[6,0] HOMÉLIE SIXIÈME. SUR LA CRÉATION DES CORPS LUMINEUX. [6,1] Il faut que celui qui vient pour regarder les combats des athlètes, ait aussi lui-même quelque courage. C'est ce qu'on peut voir par les lois des spectacles, suivant lesquelles ceux qui prennent place dans l'amphithéâtre ne doivent y paraître que la tête nue ; c'est, à ce qu’il me semble, afin que chacun ne soit pas seulement spectateur des athlètes, mais athlète lui-même dans quelque partie. Il faut de même que celui qui vient pour examiner les magnifiques et merveilleux spectacles de la nature, pour entendre parler d'une sagesse vraiment souveraine et ineffable, ait en lui-même des motifs qui l'engagent à contempler les grands objets exposés à ses regards, qu’il partage avec moi les peines du combat, qu'il ne soit pas plus juge que combattant, de peur que la vérité ne vous échappe, et que j'en aie la douleur de voir ceux qui m'écoutent ne point profiter de mon instruction. Quel est donc mon but en parlant ainsi ? C'est que, comme nous nous proposons d’examiner le bel ordre de l'univers et de contempler le monde, non d'après les principes de la sagesse du siècle, mais d'après les instructions que Dieu a données à Moïse son serviteur, lui parlant lui-même en personne, et non par des figures ; il faut nécessairement que ceux qui sont jaloux d'être spectateurs de grands objets, aient exercé leur esprit à comprendre les spectacles merveilleux dont ils sont les témoins. Si donc quelquefois, dans une nuit sereine, regardant avec attention les beautés inexprimables des astres, vous avez songé au Fabricateur de l'univers, vous avez pensé quel était celui qui a parsemé le ciel de ces fleurs brillantes, et que le spectacle des choses créées procure encore plus d'utilité qu'il ne donne de plaisir; si pendant le jour vous avez considéré avec un esprit réfléchi les merveilles du jour, et que, par les objets visibles, vous vous soyez élevé jusqu'à l'Etre invisible : alors vous êtes un auditeur bien préparé, vous êtes propre à occuper une place dans cet auguste et vénérable amphithéâtre. Ainsi, comme on prend par la main et que l’on conduit dans les villes ceux qui ne les connaissent pas, je vous conduirai moi-même aux prodiges cachés de l'univers, de cette grande cité où est notre ancienne patrie, dont nous a chassés le démon, ce cruel homicide, qui, par ses funestes séductions, a réduit l'homme en servitude. Vous verrez ici la première création de l'homme, la mort qui s'est emparée presque aussitôt de nous, la mort qua engendrée le péché, ce premier né du démon principal auteur du mal. Vous vous connaîtrez vous-même, vous saurez que, quoique terrestre par votre nature, vous êtes l'ouvrage des mains divines; que, très inférieur pour les forces aux animaux dépourvus de raison, vous êtes fait pour commander à ces animaux et aux êtres inanimés ; qu’obligé de leur céder pour les avantages du corps, vous pouvez, par la supériorité de votre raison, vous élever jusqu'au ciel. Instruits de ces vérités, nous nous connaîtrons nous-mêmes, nous connaîtrons Dieu, nous adorerons le Créateur, nous servirons notre Maître, nous glorifierons notre Père, nous respecterons et chérirons celui qui nous donne la nourriture, celui qui nous comble de bienfaits ; nous ne cesserons de rendre hommage à l'Auteur de notre vie présente et future, à celui qui, dans les richesses qu’il nous prodigue déjà, nous accorde un gage de ses promesses, et qui, par l'usage des biens actuels nous confirme ceux que nous attendons. Eh ! si les objets passagers sont si superbes, quels doivent être les éternels ? si les choses visibles sont si belles, quelles doivent être les invisibles ? si la grandeur du ciel surpasse toute imagination humaine, quel esprit pourra scruter la nature de ces beautés qui ne doivent jamais finir? si le soleil, qui est sujet à la corruption, est si beau, si grand, si rapide dans sa marche, si réglé, si invariable dans son cours, d'une grandeur si bien proportionnée, si bien mesurée avec le reste de l’univers ; si par sa beauté, il est comme l'oeil brillant de la nature, la lampe éclatante du monde; si on ne peut se lasser de contempler ce bel astre, quelle doit être la beauté du soleil de justice? Si c'est un malheur pour l'aveugle de ne pas voir le soleil matériel, quelle infortune pour le pécheur d'être privé de la lumière véritable ? [6,2] Et Dieu dit: Que des corps lumineux soient faits dans le firmament du ciel, pour éclairer la terre, pour séparer le jour de la nuit. Le ciel et la terre avaient précédé; après eux avait été créée la lumière; le jour et la nuit étaient distingués, la terre et le firmament étaient découverts ; l'eau avait été rassemblée en un même lieu, dans le réservoir qui lui était destiné; la terre était couverte des productions qui lui sont propres, et offrait de toutes parts une infinité d'espèces d’herbes, de plantes et d'arbres: le soleil et la lune n'existaient pas encore, afin que ceux qui