[0] PHOTIUS, Bibliotheca - Extraits de : Olympiodore de Thèbes, Histoires. [1] Lisez les Histoires d’Olympiodore en vingt-deux livres. Elles commencent par le septième consulat de l’empereur Honorius et le second de Théodose, et vont jusqu’à l’époque où Valentinien, fils de Placidia et Constantius, est proclamé empereur des Romains. [2] L’auteur, un païen, était natif de Thèbes en Egypte, poète de profession selon ses propres dires. Son style est d'une clarté sans force et d'une vulgaire platitude, dégénérant parfois en une vulgarité de lieux communs ce qui fait que, selon lui-même, l’ouvrage ne mérite pas d’être considéré comme une Histoire. Peut-être est-ce la raison pour laquelle l'auteur lui-même, conscient de sa faiblesse, ne définit pas son livre comme un livre d’histoire, mais plutôt comme des matériaux pour l'histoire, privés d’une forme régulière comme il considère lui-même son style et sa phraséologie. Il n’est pas brillant par la forme, sauf quand on peut faire valoir qu’il approche de la simplicité de temps à autre, mais même là, en raison de l’excessive pauvreté et de la pâleur de sa diction, il est mauvais et sombre dans un maniérisme vulgaire. Son ouvrage est intitulé Silva, mais il le divise en livres et s’efforce de l’embellir par des préfaces. Il est dédié à l’empereur Théodose, fils d’Arcadius, et neveu d’Honorius et de Placidia. [3] L’accession de Stilicon au pouvoir, sa nomination par Théodose le Grand à la tutelle de ses enfants Arcadius et Honorius, son mariage avec Serena, fiancée à lui par son oncle l’empereur lui-même. Mariage de sa fille Thermantia avec Honorius, et son accession au sommet du pouvoir. Ses nombreuses guerres victorieuses contre les barbares. Sa mort aux mains du cruel et inhumain Olympius qu’il avait lui-même recommandé à l’empereur. [4] Alaric, chef des Goths, que Stilicon avait préalablement envoyé pour faire la conquête de l'Illyrie en faveur d’Honorius (auquel cette préfecture avait été attribuée par son père Théodose), prétendant venger Stilicon et alléguant surtout que la somme convenue ne lui avait pas été remise, courut droit à Rome, l’assiégea et la mit à sac. Il emporte un butin énorme et il enlève Placidie, sœur d’Honorius, qui était à Rome à ce moment. Avant cela il nomme empereur un citoyen distingué nommé Attalus, le préfet de la ville. Une autre raison du comportement d’Alaric fut que Sarus, un Goth, chef d’une petite troupe de 200 ou 300 hommes, courage et guerrier invincible, s’était vu offrir une alliance par les Romains car hostile à Alaric, qui ainsi devint son ennemi irréductible. [5] Pendant le siège de Rome par Alaric, le peuple, pressé par la faim, s'entredévorait. Alaric, lorsque Stilicon était en vie, recevait 4.000 livres d’or à titre d’arriéré de solde. Après la mort de Stilicon, sa veuve fut étranglée, accusée, sur de légers soupçons, d'avoir attiré Alaric devant Rome. Son fils Eucherius avait déjà été mis à mort. [6] Pendant le règne d’Honorius le nom de Bucellaires (réguliers), représentait les anciennes légions, recrutés de nationaux et de volontaires barbares ; le nom de Fédérés, celui d’une masse confuse et mal disciplinée, conduite par les chefs barbares. [7] Olympius, qui intrigua contre Stilicon, fut nommé maître des Offices, mais privé de son poste par la suite. Il le récupère et le reperd à nouveau. Il est battu à mort par ordre de Constantius, l’époux de Placidia, après avoir eu les oreilles coupées. Ainsi le malheureux impie rencontre au bout son juste châtiment. [8] Les Goths menés par Radagaise, disposant d’environ 12.000 hommes appelés Optimati, sont battus par Stilicon, qui passe un accord avec Radagaise. [9] Maladie et mort d’Alaric; Ataulphe, son beau-frère, lui succède. [10] L’auteur indique que