus aujourd'hui si le témoignage des livres leur avait manqué. Que de châteaux forts renversés, de cités détruites seraient ensevelis dans l'oubli ! Les rois ou les papes ne peuvent trouver que par les livres le privilège d'être connus de la postérité. Le livre terminé communique à l'auteur son immortalité, témoin Ptolémée, qui s'écrie, dans son prologue de l'Almageste : « Celui qui vivifie la science ne meurt point. » ...