[2,0] DU RÉGIME DANS LES MALADIES AIGUES. APPENDICE. [2,1] La fièvre ardente naît quand les petites veines, desséchées pendant l'été, attirent en elles-mêmes des humeurs âcres et bilieuses; une fièvre considérable s'établit, et le corps est en proie à un sentiment de lassitude, et à la douleur. La fièvre ardente est produite, la plupart du temps, par une marche forcée, et par une soif prolongée, qui font que les petites veines desséchées attirent en elles-mêmes des fluxions âpres et chaudes. La langue devient rude, sèche et très noire; le malade ressent, dans l'abdomen, des douleurs comme mordantes; les évacuations alvines sont très humides et jaunes ; le malade est en proie à une soif excessive, aux insomnies et quelquefois même au délire. Dans cette affection, on donnera à boire de l'eau et de l'hydromel cuit étendu d'eau, autant que le malade voudra; si la bouche devient amère, il convient de le faire vomir et de procurer par les lavements quelques déjections alvines ; si ces moyens n'amènent pas de solution, vous purgerez le malade avec du lait d'ânesse bouilli ; vous ne lui ferez prendre aucune substance ni salée ni âcre, car il ne la supportera pas ; vous ne lui donnerez pas de ptisane jusqu'à ce qu'il soit hors du temps des crises. S'il survient une épistaxis, la maladie se résout; elle se résout si des sueurs légitimes et critiques s'établissent avec des urines blanches, épaisses et donnant un sédiment uni; elle se résout encore s'il se forme un dépôt. Une solution, sans aucun de ces phénomènes, annonce ou une récidive, ou une douleur des hanches, ou une douleur des membres inférieurs ; le malade expectorera des matières épaisses s'il doit recouvrer la santé. Autre espèce de fièvre ardente : il y a flux de ventre, soif considérable, la langue est rude, sèche, et le malade a un goût salé dans la bouche; l'urine ne coule pas, le sommeil est absent, les extrémités se refroidissent. Si le malade n'a pas une épistaxis, ou un dépôt aux environs du cou, ou une douleur des jambes, ou une expectoration de crachats épais (ajoutons, quand le siège du mal est dans le ventre, ou une douleur dans la hanche, ou une lividité des parties génitales), la maladie ne se juge pas ; la tension des testicules est aussi un phénomène critique. Donnez des bouillies capables d'attirer les humeurs. [2,2] Vous saignerez dans les maladies aiguës, si l'affection paraît intense, si les malades sont dans la vigueur de l'âge, et s'ils conservent leur force. Dans les cas de pleurésie avec mal de gorge, prescrivez au malade des eclegmes sialagogues ; mais, si la faiblesse parait trop grande, et si vous avez déjà tiré beaucoup de sang, bornez-vous à faire prendre tous les trois jours un clystère au malade, jusqu'à ce qu'il soit hors de danger, et tenez-le à l'abstinence, s'il en est besoin. [2,3] Les hypochondres gonflés par une autre cause que l'interruption de l'air intérieur ; la tension du diaphragme ; la respiration entrecoupée, avec orthopnée sans expectoration, dans les cas où le pus n'est pas encore formé, mais où ces accidents sont produits par la suffocation ; surtout les fortes douleurs du foie et les pesanteurs de la rate ; toutes les autres phlegmasies et douleurs fortes au-dessus du diaphragme ; enfin les maladies aiguës où il y a des engorgements d'humeurs, ne se résolvent pas si on les attaque d'abord par la purgation. La saignée en est le remède capital ; ensuite on en vient aux clystères, à moins que l'affection ne soit grande et intense; si elle l'est, une purgation est nécessaire après la saignée ; mais la saignée avec la purgation a besoin de précautions et de modération. Les médecins qui cherchent à procurer., par des purgations administrées dès le début, la résolution des maladies phlegmasiques, ne délivrent pas le corps de ce qui est tendu et enflammé, car la maladie, dans sa crudité, ne le permet pas, mais ils déterminent la fonte des parties qui sont saines et qui résistent au mal; le corps ayant été débilité, la maladie prend le dessus, et, quand la maladie a pris le dessus, la guérison n'est plus possible. [2,4] La perte subite de la faculté de parler doit être attribuée à la réplétion excessive des veines, si cet accident survient pendant la santé sans cause extérieure ou sans autre cause violente; dans ces cas, il faut ouvrir la veine interne du bras droit, et tirer du sang en quantité plus ou moins grande, suivant la constitution et l'âge du malade. La plupart de ces malades présentent les symptômes suivants : rougeur du visage, fixité du regard, distension des mains, grincements des dents, pulsations, serrement des mâchoires, refroidissement des extrémités, suspension du cours de l'air dans les veines. [2,5] Des douleurs fixées antécédemment sur un point, y attirent des flux de bile noire et d'humeurs âcres; les parties internes font éprouver un sentiment de morsure; les veines irritées à leur tour et devenues trop sèches se tendent, et, enflammées, elle attirent les humeurs, qui affluent. De la sorte, le sang étant altéré et l'air n'y pouvant parcourir les voies naturelles, cette stase produit les refroidissements, les obscurcissements de la vue, la perte de la parole, la pesanteur de tête, et les convulsions dès que la stase gagne le coeur, ou le foie, ou la grande veine; accidents suivis d'épilepsie ou de paralysie, si les fluxions tombent dans ces organes par les veines attenantes, et si à cause de la dessication l'air n'y peut suivre son chemin. Ces malades doivent être d'abord fomentés, puis saignés aussitôt dès le début, tandis que l'air intérieur et les humeurs qui nuisent, sont encore en mouvement ; puis on rendra des forces aux malades, et, prenant en considération les crises, on procurera, si le mal ne s'amende pas, des évacuations par le haut. Quant aux voies inférieures, si les lavements ne suffisent pas, on fera prendre au malade du lait d'ânesse cuit; il n'en boira pas moins de douze cotyles (2,24 litres), et même, s'il est vigoureux, il dépassera le nombre de seize (3,32 litres). [2,6] Première angine (angine de l'arrière-gorge): elle survient quand, de la tête, une fluxion abondante et visqueuse se