le pain sec était appelé bucellatum, et suggère en plaisantant que les soldats portent le nom de bucellaires pour cette raison. [11] Constantin, élevé à la tyrannie, envoie une ambassade à Honorius pour se justifier : c'est malgré lui, c'est contraint par ses soldats qu'il a pris le pouvoir; il demande donc sa grâce, mais il réclame aussi une part de la royauté. Le roi, au milieu des difficultés qui le pressent, admet pour le moment ce partage de la royauté. Constantin se trouvait avoir été proclamé dans les Bretagnes et porté au pouvoir en ces pays-là par une insurrection militaire. Et, en effet, dans les Bretagnes, avant le 7e consulat d'Honorius, les soldats insurgés avaient proclamé empereur un certain Marcus, lequel ayant été tué par eux, Gratien fut mis à sa place. Mais, au bout de quatre mois, dégoûtés aussi de ce dernier, ils l'égorgent et Constantin alors est porté au rang suprême avec le nom d'empereur. [12] Ayant promu généraux Justin et Néobigaste, il quitte les Bretagnes et passe avec les siens à Bononia, — c'est le nom d'une ville maritime, la première qu'on trouve sur ces limites des Gaules; — il y séjourne, et, s'étant approprié tous les soldats gaulois et aquitains, il s'empare de toutes les parties de la Gaule jusqu'aux Alpes, qui sont entre l'Italie et la Galatie. Il avait deux fils, Constans et Julien ; il éleva le premier au rang de César et le second à la dignité de Nobilissime. [13] Attalus, empereur rival d’Honorius, marche vers Ravenne, où Jovien, préfet du prétoire et patricien, Valens, magister utriusque militiae, Potarnius, questeur et Julien, primicerius notariorum, lui sont envoyés par Honorius. Ils informent Attalus qu’ils sont envoyés par Honorius pour discuter la question d’un partenariat dans l’empire. Il refuse, mais offre à Honorius de pouvoir se retirer sans dommage vers une certaine île ou n’importe où il lui plaira. Jovien non seulement témoigna agréer cette proposition, mais il ajouta encore qu'il faudrait couper quelque membre à Honorius et il promit de le faire; ce qu'Attalus même ne put souffrir, en cas d’abdication volontaire. Jovien va et vient plusieurs fois sans rien conclure pour Honorius, il demeure auprès d'Attale en qualité de Patrice. Entre temps, le commandement de Ravenne échoit au praepositus Eusebius, qui, peu après, par la cruauté d’Allobich meurt battu de verges publiquement, et à la vue d'Honorius même. [14] Après un temps considérable, Attalus, qui ne reste pas loyal envers Alaric (car surtout redevable à Jovien qui avait trahi les ambassadeurs d’Honorius) est déchu du trône, et après, rejoint la suite d’Alaric comme personnage privé. Il est conséquemment restauré et à nouveau contraint à abdiquer. Finalement, il part pour Ravenne, est fait prisonnier, et, après qu’on lui ait coupé le pouce et l’index de sa main droite, est banni. [15] Peu après, Allobich paie la condamnation pour meurtre du praepositus Eusebius; il est mis à mort devant l’empereur. Le tyran Constantin, informé de la mort d’Allobich, se hâte vers Ravenne pour faire un traité avec Honorius, mais effrayé, il rebrousse chemin. [16] Rhegium était la ville principale des Bruttii, d’où l’historien dit qu’Alaric désirait passer en Sicile, mais en fut empêché par une statue sacrée. Cette statue, selon les dires, avait été consacrée par les anciens comme protection contre les feux de l'Etna et la traversée des barbares des mers. Par l'un de ses pieds la statue enchantée lançait perpétuellement des flammes et par l'autre l'eau ne tarissait jamais. Le simulacre fut mis en pièces par Asclepius, gouverneur du domaine Sicilien de Constatius et Placidia, alors les habitants virent arriver sans opposition les Barbares et les feux de l'Etna. [17] Le tyran Constantin et