[0] THÉOPHRASTE, Fragments (Codex 278). [1] J'ai lu parmi les livres de Théophraste celui "Sur les animaux qui changent de couleur". Ils changent de couleur pour ressembler à des plantes, des lieux, des pierres sur lesquelles se mettent le polype, le caméléon, le renne sauvage, qui, dit-on, provient du pays des Scythes, ou des Sarmates. Le caméléon se transforme en toutes les couleurs sauf en blanc et en rouge, et il ne prend pas seulement les couleurs des choses sur lesquelles il se trouve, mais tout seul il change de couleur si quelqu'un le touche. Le renne est de la taille d'un bœuf, sa tête est celle d'un cerf, mais un peu plus large comme si elle était composée de deux fronts de cerfs, son pied est fourchu. Il porte une ramure identique à celle du cerf, et recouverte de poils. De la peau couvre les os, d'où sortent les poils. La peau épaisse d'un doigt est vraiment dure, c'est pourquoi on la sèche pour en faire une cuirasse qui couvre la poitrine. On voit rarement cet animal : sa transformation est si remarquable qu'elle en est presque incroyable. D'autres animaux muent en changeant leurs humeurs internes, ou leur sang, ou autre chose de sorte que leur adaptation à l'environnement est évidente. Le changement de couleurs des poils, alors qu'ils sont secs et pendants se produit très rarement et c'est une chose tout à fait admirable et incroyable, surtout qu'elle se fait dans une variété de couleurs. Le caméléon semble changer de couleur en respirant, étant par nature "pneumatique". Le signe en est la force de sa respiration ; elle s'étend presque dans tout son corps : ce qui fait qu'il s'enfle visiblement et gonfle. [2] Tiré du livre de Théophraste "Sur la paralysie". Il affirme que la paralysie provient du refroidissement, comme nous le croyons tous. D'autres, cependant, la font provenir de la respiration, car il s'agit d'une maladie pulmonaire, et d'autres de la perte et du manque de souffle, car c'est ce qui produit la chaleur et le mouvement. Ne pas bouger entraîne un refroidissement du sang, ou, pour parler bref, des humeurs. Ainsi se produit l'engourdissement des pieds, ou des membres supérieures, quand la chaleur et le mouvement sont comprimés par la position assise ou d'une autre façon; il y a alors compression du souffle et privation de mouvement, le sang qui ne peut plus reprendre s'arrête et se refroidit. [3] Tiré "De l'évanouissement". L'évanouissement est une déperdition ou une baisse de température dans la région pulmonaire et cela découle encore de la chaleur. Un grand feu en chasse un plus petit, on le sait par expérience. Nous nous sentons mal puis nous nous évanouissons lors de chaleurs étouffantes, ou à cause d'une autre chaleur fort condensée qui nous opprime. Ensuite, elle s'éteint parce qu'elle ne ressent plus le froid. Sans doute la suffocation empêche de respirer, d'où son nom de g-pnigos. On étouffe et celui qui ne peut respirer semble étouffer. Témoin cet évanouissement aux bains et aux sudations. Il est évident que cet évanouissement provient de la chaleur, et à cause de la chaleur : la température externe éteignant celle de l'intérieur. Alors on s'évanouit par manque des éléments naturels de la chaleur, comme le sang, ou tout simplement les humeurs naturelles, car nous voyons des évanouissements lors d'hémorragies et dans les flux de ventre. Des évanouissements se produisent aussi par fatigue. Trop de chaleur entraîne un évanouissement, car elle consume la chaleur moins forte, empêche la respiration, et ne permet pas au corps de se refroidir. Ainsi, la plupart de ceux qui prennent leur bain ne souffrent pas d'évanouissement, mais ceux qui ont terminé s'évanouissent davantage parce que l'humeur produite par la liquéfaction de ceux qui prennent leur bain est chaude alors que celle de ceux qui ont quitté le bain est froide. Comme l'humeur est froide, en tombant dans les organes principaux, elle entraîne un évanouissement, à moins que ce ne soit le relâchement de la respiration qui entraîne l'évanouissement. Ainsi, on prescrit de retenir sa respiration en cas d'évanouissement. Celui qui la retient empêche que la chaleur s'échappe et celui qui la relâche la perd. On aide ceux qui s'évanouissent en les aspergeant d'eau, ce qui referme