précipite, l'hiver ou le printemps, dans les veines jugulaires, qui attirent, à cause de leur largeur, un flux plus abondant. Cette fluxion, étant froide et visqueuse, forme une obstruction, et, embarrassant les voies de l'air et du sang, elle coagule le sang de proche en proche, elle le rend immobile et stagnant par la propriété qu'elle a de refroidir et d'engorger. Il en résulte de la suffocation, attendu que la langue devient livide, s'arrondit, et se recourbe, à cause des veines sublinguales. (On voit, en effet, si l'on coupe la luette, que l'on appelle aussi columelle, une grosse veine des deux côtés.) Donc, lorsque les veines sublinguales sont pleines, et se fixent dans la langue, dont le tissu est lâche et spongieux, cet organe, à cause de la sécheresse, recevant forcément le liquide qui vient des veines, de plat, devient rond; livide, de bien coloré ; dur, de souple ; inflexible, de flexible ; de sorte que la suffocation est rapidement imminente, à moins de prompts secours. Ces secours sont : la saignée des bras, l'ouverture des veines sublinguales, les purgations par les eclegmes, les gargarismes chauds; on rase la tête ; on applique, sur la tête et sur le col, un emplâtre de cire; on enveloppe ces parties d'étoffes de laine, et l'on fait des fomentations avec des éponges molles, trempées dans l'eau chaude et exprimées; le malade boira de l'eau et de l'oxymel, non froids ; et il prendra du suc de ptisane, lorsque, la crise étant survenue, il sera définitivement hors de danger. Autre angine (angine laryngée): quand, dans l'été ou dans l'automne, la fluxion descend chaude et âcre de la tête (car la saison lui donne l'âcreté et la chaleur), elle irrite par ces propriétés, elle ulcère, et remplit d'air ; il survient de l'orthopnée et une grande sécheresse ; la gorge examinée ne présente aucune tuméfaction ; les tendons derrière le cou sont contractés, et ils semblent être tendus par le tétanos ; la voix se perd ; la respiration est petite ; l'inspiration de l'air est fréquente et violente ; la trachée-artère s'ulcère; le poumon s'enflamme, ces malades ne pouvant faire entrer, dans leur poitrine, l'air du dehors. Cette espèce d'angine, à moins qu'elle ne se porte spontanément sur les parties extérieures du cou, est plus funeste, et expose à un danger plus inévitable, et à cause de la saison, et à cause des humeurs chaudes et âcres qui l'engendrent. [2,7] Si la fièvre commence, pendant que les intestins contiennent d'anciennes matières, ou peu de temps après un repas, il faut se tenir, qu'il y ait ou non douleur de côté, dans le repos jusqu'à ce que les aliments soient descendus d'abord dans le ventre inférieur ; pour boisson, on donnera l'oxymel ; lorsque la pesanteur sera arrivée aux lombes, on nettoiera les intestins avec un lavement, ou on prescrira un purgatif; après la purgation, le malade prendra d'abord des ptisanes, de l'hydromel pour boisson, puis il mangera des aliments solides et des poissons cuits; pour la nuit, il prendra un peu de vin coupé; le jour, de l'hydromel étendu d'eau. Si les vents sont très fétides, on provoquera semblablement une évacuation soit avec un suppositoire, soit par un lavement; sinon, on continuera à faire boire au malade de l'oxymel jusqu'à ce que les matières soient descendues dans les voies inférieures, et alors on lui fera prendre un lavement. Si la fièvre ardente survient pendant que le ventre est ouvert, il faudra, dans le cas où vous jugeriez une purgation convenable, ne pas la prescrire dans les trois premiers jours, et la reculer jusqu'au quatrième. Quand vous avez prescrit une purgation, permettez les ptisanes en surveillant les redoublements des fièvres ; car il faut en donner, non à l'approche de ces redoublements, mais lorsqu'ils touchent à leur fin, mais lorsqu'ils ont complétement cessé, et le plus loin possible de leur retour. Tant que les pieds sont froids, n'administrez ni ptisane ni boisson, ni rien de semblable, mais croyez qu'il est d'une importance capitale de s'en abstenir jusqu'à ce que la chaleur y soit tout-à-fait rétablie, et alors vous pourrez prescrire ce qui sera convenable. En général, le refroidissement des pieds est un signe d'un redoublement prochain de la fièvre; si à ce moment vous faites prendre quelque chose au malade, vous commettrez la plus grande faute, car vous ne donnerez pas un médiocre accroissement à la maladie. Quand, au contraire, la fièvre tombe, les pieds deviennent plus chauds que le reste du corps ; en effet, elle croît refroidissant les pieds, s'allumant dans la poitrine, et envoyant sa flamme jusque dans la tête. Toute la chaleur ayant pris avec force son courant vers le haut et s'exhalant vers la tête, il est naturel que le froid s'empare des pieds, parties nerveuses et dépourvues de chair ; mais, en outre, étant très éloignés des régions les plus chaudes, ils se refroidissent lorsque la chaleur se rassemble dans la poitrine ; par la même analogie, lorsque la fièvre se résout et se dissipe, la chaleur descend dans les pieds, et c'est le moment où la tête et la poitrine se refroidissent. Ces phénomènes doivent fixer l'attention du médecin; car, si, tant que les pieds sont froids, le ventre est nécessairement chaud et l'estomac soulevé, si l'hypochondre est tendu, si le corps est en proie à l'agitation à cause du trouble intérieur, si l'intelligence s'égare, si le malade souffre, s'il éprouve des tiraillements, s'il veut vomir, et, si, vomissant des matières de mauvaise nature, son malaise empire, au contraire, lorsque la chaleur est descendue dans les pieds, et que l'urine coule, quand même il n'y aurait pas de sueur, tous les accidents se calment. C'est donc à ce moment qu'il faut prescrire la ptisane, qui auparavant eût été pernicieuse. [2,8] Dans les fièvres, pendant le cours desquelles le ventre est toujours relâché, le médecin, en donnant une attention particulière à tenir les pieds chauds, en y appliquant des emplâtres de cire, et en les entourant de bandelettes, prendra garde qu'ils ne deviennent pas plus froids que le reste du corps; s'ils sont chauds, il n'y fera aucune application chaude, seulement il veillera à ce