[1,0] LIVRE I. [1,1] LETTRE 1. A SON PERE. 1. Pour éviter d'être blâmé si notre correspondance s'interrompt, je préfère remplir rapidement mon devoir plutôt que de rester oisif dans l’expectative d’une longue attente ; en outre, on ne doit imputer ni poids ni mesure aux paroles des parents. Je semblerais injuste si je me comportais avec toi, selon un point de vue strictement légal, car celui qui demande une même déférence à des êtres disparates ne peut juger équitablement. Ainsi donc, tes propos émanent de ta sollicitude, les miens d’une obligation. Ces considérations et d'autres de ce genre m’ont fortement poussé à ne pas négliger mon devoir d'écrire. 2. Maintenant, je dois énoncer devant toi l'ordre de nos activités, car il n’est pas moins plaisant d’offrir un compte rendu de ses loisirs que de son travail. Nous sommes partis de notre propriété de Baules pour celle (du lac) Lucrin, non pas parce que nous nous étions fatigués d’y résider, car plus on y séjourne plus on l’aime, mais parce que je craignais, si mon penchant pour Baules se confirmait, que tous les autres endroits à voir viennent à me déplaire. Là, j’ai offert un ensemble de vers métriques à Acindynus, constructeur (de cette villa), et à ses ancêtres, et j’ai corrigé les libertés prises dans leurs portraits, où chacune des tenues vestimentaires était inappropriée. J’aurais différé un peu plus longtemps, si je n’avais pas craint d’entretenir ta curiosité. En conséquence, accepte ce léger poème, élaboré d’une manière rudimentaire : 3. Mon beau-père porte une cape attique, mon père une toge colorée ; L’un présida aux rites sacrés, l'autre se prononça sur le droit des Quirites. Mais comme en témoigne la fibule qui fixe ma tenue militaire, Parmi les peuples de l'Aurore, j’ai dirigé les prétoriens de l'empereur. À propos de mes faisceaux, le tableau se tait : tu dois regarder vers les fastes. 4. Dès que tu auras lu ces versets, je sais que tu feras immédiatement marcher ton plectre poétique. Ne le fais pas au péril de ma gloire. Je t’en supplie, par l'autorité de notre barde, comme par une sorte de loi : « Laisse une oie crier parmi les cygnes mélodieux. » {cfr. Virgile, Les Églogues, IX, 36} Tu ordonneras mon silence, à moins que tu t’engages à te taire. Mais veux-tu éprouver comme je suis loin de te redouter ? Voici que je te livre une autre de mes divagations secrètes, alors que sur la première je ne sais encore à quoi m’en tenir. Ecoute ces vers qui touchent à l’histoire de Baules : 5. Ici, pour les mener à l’étable, le divin Alcide rassembla les troupeaux Arrachés du foyer de Géryon, l’homme aux trois corps. A ce « parc-aux-bœufs », mal compris de qui n’en voyait plus le sens, Baules, plus tard, dut son nom. Du Dieu la Fortune accourut vers de puissants seigneurs Afin qu’un lieu fameux ne souffrît pas d’obscurs possesseurs : En ce palais résida le riche Hortensius, Assez éloquent pour résister à l’Arpinate ; Y vécurent longtemps dans la gloire le consul Acindynus Et Orfitus, le législateur des Ennéades ; Auprès d’eux, Symmaque, ta jeunesse prestigieuse, Fière de ses douze faisceaux, s’honore d’une charge due à tes aînés. Mais de Baules la paresseuse retraite ne te réclame pas encore. Homme jeune, que le service de l’État te garde en éveil ». 