ignorent le vrai Dieu, ne regardassent pas le soleil comme le père et l'auteur de la lumière, comme le générateur des productions terrestres. C'est pour cela qu'au quatrième jour Dieu dit : Que des corps lumineux soient faits dans le firmament du ciel. Lorsqu'on vous montre celui qui parle, pensez aussitôt en vous-même à celui qui entend. Dieu dit que des corps lumineux soient faits.... et Dieu fit deux corps lumineux. Qui est-ce qui a dit et qui est-ce qui a fait ? Dans ces paroles, ne voyez-vous pas une double personne ? dans toutes les histoires de l'Ecriture est répandu, d'une manière mystique, le dogme des personnes divines. Moïse ajoute la cause pour laquelle les corps lumineux ont été créés, pour éclairer la terre, dit-il. Si la création de la lumière a précédé, pourquoi dit-on maintenant que le soleil a été créé pour éclairer la terre ? Ici, m adressant aux infidèles, je leur dis d'abord : Que la simplicité de l'Ecriture ne vous inspire pas de mépris pour elle. Nous n'étudions pas, comme chez vous, le choix des mots; nous ne cherchons pas à les arranger avec art ; nous sommes moins jaloux de belles expressions et de discours harmonieux que de paroles simples qui énoncent clairement ce que nous voulons faire comprendre. Or il n'est rien ici qui contredise ce qui a déjà été dit de la lumière. Dieu a créé d'abord la substance de la lumière, et il produit maintenant le corps du soleil pour servir de véhicule à la lumière créée avant lui. Et de même que le feu est distingué de la lampe, que l'un a la vertu d'éclairer, et que l'autre est faite pour communiquer la lumière à ceux qui en ont besoin : ainsi des corps lumineux reçoivent l'être maintenant pour servir de véhicule à une lumière pure, simple et immatérielle. L'apôtre parle de corps lumineux dans le monde (Phil. 1. 15), distingués de cette lumière véritable du monde, par la participation de laquelle les saints sont devenus des corps lumineux pour les âmes qu'ils instruisaient, en les délivrant des ténèbres de l'erreur. C'est ainsi que le Créateur de l'univers fait paraître maintenant dans le monde le soleil après l'éclatante lumière que cet astre doit nous communiquer. [6,3] Et que personne ne refuse de croire ce que nous disons; sans doute que l'éclat de la lumière est distingué du corps qui communique la lumière. D'abord, dans les êtres composés nous considérons la substance qui reçoit les qualités, et les dualités jointes à la substance. Or de même que par sa nature la blancheur est distinguée du corps blanc; ainsi la puissance du Créateur a réuni des choses distinguées par leur nature. Et ne me dites pas qu'il est impossible de les séparer l'une de l'autre. Ni vous, ni moi, nous ne pouvons séparer la lumière du soleil; mais ce que nous pouvons distinguer par la pensée, le Créateur de l’univers a pu le séparer dans la réalité. Par exemple, pour le feu, il vous est impossible de séparer sa vertu brûlante de son éclat ; mais Dieu, voulant attirer son serviteur par un prodige étonnant, a mis dans le buisson un feu qui n'agissait que de son éclat, et dont la vertu brûlante restait oisive. C'est ce qu'atteste le psalmiste par ces mots: la voix du Seigneur qui rend inutile la flamme du feu. De-là, dans les peines et les récompenses des actions de notre vie, certains passages de l’Ecriture nous font entendre, sans le dire clairement, que la nature du feu sera divisée, que sa lumière brillera pour la gloire des justes, et que son activité se fera sentir pour la punition des méchants. Nous pouvons encore trouver une preuve de ce que nous disons dans les phases de la lune. Lorsqu'elle décroît et qu'elle ne luit plus à nos yeux, elle ne perd pas toute sa substance; mais déposant et reprenant la lumière qui l'environne, elle nous offre des apparences d’augmentation et de diminution. Or, que ce ne soit pas sa substance qui se perde lorsqu'elle ne luit plus, ce que nous voyons en est un témoignage sensible. Si, dans un air pur et dégagé de tout nuage, vous observez la lune dans son croissant, vous pouvez distinguer la partie obscure avec toute la circonférence que nous lui voyons quand elle est pleine et toute éclairée ; en sorte que, si la vue réunit la partie éclairée avec la partie ténébreuse, on aperçoit visiblement son disque parfait. Et ne me dites pas que la lumière de la lune n'est qu'empruntée, parce quelle décroît quand elle approche du soleil, et qu'elle augmente quand elle s'en éloigne. Ce n'est pas là ce que nous avons à examiner pour le moment: mais nous disons que sa substance est distinguée de la lumière qui l'éclaire. Pensez la même chose du soleil, excepté qu'ayant une fois pris la lumière et l'ayant mêlée à sa substance, il ne la dépose plus ; au lieu que la lune s'en revêtant et s'en dépouillant tour-à-tour, prouve, par ce qui se passe en elle-même, ce que nous disons du soleil. Les corps lumineux reçurent l'ordre de séparer le jour de la nuit. Dieu avait déjà séparé la lumière des ténèbres : alors il rendit leur nature absolument opposée, de sorte qu'elles ne pouvaient avoir commerce ensemble, et que la lumière n'avait rien de commun avec les ténèbres. Ce qui est ombre pendant le jour, doit être appelé ténèbres pendant la nuit. Car si toute ombre vient des corps opaques opposés à un éclat de lumière qu'ils interceptent ; si le matin elle s'étend vers l'occident, le soir vers l’orient, et au midi vers le septentrion, la nuit se retire devant les rayons du soleil, et n'est autre chose que l'obscurcissement de la terre. Ainsi dans le jour l’ombre résulte d'un corps qui intercepte une lumière devant laquelle il se trouve ; et la nuit se forme lorsque l'air qui environne la terre est obscurci. Voilà pourquoi il est dit dans l’Ecriture que Dieu sépara la lumière des ténèbres. Les ténèbres fuient à l'arrivée de la lumière, parce que dans la première création elles ont reçu toutes deux une nature qui les rend ennemies irréconciliables. Dieu a commandé au soleil de mesurer le jour, et a chargé la lune de régler la nuit lorsqu'elle se montre à nous toute entière. Ces deux corps lumineux sont opposés diamétralement l'un à l'autre. La lune, lorsqu'elle est pleine, disparaît devant le soleil qui se lève ; quand il se couche, elle se lève du côté de l’orient. Que si dans ses autres phases, la lumière de la lune ne remplit point toute la nuit, cela ne détruit pas ce que nous disons maintenant ; tout ce que nous prétendons, c'est que dans son état le plus parfait la lune commande à la nuit, en répandant sur la terre l'éclat dont elle brille au-dessus de tous les astres, et qu'alors elle partage également le temps avec le soleil. [6,4] Et qu'ils servent de signes pour marquer les temps, les jours et les années. Les signes que donnent les deux corps lumineux sont nécessaires dans la vie humaine ; et pourvu qu'en interrogeant ces signes on se tienne dans les bornes d'une sage retenue, une longue expérience fera trouver des observations utiles. On peut acquérir beaucoup de connaissances sur la pluie et sur la sécheresse, sur les vents en général et sur les vents en particulier, sur les vents violents et sur les vents doux. Le Seigneur lui-même, dans l’Evangile, nous parle d'un des signes que donne le soleil : Il y aura de l’orage, dit-il, car le ciel est sombre et rougeâtre (Matth. 16. 3). Lorsque le soleil s'élève à travers un brouillard, ses rayons sont dispersés et obscurcis ; il se montre avec une couleur de sang et de charbon ; embrasé, l’air chargé de vapeurs offrant à nos yeux cette apparence. Il est évident que cet air chargé n'étant pas dissipé par les rayons, ne peut rester suspendu à cause du concours des vapeurs qui s'élèvent de la terre ; mais que, vu l'abondance de l'eau, il se répandra en orage dans les pays sur lesquels il est rassemblé. Pareillement, lorsque le disque de la lune paraît s'étendre, et lorsque des cercles entourent celui du soleil, ce signe annonce, ou une grande quantité de pluies, ou un cours de vents impétueux. Lorsqu'on voit ces images du soleil qui se peignent quelquefois dans la nue, marcher avec lui, c'est le signe de quelque révolution dans l'air. Ainsi ces raies droites qu'on aperçoit dans les nuages et qui imitent les couleurs de l'iris, présagent des pluies ou des tempêtes furieuses, ou en général annoncent qu'il y aura dans l'air quelque grand changement. Ceux qui se sont occupés de ces études ont fait plusieurs observations sur le croissant et le décours de la lune, comme si l'air qui enveloppe la terre suivait nécessairement toutes ses phases. Lorsqu'au troisième jour elle est pure et déliée, c'est l'annonce d'un beau temps invariable. Lorsque son croissant est épaissi et de couleur rougeâtre, c'est la menace d'une grande pluie ou d'un vent violent. Qui est-ce qui ignore combien ces observations sont utiles dans la vie ? Le navigateur qui prévoit ce qu'il a à craindre des aquilons, peut retenir son vaisseau dans le port. Le voyageur qui s'attend à des changements dans l'air, peut éviter de loin les effets du mauvais temps. Les laboureurs occupés de la semence des grains et de la culture des plantes peuvent choisir les moments les plus favorables pour leurs travaux. Le Seigneur nous a prédit que le soleil, la lune et les étoiles donneront des signes de la dissolution de l'univers. Et quels seront ces signes ? Le soleil sera changé en sang, et la lune ne donnera pas sa lumière (Matth. 24. 29 — Marc. 13. 