qu'ils ne se refroidissent pas ; il prescrira des boissons en aussi petite quantité que possible, de l'eau froide ou de l'hydromel. Dans les fièvres où le ventre est relâché, l'intelligence troublée, la plupart des malades détachent les brins de leur couverture, se grattent les narines, répondent peu à peu aux demandes qu'on leur fait, mais, laissés à eux-mêmes, ne disent rien de raisonnable ; ces symptômes me paraissent dépendre de l'atrabile. Dans un tel état, si le flux de ventre persiste et si le corps se fond, il me paraît convenable de prescrire des ptisanes plus froides et plus épaisses que d'ordinaire, et des boissons resserrantes, vineuses ou même astringentes. Dans les fièvres où dès le début il survient des vertiges, des battements dans la tête et des urines ténues, il faut s'attendre à ce que la fièvre redoublera vers l'approche des crises, je ne serais même pas surpris que les malades eussent du délire. Si, dans le début, les urines sont nuageuses et épaisses, on purgera modérément le malade, pourvu du reste que la purgation convienne; si au contraire dès le début les urines sont ténues, on ne prescrira point de purgation; mais, si les lavements paraissent utiles, on y aura recours. Voici comment il faut traiter ces malades : on prescrira le repos, des onctions, et on enveloppera également le corps de couvertures; on prescrira pour boisson de l'hydromel coupé d'eau, et pour aliments, le soir, le suc de ptisane. Ayez soin dès le commencement de déterminer les évacuations par les lavements, mais ne donnez point de purgatif ; car, si vous provoquez par les purgatifs quelques évacuations alvines, l'urine n'éprouve pas de coction, et la fièvre reste longtemps sans sueur et sans crise. Lorsque le temps des crises approche, ne donnez point de ptisane s'il y a de la perturbation, mais donnez-en si la maladie se relâche et tourne vers le mieux. Quant aux autres fièvres, il faut toujours en surveiller les crises, et supprimer les ptisanes à ce temps de la maladie. Les fièvres de cette nature ont coutume de se prolonger, et de déterminer des dépôts qui se forment vers les oreilles et le cou si les parties inférieures sont froides ; si elles ne sont pas froides, les changements sont différents ; il survient aussi des épistaxis, et le ventre se dérange. Dans les fièvres où il y a soulèvement de l'estomac, tension des hypochondres, besoin de changer sans cesse de position dans le lit, et refroidissement de toutes les extrémités, il faut beaucoup de soin et de précaution ; on passera le temps de la maladie, sans donner autre chose que de l'oxymel coupé d'eau; et l'on ne permettra les ptisanes que lorsque la maladie aura cessé, et l'urine subi la coction. Le malade doit reposer dans un appartement obscur, et être couché sur un lit aussi mou que possible; vous l'engagerez à rester longtemps dans la même position et à s'agiter le moins qu'il pourra; cette précaution est particulièrement utile. Vous appliquerez, sur l'hypochondre, de la graine de lin, en ayant soin que cette application ne détermine pas de frisson. Le cataplasme sera tiède, et cuit avec de l'eau et de l'huile. On interrogera les urines sur l'issue de la maladie; si elles sont épaisses et d'un jaune pâle, c'est un bon signe ; si elles sont ténues et noires, c'est un mauvais signe ; si l'urine varie, cela indique la prolongation de l'affection, et nécessairement le malade éprouvera, de son côté, des variations en pis et en mieux. Les fièvres irrégulières doivent être abandonnées à elles-mêmes, jusqu'à ce qu'elles se fixent ; une fois fixées, on les combat par le régime et le traitement convenables, en consultant la constitution du malade. [2,9]. Les malades se présentent sous beaucoup d'aspects différents ; par conséquent le médecin ne laissera échapper à sa vigilance ni parmi les causes celles qui sont manifestes et celles que trouve le raisonnement, ni parmi les symptômes ceux qui doivent apparaître suivant le nombre pair ou impair; c'est surtout des jours impairs qu'on doit se défier; car ces jours sont décisifs dans un sens ou dans l'autre. Il faut porter son attention sur le premier jour où le malade s'est senti atteint, et rechercher d'où et par quoi le mal a pris origine ; car c'est le point qu'il importe d'éclaircir le premier. En interrogeant le malade et en examinant tout avec soin, on demandera d'abord dans quel état est la tête, s'il n'y souffre pas et s'il n'y éprouve pas de pesanteur; on examinera ensuite si les hypochondres et la poitrine sont sans douleur ; pour l'hypochondre, s'il est douloureux et tuméfié, s'il présente une inégalité entre l'un et l'autre côté, et s'il donne au malade un sentiment de plénitude et de dégoùt; pour la poitrine, si elle est douloureuse, et s'il y a, en même temps que la douleur, une petite toux, des tranchées ou de la souffrance dans le ventre. Il faut, quand un de ces symptômes se montre, dans l'hypochondre particulièrement, provoquer des évacuations par les lavements ; le malade boira de l'hydromel cuit et chaud. Le médecin s'informera encore si le malade, lorsqu'il se lève, est pris de défaillances, et si chez lui la respiration est en bon état. Examinez les selles, si elles sont fortement noires, ou louables comme celle des gens en santé; examinez si la fièvre redouble au troisième jour. Ayant, dans ces affections, considéré très attentivement le malade au troisième jour, il importe, à côté de ce troisième jour, de comparer les autres symptômes ; et si le quatrième présente quelques accidents semblables à ceux du troisième, l'état du malade devient dangereux.Voici des signes à consulter: les selles noires annoncent la mort ; celles qui ressemblent à l'état de santé, sont, quand elles offrent chaque jour le même caractère, un indice de salut. Quand les lavements ne procurent pas d'évacuations, et que le malade, bien que la respiration soit bonne, éprouve des défaillances ou en se mettant sur son siége, ou même dans son lit, il faut, si ces symptômes se manifestent dès le début chez le malade ou la malade, s'attendre au délire. Les mains doivent aussi être l'objet de l'attention : si elles sont tremblantes, il