Constant, son fils, qui avait été élu d'abord césar, puis roi, sont défaits tous les deux et mis en fuite. Gérontius, qui commandait une armée, se prête volontiers à faire la paix avec les barbares ; il avait au nombre de ses domestiques un fils à lui nommé Maxime, il le proclame roi; puis, se mettant à la poursuite de Constant, il réussit à le tuer; enfin, poursuivant aussi Constantin, le père de Constant, il le suit pied à pied. Au moment où cela se passait, Constantius et Ulfilas étaient envoyés par Honorius contre Constantin. Ayant atteint Arelatum, où Constantin faisait son séjour avec Julianus son fils, ils assiègent cette ville. Constantin se réfugie dans un oratoire et il est ordonné prêtre ; on lui avait promis la vie sauve ; les portes de la ville sont ouvertes aux assiégeants, et Constantin est envoyé avec son fils à Honorius. Ce prince, qui lui gardait rancune à cause de ses parents, que Constantin se trouvait avoir fait périr, donna l'ordre, au mépris de la foi jurée, de les faire périr à trente milles en deçà de Ravenne. — Gérontius, à l'approche d'Ulfilas et de Constantius, s'enfuit ; il est arrêté, et pour s'être montré dur envers les soldats qu'il commandait, il est en butte à leur mauvais vouloir. Et, en effet, ils mirent le feu à sa maison. Il combattit vaillamment, n'ayant contre ces insurgés, pour aide, qu'un seul homme, Alain de nation, qui était au nombre de ses esclaves. Enfin, il tue, selon leur désir, cet Alain et sa femme, et s'égorge lui-même. Maxime, son fils, informé de ces événements, s'enfuit chez les barbares que protègent des traités. [18] A Moguntiacum (Mayence), ville de la deuxième Germanie, Jovinus, grâce aux intrigues de l'Alain Goar et de Guntiar, qui tenait l'emploi de phylarque des Burgondes, fut proclamé tyran. Attalus conseille à Ataulf de se joindre à lui, et Ataulf se joint à Jovinus avec tout son monde. Mais ce dernier s'inquiète de la présence d'Ataulf, et reproche à mots couverts son arrivée à Attalus aux conseils de qui elle était due. Sarus devait aussi venir se joindre à Jovinus, mais Ataulf l'apprend ; avec dix mille soldats qu'il a rassemblés, il court à la rencontre de Sarus qui n'avait avec lui que dix-huit ou vingt hommes, et qui, malgré les prodiges d'une valeur héroïque, fut pris vivant, non sans peine, à l'aide de sacs, et plus tard mis à mort [19] Sarus se révolta contre Honorius, qui avait traité le meurtre d’un de ses serviteurs, Bellerides, avec indifférence, refusant de rechercher et de punir son meurtrier. [20] Donatus et les Huns, et l’habileté de leurs rois à manier l’arc. L'auteur rapporte qu’il fut envoyé lui-même en ambassade vers Donatus et il fournit un compte rendu tragique de ses péripéties après une périlleuse navigation. Comment Donat, trompé par des serments, fut assassiné par trahison; comment Charaton, chef de la nation, se préparait à tirer vengeance de cette perfidie, mais qu'il fut apaisé par les présents de l'empereur. Tels sont les événements de la première décade de l’histoire. [21] La seconde commence comme suit : Jovinus, ayant, malgré l'avis contraire d'Ataulf, nomme Auguste roi son frère Sébastianus. Ataulf est gravement offensé ; aussi envoie-t-il à Honorius des ambassadeurs pour promettre à ce prince de lui donner la tête des tyrans et la paix. L'ambassade de retour et les serments échangés, la tête de Sébastianus est envoyée à l'empereur. Jovinus, assiégé par Ataulf, se livre lui-même ; il est envoyé à l'empereur, et exécuté par l'éparque Dardanus qui prend sur lui de le faire mourir. Les deux têtes sont exposées à l’extérieur de Spadusa, où celles de Constantin et Julien, de Maxime et Eugenius, qui avaient aspiré au trône pendant le règne du grand Théodose et avaient subi le même sort, avaient déjà