24). [6,5] Ceux qui passent les bornes emploient les paroles de l’Ecriture pour soutenir la science astrologique ; ils disent que notre vie dépend du mouvement des cieux, et qu'en conséquence les devins tirent, des astres, des pronostics pour ce qui doit nous arriver. Ces paroles fort simples de l’Ecriture, qu'ils servent de signes, ils les entendent, non des vicissitudes dans l'air, ni des révolutions dans le temps ; mais ils les appliquent, d'après leur opinion, au sort destiné à tous les hommes. Que disent-ils donc ? sans doute que le rapport de telles planètes avec les astres du zodiaque, que tel concours entre eux produit telle naissance ; que de tel autre rapport et concours résulte une destinée contraire. Il n'est peut-être pas inutile de reprendre les choses d'un peu haut et de nous expliquer clairement. Je ne dirai rien de moi, mais je me servirai de leurs propres paroles pour les confondre. Je tâcherai de guérir ceux qui sont déjà prévenus de ces opinions dangereuses, et de prémunir les autres contre de pareilles erreurs. Les inventeurs de l'astrologie ayant remarqué que beaucoup de rapports leur échappaient dans l'espace du temps, l'ont divisé le plus qu'il leur a été possible, en petites portions, selon ce que dit l'Apôtre, en un moment, en un clin-d'oeil (1 Cor. 15. 52), parce qu'il y a une grande différence entre telle naissance et telle autre. Ils ont prétendu que celui qui était né dans tel instant indivisible, devait commander les villes et les peuples, être distingué pas ses richesses et par sa puissance ; que celui qui était né dans tel autre instant, devait mendier sa vie, errer de ville en ville, aller de porte en porte pour chercher sa nourriture journalière. En conséquence, ils ont divisé en douze parties le cercle du zodiaque, parce que le soleil emploie trente jours à parcourir un douzième de ce cercle. Ils ont divisé chaque douzième en trentièmes, chaque trentième en soixantièmes, et ces soixantièmes en d'autres soixantièmes encore. Considérons les naissances de ceux qui viennent au monde, et voyons si les tireurs d’horoscopes pourront observer cette exactitude de la division du temps. Dès qu'un enfant est né, on examine si c'est un mâle ou une femelle : ensuite on attend ses cris pour savoir s'il est vivant. Combien voulez-vous que dans ce temps il s'écoule de soixantièmes ? On dit au devin l'enfant qui est né. Combien pour cela faudra-t-il de petites portions d'une heure, surtout si le tireur d'horoscopes n'est point dans la chambre de la mère ? Il faut qu'il marque précisément le temps, soit que ce soit pendant le jour ou pendant la nuit. Combien ne se passera-t-il pas encore de soixantièmes ? Il est indispensable qu'il trouve, non-seulement à quelle douzième partie du zodiaque, mais à quelle soixantième, à quelle soixantième de soixantième répond l'astre de la naissance, pour savoir quel rapport il avait avec les étoiles fixes, en quel concours elles étaient ensemble au moment où l'enfant est né. Si donc il est impossible de rencontrer l'instant précis, et si la moindre différence fait manquer le tout, ne doit-on pas également se moquer, et de ceux qui s'occupent de cette science chimérique, et de ceux qui consultent avec avidité ces prétendus savants, comme s’ils pouvaient leur apprendre quel sera leur sort ? [6,6] Mais quels sont les résultats de cette science? Un tel, disent-ils, aura les cheveux crépus et de beaux yeux, car il est né sous le bélier ; et telles sont les qualités visibles de cet animal. Il aura aussi une âme grande, parce que le bélier aime à commander. Il sera libéral et aimera à faire de la dépense, parce que ce même animal dépose sans peine sa toison, et qu'il en reçoit aisément une autre de la nature. Celui qui est né sous le taureau supportera le travail et sera disposé à la servitude, parce que le taureau est soumis au joug. Celui qui est né sous le scorpion sera violent et prêt à frapper, à cause de sa ressemblance avec cet animal. Celui qui est né sous la balance sera juste, parce que, chez nous, les bassins de la balance sont égaux. Peut-on rien imaginer de plus ridicule ? Le bélier, d'après lequel vous expliquez la naissance d'un homme, est une douzième partie du cercle appelé zodiaque ; lorsque le soleil y est arrivé, il touche aux signes du printemps. La balance et le taureau sont également chacun une douzième partie de ce cercle. Comment donc tirez-vous de-là les principales causes qui influent sur la vie des hommes, et marquez-vous les caractères de ceux qui naissent, d'après les animaux qui vivent sous nos lois ? Celui qui est né sous le bélier sera libéral, non parce qui; cette partie du ciel peut donner ce caractère, mais parce que le bélier a telle nature. Pourquoi donc nous épouvantez-vous en cherchant vos preuves dans les astres, en même temps que vous voulez nous persuader par des bêlements ? Si le ciel prend de certains animaux ses caractères particuliers, il est donc soumis lui-même à des principes étrangers, et son existence dépend de brutes qui paissent. Si une telle assertion est ridicule, il est bien plus ridicule encore de chercher ses preuves dans des objets qui n'ont aucun rapport avec ce qu'on avance. Les subtilités de ces prétendus savants ressemblent à des toiles d’araignée, dans lesquelles une mouche, un moucheron, ou quelque autre animal aussi faible, peuvent bien se laisser prendre, mais que des animaux un peu plus forts viennent aisément à bout de rompre, et à travers lesquelles