surviendra, dans ce cas, une épistaxis ; dans ce cas encore, il faut examiner les narines, et voir si l'air de la respiration les traverse également ; la respiration se fait-elle fortement par les narines, des convulsions ont coutume de se manifester ; et, si elles se manifestent, il faut attendre la mort du malade; c'est un beau pronostic à porter. [2,10] Dans une fièvre d'hiver, la langue étant âpre, le malade éprouvant des défaillances, il est ordinaire que la maladie ait une rémission. Néanmoins, il faut tenir le malade à l'abstinence, aux boissons aqueuses, à l'hydromel, aux sucs de ptisane, sans se fier à la rémission, car ceux qui présentent ces symptômes sont en danger de mourir ; cela étant bien vu, portez un pronostic, si vous le voulez, après avoir tout pris en exacte considération. Quand, dans les fièvres, il survient, le cinquième jour, quelque symptôme redoutable, un flux soudain de ventre, une défaillance, la perte de la parole, des convulsions ou le hoquet, il se joint ordinairement un sentiment de nausée à ces symptômes, et des sueurs se montrent sous les narines, au front et à la partie postérieure du cou et de la tête; les malades qui présentent cette réunion de symptômes, succombent, avec la respiration embarrassée, dans un intervalle de temps qui n'est pas long. Dans des fièvres, il se forme parfois, aux jambes, des tumeurs qui se prolongent et qui n'arrivent pas à maturation, l'état fébrile persistant ; s'il survient de la suffocation sans qu'aucun gonflement se manifeste dans la gorge, et si les tumeurs des jambes, sans mûrir, disparaissent, le malade, dans ce cas, est ordinairement pris d'épistaxis ; si l'hémorrhagie est abondante, cela indique la solution de la maladie; sinon, la prolongation; et moins il s'écoulera de sang, plus le danger sera grand, et la durée longue. Si, du reste, l'état du malade est satisfaisant, on doit croire qu'il lui reviendra des douleurs dans les pieds ; le mal s'étant jeté sur les pieds, si le malade reste en proie à la douleur et à l'inflammation, et que la résolution ne s'opère pas, les douleurs se porteront peu à peu au cou, à la clavicule, à l'épaule, à la poitrine, à une articulation, et il devra se former là quelque tumeur. Ces tumeurs s'étant éteintes, si les mains sont prises de contraction ou de tremblement, le malade éprouve des convulsions et le délire; il se fait même, aux sourcils, des phlyctènes et des rougeurs; et l'une des paupières, se tuméfiant, déborde l'autre ; une inflammation dure envahit ces parties, l'oeil se gonfle fortement, et le délire éprouve un grand accroissement; le délire est plus marqué les nuits que les jours. Les signes funestes se manifestent beaucoup plus suivant le nombre impair que suivant le nombre pair ; mais, quel que soit le nombre où ils se montrent, ils deviennent mortels. Ces malades, si vous jugez convenable qu'ils soient purgés dès le début, doivent l'être avant le cinquième jour, au cas où il y a des gargouillements dans le ventre ; sinon, il faut les laisser sans purgation. S'il y a des gargouillements et si les déjections sont bilieuses, procurez des évacuations modérées avec la scammonée (convulvulus sagittifolius) ; pour le reste du traitement, il faut, afin que le malade se trouve mieux, donner aussi peu que possible de boissons et de ptisanes, jusqu'à ce que la maladie ait dépassé le quatorzième jour et éprouvé un amendement. Chez un fébricitant arrivé au quatorzième jour, la perte de la parole n'annonce, d'ordinaire, ni une solution prompte de la maladie ni un prompt changement; mais elle en indique la prolongation; ainsi, ce signe apparaissant au quatorzième jour, la maladie aura une plus longue durée. Chez un fébricitant, au quatrième jour, si la langue articule d'une manière confuse, et s'il y a des déjections bilieuses, le délire a coutume de survenir ; il importe de faire attention à ce qui suivra ultérieurement ces symptômes. Dans les maladies aiguës, pendant l'été et l'automne, une hémorrhagie soudaine annonce de la tension, la nécessité de porter le traitement sur les veines, et pour le lendemain l'émission d'urines ténues; si le malade est dans la force de l'âge et livré aux exercices gymnastiques, ou d'un corps bien charnu, ou d'une complexion mélancolique, ou s'il a les mains tremblantes par l'effet de la boisson, il sera d'un médecin habile de prédire, dans ce cas, que le délire ou la convulsion surviendra; que, si ces symptômes se manifestent dans les jours pairs, cela vaut mieux, mais que, s'ils éclatent dans la crise, le danger est imminent ; que, si une abondante hémorrhagie procure une issue à la plénitude accumulée soit dans les narines soit dans le siége, il se formera soit un dépôt, soit des douleurs dans les hypochondres, ou dans les testicules, ou dans les jambes ; ces derniers accidents ayant subi la coction, les voies s'ouvrent à une expectoration épaisse, des urines avec un sédiment uni et blanc. Dans la fièvre singultueuse, faites broyer ensemble du suc d'assa-foetida, de l'oxymel, et le daucus de Crète (athamanta cretensis, Lin.), et donnez à boire ce mélange; faites aussi avec le galbanum, le cumin (cuminum cyminum, Lin.) et le miel, un éclegme, que le malade prendra, et là-dessus prescrivez le suc de la ptisane ; la guérison sera impossible s'il ne survient des sueurs critiques et des sommeils réguliers, si des urines épaisses et âcres ne sont pas rendues, ou si la maladie ne se fixe en un dépôt. Faites un eclegme avec la myrrhe et les graines de pomme de pin ; donnez à boire au malade de l'oxymel en aussi petite quantité que possible; si le malade est très altéré, vous lui prescrirez de l'eau d'orge. [2,11] Il faut examiner de la manière suivante les affections péripneumoniques et pleurétiques : si la fièvre est aiguë, s'il y a douleur dans un côté de la poitrine ou dans tous les deux, si le malade souffre pendant l'expiration, s'il tousse, si les crachats sont rouillés ou livides, ou ténus, spumeux et d'un rouge de sang, enfin s'ils présentent quelque différence avec les crachats de bonne nature, il faut se comporter ainsi : la douleur s'étendant en haut vers la clavicule, ou