été montrées [22] Constantius exige impérativement d’Ataulf qu’il rende Placidia à son frère Honorius. Après quelque temps Ataulf devint son mari. Mais les promesses faites à son égard n’ayant pas été tenues, particulièrement pour les fournitures de blé, il refuse de la rendre et prépare la guerre au lieu de la paix. Ataulf, à qui l'on réclamait Placidia, réclamait de son côté les vivres qui lui avaient été garantis. Ceux qui les lui avaient promis étaient bien embarrassés pour les livrer ; ils n'en conviennent pas moins de les lui fournir, pourvu que Placidie leur soit remise. Le barbare faisait des réponses semblables, et cependant il s'approchait de la ville appelée Marseille, comptant bien la prendre par ruse. Mais alors il fut blessé, et c'est le très noble Boniface qui lui porta ce coup ; à grand'peine il échappa à la mort, et se retira dans ses tentes, laissant la ville le cœur content, qui prodiguait à Boniface louanges et bénédictions. [23] Ataulf, décidé à épouser Placidia, en dépit de la requête de Constantius, précise son projet pour que, s’il n’est pas approuvé, il paraisse avoir une bonne excuse pour la retenir. [24] Constantius, qui avait été déjà élu consul, est fait consul à Ravenne, Constans étant en même temps fait consul à Constantinople. Suffisamment d’or fut trouvé dans la propriété des Héracliens, mis à mort quand ils aspiraient au trône, pour pallier les dépenses de consulat, bien que le montant ne fut pas si important que prévu. Le montant en or trouvé était d’environ £4600, et la valeur du patrimoine de 2.000 litrae. Tout cela fut fait pour Constantius par Honorius « lors d’une demande ». Fier de sa belle prestance, Constantius aimait à paraître à cheval en public, l’aspect abattu et refrogné, ses grand yeux, son cou et son large front, son corps entier courbé sur son cheval, se penchant à droite et à gauche, de façon à justifier l’expression « apparaître digne de l’empire ». Dans les cérémonies et banquets, cependant, il était agréable et sociable, ami de la bonne chère, souvent même condescendant à rivaliser avec les mimes qui se produisaient à la table [25] Grâce au zèle et aux bons avis de Candidien, s'accomplit le mariage d'Ataulf avec Placidie, au commencement de janvier, à Narbo (Narbonne), dans la maison d'Ingénius, un des premiers citoyens de cette ville. Placidie assise dans l’atrium orné à la manière romaine, et en costume royal, Ataulf s'assit près d'elle, vêtu, lui aussi, du manteau et des autres habits en usage chez les Romains. Entre autres présents, il offrit à sa fiancée cinquante beaux jeunes gens vêtus d'une robe de soie, et portant chacun dans leurs mains deux grands plateaux, chargés l'un d'or, l'autre de pierres de haut prix ou plutôt sans prix, dépouilles de Rome enlevées par les Goths lors de la prise de cette ville. Puis on dit des épithalames, dont Attalus récitait les premiers vers et que continuaient Rusticius et Phœbadius ; et le mariage s'accomplit au milieu des jeux et de la joie, où se confondaient barbares et Romains. [26] Après la prise de Rome par les Goths, le préfet Albinus, quand l’état normal des choses fut restauré, fait part à l'empereur, que la mesure habituelle de blé concédée au peuple devient insuffisante par suite de l'accroissement de la population, 14.000 étrangers étant arrivés en un jour. [27] L'amour d'Ataulf pour la paix s'augmenta encore lorsque Placidie fut accouchée d'un fils, à qui il donna le nom de Théodose. Constance et ceux de sa faction rendirent inutiles tous les efforts qu'Ataulf et Placidie firent pour cela. Le petit Théodose son fils mourut. On en fit un fort grand deuil. On mit son corps dans un cercueil d'argent, et on l'enterra auprès de Barcelone dans un lieu de prière, c'est-à-dire dans une