ils passent sans aucune peine. [6,7] Et ces téméraires ne s'arrêtent pas là : mais une chose qui dépend de notre volonté, je veux dire la pratique du vice et de la vertu, ils en attribuent la cause aux mouvements célestes. Il serait ridicule de les combattre sérieusement ; mais il est peut-être nécessaire d'en faire quelque mention, parce qu'il en est beaucoup qui sont livrés à cette erreur. Demandons-leur d'abord si les positions des astres ne changent pas mille fois le jour. Ceux qu'on appelle planètes, qui ne sont jamais à la même place, dont les uns se rencontrent plus vite, les autres achèvent plus lentement leur course, ces astres se regardent souvent à la même heure et se cachent ; et c'est un grand point dans les naissances d'être regardé par un astre bienfaisant ou par un astre malfaisant, comme ils s'expriment eux-mêmes. Souvent, faute de connaître le moment précis oit une naissance était présidée par un astre bienfaisant, parce qu'on ignore une des plus petites divisions du temps cette époque a été marquée de l'influence d'un astre malfaisant : je suis obligé de me servir de leurs propres expressions. Quelle folie dans de pareils discours, ou plutôt quelle impiété ! Les astres malfaisants rejettent la cause de leur malignité sur celui qui les a faits. Car si le mal vient de leur nature, celui qui les a créés sera l'auteur du mal : s'ils sont mauvais par un choix libre de leur volonté, ce seront donc des animaux doués de la faculté de choisir, dont les actes seront libres et volontaires ; ce qu'on ne peut dire, sans extravagance, d'êtres inanimés. Ensuite quelle déraison de ne pas attribuer dans chacun le bien et le mal au choix d'une volonté bonne ou mauvaise ; mais de prétendre qu'un être est bienfaisant parce qu'il est dans telle place, qu'il devient malfaisant parce qu'il est dans telle autre, et qu'après encore, pour peu qu'il s'écarte, il oublie aussitôt sa malignité ? Sans nous arrêter à ces inepties, concluons et disons : Si les astres changent de position à chaque instant, et si, dans ces révolutions diverses, se rencontre plusieurs fois le jour la position d'où résulte la naissance d'un prince, pourquoi ne naît-il pas des princes tous les jours ? ou pourquoi les trônes parmi eux sont-ils héréditaires ? Chaque prince, sans doute, n'adapte pas la naissance de son fils à une position d'astres propre à cette naissance : aucun homme n'en est le maître. Pourquoi donc Osias a-t-il engendré Joachim, Joathan Achas, Achas Ezéchias ? pourquoi aucun d'eux ne s'est-il rencontré au moment marqué pour la naissance d'un esclave ? Disons encore : Si le principe des actions vertueuses ou vicieuses n'est pas en nous ; s'il dépend nécessairement de telle naissance, c'est en vain que les législateurs nous marquent ce qu'il faut faire et ne pas faire ; c'est en vain que les juges honorent la vertu et punissent le vice. Ni le voleur, ni le meurtrier ne sont coupables, puisqu ils ne pourraient retenir leurs mains quand ils le voudraient, s’ils sont poussés à agir par une nécessité inévitable. Il est fort inutile de cultiver les arts. Le laboureur aura abondance de fruits sans jeter de semence et sans aiguiser sa faux. Le commerçant, qu’il le veuille ou non, acquerra de grandes richesses qu'amassera pour lui le destin. Les grandes espérances des chrétiens s'évanouiront, parce que la justice ne peut être honorée ni le péché puni, si l'homme ne fait rien librement. Partout ou dominent la nécessité et le destin, il ne peut y avoir place au mérite, qui est le fondement essentiel d'un jugement juste. En voilà assez sur cet article. Ceux d'entre vous qui pensent bien n'ont pas besoin de plus de paroles, et le temps ne permet pas de nous étendre pour attaquer les autres. [6,8] Revenons à l'explication de l'Ecriture. Qu'ils servent de signes, dit-elle, pour marquer les temps, les jours et les années. Nous avons expliqué le mot signes ; nous pensons que par temps il faut entendre les diverses saisons, l’hiver, le printemps, l'été et l'automne, que nous fait régler avec ordre le cours périodique des corps lumineux. L'hiver règne lorsque le soleil est dans la partie australe, et qu'il prolonge les ténèbres de la nuit dans nos contrées, en sorte que l'air qui nous enveloppe est refroidi considérablement, et que les exhalaisons humides se rassemblant sur nous causent les pluies, les frimas, et des neiges abondantes. Lorsque revenant des régions australes, le même astre s'arrête au milieu de sa course, de manière qu’il partage également le jour et la nuit, plus il conserve cette position par rapport à la terre, plus il nous ramène une agréable température. Arrive le printemps qui fait fleurir toutes les plantes, qui fait revivre la plupart des arbres, qui, par une génération successive, conserve toutes les espèces d’animaux terrestres et aquatiques. De-là, le soleil s'avançant vers le solstice d’été, dans les contrées septentrionales, nous donne les jours les plus longs. Et