vers la mamelle et le bras, on ouvrira la veine interne du bras du côté malade. La quantité de sang extraite sera proportionnelle à la constitution du corps, à la saison, à l'âge, à la couleur ; et, si la douleur est aiguë, on poussera hardiment la saignée jusqu'à la défaillance, puis on prescrira un lavement. Si la douleur occupe la région inférieure à la poitrine, et si la tension est forte, vous prescrirez aux pleurétiques une purgation douce, mais vous ne leur donnerez rien pendant que la purgation opère ; après la purgation, ils prendront de l'oxymel. La purgation sera administrée le quatrième jour; pendant les trois premiers, on fera prendre des lavements, et, s'ils ne soulagent pas, on purgera ainsi qu'il a été dit. On surveillera le malade jusqu'à ce qu'il soit sans fièvre et arrivé au septième jour dès lors, s'il paraît hors de danger, il prendra un peu de suc de ptisane, léger d'abord et mêlé à du miel. Si la convalescence fait des progrès, si la respiration est bonne, si les côtés sont indolents, on donnera deux fois par jour le suc de ptisane, dont on augmentera peu à peu la consistance et la quantité. Mais, si la convalescence ne marche pas facilement, on donnera moins de boisson, et, pour nourriture, du suc léger de ptisane en petite quantité et une seule fois; on choisira pour cela l'heure où le malade est mieux ; ce que l'on connaîtra par les urines. A ceux qui sont sur la fin de la maladie, il ne faut pas donner de ptisane, avant que vous ne voyez la coction manifestée dans les urines ou dans l'expectoration cependant, si, purgé, le malade a des évacuations abondantes, il est nécessaire de donner de la ptisane, mais en moindre quantité et plus légère ; autrement, la vacuité des vaisseaux ne lui permettra ni de dormir, ni de digérer, ni d'attendre les crises. A part cette exception, il faut que les humeurs crues se soient fondues, et que ce qui faisait obstacle ait été rejeté ; alors rien ne s'opposera plus à l'alimentation. Les crachats sont cuits, quand ils sont devenus semblables à du pus; les urines le sont, quand elles ont un sédiment rouge comme de l'ers (ervum ervilia, Lin.). Quant aux autres douleurs de côté, rien n'empêche d'y appliquer des fomentations et des emplâtres de cire ; on frottera, avec de l'huile chaude, les jambes et les lombes, et on les oindra avec de la graisse. On recouvrira les hypochondres jusqu'aux mamelles avec de la graine de lin. Quand la péripneumonie est arrivée à son summum, il n'y a rien à faire sans purgation ; et il est fâcheux que le malade ait de la dyspnée, que l'urine soit ténue et âcre, qu'il survienne des sueurs autour du cou et de la tète. De telles sueurs sont mauvaises; car elles se montrent à mesure que par la suffocation, le râle et la violence le mal prend le dessus, et il triomphe à moins qu'il ne se fasse un flux d'urines abondantes et épaisses, et que des crachats cuits ne soient expectorés ; quelque soit celui de ces phénomènes qui survienne spontanément, il résout la maladie. Eclegme pour les péripneumoniques : du galbanum et des grains de pomme de pin, dans du miel attique. Autre expectorant : de l'aurone (artemisia abrotanum, Lin.), dans de l'oxymel, et du poivre. Purgatif: faites bouillir de l'hellébore noir (helleborus orientalis, Lin.), et donnez à boire aux pleurétiques dans le début et pendant que la douleur se fait sentir. On prescrit utilement, dans les affections du foie et dans les fortes douleurs venant du diaphragme, une boisson d'opoponax (pastinaca opoponax, Lin.), qu'on fait bouillir dans l'oxymel et qu'on coule ; et en général un remède qui doit agir sur les selles et sur les urines, sera donné dans le vin et dans le miel ; s'il doit agir sur les selles seulement, il sera donné en plus grande quantité dans de l'oxymel étendu d'eau. [2,12] La dysenterie supprimée produira quelque dépôt ou quelque tumeur, à moins qu'il ne survienne une fièvre, des sueurs, une urine épaisse et blanche, une fièvre tierce, une varice, ou qu'une douleur ne se fixe dans le testicule ou dans les jambes, ou dans la hanche. [2,13] Dans une fièvre bilieuse, l'ictère, s'établissant avec le frisson avant le septième jour, résoud la maladie ; mais sans frisson, s'il survient hors des temps critiques, il est mortel. [2,14] Le tétanos des lombes et l'interception des esprits dans les veines par les humeurs atrabilaires, se dissipent par la saignée. Dans certains cas, les parties antérieures du corps sont fortement contractées par les tendons ; des sueurs apparaissent au cou et au visage ; la douleur mord et dessèche les tendons du sacrum, qui, ayant le plus de grosseur, maintiennent le rachis, là où s'implantent les ligaments les plus considérables pour aller se terminer dans les pieds; si la fièvre et le sommeil ne surviennent pas, si les urines qui suivent n'ont pas de coction, et s'il ne se manifeste point de sueurs critiques, on fera boire au malade du vin fort de Crète ; on lui donnera à manger de la farine cuite, on l'oindra et on le frottera avec un cérat, et, après lui avoir baigné les jambes dans un vase plein d'eau chaude, on les lui enveloppera jusqu'aux pieds; on enveloppera de même les bras jusqu'aux doigts, et le dos depuis le cou jusqu'aux hanches, avec une toile cirée, de manière qu'elle s'étende jusqu'au côté extérieur du corps; par intervalle, on fera des fomentations avec des vases de terre remplis d'eau chaude ; et, après avoir recouvert d'un linge le malade, on le tiendra couché. On ne purgera pas le malade, et on n'emploiera que les suppositoires, pourvu qu'il y ait une constipation prolongée. S'il survient quelque soulagement, tant mieux ; sinon, broyez dans un vin odorant la racine de bryone (bryonia cretica, Lin.), et le daucus de Crète (athamantha cretensis, Lin.) ; faites boire au malade cette infusion de bonne heure à jeûn, avant les affusions, et aussitôt après, faites-lui manger la farine cuite chaude en aussi grande quantité que possible ; il boira, par-là-dessus, autant qu'il voudra, du vin bien trempé. Si le mal éprouve quelque relâchement, c'est pour le mieux ; sinon, il faut porter un pronostic fâcheux. [2,15] Toutes les maladies