église. Peu après, Ataulf fut assassiné dans ses écuries, où, selon son habitude, il était allé voir ses chevaux, par un certain Dubius, qui guettait depuis longtemps l’occasion de satisfaire une vieille haine. Le maître de Dubius, chef d’une tribu des Goths, avait autrefois été tué par Ataulf, qui avait pris Dubius à son service. Pour venger ce premier maître, Dubius tua le second. A son lit de mort, Ataulf recommanda instamment à son frère de s'entourer autant que possible de l'amitié des Romains. Singeric, frère de Sarus, lui succéda et assura son pouvoir par la violence et les intrigues plutôt que loyalement et par relations. Il fit massacrer les enfants d'Ataulf, réfugiés dans le sein d'un évêque nommé Sigesar et comme insulte, obligea Placidia à marcher devant son cheval avec d’autres prisonniers aussi loin que le douzième mile de la ville. Après sept jours, Singeric fut assassiné et Walia, chef des Goths lui succéda. [28] L’historien assure qu'il existait en Thrace des statues d'argent constellées qui arrêtèrent pendant plusieurs années les irruptions des barbares ; malheureusement l'empereur Constance fit enlever ces statues et les barbares inondèrent aussitôt le pays. Valerius, gouverneur de la Thrace, ayant eu avis qu'il y avait un trésor caché en un endroit de ce pays qui confinait avec l’Illyrie, il vint s'informer de ce que c'était ; ceux du pays lui dirent que c'étaient des choses consacrées il y avait longtemps pour arrêter les barbares. Valère fit son rapport à Constance, qui lui ordonna par écrit d'enlever ce qu'il trouverait. Il fit donc creuser, trouva trois statues d'argent massif habillées en barbares, les mains sur les hanches, les coudes tournés vers l’extérieur, vêtues de tissus de couleurs bigarrées, cheveux longs, tournées vers le nord, pays des barbares. Peu de jours après, les Goths ravagèrent toute la Thrace et un peu après les Huns et les Sarmates ouvrirent des routes vers l’Illyrie et même la Thrace, car ces districts consacrés étaient situés entre la Thrace et l’Illyrie et nombre de ces statues étaient consacrées à une protection contre ces nations barbares. [29] L’historien nous raconte les souffrances et périls de son voyage. Il dit aussi qu’il débarqua à Athènes et que grâce à son soutien et à ses efforts, Léonce fut nommé à la chaire de sophistique, bien qu’il ne la désirât pas. Au sujet de la cape des philosophes, il dit que personne à Athènes, en particulier un étranger, n’était autorisé à la porter, à moins d’en avoir eu la permission par un vote général des sophistes et à moins que ce droit ait été confirmé par leurs règles et règlements. Voici l'usage à cet égard. Le récipiendaire (novice), jeune ou vieux se rendait aux bains publics. Ceux qui par leur âge pouvaient porter la cape étaient emmenés au milieu de tous les étudiants ou membres de l'école de cette ville qui les escortaient. Alors pendant que certains couraient en tête et les repoussaient pour les empêcher de se baigner, en criant Stop, Stop. Ceux qui poussaient par derrière eux, par contre, les y invitaient. Après longtemps et de longues querelles, celui qui était escorté dans une pièce chaude entrait dans le bain et se lavait. Après s’être rhabillé, il se revêtait du manteau, accompagné à la sortie par une foule nombreuse et distinguée. De larges sommes sont votées pour les principaux des écoles, qui sont appelés Acromitae. [30] Les Vandales appellent les Goths du nom de Trules, car quand ces derniers furent pressés par la famine, ils achetaient aux Vandales une trula de blé pour une pièce d'or. La trula ne contient pas plus d’un tiers de pinte. Quand les Vandales ravageaient l’Espagne, les Romains qui se réfugiaient dans des cités fortifiées manquaient tellement de nourriture qu’ils