les pores et condense les conduits, et accumule la chaleur à l'intérieur (car elle résiste). La joie et la tristesse entraînent aussi des évanouissements. Elles contribuent toutes deux à créer nombre d'humeurs. La joie par la liquéfaction et la dilatation, la tristesse par la coagulation. Et quand l'humeur parvient au poumon, nous nous évanouissons. [4] Tiré "Du vertige". On a des vertiges lorsqu'un souffle étranger entre dans la tête, ou une humeur superflue, ou à cause d'un peu de nourriture, ou de vin, ou d'une autre boisson. Également en tournant tête. En effet puisque le siège du cerveau est humide, si quelque chose d'étranger y entre, il y apporte une plus grande force que celle convenue, et remue les veines autour de la première humeur. Et puisque l'agitation arrive comme un tourbillon, et que l'humeur n'est pas très dense, mais en un mouvement continu, l'une prenant de l'avance, l'autre du retard à cause de la différence de densité, on a des vertiges, et souvent on tombe. Pourquoi on ne peut retourner les œufs crus. On ne peut pas retourner les œufs crus comme les cuits, soit parce qu'ils chancellent à cause de leur humeur inégale ne présentant pas le même poids, soit parce qu'ils n'ont aucun élément qui puisse les faire tomber, puisque leur intérieur est un et continu. De cette considération, on considère que ceux qui marchent en rond ont des vertiges, et ce d'autant plus que le cercle est petit, et qu'ils courent plus vite, et plus ils courent avec d'autres, que seuls. C'est aussi la raison pour laquelle ceux qui courent en tournant à gauche sont plus sujets au vertige que ceux qui courent en tournant à droite. On a parlé plus haut de la cause de ces phénomènes et de phénomènes semblables. Si on a un vertige lorsque qu'on tourne la tête dans un sens, si quelqu'un tourne autour de lui, il souffrira du vertige très vite, bien avant les autres. Plus près est celui qui tourne la tête, plus sa vitesse donne le vertige. C'est pourquoi ceux qui courent sont plus enclins au vertige que ceux qui se promènent, et plus encore ceux qui courent vite que ceux qui vont lentement (car ils courent en effet en s'inclinant vers le centre). Ceux qui courent en tournant à gauche ont plus le vertige que ceux qui courent en tournant à droite, parce qu'ils forment un angle plus aigu par rapport au cercle. En effet les choses situées à droite étant plus lourdes, elles sont plus attirées vers le centre, à cause de la faiblesse du côté gauche. Et si vous courrez avec d'autres plus que seuls : outre le mouvement circulaire, la vue tournée vers les coureurs, n'étant pas continue, provoque un mouvement et un trouble dans le cerveau. Donc nous souffrons davantage de vertige parce que le cerveau supporte deux mouvements : d'une part le tournoiement, d'autre part le mouvement apporté par la vue. Que souvent beaucoup de gens aient le vertige en clignant des yeux, est évident par de nombreux indices. Les marins souffrent plus vite et plus fortement de vertige en regardant les vagues, et ceux qui regardent les balançoires et les roues, aussitôt tombent dans les ténèbres. Souffrent aussi de vertige ceux qui regardent longtemps les profondeurs et les précipices, du fait que la vue trop longtemps tendue au moins est troublée et perturbée : des yeux troublés et agités troublent et agitent l'intérieur; cela n'arrive pas à ceux qui regardent vers le haut parce qu'ils ne regardent pas longtemps, empêchés qu'ils le sont par la lumière. On a aussi le vertige quand on regarde longtemps une chose. Une difficulté est de savoir pourquoi parfois, il arrive la même chose quand on fait tourner ses yeux en cercle puis qu'on cesse. On prétend que la cause en est le mouvement circulaire. Mais pourquoi cette douleur se produit quand on arrête et qu'on fixe le regard, c'est parce que ce qui était sauf dans le mouvement, l'arrêt et le repos les troublent. Quand la vue est fixe, le reste dans le cerveau ne bouge pas. Étant fixes, les éléments lourds se divisent, se séparent, alourdissent et provoquent le vertige. Le mouvement circulaire sépare le lourd du léger. Se baisser produit aussi le vertige. Car en se baissant, on sépare le lourd du léger. L'un monte, l'autre descend. Mais comme on l'a dit, il faut