ont leur solution ou par la bouche, ou par le ventre, ou par la vessie, ou par quelque autre organe semblable. Quant à la sueur, elle est commune à tous. [2,16] Il faut purger par l'hellébore ceux chez qui une fluxion descend de la tête. Mais quand un empyême survient soit après le dépôt d'une maladie, soit après la rupture d'une veine, ou par l'intempérie des humeurs, ou par toute autre action violente, ne prescrivez pas l'hellébore, car il ne servira à rien, et, si le malade éprouve quelque accident, on l'attribuera à ce remède. Au contraire, s'il y a résolution du corps, ou douleur prolongée dans la tête, ou obstruction des oreilles ou du nez, ou ptyalisme, ou pesanteur des genoux, ou gonflement général extraordinaire, vous prescrirez l'hellébore, quel que soit celui de ces phénomènes qui se manifeste, pourvu qu'il n'ait été causé ni par l'excès des boissons, ni par l'abus des plaisirs de l'amour, ni par les chagrins, ni par les inquiétudes, ni par les veilles. Si une de ces causes a agi, c'est contre elle qu'il faut diriger le traitement. [2,17] Les douleurs que la marche cause dans les côtés, dans le dos, dans les lombes, dans Ies hanches, et tout ce qui fait que l'on souffre, par une cause manifeste, en respirant souvent des excès de vin, et des aliments flatulents, produisent des douleurs dans les lombes et dans les hanches; ceux qui éprouvent ces accidents ont de la dysurie ; la marche en est la cause, ainsi que des coryzas et des bronchites. [2,18] Dans le régime alimentaire, ce sont ordinairement les changements apportés à la manière habituelle de vivre, qui se font le plus sentir. Ceux qui n'ont pas l'habitude de déjeûner, s'ils déjeûnent, éprouvent de la surcharge dans l'estomac, de la somnolence et de la plénitude; s'ils dînent par dessus, le ventre se dérange ; il convient, dans ce cas, de prendre un bain et de dormir, puis, après le sommeil, de faire une longue promenade à pas lents ; s'il y a une selle, on dînera, et on boira moins de vin et moins trempé; s'il n'y a pas de selle, on oindra le corps à chaud; s'il y a soif, on boira un vin aqueux ou doux, et l'on se reposera si l'on ne peut dormir, on se reposera davantage. Du reste, on suivra le même régime qu'après une débauche de table. Quant aux boissons, les vins qui sont aqueux, passent plus lentement ; ils tournent et flottent dans les hypochondres, sans pousser aux urines; l'homme qui en aura beaucoup bu, ne devra faire aucun travail avec activité, ni rien qui demande une exsertion de force ou de vitesse; mais qu'il garde, autant que possible, le repos, jusqu'à ce que tout ait été digéré, liquides et aliments. Les boissons moins aqueuses ou plus astringentes produisent des battements dans le corps, des pulsations dans la tête; en ce cas, il est avantageux de dormir, et de prendre quelque potage chaud, de ceux qui agréeront le plus. L'abstinence ne vaut rien contre le mal de tête et contre le malaise de l'ivresse. Ceux qui (contre leur habitude) ne font qu'un repas, éprouvent de la vacuité et de la faiblesse ; ils rendent une urine chaude, à cause de l'abstinence à laquelle ils ne sont pas habitués ; la bouche devient salée et amère ; ils tremblent dans tout travail ; ils ont de la tension dans les tempes, et ils ne peuvent pas digérer leur dîner aussi bien que s'ils avaient fait leur déjeuner habituel; pour remédier à ces accidents, ils mangeront moins qu'ils n'ont coutume ; ce sera de la pâte d'orge humide au lieu de pain, et, en fait de légumes, de la patience (rumex patientia, Lin.), de la mauve (malva rotundi-folia, Lin.), de l'orge bouillie et des bettes (beta vulgaris, Lin.); en mangeant, ils boiront du vin en quantité convenable et coupé d'eau. Après le dîner, ils feront une courte promenade, jusqu'à ce que l'urine soit descendue et que l'émission en ait été faite ; ils mangeront aussi des poissons cuits. C'est surtout quand on change les aliments l'un pour l'autre, que les propriétés s'en font sentir: l'ail produit des flatuosités, de la chaleur dans la poitrine, de la pesanteur de tête, du dégoût, et, s'il y avait dès auparavant quelque douleur habituelle, il la réveillerait ; ce qu'il a de bon c'est qu'il augmente la quantité de l'urine; le meilleur moment pour en manger, c'est lorsqu'on va faire quelques excès de boisson ou lorsqu'on est ivre. Le fromage produit des flatuosités, resserre le ventre et est échauffant ; il engendre les humeurs crues et indigestes ; ce qu'il y a de pis, c'est d'en manger en buvant après s'être complétement repu. Tous les légumes à gousse, crus, bouillis ou frits, sont flatulents ; ils le sont moins quand ils ont macéré dans l'eau, ou qu'ils sont verts ; il n'en faut manger qu'avec du pain. Chacun d'eux a, du reste, ses inconvénients particuliers. Les pois chiches (cicer arietinum, Lin.), crus et rôtis, sont flatulents et causent de la douleur. Les lentilles sont astringentes et causent du trouble, si on les mange avec la gousse. Le lupin, de tous ces légumes, est celui qui fait le moins de mal. La racine et le suc d'assa-foetida, qui passent très bien chez quelques-uns, ne passent pas chez ceux qui n'y sont pas habitués, et engendrent ce qu'on appelle choléra sec; cet accident survient surtout si on mange cette substance avec beaucoup de fromage, ou avec du boeuf; la viande de boeuf, en effet, pourrait exaspérer les affections atrabilaires; car elle est d'une nature difficile à surmonter, et tout estomac n'est pas capable de la digérer ; on s'en trouvera d'autant mieux que cette viande sera plus cuite, et plus faite. Les viandes de chèvres ont tous les inconvénients des viandes de boeuf ; elles sont, comme elles, de difficile digestion, et plus qu'elles, produisent des flatuosités, des renvois et de la bile ; celles qui sont de la meilleure odeur, compactes et le plus agréables au goût, valent le mieux pour l'estomac, pourvu qu'on les mange très cuites et froides ; celles qui sont le plus désagréables au goût, de mauvaise odeur et dures, sont les plus indigestes, surtout si elles proviennent d'animaux fraîchement tués ; ces viandes sont les meilleures pendant l'été, les plus mauvaises pendant l'automne. La