se livrèrent au cannibalisme. Une femme, mère de quatre enfants, les mangea tous, prétendant chaque fois qu’elle faisait ainsi pour fournir de la nourriture aux autres enfants et sauver leurs vies ; mais une fois qu’ils eurent tous disparus, elle fut lapidée à mort par le peuple. [31] Euplutius, le chambellan, est envoyé chez Walia, roi des Goths, pour faire un traité de paix avec lui et récupérer Placidia. Walia le reçoit aimablement et, à réception de 600.000 mesures de blé, Placidia est relâchée et remise à Euplutius pour être escortée vers son frère Honorius. [32] On désirait beaucoup, à Athènes, connaître le moyen de bien coller les livres, et on se livrait à des recherches, lorsque Philtatius, dont le savoir littéraire est bien connu, enseigna aux Athéniens le degré d'encollage convenable. Ceux-ci, par reconnaissance, lui élevèrent une statue. [33] L’auteur raconte de l'oasis ou plutôt de trois oasis beaucoup de choses incroyables. D’abord, le climat est si salubre que non seulement aucun des habitants ne souffre d’épilepsie, mais encore ceux qui y viennent d’autres endroits en sont guéris. Ensuite il parle de l'abondance du sable et des puits qu'on trouve dans les oasis; ces puits sont creusés à une profondeur de 200, de 300 et même quelquefois de 500 coudées (92 à 230 m) et qu'ils déversent leurs eaux comme des ruisseaux, spontanément, par leur orifice. Les cultivateurs qui par un travail commun ont perforé ces puits, viennent y puiser de l'eau, à tour de rôle, pour en arroser leurs champs. Les arbres portent des fruits en toute saison, que le froment qui y croît est blanc comme de la neige et qu'il est meilleur que tout autre froment. On y sème quelquefois l'orge deux fois par an, et toujours trois fois le millet. Les cultivateurs arrosent en été leurs champs tous les trois jours, en hiver tous les six, et que là réside la cause de cette grande fertilité : car il n'y a pas de pluie à attendre ; jamais les nuages ne cachent le ciel. Au sujet des horloges qui y sont faites. L’auteur dit que l’oasis était auparavant une île, détachée du continent, et que ces îles sont appelées par Hérodote les îles du paradis, mais qu’Hérodote, qui écrivit les vies d’Orphée et de Musée, l’appelle Phaeacis. Il argue du fait que c’était d’abord une île, s’appuyant sur le fait qu’on trouve des coquillages accolés aux pierres sur les montagnes qui mènent aux oasis depuis la Thébaïde et ensuite à cause de la vaste quantité de sable qui remplit trois oasis. Il nous dit qu’il y a trois oasis deux grandes, l'une extérieure, l'autre intérieure, situées vis-à-vis l'une de l'autre, à cent milles de distance. Il y en a aussi une troisième, petite, à un grand éloignement des deux autres, et qui était une île ; comme des poissons ou des débris de poissons se voient souvent dans le bec des poissons, on peut supposer avec vraisemblance que la mer n'est pas loin. L’auteur dit aussi que la famille d’Homère provenait à la Thébaïde. [34] Pendant le onzième consulat d’Honorius et le second de Constantius, le mariage de Placidia fut arrangé. Elle-même y était totalement opposée, ce qui rendit Constantius furieux dans son ménage. Néanmoins le premier jour de son consulat, son frère l’empereur Honorius la prit par la main et, bien qu’elle protestât, la remit à Constantius, et le mariage fut célébré avec splendeur. Ils avaient deux enfants, une fille Honoria et un fils Valentinien, qui à la demande pressante de Placidia reçut le titre de Nobilissime pendant le règne d’Honorius. Après la mort de ce dernier, et l’élimination de l’usurpateur Jean, il devint empereur. Honorius accepta de mauvaise grâce de donner l’empire en partenariat à Constantius, et Placidia reçut le titre d’Auguste de son frère et de son mari. Théodose, cousin