comme il séjourne dans l'air fort longtemps, il brûle celui qui est au-dessus de notre tête et dessèche toute la terre, opérant ainsi l'accroissement parfait des semences, et poussant les fruits à leur maturité. Lorsqu'il est le plus bridant, il accourcit les ombres à midi, parce qu'il éclaire nos contrées de plus haut. Les plus longs jours sont ceux où les ombres sont les plus courtes, comme les jours les plus courts sont ceux où les ombres sont les plus longues. Voilà ce qui nous arrive à nous qui sommes appelés Hétérosciens, et qui habitons les contrées septentrionales. Il est des peuples qui, deux jours de l’année, sont absolument sans ombre à midi, parce que le soleil, perpendiculaire sur leurs têtes, les éclaire également de toutes parts, de sorte que même les puits les plus profonds reçoivent la lumière par les plus étroites embouchures. Quelques-uns appellent ces peuples Aciens. Ceux qui habitent au-delà des contrées odoriférantes, voient, selon les saisons, leurs ombres passer d'un côté à l'autre. Seuls de la terre habitable, ils jettent l’ombre à midi vers les régions australes ; d’où quelques-uns les nomment Amphisciens. Voilà tout ce qui arrive lorsque le soleil s'avance vers la partie septentrionale. De-là on peut conjecturer combien les rayons du soleil échauffent l'air, et quels sont les effets de cette chaleur. Après l'été, nous sommes accueillis par la saison de l'automne, qui amortit l'excès du chaud, qui le diminue peu à peu, et qui, par une température moyenne, nous conduit heureusement à l’hiver, dans le temps où le soleil retourne des régions septentrionales aux contrées australes. Telles sont, d'après le cours du soleil, les vicissitudes des saisons qui réglera notre vie. Qu'ils servent de signes pour les jours, dit l'Ecriture, non pour produire les jours, mais pour les présider : car le jour et la nuit sont plus anciens que la création des corps lumineux. C'est ce que nous déclare le Psalmiste : Il a placé, il le soleil pour commander au jour, la lune et les étoiles pour commander à la nuit (Ps. 135.8). Et comment est-ce que le soleil commande au jour ? C'est que portant en lui la lumière, lorsqu'il monte sur notre horizon il nous donne le jour en dissipant les ténèbres. De sorte qu'on pourrait, avec vérité définir le jour, un air éclairé par le soleil, ou une mesure de temps pendant lequel le soleil demeure sur notre hémisphère. Le soleil et la lune ont été aussi établis pour les années. La lune forme l'année lorsqu elle a achevé douze fois son cours, excepté qu'on a souvent, besoin d'un mois intercalaire pour le calcul exact des temps. C'est ainsi que les Hébreux et les plus anciens Grecs comptaient d'abord l’année. L'année solaire est le retour du soleil d'un signe à ce même signe, d'après le cours qui lui est propre. [6,9] Et Dieu fit deux grands corps lumineux. Comme la grandeur se prend, ou dans un sens absolu, dans lequel sens nous disons que le ciel est grand, que la terre et la mer sont grandes ; ou le plus souvent par comparaison avec un autre corps, ainsi un cheval et un boeuf sont grands, non par l'étendue extraordinaire de leur corps, mais parce qu'on les compare avec des êtres de même nature : dans quel sens prendrons-nous ici l'expression de grandeur ? Est-ce dans le sens que nous appelons grande une fourmi, ou quelque autre petit animal, jugeant de leur grandeur par comparaison avec d'autres êtres de même espèce ; ou dans le sens qu'une grandeur absolue se montre dans la constitution des corps lumineux ? c'est sans doute dans ce dernier sens. Car le soleil et la lune sont grands, non parce qu'ils sont plus grands que les autres astres, mais parce que telle est leur circonférence, que la splendeur qu'ils répandent éclaire le ciel et l'air, embrasse a la fois a a terre et la mer. Dans quelque partie du ciel qu'ils se trouvent, soit qu'ils se lèvent, soit qu'ils se couchent, soit qu'ils soient au milieu de leur course, ils paraissent de toutes parts également grands aux hommes, ce qui est un témoignage évident de leur grandeur immense, parce que, malgré l'étendue de la terre, ils ne paraissent nulle part ni plus grands, ni plus petits. Nous voyons plus petits les objets éloignés ; à mesure que nous en approchons, nous en découvrons la grandeur. Mais personne n'est plus proche ni plus éloigné du soleil, qui s'offre de la même distance à tous les habitants de la terre. Ce qui le prouve, c'est que les Indiens et les Bretons le voient de la même mesure. Non, il ne paraît ni moins grand, lorsqu il se couche, aux peuples orientaux, ni plus petit, lorsqu'il se lève, aux nations occidentales ; et, lorsqu’il occupe le milieu du ciel, il ne change ni pour les uns ni pour les autres. Que l'apparence ne vous trompe pas, et parce qu'il ne vous paraît que d'une coudée, ne croyez point qu'il n'ait qu'une coudée. Dans les longues distances, la grandeur des objets diminue, parce que notre faculté visuelle ne peut parcourir tour