qu'ils restent ensemble. L'abondance et le besoin produisent aussi le vertige. Le manque produit l'épuisement, l'abondance la surabondance, puisque les pores sont bouchés. En effet, tout en montant, elle descend et divise les circuits : de là viennent les vertiges. L'ivresse, le poison, et d'autres choses semblables donnent le vertige. L'humeur étrangère en effet tombant sur nous, crée des perturbations. Ceux qui se lèvent souffrent plus de vertige que ceux qui sont assis. Car l'humeur dans la tête reste plus ramassée. Mais quand on se déplace, l'humeur se dissipe, et tombant d'un seul côté, elle entraîne le vertige [5] Du même "Sur la Fatigue". Celui qui descend une pente se fatigue beaucoup les cuisses, par contre celui qui monte se fatigue les mollets parce que dans la montée le travail de soulever le corps est un fardeau. La fatigue se fait surtout sentir à porter et à soulever ce poids. En descendant il y a aussi fatigue, parce que le poids du corps tombe et est entraîné contre les lois de la nature. Ainsi, plus le poids tombe, plus la fatigue est grande. Car de même que les mollets travaillent plus en montant, de même les cuisses en descendant. Puisque les choses lourdes sont entraînées vers le bas, il est plus difficile de monter que de descendre. Il est plus difficile de lancer le bras à vide que de jeter une pierre ou quelque chose d'autre de lourd, parce que le mouvement est plus convulsif: car on ne s'appuie pas comme le lanceur sur le poids qui se trouve dans la main. Elle ne se fixe pas, comme celui qui lance, au poids qui est dans la main. Les rues planes fatiguent plus que les rues inégales parce que trop de mouvement fatigue : un grand mouvement est continu et uniforme. Les chemins inégaux, à cause des changements, amènent le repos : dans la marche à plat la similitude du maintien amène un mouvement continu. Les gens fatigués ont des pollutions nocturnes parce que leurs corps sont chauds et humides à cause de leur consomption. Telle est la façon de perdre du sperme. Ceux qui sont couchés sur le dos le font parce qu'ils sont affaiblis. Cette position amène des pollutions nocturnes. Les corps humides sont plus vite fatigués que les corps secs, parce qu'ils sont plus faibles, quoique d'une autre façon les corps secs soient plus fragiles. [6] Du même "Sur les animaux qui se mettent à pulluler". La cause de l'abondance des animaux n'est pas la même pour tous : pour certains elle est évidente, comme les mouches qui dans les camps, dans la foule des hommes prolifèrent après leur départ. La cause s'en trouve dans le fumier et dans la putréfaction. D'autres animaux existaient avant mais apparaissent après les pluies comme les escargots et les petites grenouilles. Elles ne tombent pas avec la pluie, comme certains le pensent, mais elles n'apparaissent, alors qu'auparavant elles étaient sous terre, que lorsque l'eau atteint leurs refuges. Il y a un autre genre de grenouilles que celles qui vivent dans les lacs et les marais. Il y a abondance de mouches et d'autres animaux lors de leur reproduction. Les mouches naissent plus après la fin des assemblées et des armées que durant leur concentration. Lorsqu’il y a présence humaine, à cause de la vie quotidienne et du mouvement, il se fait que les germes meurent dans le mouvement et le changement, comme cela arrive chez d'autres insectes, ainsi que chez ceux qui sont rejetés avec les crasses. Mais quand le camp est levé, aussitôt elles pullulent, parce que rien ne les en empêchent, jusqu'à ce que l'humidité des immondices est asséchée. Les mouches, comme nous l'avons dit, naissent rapidement et en abondance : les escarbots et les sauterelles sont partout, comme je l'ai dit. Elles pullulent là où elles occupent des lieux propices et que leurs œufs ne sont pas détruits. Cela arrive parce que la zone est en friche. Si un champ est cultivé, elles périssent. C'est pourquoi ces insectes se transportent d'une région inculte et déserte vers des régions fréquemment habitées et cultivées. Ils y restent longtemps, soit parce que le lieu est entouré de hautes montagnes et qu'ils n'ont pas la force de les surmonter, soit à cause des avantages de la région : ils aiment une région douce, tranquille, humide et remplie de rosée. Les