d’Honorius et empereur d’Orient, à qui on envoya une ambassade d’information sur l’élévation de Constantius, refusa de la recevoir. Constantius regretta bientôt d’être empereur parce qu'il n'avait plus la liberté d'aller et de venir comme il vouloir, et de se divertir à son ordinaire. Cela affecta sérieusement sa santé et, après six mois, il eut une vision qui lui dit : « Six sont partis, le septième commence ». Il mourut de pleurésie, et avec lui mourut l’indignation soulevée par le refus de reconnaître son accession. L’attaque projetée sur l’Est fut abandonnée. Walia, roi des Goths, mourut et Théodoric lui succéda. [35] L’auteur rapporte divers périls en mer dont il échappa de justesse pendant sa vie. Alors qu’il parlait à une étoile merveilleuse appelée Urania, il s’appuya lourdement sur le mât qui se déchaussa presque et le précipita dans l’eau. Il parle également d’un perroquet, avec lequel il vécut vingt ans et qui imitait tous les actes du comportement humain. Il appelait à danser et à chanter, appelait chacun par son nom etc. Il relate aussi que, séjournant à Thèbes et Soene pour connaître le pays, les chefs et les prophètes des barbares à Talmis, appelés Blemmyes, étaient impatients de le rencontrer en raison de sa réputation. « Ils m’emmenèrent aussi loin que Talmis, dit-il, afin que je puisse voir leur pays, distant de cinq journées au-delà de Philae, jusqu'à la ville de Prima. C'était la ville de la Thébaïde la plus proche du territoire des barbares, appelée Prima par les Romains, le nom ayant été conservé bien qu'elle fut alors depuis longtemps entre les mains des barbares avec quatre autres villes, Phoenicon, Chiris, Thapis, et Talmis. » Il y avait dans ce district-là des mines d'émeraudes qui fournissaient abondamment des pierres précieuses aux rois d’Egypte. Les prophètes et les barbares l’invitèrent à les visiter mais c’était impossible sans une autorisation impériale. [36] Il raconte une histoire merveilleuse à propos d’un certain Libanius, magicien de premier ordre, qui fit son apparition à Ravenne durant le règne d’Honorius et de Constantius. Libanius avait promis d'arrêter à lui tout seul, et par la puissance de ses enchantements, une invasion de barbares qui menaçait l'empire d'Orient. Il allait être mis en demeure d'en faire l'expérience, quand l'impératrice Placidie en entendit parler, elle qui menaçait de divorcer de Constantius, à moins que le magicien et l’infidèle soient écartés. Placidia fit mettre à mort Libanius, et lui sauva ainsi sa réputation. [37] Constantius était Illyrien de Naisus en Dacie, qui, ayant servi dans de nombreuses campagnes au temps de Théodose le Grand, fut après élevé au trône. Par de nombreux traits il méritait l’estime et avait de généreuses dispositions, jusqu’à son mariage avec Placidia, qui le rendit cupide et envieux. Après sa mort, de nombreuses pétitions contre lui de ceux qu’il avait lésé financièrement furent présentées à Ravenne. Mais l’indifférence d’Honorius et son intimité avec Placidia rendirent ces pétitions inutiles et contrecarrèrent le pouvoir de la justice. [38] Après la mort de Constantius, Honorius s’éprit pour sa sœur d’une grande affection, qui, cependant, tourna rapidement à la haine et à la méfiance, aggravées par les intrigues de Spadusa et d’Elpidia (servante de Placidia), en laquelle elle avait la plus grande confiance, avec Leontius son serviteur. Ravenne connut de fréquentes émeutes, où un grand nombre de barbares, du côté de Placidia en raison de ses mariages avec Ataulf et Constantius, en venaient aux coups avec les gardes impériaux. La querelle fut à la longue si âpre que, comme résultat de la haine plutôt que de l’amour que son frère ressentait alors pour elle, Placidia, se trouvant incapable