6. Tu te moques de moi, n’est-ce pas ? parce que je me suis vanté plus complaisamment qu’il ne convient ? C’est un reproche fondé que je mérite. De fait, quiconque s’affiche s’expose à une certaine suspicion de mensonge, puisque les gens pensent, quoi qu’on revendique, que cela ne nous appartient pas, et qu’à nouveau la vantardise, avide de louanges, diminue largement la retenue. Tu pourrais me dire, si un auditeur externe s’introduit discrètement, que je peux nier l’appartenance de ces petits vers, afin que la louange, semblant venir d'un autre, arrive à mes oreilles, ma modestie restant intacte. Mais, comme je le vois, mon petit poème ne doit pas être cause de regret. Ainsi, l'incertitude et le hasard me font douter : dois-je davantage craindre un risque pour ma modestie ou pour ma renommée. A toi, donc, meilleur que tous par la prudence, je délègue l'autorité de ce choix. Tu verras toi-même ce qui doit être fait ; je pense avoir été avisé en mettant secrètement au courant mon père de mon manque de clarté et de sagesse. Adieu. [1,2] LETTRE 2. SYMMAQUE LE PERE À SON FILS. 1. Voilà un cadeau dont non seulement la Campanie pourra se prévaloir mais surtout Rome, Athènes ou même d’autres, si ces mots avaient la faveur de faire l’objet d’une traduction en grec ! Car quoi de plus harmonieux que ta lettre, que je viens de recevoir ? Quoi de plus agréable qu’un mélange de vers et de prose ? A dire vrai, une lettre terminée trop vite pour des lecteurs qui en voulaient plus. Mais il faut qu’un certain sentiment perdure pour ceux qui, au-dessus des images, voient ces épigrammes inscrites ! On louera sans peine de tels successeurs de leurs prouesses, qui illumineront le lustre de la peinture avec de plus beaux vers encore. Quant à moi, je me réjouis donc que ton estomac soit moins gorgé d'huîtres et de palourdes que ton âme d’éloquence. 2. Et puisque tu m’as toi-même dégagé de ma honte, accepte de moi, aussi, ces éloges écrits des grands hommes de mon temps que je viens récemment de commencer. Car n'ayant rien à faire, et si je ne fais rien, le souvenir malheureux de mes ennuis me gagne, j'ai trouvé ce que nous pouvons ajouter à ces petits livres que j’ai récemment dictés. Tu sais que Térence — non pas l'auteur comique, mais l'homme de Reate, le père de l'érudition romaine — accommode ses livres des Hebdomades en y ajoutant des épigrammes. Je suis en train d'imiter ce travail, si le sort me le permet. Mais, pour le moment, je t’ai envoyé quelques-uns des textes composés en premier, te suppliant, par les dieux, d’y corriger quoi que ce soit qui te déplaise. Mais il n'y a pas lieu pour moi d'en avoir honte, car si toi ou moi peut plaire, la gloire sera mienne et je ne peux éviter une communauté littéraire où je ne rougis pas d'avoir un tel partenaire. 3. Aradius Rufinus Talentueux dès ton jeune âge, premier doté par la Fortune Parmi tes pairs, Rufin, ta gloire extraordinaire Alla de pair avec ta prospérité et tes actes. Personnage aimé de tous, protecteur des craintifs, Tu savais à la fois stimuler les bons princes, Et, en ton temps, brider les tyrans. 4. Valerius Proculus Parmi les premiers hommes de son âge, que la gloire de ses ancêtres n'affaiblît pas, Nous allons situer Proculus ; par sa digne vie et ses mœurs, Il ne fut jamais indigne des grands Publicola. Toujours il posséda l’amour de la vérité, la fermeté, et une sincère Vénération des dieux du ciel. Qui aurait pu le mépriser, Suscitant un effroi mêlé de respect. 5. Amnius Anicius Iulianus Qui aurait la richesse, la noblesse, ou un si grand pouvoir, Pour ne pas céder devant Amnius, qui, seul, éclipsa tout ? Un esprit pénétrant, mais aussi obligeant, Cher à tous, prêt à apporter son aide et son assistance. Car riche et éminent en raison de ses charges, mais toujours Il les dépassa et remplit Rome de son nom éternel. 