Sénèque l'Ancien (vers 59 av. J.-Chr. - vers 39 apr. J.-Chr.) cite Albinovanus Pedo à propos de la difficile navigation de Germanicus sur la mer du Nord : Sénèque l'Ancien, Suasoires, I, 15 : Latini declamatores in descriptione Oceani non nimis uiguerunt nam aut minus descripserunt aut nimis curiose. Nemo illorum potuit tanto spiritu dicere, quanto Pedo, qui in nauigante Germanico dicit : Iampridem post terga diem solemque relictum iamque uident, notis extorres finibus orbis per non concessas audaces ire tenebras ad rerum metas extremaque litora mundi; 5 nunc illum, pigris immania monstra sub undis qui ferat, Oceanum, qui saeuas undique pristis aequoreosque canes, ratibus consurgere prensis ; accumulat fragor ipse metus. Iam sidere limo nauigia et rapido desertam flamine classem 10 seque feris credunt per inertia fata marinis iam non felici laniandos sorte relinqui. Atque aliquis prora caecum sublimis ab alta, aera pugnaci Iuctatus rumpere uisu, ut nihil erepto ualuit dignoscere mundo, 13 obstructa in tales effundit pectora uoces : « Quo ferimur ? Fugit ipse dies orbemque relictum ultima perpetuis claudit natura tenebris. Anne alio positas ultra sub cardine gentes atque alium flabris intactum quaerimus orbem ? 20 Di reuocant rerumque uetant cognoscere finem mortales oculos : aliena quid aequora remis et sacras uiolamus aquas diuumque quietas turbamus sedes? » ... Les déclamateurs latins n’ont pas montré trop de vigueur dans la description de l’Océan : elle est trop faible ou trop minutieuse. Aucun n’a pu atteindre le souffle de Pedo {Albinovanus Pedo ; entre la fin du Ier siècle av. J.-C. et le début du Ier siècle ; cfr. Sénèque le jeune, Lettres à Lucilius, CXXII, 15}, qui, sur la navigation {mer du Nord} de Germanicus, s’exprime ainsi : « Depuis longtemps ils voient, derrière eux, s’éteindre toujours davantage le jour et le soleil ; comme chassés hors des limites connues de l’univers, ils s’avancent avec audace, à travers les ténèbres qui leur sont fermées, vers les bornes de la nature et les plus lointains rivages du monde ; maintenant l’Océan, qui porte dans ses ondes paresseuses des monstres effrayants, l’Océan qui, dans toute son immensité, nourrit des baleines terribles et des chiens de mer, l’Océan se dresse contre leurs navires qu’il saisit. Son bruit suffît à augmenter les craintes. Déjà gisent, échoués sur un bas-fond, les navires et la flotte, privée du vent qui la pousserait ; les équipages croient que les destins immuables les livrent, par un sort cruel, à la dent des monstres marins. L’un des matelots, debout sur la proue, tendant ses regards pour percer de sa vue l’air opaque, n’ayant pas réussi à distinguer un seul objet du monde, du monde soustrait à leurs yeux, exhale en ces termes son cœur oppressé : « Où sommes-nous emportés ? Le jour lui-même fuit et la nature, dont les bornes sont près de nous, entoure d’une barrière de ténèbres éternelles le monde que nous avons quitté. Cherchons-nous des nations placées de l’autre côté, sous un autre pôle ? Cherchons-nous un autre monde où ne soufflent pas les vents ? Les dieux nous rappellent et défendent aux regards humains de voir où la nature finit. Pourquoi, de nos rames, violer ces flots sur lesquels nous n’avons aucun droit, ces eaux sacrées ? Pourquoi troubler la paisible demeure des dieux ? »