LECTURE : Jacques de Vitry (né entre 1160 - 1170, mort en 1240) fait à l'évêque de Toulouse l'éloge de ce qui se passe, au XIIe siècle, dans l'évêché de Liège : Jacques de Vitry, Vie de la Bienheureuse Marie d'Oignies, Prologue : ... (2) Unde cum sanctus et uenerabilis Pater, Ecclesiae Tolosanae Episcopus, a ciuitate sua ab haereticis depulsus, ad partes Galliae petiturus auxilium contra inimicos fidei deuenisset, et tandem usque in Episcopatum Leodii, quasi tractus odore et fama quorumdam, Deo in uera humilitate militantium, descendisset; non cessabat admirari fidem et deuotionem, maxime sanctarum mulierum, quae summo desiderio et reuerentia Christi Ecclesiam et sanctae Ecclesiae Sacramenta uenerabantur: quae in partibus suis fere ab omnibus uel penitus abiiciebantur, uel paruipendebantur: ualdeque desiderabat ut quaedam quae uidit et audiuit, ne perirent, tamquam fragmenta colligerentur. Scis etenim Pater sancte, Pastor Tolosane, imo totius ecclesiae Christi, in diebus nostris columna fortitudinis (ad te enim mihi sermo est, quo praecipiente et de negligentia me redarguente, praesens opusculum ausus sum attentare) nosti, inquam, quod cum uenires ad partes nostras, iam tibi uisum est esse quasi in terra promissionis. Te enim narrante audiui, quod reliqueras Aegyptum in partibus tuis, et transiens per desertum, terram promissionis in partibus Leodii inuenisti. Cum enim in partibus tuis, multos de partibus nostris Cruce signatos, contra haereticos fide feruentes, in tribulatione miram patientiam habentes, in operibus misericordiae abundantes, cognouisses; imo (sicut mihi dixisti) quasdam mulieres magis pro uno ueniali lugentes, quam homines in partibus tuis pro mille mortalibus, mirareris; ueniens ad partes nostras, sicut audiuisti, sic uidisti, ut imo plusquam audiuisti; itaque uix posses credere, nisi fide oculata per experientiam cognouisses. Traduction française quelque peu "libre" : [Vie de la bienheureuse Marie d'Oignies (1177 - 1213) traduite du latin du cardinal de Vitry. Bruxelles, V. Devaux, 1868] ... (2) Pénétré de cette vérité, le vénérable évêque de Toulouse, chassé de son siége par les hérétiques albigeois, était venu dans la Gaule belgique chercher du secours contre les ennemis de la foi. Attiré dans l'évêché de Liége par la haute réputation d'un grand nombre de vrais serviteurs de Dieu, il ne pouvait assez admirer leur foi et leur dévotion ; il admirait principalement les vertus de plusieurs saintes femmes qui avaient un attachement inviolable à notre mère la Sainte-Église et la plus grande vénération pour ses sacrements; tandis que, dans son diocèse, la religion et ses devoirs étaient méprisés et même totalement abandonnés. Ce vénérable évêque, persuadé de ce que peut l'exemple, désirait ardemment que l'on recueillît les choses édifiantes qu'il avait vues et entendues, pour en perpétuer la mémoire. Vénérable Prélat, vous qui, dans ce siècle, êtes non seulement le digne pasteur de l'Église de Toulouse, mais une des colonnes inébranlables de l'Église universelle de Jésus-Christ ; c'est à vous que j'adresse cette préface. C'est par vos ordres et pour éloigner de moi tout soupçon de la négligence dont vous eussiez pu m'accuser, que j'ose entreprendre cet ouvrage. Vous n'ignorez pas qu'arrivé dans nos contrées, il vous parut être dans un autre monde ; je me souviens de vous avoir entendu dire, qu'en sortant de votre pays vous étiez sorti de l'Égypte, et qu'après avoir traversé le désert, arrivé à Liége, vous aviez trouvé cette terre bienheureuse que Dieu a promise à nos pères. Votre pays fut témoin qu'un nombre considérable des nôtres, hommes fervents dans la foi, d'une patience admirable dans les souffrances, constants dans l'exercice des oeuvres de miséricorde, étaient entrés dans la croisade pour faire la guerre aux hérétiques ; Votre Éminence y a vu de pieuses femmes, pénétrées de la plus vive douleur pour une faute même légère, tandis que les hommes de vos contrées vivaient dans une impénitence opiniâtre, après avoir commis les crimes les plus énormes. En arrivant ici, vous fûtes obligé de convenir que la réalité des choses que vous voyiez était infiniment au-dessus de ce que vous en aviez entendu : à peine pouviez-vous croire ce qui se passait sous vos yeux. ...