6. Pétrone Probianus Laisse la Fortune se vanter des autres que seul leur libertinage, Sans aucune raison, a fait briller dans la ville de Romulus. Toi, Probianus, ta modestie t’a aidé, comme ton charme heureux, Par ta simplicité italienne de caractère et d’habileté. Pour cette raison, invité familier et attentionné des empereurs, A juste titre tu fus récompensé de grands honneurs. 7. Verinus Dois-je plus admirer ta maîtrise des armes, Verinus, Lorsque, pareil à un général, tu soumis dans un bain de sang les Arméniens de l’Orient, Que ton éloquence, le charme et les mœurs et de ta vie, Et — sauf lors des services et de la charge des affaires publiques — Le fait que tu vécus une vie heureuse dans une campagne innocente ? Impossible d’étendre la vertu ; car si c’était le cas, tu y prétendrais. 8. Je ne sais si je peux tenir compte de quatre-vingts personnes à moi seul ; pour cette raison je te délègue les épigrammes au sujet de mon beau-père et de mon oncle maternel. Car les livres de Varron contiennent aussi des écrits de différents auteurs. Adieu. [1,3] LETTRE 3. SYMMAQUE À SON PÈRE. 1. Je suis très content de pouvoir dire que mes propos ne te semblent pas fades, et je considère le fait que tu puisses avoir cette opinion de ma lettre comme un grand cadeau, car « être reconnu par le renommé » est une rare récompense pour le talent. Mais en vérité, tout à ma joie, je pense toujours que tu plaisantais lorsque tu as ajouté que l'effet de ma plume devrait perfectionner la pauvreté de tes vers. 2. Vraiment, je suis stupide et je ne vaux rien du tout, si je ne remarque pas que tu te moques de moi. En effet, que puis-je améliorer ou quel droit ai-je de te corriger ? Toi seul de notre époque as façonné la pièce d'éloquence latine sur l’enclume de Cicéron. La poésie agréable, la puissance des orateurs, la confiance dans l'histoire, le savoir des grammairiens, tout cela, toi seul en est imprégné ; tu es le véritable héritier de la littérature des anciens. N’essaye pas de m’en raconter. Je connais le proverbe sur « le cochon et Minerve. » Tu es un spécialiste particulier de l'épique et pas moins habile à inspirer un vers plus prosaïque. Vraiment ? Toi qui es aussi remarquable comme orateur que comme poète, tu prétends avoir besoin de mon aide ? C’est agir là de manière tout à fait partiale, et les faux compliments ne m’apportent aucun plaisir. 3. Entretemps, prête-moi l’oreille, je vais te dire ce que j’ai fait ces derniers jours. Je me détendais à Baia, ayant écarté tout témoin. Peu après, une rumeur arriva comme quoi certains « fils de la terre » approchaient ; je fis très attention à ce que cette communauté plébéienne ne vienne pas obscurcir ma solitude modérée. Je suis donc d’abord parti à Naples, puis, après quelque temps je fus reçu à Bénévent. Là, c’est avec la plus grande courtoisie et l’enthousiasme de l'ensemble des citoyens, que je fus fêté ; de tels grands honneurs m’ont fait alors sentir le poids des obligations. En effet, un empressement qui n’est pas compensé est pénible. 4. Et, bien que cette cité soit très vaste, chacun de ses notables m’a semblé plus grand que sa ville, étant amateurs les plus passionnés des lettres et possédant un caractère admirable. Une grande partie d'entre eux vénère les Dieux ; ils épuisent leurs revenus personnels à se concurrencer pour décorer leur cité. Car, après le tremblement de terre, rien ou presque ne leur est resté, mais des richesses brisées ont trouvé des esprits inébranlables. Chacun cherche à faire son devoir comme un bon citoyen ; pour travailler, la nuit se joint au jour. Pour cette raison, j’ai pris le plus grand soin à partir plus tôt que prévu, de peur que leur trop longue déférence envers moi les distraie de leur travail ou de crainte qu’avoir à doubler leurs devoirs les disperse. 