LIVRE II. CHAPITRE I. Irruption des Hongrois en Bavière. 1. Le roi Arnoul (Arnulf de Carinthie, vers 850 - 899) n'eut pas sitôt été enlevé du monde que Louis son fils (Louis IV, dit l'Enfant) fut élu du consentement général de tous les sujets pour lui succéder. Cette mort, dont le bruit se répandit par toute l'Europe, ne fut pas ignorée en Hongrie et le jour, auquel elle y fut apprise, fut pour ces peuples-là (les Magyars) un jour de fête et de réjouissance publique. 2. L'année suivante (900) , ils levèrent une puissante armée et assujettirent à leur obéissance la Moravie que le roi Arnoul avait autrefois conquise avec le secours de leurs armes. Ils s'emparent ensuite de la Bavière, démolissent les châteaux, brûlent les églises, égorgent les hommes et, pour se rendre formidables par l'excès de leur inhumanité, boivent le sang de ceux qu'ils ont égorgés. 3. Louis, roi de Bavière, voulant arrêter la cruauté de ses ennemis et le massacre de ses sujets, obligea par édit, sous peine de la vie, à prendre les armes tous ceux qui étaient capables de les porter. Cependant cette cruelle nation brûlait d'envie d'en venir aux mains et souhaitait de voir le jour du combat avec la même impatience qu'une personne pressée d'une soif ardente souhaite de trouver une source d'eau. J'ai appris par la lecture d'un livre qui a pour titre l'Origine des Hongrois, que, dès qu'un enfant est venu au monde, la mère lui entame le visage avec une pointe de fer afin qu'il soit accoutumé à recevoir des blessures avant que de l'être à sucer le lait. Ce qui donne lieu de croire que ce fait est véritable, c'est qu'il est constant que quand leurs proches sont à a fin de leur vie, ils se déchirent la peau pour en témoigner leur douleur. Le roi Louis ayant assemblé son armée, s'approcha d'Augsbourg, ville située sur les confins de la Souabe, de Bavière et de Franconie, où il apprit que les ennemis étaient proches. Le jour suivant, les deux armées se trouvèrent dans une vaste campagne le long du fleuve Leman.