[2,7] CHAPITRE VII. Du nombre des captifs et de ceux qui moururent par le tranchant de l'épée et par la faim. Je veux mettre en fuite l'issue d'une si longue calamité tirée du même auteur, lequel supputant le nombre de ceux que l'épée, la soif et la faim exterminèrent en trouve onze cents mille, et dit, que ces voleurs et ces coupe-jarrets, qui demeurèrent après la destruction de la ville s'entretuèrent les uns les autres. Que les jeunes hommes qui restèrent, s'ils étaient de belle taille et de bonne mine, furent réservés pour la pompe du triomphe. Le reste au-dessus de dix-sept ans fut envoyé chargé de fers aux ouvrages d'Egypte et aux mines ou fut dispersé par toutes les provinces, les uns pour les combats des gladiateurs, les autres pour ceux des bêtes farouches. Ceux qui se trouvèrent de l'âge d'entre sept et dix ans furent vendus pour esclaves et emmenés en diverses provinces, le nombre en montait jusqu'â 90 mille. Toutes ces choses se passèrent la deuxième année de l'empire de Vespasien ainsi que l'avait prédit notre Seigneur voyant les choses futures aussi clairement que les présentes, lors qu'au rapport des évangiles regardant Jérusalem, il répandit des larmes et lui dit ces mots comme lui parlant en l'oreille. "Si tu connaissais aujourd’hui ce qui t'est nécessaire pour la paix, mais c'est un secret trop caché à tes yeux car les jours viendront sur toi que tes ennemis t'environneront de tranchées, ils t'assiégeront et te presseront de tous côtés et te mettront par terre, et enseveliront tes enfants dans ton sein". {Saint Luc, XIX, 42-43} De cette sorte les tonnerres de l'avertissement divin éclataient publiquement à ses oreilles endurcies, jusqu'à tant que le juste jugement de Dieu redemandât à ses habitants le sang des justes et principalement celui de l'unique juste qu'ils avaient répandu. Ils ont été froissez de coups, abattus par les guerres et comme déracinés de leur terre natale par le tourbillon de la vengeance divine, si bien qu'il n'est resté pierre sur pierre de cette grande et superbe ville, et la persécution de ce peuple obstiné et plus dur que les pierres fut telle, que depuis le commencement du monde jusqu'à maintenant, aucun peuple n'en a souffert de semblable.