5. Je suis donc retourné au golfe de Baia, car il y régnait alors le silence. D'ici, je te donne un salut respectueux et t’annonce que je reviendrai bientôt, si les dieux le permettent. Que la Fortune transforme cette promesse en réalité ! Malgré tout, laisse-toi souvent aller à m’écrire, comme on écrit à quelqu'un qui sera éloigné plus longtemps. Adieu. [1,4] Lettre 4. A SON PERE 1. Tu imites le projet de Varron, auteur des Ménippées, mais ton talent le surpasse, car je pense que les épigrammes que tu viens récemment de composer sur les grands hommes de notre époque se remarquent plus par leur éclat que les éloges des Hebdomades. Ces deux œuvres sont également sobres, mais la tienne a un style élaboré, tandis que la sienne, forgée dans un bon métal, n’a pas une tournure aussi raffinée. 2. Et, si je ne m’abuse, tu t’appuies sur un matériau plus solide. Lui, adresse brièvement une modeste louange à Pythagore, le premier à avoir affirmé l’éternité de l’âme ; à Platon, qui a établi que les Dieux existaient ; à Aristote, qui a transformé la façon de bien s’exprimer en art ; au pauvre Curius qui sut néanmoins diriger les riches ; aux sévères Catons, à la gent des Fabius, aux dignités des Scipions, et à ce glorieux Sénat au complet. Toi, cependant, tu illumines notre époque troublée. Il est difficile d’encenser des sujets aussi restreints. 3. Tu me demandes également d’ajouter plusieurs choses à tes vers. Ton bien-aimé Flaccus ne recommande rien de semblable dans ses préceptes de « L'art poétique », qui débute, si je m'en souviens, par : « N’associez pas une tête humaine au cou d'un cheval » {cfr. Horace, L'Art poétique, 1}. Je préfère donc te déplaire par mon indépendance d’esprit à refuser ce service plutôt que de te faire une promesse imprudente. Je t’en dirai plus personnellement, puisque je me prépare bientôt à suivre cette lettre voire même à la rattraper. De ton côté, poursuis ton entreprise, et utilise généreusement ton éloquence raffinée. Je te refuse la complaisance de ma langue, mais mes oreilles sont à ta disposition. Adieu.   [1,5] LETTRE 5. SYMMAQUE A SON PERE. 1. Sans raison valable, tu me reproches mon silence, alors que j'ai pris le plus grand soin à respecter mes devoirs, tant et si bien que, dans presque aucun des nombreux endroits où je me suis arrêté, je n’ai omis cette obligation. Certes une demande affectueuse de conversation satisfait l'âme, car même une plainte est douce quand elle arrive avec tendresse. Mais sache que ton insistance montre plutôt ta raison que ta droiture. Entretemps, tu n’as rien dit sur ta retraite à Praeneste, dont l’opinion publique m'a informé. Comme je voudrais surprendre à l’improviste ton repaire raffiné ! Bien que les charmes de la Campanie puissent les surpasser, il me plairait néanmoins plus de passer quelque temps avec toi et de tempérer l’embrasement estival par les brises fraîches de cette région. 2. Mais nos biens familiaux diminuent, et nous devons les surveiller partout, non pas pour que l’ensemble de nos revenus s’enrichisse plus, mais afin que la récolte espérée de nos terres soit soutenue par les dépenses volontaires. Car cette coutume s’est développée à notre époque, que des terres nourricières soient nourries maintenant ! Mais je laisse cela de côté, de crainte que mon hommage se transforme en plainte et te diminue le plaisir de mon devoir. Prends soin de ta santé et écris-moi plus souvent ; ces demandes que je fais là, je te promets sincèrement d’y répondre. Adieu. [1,6] LETTRE 