sauterelles sont un fléau, mais les escarbots sont un fléau pire encore. Les pires de tous sont ceux qu'on appelle g-broukous (sauterelles). Elles se reproduisent entre elles. Certains pensent, sans en donner de raison, que certaines d'entre elles ont la même couleur que celle du pays et que leur génération est spontanée. Mais il est évident qu'une telle chose provient de la nourriture et non de leur mode de génération. La mort de ces insectes est différente. Pour les uns elle est naturelle et pestilentielle. Lors de la canicule ils sont comme piqués par un taon et dans leur tête se développe un petit vers qui les détruit. Pour d'autre cela se produit par le mouvement en volant. Car emportés par les vents, elles sont transportées jusqu'à la mer et meurent. D'autres meurent à cause de l'hiver et du froid ainsi que leurs œufs. D'autres encore meurent de la main de l'homme : on creuse des fossés, on les jette dedans, on les enterre et on les fait périr. Les serpents naissent de deux façons ; soit de la pluie soit lors de l'effusion de sang lors des guerres, à l'origine de presque tous les autres animaux venimeux. C'est pourquoi jadis en Thessalie disait-on il y avait un grand nombre de serpents. Il y a beaucoup de rats dans les champs et plus sur terre sèche que sur terre humide. En effet ils n'aiment pas l'eau. Cet animal est prolifique. Il est évident que trop d'eau les fait périr. Elle leur est funeste au dehors et en plus envahit leurs trous. La belette sauvage les tue aussi. Ils meurent aussi en cachette souvent d'un mal pestilent. Cette maladie prend son origine dans leur tête à cause de vers : ceux qui ont l'expérience par l'observation, connaissant la maladie peuvent la présager et annoncer leur mort On dit que les rats rongent le fer et l'or : c'est pourquoi les orfèvres, les dissèquent pour en retirer l'or. En Égypte naissent des rats bipèdes et énormes. Ils ont en effet des pattes de devant; ils ne s'appuient pas dessus mais s'en servent de mains. Ils sautent en fuyant. [7] Du même auteur "Sur les animaux sujets à l'envie". Le lézard moucheté, à ce qu'on dit, jaloux de l'aide qu'il peut donner à l'homme, avale sa propre peau, lors de sa mue, car celle-ci est un remède pour l'épilepsie. Le cerf enterre sa corne droite, alors qu'elle est utile contre le venin du crapaud, et contre bien d'autres choses. La jument mange l'hippomane des poulains, alors qu'elle est utile pour certaines choses. Le phoque au moment d'être pris, vomit sa pressure, alors qu'elle est également bonne pour l'épilepsie. Le hérisson terrestre se souille la peau d'urine et la détruit. Le lynx enfouit son urine, alors qu'elle est utile pour faire des sceaux, et pour d'autres choses. Toutefois, il est clair que les animaux ne font pas cela pour ennuyer les hommes, mais que ce sont les hommes, qui par conjecture, leur attribuent un tel défaut. D'où proviendrait une telle sagesse chez des animaux sans raison, alors que les hommes ne la possèdent à peine après un long apprentissage ? C'est peut-être la peur naturelle qui pousse les phoques à rejeter leur pressure et qui pousse le lézard moucheté à avaler sa peau : il le fait par penchant naturel comme les chiens, les porcs, et presque tous les quadrupèdes. Ils mangent aussi les membranes qui entourent leur fœtus. C'est par peur ou par suite d'une autre affection naturelle que le hérisson urine et non pas pour corrompre sa peau. Les animaux dépourvus de raison font beaucoup de choses dont nous ne pouvons donner la raison; comme, par exemple, la poule, qui lorsqu'elle pond, s'entoure de paille. Pourquoi les chiens lorsqu'ils urinent lèvent-ils la patte? Pourquoi lorsque la chèvre mange de l'herbe à cent têtes (érynge), reste-t-elle debout et fait-elle en sorte que les autres restent debout? Il faut déduire la même chose de ce que l'on a dit du lynx et du cerf. [8] Du même "Des sueurs". La sueur est salée, parce ce qui est étranger est séparé de la chair qui y adhère, toute légèreté et douceur étant enlevée. Un tel excrément se trouve dans de la vessie : c'est l'urine ; sur la chair c'est la sueur. La sueur sort par le biais des mouvements, de la fatigue, ou à cause de la chaleur et de la respiration. La sueur comme le sel, donne de l'acidité