viande de cochon de lait est mauvaise quand elle est trop ou trop peu cuite, car elle est bilieuse et dérange le ventre. La viande de porc est la meilleure de toutes ; la plus substantielle est celle qui n'est ni très grasse ni très maigre, et qui provient d'un animal qui n'a pas l'âge d'une vieille victime ; il faut la manger sans la couenne, et un peu froide. [2,19] Dans le choléra sec, le ventre est distendu par l'air, des bruits s'y font entendre, il y a douleur des côtés et des lombes. Le malade, loin de rien rendre par le bas, est resserré. II faut avoir soin, en prévenant le vomissement, de procurer des évacuations alvines. On lui fera prendre immédiatement un lavement chaud, et aussi gras que possible; on lui fera les onctions huileuses les plus abondantes ; on le mettra dans de l'eau chaude; on l'étendra dans la baignoire, et on lui fera des affusions chaudes avec lenteur; si, ainsi réchauffé, il a des évacuations alvines, il est guéri. Il lui convient aussi de dormir, de boire du vin léger, vieux et sans eau; vous lui donnerez de l'huile, afin qu'il se calme et qu'il ait des évacuations; car alors il est guéri. Il faut s'abstenir du pain et de tout le reste. Mais, si la douleur ne se relâche pas, donnez à boire du lait d'ânesse, jusqu'à ce qu'il y ait purgation. Si le ventre est relâché, si les déjections sont bilieuses, s'il y a des tranchées, des vomissements, des suffocations, un sentiment de morsure, ce qu'il y a de mieux dans ce cas, c'est de prescrire le repos, de l'oxymel pour boisson, et d'empêcher le vomissement. [2,20] Il y a deux espèces d'hydropisie : l'une est l'anasarque; quand elle attaque, il est impossible de s'en délivrer ; l'autre est avec de l'emphysème, et il faut beaucoup de bonne fortune pour en triompher. Cette dernière réclame l'exercice, les fomentations, la modération dans le régime, il faut manger des choses sèches et échauffantes; par ce régime l'urine coulera le mieux, et le malade conservera le plus de force. S'il a de l'oppression, si l'on est en été, s'il est à la fleur de l'âge et s'il est robuste, il faut pratiquer une saignée du bras, puis donner des pains chauds trempés dans du vin rouge et de l'huile ; le malade boira le moins possible, s'exercera le plus possible, mangera de la viande de porc bien en chair, cuite avec du vinaigre, afin qu'il soit capable de soutenir des promenades dans des chemins escarpés. [2,21] Chez les malades qui ont le ventre inférieur chaud, et des selles âcres et irrégulières par un effet de colliquation, il faut, s'ils sont en état de supporter l'hellébore blanc (veratrum album, Lin.), procurer des évacuations par le haut avec ce médicament; sinon, il faut leur donner, froide et épaisse, une décoction de blé, de l'année ; de la bouillie de lentille; du pain cuit sous la cendre; des poissons bouillis s'il y a de la fièvre, rôtis s'il n'y en a pas, et du vin rouge en cas d'apyrexie ; dans le cas contraire, de l'eau de nèfles, ou de baies de myrtes, ou de pommes, ou de sorbes (sorbus domestica, Lin.), ou de dattes, ou de fleurs de vignes. S'il n'y a point de fièvre, et s'il y a des tranchées, on leur fait boire d'abord un peu de lait d'ânesse chaud, dont on augmente progressivement la quantité, et qu'on saupoudre de graine de lin, de farine de froment et de fèves d'Égypte (nymphæa nelumbo) moulues et débarrassées de leurs parties amères ; on fait manger des oeufs demi durs frits, de la farine fine de froment, de l'holcus sorghum (Lin.), du gruau cuit dans du lait ; ces substances se prendront cuites et froides, et autres choses pareilles tant en aliments qu'en boissons. [2,22] Ce qu'il y a de principal à observer dans le régime alimentaire durant les maladies de longue durée, ce sont les exacerbations et les rémissions des fièvres, afin de se garder des moments où il ne faut pas donner d'aliments, et de connaître celui où on peut en donner avec sûreté, et qui est le plus éloigné du redoublement. [2,23] Il faut savoir reconnaître les céphalalgies qui proviennent des exercices du corps, des courses, des marches, des chasses ou de toute autre fatigue inopportune ou des excès vénériens, les pâles couleurs, les enrouements, les affections de la rate, les anémies, les dyspnées, les toux sèches, la soif, la pneumatose, l'interception de l'air dans les veines, la tension des hypochondres, des côtés et du dos, les engourdissements, les obscurcissements de la vue, les bourdonnements d'oreille, l'incontinence d'urine, les ictères, les déjections de matières non digérées, les épistaxis, les hémorrhagies abondantes par le fondement, les emphysèmes, les douleurs intenses dont on ne peut triompher. Dans aucun de ces cas il ne faut purger, car la purgation aura du danger, sera sans aucun avantage et empêchera les libérations et les crises qui pourraient survenir d'elles-mêmes. [2,24] S'il importe de tirer du sang à un malade, il faut d'abord resserrer le ventre, puis saigner, mettre à la diète et défendre l'usage du vin ; du reste on fera suivre au malade un régime convenable, et on lui ordonnera des fomentations humides. Si le ventre paraît être resserré, il faut prescrire un lavement adoucissant. [2,25] Si des évacuations sont jugées convenables, vous les procurerez avec sûreté par le haut à l'aide de l'hellébore (veratrum album, Lin.); mais dans ces cas ne donnez pas de purgation. Ce qu'il y a de plus efficace, c'est de provoquer l'urine, les sueurs, et de faire faire des promenades; il faut que le malade se fasse de douces frictions, afin d'assouplir le corps; s'il est alité, d'autres le frotteront. Si la douleur siège dans la poitrine au-dessus du diaphragme, on mettra souvent le malade sur son séant, on le laissera couché aussi peu de temps qu'on le pourra, et assis, on le frottera longtemps avec beaucoup d'huile chaude. Si la douleur occupe le ventre au-dessous du diaphragme, il est utile qu'il reste couché, qu'il ne se donne aucun mouvement, et qu'on ne lui fasse rien autre chose que des frictions. Les douleurs du bas-ventre se résolvant par les urines et par les sueurs dont l'écoulement marche modérément, se dissipent d'elles-mêmes si elles sont