6. SYMMAQUE A SON PERE. 1. Les habitués de la réception d’un cadeau quelconque sont généralement impatients lors des retards. En vérité, nous voyons cela comme une nouvelle innovation, alors que les gens prodigues de leurs richesses ne peuvent supporter le moindre délai pour dispenser leur générosité. Il y a quelque temps, vous avez bénéficié d’une succession par héritage juridique, et vous me l'avez donnée à juste titre. Votre bien est passé rapidement à mon patrimoine, et vous avez imité la Fortune, mais dans des circonstances plus heureuses, car ce que vous avez reçu dans le chagrin des biens d'une parente, et vous me l’avez remis dans la joie. 2. Que dirai-je du fait que vous avez ajouté à cette libéralité un éloge plus splendide, une distinction que je préfère au don d’une succession, car quiconque reçoit un avantage matériel sans aucune louange semble recevoir un cadeau obligatoire plutôt qu’une récompense méritée. Aussi, je tiens à exprimer et je ressens de la gratitude pour votre jugement dans toute la mesure du possible, parce que vous m’avez doté d’un double honneur. Je prie les Dieux que nous puissions tous profiter pendant longtemps de ce qui nous a été donné en commun et que je puisse avoir une descendance qui pourra hériter de ce domaine d'Ostie en accord avec mon avis et selon votre exemple. Adieu. [1,7] LETTRE 7. SYMMAQUE A SON PERE 1. Nous sommes de bonne humeur, car conscient de votre promesse d’avoir commencé votre voyage. Maintenant, il faut se hâter, afin que nous puissions rapidement profiter des bienfaits de l'automne quand le temps est encore chaud. En effet, la Campanie est radieuse durant ces mois avec ses champs fertiles et ses beaux arbres ; Baia est tempérée par des pluies éparses et un soleil modéré ; les tables menacées par des hordes d'amis, sont chargées de victuailles. 2. Mais une foule honorable n’est pas une menace à mes yeux ; même si elle était deux fois plus nombreuse que vous me l’écrivez, vous avez agi correctement. Il n'y aura pas de manque de nourriture ici pour rompre le jeûne, car « tuer le veau gras » est pour vos compagnons, modérés comme ils le sont, la chose la plus éloignée de leur esprit. Combien de temps vais-je parler ? Je vous envoie des mots, mais je recherche l'action ! C’est la marque d'un homme sage de « saisir l’instant présent. » Si votre voyage prend plus de temps que prévu, qu’il soit compensé par la durée de votre retraite tranquille. Adieu. [1,8] LETTRE 8. SYMMAQUE A SON PERE. Pendant longtemps, maintenant le calme du lac Lucrin, les eaux claires de Baia, de Puteoles, toujours bondée, et de Bacoli, avec ses profonds silences, ont souhaité votre présence. Vous restez dans votre rustique Cora ou à Formia au sol nu. Enfin, si c’est faisable, hâtez-vous de prendre la route pour venir voir des régions plus agréables, où il existe une paix profonde éloignée de la foule et où votre plaisir de vacances sera sans bornes, Là, Lyaeus le cornu Couvre les sommets du Gaurus, Vulcain bouillonne dans des cavernes torrides Sur ce qui se trouve à mi-hauteur, Et les sœurs Thétis et Baïes Possèdent les profondeurs et sa richesse piscicole. L'onde est chaude, l'air est frais ; Dansant en chœur, Avec l'éclat d’Amathus, Maîtresse de la mer et du ciel doux, Dione, fleur des astres, nage. Penseriez-vous par hasard que je déraisonne, enivré par trop d’exubérances, au point que mon nom entrât parmi les poètes ? Je ne veux rien savoir de cet opuscule ; je me suis plus appuyé sur les beautés du site que sur mon talent. D’ailleurs, si mes propos vous invitent, franchissez le pas, pour que