l'espace intermédiaire, mais que s'usant, pour ainsi dire, dans l'intervalle, elle n'arrive aux objets qu'avec une petite partie d'elle-même. C'est donc la petitesse de notre vue qui nous les fait juger petits, parce qu'elle transporte sur eux sa propre faiblesse. Or, si notre vue se trompe, il s'ensuit que ce n'est pas un moyen sûr de connaître la vérité. Rappelez-vous ce qui vous est arrivé quelquefois, et vous trouverez dans vous-même la preuve de ce que je dis. Si du sommet d'une haute montagne vous avez jamais jeté les yeux sur une grande étendue de plaine, que vous ont paru les boeufs attelés et les laboureurs eux-mêmes ? ne vous ont-ils pas présenté l'apparence de fourmis? Si du haut d'une guérite vous avez promené vos regards sur une vaste mer, que vous ont paru grandes îles? que vous a paru un grand navire porté avec ses voiles blanches sur une plaine d'azur? ne vous ont-ils pas offert l'apparence d'une petite colombe ? Pourquoi? c'est, je le répète, que notre vue s'usant dans l'air et s'affaiblissant, est incapable de saisir exactement les objets. Les plus hautes montagnes, coupées de profondes vallées, notre vue nous annonce qu'elles sont rondes et unies, parce que se portant sur les seules éminences, elle ne peut, à cause de sa faiblesse, pénétrer dans les profondeurs intermédiaires. Ainsi elle ne conserve pas les vraies figures des corps, mais les tours quadrangulaires elle les juge ronds. Il est donc prouvé de toutes parts que, dans les grandes distances, nous ne saisissons des corps qu'une forme confuse et imparfaite. Le soleil est donc un grand corps lumineux, d'après le témoignage de l'Écriture, et infiniment plus grand qu'il ne nous paraît. [6,10] Ce qui doit être encore pour vous une preuve manifeste de la grandeur du soleil, c'est que, malgré cette multitude d'astres qui décorent le firmament, toute leur lumière ensemble ne peut suffire à dissiper la tristesse de la nuit; au lieu que le soleil seul, lorsqu'il paraît sur l'horizon, ou plutôt lorsqu'il est simplement attendu, et avant de se montrer réellement à la terre, fait disparaître l'obscurité, éclipse tous les astres, raréfie et résout en eau l'air épaissi et condensé qui nous enveloppe. De là les vents du matin et ces rosées abondantes qui tombent sur la terre dans un beau jour. Et comment pourvoit-il en un instant pour éclairer tout notre globe, qui est d'une si grande étendue, si le disque d'où part sa splendeur n'était immense? Ici admirez la sagesse de l'Ouvrier suprême ; comment dans une si grande distance, il lui a donné de la chaleur dans une si juste proportion, que les feux qu'il lance ne sont ni assez forts pour brûler la terre, ni assez faibles pour la laisser froide et stérile. On peut dire à peu près la même chose de la lune. C'est aussi un grand corps lumineux, et le plus éclatant après le soleil. Toute sa grandeur néanmoins n'est pas toujours visible; mais tantôt son disque est entier; tantôt, dans son décours, elle n'en montre qu'une partie. Une partie, lorsqu'elle croît, est obscurcie par les ténèbres ; et la partie éclairée, lorsqu'elle décroît, disparaît à la fin et se cache entièrement. Dans toutes ces variations de figures, le sage Ouvrier a eu sans doute des vues secrètes. En effet, ou il a voulu nous donner un exemple frappant de la fragilité de notre nature, nous apprendre qu'aucune des choses humaines n'est stable, mais que, parmi elles, les unes sortent du néant pour parvenir à leur perfection; que les autres, lorsqu'elles se sont accrues et qu'elles sont arrivées à leur plus haut point, s'altèrent par des diminutions insensibles et finissent par se détruire. Ainsi la vue de la lune nous instruit de ce que nous sommes; et nous faisant concevoir une juste idée du changement rapide des choses humaines, elle nous enseigne à ne pas nous enorgueillir des prospérités de ce siècle; à ne pas nous applaudir de la puissance, à ne pas être fiers de posséder des richesses qui sont passagères, à mépriser notre corps qui est sujet à la corruption, et à avoir soin de notre âme qui est immortelle. Si vous êtes fâché de voir la lune décroître peu à peu et perdre enfin sa lumière, soyez plus fâché encore de voir votre âme, lorsqu'elle est décoré de la vertu, perdre sa beauté par votre négligence, ne pas rester dans la même situation, mais varier et changer fréquemment par l'inconstance de votre esprit. L’insensé, dit avec vérité l’Ecriture, est changeant comme la lune (Eccl. 27. 