[1,21] Chapitre XXI. Remèdes par l'usage des médecines liquides. Or il se faut souvenir que quand il y aurait un fort grand danger imminent pour la sècheresse et que toutefois la nécessité contraindrait de purger, il serait de besoin d'entremettre les pilules et dedans le sirop, ou autre semblable decoction faite en eau de buglosse; lorsqu'il faut purger, faire quelquefois infusion de diasené ou de diacatholicon ou de triphère persique une once ou pour le moins une demie once. Que si le corps est plus robuste ou que le ventre soit plus restreint et plus dur, il y faut ajouster une drachme ou deux d'électuaire Hamech. La casse confite y est aussi utile et plus utile la manne. Toutefois ils ne conviennent pas pas à toute espèce de mélancholie mais à celle principalement qui est créée d'adustion et d'embrasement. Que si la mélancholie est naturelle ,ils y conviendront bien pourvu principalement qu'on ajoute au sirop double ou triple portion de polipode, pareilement autant de réglisse, de safran et de raisins secs. Item qu'on ajouste à la médecine deux onces de miel rosat liquide. Or toutefois et quand il faudra prendre le sirop, nous l'avons dit ci-dessus, mais il faudra prendre la médecine avec celui-ci par trois fois vingt jours. Mais s'il est ainsi qu'aucune humeur mélancholique n'apparaisse, ainsi seulement que la complexion soit mélancholique à savoir la qualité des membres froide et sèche, souvenez-vous qu'il ne convient pas de lâcher le ventre ou de tirer du sang, mais seulement faire le reste que nous avons dit ou que nous dirons, principalement tout ce qui appartient au corps pour médiocrement l'échauffer et l'humecter beaucoup, pour illuminer les esprits autant qu'il se peut faire et pour réchaufffer les membres. Mais où l'humeur de la melancholie redonderait, nous ne humecterons pas seulement le corps et l'humeur mais aussi nous lâcherons le ventre avec telle précaution comme nous avons dit mais non jamais avec véhémence. Car Platon nous avertit au Timée qu'il ne faut pas trop irriter une longue maladie, telle qu'est la mélancholique, avec de forts médicaments et de remèdes fâcheux. [1,22] Chapitre XXII. Règles pour donner la saignée. D'aucuns sont trop hardis à tirer du sang, ce que tous les médecins sages détestent grandement. Car le sang est le tempérament de l'humeur noire, le foyer des esprits, le trésor de la vie. Seulement nous devons tirer du sang aux hommes de lettres quand le cas le requiert, lorsque le rire immodéré, l'audace et la grande confiance démontrent qu'il y a abondance de sang ou bien la couleur rouge et les veines enflées, alors nous en devons tirer de la veine de la ratte du bras senestre, faisant l'incision grande quatre onces au matin et autant vers le soir. Puis après peu de jours, sept, pour le moins ou quatorze pour le plus, tant avec un frottement plus âpre que même en y appliquant des sangsues, irriter les enflures et durillons afin que trois ou quatre onces de sang en distillent. Ces deux choses doivent seulement être faites aux hommes plus robustes. Mais aux plus débiles, si la nécessité le requiert, il faut seulement irriter les durillons ainsi que nous avons enseigné. Mais il n'est pas loisible de lâcher le ventre par des médecines, ni donner une saignée que vous ne l'ayez auparavant adouci par des gras et moultes clystères. Et soit ce précepte commun en la nature mélancholique qu'il faut mettre peine, s'il en est besoin, que par tels clystères souvent répétés le ventre inférieur soit toujours lâché et purgé. [1,23] Chapitre XXIII. Des Electuaires et des compositions. Ensuivent les électuaires, d'entre lesquels je loue bien celui que Rasis a nommé réjouissant. Et celui qu'Avicenne au livre des vertus du coeur a composé, mais beaucoup plus celui que Mesué décrit en cette sorte. Prenez de la soie crue de couleur d'écarlate naguère teinte une livre pesant, trempez la dedans le suc et le jus exprimé de pommes douces bien flairantes et odoreuses, et en suc de buglosse et d'eau rose, une livre de chacun, vingt