nous puissions profiter de ce qui est à portée de main et avoir le bonheur de posséder ce que nous désirons. Adieu. [1,9] LETTRE 9. SYMMAQUE A SON PERE. Nous avions peur que la pluie ne vous retarde. Mais les écrits laissés par notre poète se sont révélés justes : « le devoir a surmonté un voyage difficile. » Pour cette raison, nous attendons votre arrivée le jour prévu. Fassent les dieux qu'aucun obstacle n’interfère avec ce qu’a décidé votre cœur. Adieu. [1,10] LETTRE 10. SYMMAQUE A SON PERE. C’est bien ma chance ! Partout où je pose le pied, où me conduisent mes pas, je tombe sur un projet de construction ! Maintenant, par exemple, la reconstruction de la villa de Capoue implique pour moi de lourdes charges. Une partie risque de s’effondrer en raison de la négligence et une autre réparée trop vite auparavant, mais avec des précautions insuffisantes fournit un endroit malsain à vivre. A moins de m’occuper de ces problèmes tout de suite, mes pertes augmenteront à l'avenir, que ce soit financièrement ou par l'effondrement de la villa. Car celui qui reporte ce genre de réfection perd tout en général. Pour cette raison, j’ai l'intention d’éliminer les signes de vétusté du bâtiment. Et ainsi, j'ai consacré à cette entreprise coûteuse mon précieux et recherché temps de loisirs. Vous avez entendu ce que je gère. Donnez-moi de bonnes nouvelles de votre santé et de vos activités, afin que je puisse conclure, sans mécontentement pour votre silence, le peu de temps que je me prépare à passer entièrement en Campanie. Adieu. [1,11] LETTRE 11. SYMMAQUE A SON PERE. 1. Comme l'anniversaire de votre fille approchait déjà, les cadeaux que vous aviez envoyés arrivèrent en temps opportun. Ils étaient, à mon avis, extrêmement précieux et significatifs. Car montrer de la considération pour les absents apporte extraordinairement une grande joie. J’ai immédiatement embrassé la lettre jointe à vos cadeaux, et ce fut le début de l’expectative, dans combien de temps nous diriez-vous : « je prends la Voie Appienne ». Mais rien de tout cela ne figurait dans votre lettre. 2. J’ai demandé au messager si quelque chose d'inattendu avait perturbé votre but fixé. Il répondit que votre résolution était toujours ferme, mais reportée jusqu'à ce que la maison de Formia fût pourvue en grain abondant et avec d'autres nécessités pratiques de ce genre. Mon esprit cessa alors de s’agiter. Je vous donne ma parole qu’ici, tant la table des notables, que les serviteurs et les bêtes ne manqueront de rien. Et afin qu’après coup je ne renie pas ma promesse, considérez ma lettre comme un engagement. Mon affection garantit ma promesse. En effet, je ne saurais permettre une tromperie à ceux que j'espère embrasser. Adieu. [1,12] LETTRE 12. SYMMAQUE A SON PERE. 1. Le censeur avait la responsabilité d'examiner tous les ouvrages construits ; vous m'avez chargé de superviser cette affaire. J'ai suivi vos instructions, car je me dois d’y obéir et parce que j'ai reconnu que cette tâche assignée était conforme à mes propres aspirations. Alors écoutez le soin apporté à la construction de notre maison. 2. Un beau marbre a été collé sur les escaliers. Les chambres de l’étage ont été recouvertes d’un placage d’une telle finesse que, malgré les jointures, il donne l'illusion d'être fait d'un seul tenant. Quant aux colonnes, vous ne les avez pas payées plus chères qu’un cadeau. Si je peux me fier à mes yeux, je pense qu’elles ont été découpées à partir de marbre de Bithynie. Voilà ce que vous deviez savoir. A compter de ce jour, je vous informerai chaque fois que la construction avancera. Adieu.