12). Je crois aussi que les variations de la lune sont fort utiles pour la constitution des animaux et pour les productions de la terre: car les corps sont disposés différemment lorsqu'elle croit ou lorsqu'elle décroît. Lorsqu'elle décroît, ils se raréfient et deviennent vides; lorsqu'elle croit, et qu'elle s'avance vers la plénitude de son disque, ils se remplissent de nouveau, parce que sans doute elle leur communique insensiblement un certain humide mêlé de chaud qui pénètre jusqu'à l'intérieur. Nous en avons une preuve dans ceux qui dorment au clair de la lune, dont la capacité de la tête se remplit d'une humidité abondante; dans les chairs d'animaux récemment tués, qui changent dès que la lune paraît; dans les cerveaux des animaux terrestres, dans les plus humides des animaux maritimes, enfin dans la moelle des arbres. La lune ne pouvait produire tous ces changements par ses variations, si elle n'avait une vertu puissante et extraordinaire. [6,11] Les diverses phases du même astre influent aussi sur les divers mouvements de l'air, comme l'attestent les tempêtes subites qui surviennent souvent lorsqu'elle est nouvelle, après le temps le plus calme et le plus serein, lesnuées étant agitées et se rencontrant l'une l'autre; comme l'attestent encore les flux irréguliers des bras de mer, le flux et le reflux de l’océan, qui d’après les observations des peuples maritimes, suit exactement les variations de la lune. Dans les phases qui précèdent et qui suivent le renouvellement de la lune, les bras de mer coulent à droite et à gauche; c'est lorsqu'elle est nouvelle, qu’ils ne sont point un moment tranquilles, mais qu’ils éprouvent une agitation et un continuel balancement, jusqu'à ce que, paraissant de nouveau, elle donne au reflux quelque régularité. La mer Occidentale, sujette aux flux et reflux, tantôt revient sur ses pas, tantôt se déborde, comme si les inspirations de la lune la ramenaient en arrière, et que ses expirations la poussassent en avant jusqu’à une certaine mesure. Dans tout ce qui précède, j'ai voulu montrer la grandeur des corps lumineux, et prouver qu’il n'y a pas un mot d’inutile dans les divines Écritures. Cependant, nous n’avons pas touché les articles les plus essentiels; et en examinant avec attention la vertu et la puissance du soleil et de la lune, on pourrait faire beaucoup de découvertes sur leur grandeur et leur distance. Il faut donc reconnaître sincèrement notre faiblesse, afin qu'on ne mesure pas sur nos discours la grandeur des choses créées, mais que le peu que nous avons dit fasse penser à ce que doit être ce que nous avons omis. Ne jugez donc point par les yeux de la grandeur de la lune, mais par le raisonnement qui est beaucoup plus sûr que les yeux pour découvrir la vérité. On a répandu de toutes parts à son sujet des fables ridicules, qui sont les contes de vieilles femmes ivres; on dit que, par certains enchantements, on la fait sortir de sa place et descendre sur la terre. Quel enchanteur pourrait donc déplacer un astre fondé par le Très-Haut lui-même? ou quel lieu l’aurait reçu quand il aurait été déplacé ? Voulez-vous que je vous démontre par des preuves fort simples la grandeur de la lune? Les villes de la terre les plus éloignées les unes des autres, dans tous les endroits tournés vers son lever, reçoivent également sa lumière. Or, si elle ne se présentait pas à toutes en face, il y aurait des endroits qu'elle éclairerait tout entiers et directement; il y en aurait d autres qu'elle ne frapperait que d'un côté et faiblement par des rayons inclinés. C'est ce qu'on remarque par rapport aux lampes allumées dans les maisons. Lorsque plusieurs personnes environnent une lampe, l’ombre de celui qui reçoit la lumière directe, est jetée en arrière directement, tandis que les ombres des autres s’étendent à droite et à gauche. Si donc le disque de la lune n'était pas d'une grandeur immense et au-dessus de ce que nous imaginons, il ne se communiquerait pas également à tous. Lorsque la lune se lève dans les contrées équinoxiales, les habitants des pôles, ceux des zones glaciale et torride, participent également à sa lumière ; et comme elle se présente en face à tous dans la largeur du globe, c'est la preuve la plus claire de sa vaste circonférence. Qui pourra en disconvenir, quand elle s'offre avec la même mesure à de si grandes distances ? Nous n'en dirons pas davantage sur la grandeur du soleil et de la lune. Que celui qui nous a donné l'intelligence pour comprendre par les plus petits objets de la création la grande sagesse de l’Ouvrier suprême, nous accorde de concevoir par les grands objets de plus grandes idées du Créateur. Toutefois devant le souverain Etre le soleil et la lune sont comme le moucheron et la fourmi. Ces beaux astres eux-mêmes ne peuvent nous en donner une idée suffisante, et nous n’en pouvons prendre d’après eux que des notions légères et imparfaites, comme d'après les plus petits des animaux et les plus viles des plantes. Contentons-nous de ce qui a été dit, et rendons grâces, moi, à celui qui m’a gratifié de ce ministère de la parole; vous, à celui qui vous alimente de nourritures spirituelles, et qui, par ma faible voix, vient de vous nourrir encore d'un pain grossier. Puisse-t-il vous nourrir toujours et vous donner, en proportion de votre foi, la manifestation de l'esprit, en Jésus-Christ noire Seigneur, à qui soient la gloire et l'empire dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.