et quatre heures après cuisez tout cela doucement jusques à ce que l'eau rougisse. Par après tirez la soie et en outre l'exprimez diligemment. Puis soudain versez y cent cinquante drachmes de sucre fort blanc et cuisez cela dérechef jusques à tant qu'il s'épaisisse comme du miel. Ôtez-le hors du feu et y versez tandis qu'il est chaud six drachmes d'ambre crue diligemmentt broyée, et permettez que l'ambre devienne liquide. Après ajoutez y la poudre qui ensuit. Prenez du bois d'aloës cru et de la canelle six drachmes autant de l'un que de l'autre, treize drachmes de la pierre de lazul bien lavée, deux drachmes de perles, c'est-à-dire de blanches marguerites, une drachme de vrai or, une demie drachme de musc choisi. Qu'on donne de cela une ou deux drachmes avec du vin de matin et sur le soir trois ou quatre heures avant le repas. Celui là sur tous autres me plaît grandement. Mais j'approuve bien aussi le diamusc doux de Mesué, et la composition des pierres précieuses pourvu qu'elles soient prises avec de l'eau rose. Je louerais aussi merveilleusement celui qui a été composé par P. de Albano, philosophe excellent, si lui-même par l'immodéré usage de celui-ci ne redoutait une trop grande dilatation et exhalation d'esprits. Pourtant j'en ai encore pensé et inventé deux autres bien assurés et pour leur tempérament fort convenables en toute saison, âge, et naturel, auxquels l'utile est mêlé au doux. Lesquels nourrissent autant comme ils réchauffent et confortent. Davantage ils conviennent tant pour conformer l'esprit et la pointe de l'entendernent, comme pour l'aiguiser et illustrer. Prenez deux onces de sucre cuit avec des fleurs de buglosse, une once d'écorce de citron confite en sucre, deux onces de myrobalants chebules confits, une drachme de canelle élue, de sandal, et de coral, tous deux rouges. Item de soie crue de couleur d'écarlate broyée, de safran et de perles, une demie livre de chacun; d'or et d'argent la tierce partie d'une drachme de chacun; d'ambre et de musc deux grains de chacun. Versez le tout ensemble en du suc de citron ou de limon cuit en sucre. Ensuite une autre confection qui est un peu plus salubre que l'autre, et certainement beaucoup plus souple et douce. Prenez quatre onces d'amandes, de noyaux de pommes de pin trempés et lavés par l'espace d'un jour, et de grains de courge quatre onces pareillement de chacun quatre onces de sucre dur, qu'ils appellent candy, c'est-à-dire candide, et une livre et demie d'autre sucre très blanc. Versez tout cela en eau rose et en eau de limons et citrons, en laquelle de l'or et de l'argent embrasé, ayant été éteint, et les cuisez ensemble doucement. Puis ajoutez-y de la canelle, du been rouge et du sandal et coral rouges une drachme de chacun; de perles fort nettes, de safran, de soie crue de couleur d'écarlate broyée fort menu une demie drachme de chacun; douze grains d'or et autant d'argent; d'hyacinthe, d'émeraude, de safir, d'écarboucle, de chacun la tierce partie d'une drachme. Que si quelques-uns n'ont point d'or, d'argent, d'ambre, de rnusc ni de pierres précieuses, ces compositions ne laisseront point de profiter beaucoup sans cela. Trois desquelles je choisis principalement, à savoir une de Mesué laquelle j'ai recitée, et les deux nôtres que naguère nous avons décrites. Or avons-nous assez exposé ci-dessus comme il en faut user. Que si quelqu'un désire quelque chose plus simple, qui soit néanmoins accomrnodée à tous, qu'il broie une pomme de citron parfaitement mûre et parfaitement entière et qu'il la cuise en beaucoup de liqueur de sucre et en beaucoup d'eau rose, et après être ainsi cuite, qu'elle soit confite en quelque peu de canelle et de safran ou d'aromatic rosat et ainsi ternpérée qu'il en use. Prenez une once d'aromatic rosat, du sucre rosat, du sucre diabuglossat deux onces de chacun, ou enuiron, et y mêlez du diamusc. Car combien que ces deux ne soient point simples, toutefois on les a assez aisément. Que si on craint la chaleur, qu'on y ajoute du diaprunis et du sucre violat.