ou de l'amertume, une bonne ou mauvaise odeur pour beaucoup de raisons variées. Les jeunes transpirent plus difficilement que les gens d'âge mûr, et surtout les petits enfants, bien qu'ils soient naturellement chauds et humides (cause de sueur, parce que la peau des enfants est très dense et comme fermée). En outre, l'excès de chaleur cuit les sueurs quand ils croissent. S'il y a résidu, il s'écoule par le bas-ventre. En général la défécation des enfants est facile. Les vieillards ont une peau distendue mais ils sont secs. Il faut donc à la sueur de l'humeur comme matière première. C'est pourquoi une bonne respiration et l'absence de consistance produisent une excrétion suffisante et par sa continuité et par son peu d'humeurs. C'est pourquoi ceux qui ont les intestins humides et dont les excréments s'évacuent vers la vessie ne transpirent pas facilement parce que toute l'humidité s'y précipite. Ceux qui n'ont pas digéré leur nourriture et les insomniaques transpirent parce que la digestion répartit les humeurs et le sommeil les cuit. Ceux qui s'exercent, et ceux qui sont bien portants, transpirent plus que ceux qui ne travaillent pas. Ceux qui mangent des aliments cuits, et ceux qui mangent des aliments crus transpirent beaucoup, ce qui semble être absurde, mais ne l'est pas. Ceux qui exercent leurs corps, parce qu'ils ont leurs corps souples et les pores ouverts, et qu'ils sont habitués à transpirer, suent beaucoup. Les pores des autres sont fermés parce qu'ils ne s'exercent pas. Ceux qui mangent des aliments crus, à cause de la multitude des humeurs, transpirent davantage. Ceux qui mangent des aliments cuits, l'humidité ayant été supprimée par la digestion d'u reste du suc, transpirent facilement. Ceux qui ne travaillent pas transpirent plus quand ils sont au repos : ils n'augmentent pas ni ne retiennent leur respiration, mais quand ils recommencent à travailler, comme les veines de ceux qui travaillent se gonflent d'air, il y a obstruction des pores. C'est pourquoi l'humeur s'échappe davantage par des pores dilatés. La rétention d'air remplit les veines pour empêcher la sueur de sortir. Après le travail et la course, ceux qui sont à l'ombre suent plus ceux qui sont au soleil. C'est parce que le soleil sèche et condense les pores. Qui met les pieds dans l'eau, ne transpire pas, parce que l'eau empêche la liquéfaction, et la sueur est une liquéfaction des choses qui sont mal placées dans les chairs lorsqu'elle est évacuée par la chaleur. Les exercices physiques, s'ils sont continus, dessèchent, comme le soleil : c'est pourquoi ceux qui s'y adonnent transpirent moins. On transpire d'abord et surtout du front, parce que l'humidité se trouve à la base du cerveau. La tête transpire aussi beaucoup, parce qu'elle est légère, comme le montrent les cheveux et parce que la rétention de la respiration provoque une certaine tension dans la tête. Ceux qui sont angoissés suent des pieds et jamais du visage parce que l'angoisse ne fait pas diminuer la chaleur, mais plutôt l'augmente, comme dans la colère on a le visage rouge parce qu'on est très chaud (c'est une chaleur permanente sèche). La chaleur se liquéfie dans les pieds, parce qu'elle est trop faible pour pouvoir dessécher. Mais elle est toutefois supérieure à ce qu'elle y était avant d’y être implantée. Ceux qui dorment ont plus de sueur que ceux qui veillent parce que leurs humeurs et leurs chaleurs sont plus grandes à cause de la lutte des contraires : la sueur provient des deux causes. [9] Du même "Sur les abeilles". On peut avoir du miel de trois façons, soit par les fleurs, et d'autres choses où se trouve de la douceur, soit par l'air lorsque l'humeur tombe, liquéfiée par le soleil et cuite : c'est ce qui arrive surtout au temps de la moisson, soit par les roseaux. Le miel tombe du ciel et sur la terre et sur les plantes qu'il rencontre, et en particulier sur les feuilles de chênes et de tilleuls, parce que celles-ci sont denses et humides. Il faut donc que les feuilles ne soient ni absolument sèches, pour ne pas absorber le miel, ni clairsemées afin de ne pas être traversées. Les feuilles de chêne sont denses et humides, et le tilleul a sa douceur propre. L'abeille a une sorte de familiarité avec le chêne.