petites, causent de fâcheux accidents si elles sont grandes ; dans ces cas, les malades succombent ou bien ne guérissent pas sans d'autres maux, car ces affections forment aussi des dépôts qui se fixent. [2,26] Potion pour un hydropique: prenez trois cantharides, ôtez-en la tête, les pieds et les ailes, broyez-en les corps dans trois verres d'eau (0,135 litre) ; lorsque celui qui a bu ce médicament souffre, on lui fait des onctions huileuses, puis des affusions chaudes ; la potion doit être bue â jeun, puis on mange des pains chauds avec de la graisse. [2,27] Médicament hémostatique qu'on applique sur la veine de la laine humectée avec le lait qui sort du figuier, ou bien qu'on enfonce dans la narine un tampon fait avec de la présure, ou bien poussez du colcothar avec le doigt dans la narine, et pressez des deux côtés les cartilages en dehors; en même temps relâchez le ventre avec du lait d'ânesse cuit, rasez la tête et administrez des réfrigérants si la saison est chaude. [2,28] L'isopyrum thalictroïdes (Lin.) évacue par le haut ; on le prend en potion à la dose d'une drachme et demie (4,86 grammes) pilé dans de l'oxymel. On le combine aussi aux hellébores à la dose du tiers de cette potion et ce mélange cause moins d'étouffement. [2,29] Trichiasis. Mettez un fil dans le chas d'une aiguille, passez-le à travers la peau vers le bord libre de la paupière ; passez-en un autre à la base ; tendez les fils, et faites un noeud, que vous laisserez en place jusqu'à la chute de la ligature. Cela pourra suffire ; sinon, c'est-à-dire si les cils ne sont pas assez renversés en dehors, faites en arrière la même opération. Pour les hémorrhoides, vous les traverserez avec l'aiguille d'une façon semblable, et vous les lierez avec un brin de laine non lavée aussi épais et aussi long que possible ; car cela rend l'opération plus sûre. Après avoir serré la ligature, servez-vous du médicament corrosif ; n'employez pas de fomentations humides avant la chute des hémorrhoides. Ayez soin d'en laisser toujours une. Après cela, le malade, s'étant remis, sera purgé avec l'hellébore. Ensuite, qu'il se livre aux exercices gymnastiques, et qu'il essuie la sueur ainsi provoquée ; dans le gymnase qu'il se fasse frotter, et qu'il lutte dès le matin ; mais qu'il s'abstienne de la course, de l'ivresse et de toutes les substances âcres excepté l'origanum heracleoticum (Lin.); qu'il vomisse tous les sept jours, ou trois fois par mois ; car, de cette façon, il aura le corps dans le meilleur état ; qu'il use pour boisson d'un vin paillet, de saveur astringente, coupé d'eau et en petite quantité. [2,30] Empyème. Coupez des tranches d'oignons de scille (scilla maritima, Lin.), et faites les cuire dans de l'eau; quand elles auront bien bouilli, jetez l'eau, versez-en de nouvelle, et faites cuire jusqu'à ce que la scille paraisse au toucher molle et bien cuite, puis broyez-la exactement, mêlez-y du cumin rôti (cuminum cyminum, Lin.), du sésame blanc (sesamum orientale, Lin.), des amandes fraîches, broyez toutes ces substances dans du miel, et faites-en un eclegme que vous donnerez à prendre au malade. Il boira par-là-dessus un vin doux. Pour potage : pilez un lekiskion (0,068 litre) de pavot blanc, humectez avec de l'eau qui a servi à laver de la farine du blé de l'année ; faites cuire, ajoutez-y du miel ; que le malade prenne ce potage tiède, et qu'il passe ainsi la journée; puis, considérant ce qui suivra, faites-lui prendre son repas du soir. [2,31] Dysenterie. Prenez trois onces (81 grammes) de fèves d'Égypte nettoyées (nymphaea nelumbo, Lin.), douze branches de garance (rubia tinctorum, Lin.), pilez, mélangez, faites cuire, ajoutez-y de la graisse, et faites-en un eclegme. [2,32] Maladies des yeux. Prenez des scories de cuivre lavées, pétrissez-les avec de la graisse, comme de la pâte non humide, broyez le tout; humectez avec du jus de raisins non mûrs ; faites sécher au soleil, humectez de nouveau jusqu'à consistance d'onguent. Lorsque cette préparation est redevenue sèche, pilez-la finement à sec ; frottez-en les yeux, et mettez-en dans les angles oculaires. [2,33] Yeux humides. Prenez une drachme (3,24 grammes) de bois d'ébène, neuf oboles (4,86 grammes) de cuivre brûlé, que vous pilerez dans un mortier, trois oboles (1,62 grammes) de safran (crocus sativus, Lin.), broyez le tout finement, versez-y une cotyle attique (0,27 litre) d'un vin doux, puis exposez au soleil en ayant soin de couvrir cette préparation. Quand elle s'est suffisamment digérée, servez-vous-en. [2,34] Contre les fortes douleurs des yeux. Prenez une drachme (3,24 grammes) de colcothar, autant de raisin ; lorsque cela se sera digéré pendant deux jours, exprimez ; pilez de la myrrhe et du safran ; mêlez-y du moût de vin et faites digérer au soleil ; vous oindrez avec ce médicament les yeux douloureux. Conservez-le dans un vase d'airain. [2,35] Moyens de reconnaître une suffocation hystérique. Pressez la malade avec les doigts; si la femme le sent, c'est une attaque d'hystérie; sinon, c'est une attaque de convulsion. [2,36] Somnolence. Prenez un lekiskion attique rond (0,068 litre) d'euphorbia peplus (Lin.) ; vous en ferez une potion. [2,37] Prenez des parcelles de cuivre battu trois fois autant qu'il en peut tenir dans la petite cavité qu'offre l'extrémité postérieure de la sonde ; ajoutez de la colle de farine de l'année; pulvérisez; et faites des pilules que le malade prendra Ce médicament évacue les eaux par le bas. [2,38] Préparation eccoprotique. Exprimez sur des figues sèches le suc de l'euphorbia characias (Lin.), sept gouttes sur chaque ; puis placez-les dans un vase neuf ; conservez-les, et faites-les prendre au malade avant qu'il ne mange. [2,39] Pilez l'euphorbia peplus (Lin.), versez-y de l'eau, passez, pétrissez-y de la farine, faites des massepains, versez-y du miel cuit, et faites manger cette préparation à ceux qui ont besoin d'évacuations alvines, et aux hydropiques; ils boiront. par là-dessus, un vin doux, aqueux, ou de l'hydromel, étendu d'eau, et fait avec le résidu de la cire ; ou bien recueillez l'euphorbia peplus, et conservez cette plante pour les usages de la médecine.