de résister, s’exila avec son enfant à Constantinople. Boniface seul lui resta loyal ; il lui envoya de l’argent quand il fut gouverneur de l’Afrique et lui rendit chaque service en son pouvoir. Il l’assista par la suite pour regagner le trône. [39] Honorius mourut d’hydropisie le 27 août et une annonce de ces nouvelles fut envoyé en Orient. Entretemps, un certain Jean prit le pouvoir. Pendant son inauguration, une voix se fit entendre, comme un oracle murmurant les mots : « Il chute, il ne reste pas » tandis que le peuple, comme pour casser le sort, criait « Il chute, il ne reste pas ». [40] Boniface était un soldat de très grande valeur, qui souvent se distinguât contre les barbares, parfois accompagné de grandes forces parfois de forces plus modestes. En une seul bataille même, en un mot, il libéra entièrement l’Afrique de nombreuses nations barbares. C’était un partisan de la justice, il méprisait la richesse. [41] [42] L’auteur dit que les grandes maisons de Rome renfermaient tout ce qu'une petite bourgade pouvait contenir : cirque, forum, temples, fontaines et bains. Ceci le conduisit à s’exclamer : « Une maison est une bourgade, une ville contient dix mille bourgades. » Il y avait aussi des Thermes immenses: ceux d'Antonin avaient été construits pour 1600 baigneurs, et très somptueux en marbre, et dans ceux de Dioclétien il y en avait plus du double. Les murs d’enceinte de Rome, selon les mesures exécutées par le géomètre Ammon, au moment où Rome fut prise par les Goths, faisait vingt et un miles de circonférence. [43] Un grand nombre des riches sénateurs tiraient de leur patrimoine un revenu de quarante centenarii d'or, sans compter leur provision de blé et de vins, qu'on peut évaluer à un tiers de la somme précédente. Venaient ensuite d'autres familles qui étaient recensées comme ayant un revenu de dix ou de quinze centenarii d'or. Probus, fils d'Olympius, dépensa douze centenarii d'or pour célébrer sa préture à l'époque de l'usurpation de Jean. Avant la prise de Rome, Symmaque, qui n'était compté que parmi les sénateurs d'une fortune médiocre, dépensa 20 centenarii d'or, pour l'entrée solennelle de son fils, qui avait été nommé à la préture ; et le sénateur Maxime en avait employé le double dans une pareille circonstance, parce qu'alors le préteur donnait pendant sept jours des jeux et des spectacles au peuple. [44] L’auteur dit que la scène des errances de l’Odyssée ne fut pas la côte de Sicile, mais les ports plus éloignés d’Italie, et que, après la traversée de l’océan, il descendit dans l’Hadès et fit de nombreux voyages périlleux sur cette mer, une opinion qu’il essaie de confirmer par divers arguments. J’ai lu de nombreux autres écrivains en accord avec lui. [45] Placidia fut renvoyée avec ses enfants de Constantinople par Théodose pour s’opposer à l’usurpateur Jean. Théodose confirma Placidia dans leurs titres : ils reprirent l’une le titre d’Auguste, l’autre celui de Nobilissime. Ils partirent avec une armée, infanterie et cavalerie, commandée par Ardaburus, son fils Aspar et Candidien. A Thessalonique, Hélion, envoyé par Théodose dont il était maître des Offices, revêtit Valentinien des marques de la dignité de César. Valentinien n’avait alors que cinq ans. [46] Sur son chemin de retour, Ardaburius est capturé par les soldats de Jean et amené à l’usurpateur avec qui il se met en bons termes. Son fils Aspar et Placidia étaient entretemps accablés de chagrin et d’anxiété mais Candidien, prenant de nombreuses villes et se faisant ainsi un grand renom, dissipa leur douleur et leur remonta le moral. L’usurpateur Jean fut mis à mort et au milieu d’une vaste foule populaire, Valentinien âgé de sept ans, apparût avec la pourpre impériale. C’est là que l’histoire se termine.