[2,0] ASTRONOMICON - LIVRE II. Les combats livrés sous les murs d'Ilion ; Priam, père et roi de cinquante souverains ; la flotte des Grecs incendiée par Hector; Troie invincible sous ce héros; les erreurs d'Ulysse, qui durèrent autant que ses exploits, et l'exposèrent sur mer à autant de périls que devant Troie; les derniers combats qu'il eut à soutenir dans sa patrie pour recouvrer son royaume usurpé : tels sont les évenements chantés par ce poète immortel dont la Grèce nous a laissé ignorer la vraie patrie, en lui en assignant sept différentes; par cet homme divin, dont les écrits sont une source féconde où ont puisé tous les poètes, un fleuve que la postérité, enrichie des trésors d'un seul homme, a partagé en une infinité de rameaux. Hésiode le suivit de près : il a célébré les dieux et ceux dont ils tirent leur origine; il a montré le chaos engendrant la terre, l'enfance du monde sous l'empire du chaos; les astres, premières productions de la nature, et encore incertains dans leur marche ; les vieux Titans; le berceau du grand Jupiter; son titre d'époux joint à celui de frère; le nom de mère acquis à Junon sans l'entremise de ce frère ; la seconde naissance de Bacchus sortant de la cuisse paternelle; enfin toutes les divinités dispersées dans la vaste étendue de l'univers. Il a fait plus : voulant nous faire profiter des dons de la nature, il a dicté les lois de la culture des terres; il a enseigné l'art de les rendre fertiles : il nous a appris que Bacchus se plaît sur les coteaux, Cérès dans les plaines, Pallas dans ce double séjour, et que par la greffe on peut faire produire aux arbres diverses espèces de fruits ; occupations dignes d'exercer l'homme pendant la paix. Quelques-uns ont décrit les figures des constellations, les signes que nous voyons répandus dans toute l'étendue des cieux; il les ont rangés en différentes classes, et nous ont dit les causes qui leur ont mérité les honneurs célestes. L'appareil d'un supplice y aconduit Persée et Andromède, la plaintive Cassiopée, et Céphée qui s'efforce de la consoler. La fille de Lycaon y fut enlevée par Jupiter; Cynosure y est parvenue, pour le soin qu'elle prit du maître des dieux; la chèvre, pour l'avoir nourri de son lait; le cygne, pour lui avoir prêté son plumage; Érigone, pour prix de sa piété; le scorpion, pour avoir lancé son dard à propos; le lion, pour sa dépouille enlevée par Hercule ; l'écrevisse, pour avoir mordu ce héros; les poissons, pour avoir vu Vénus emprunter leur forme; le bélier, chef des signes célestes, pour avoir triomphé des flots. Il en est de même des autres constellations que nous voyons rouler au haut de l'espace; les poètes ont puisé dans l'histoire les causes qui les ont élevées au ciel, et le ciel, dans leurs vers, n'est qu'un tableau historique; ils nous montrent la terre peuplant le ciel, au lieu de nous la représenter comme en étant dépendante. Le poète que la Sicile a vu naître a décrit les moeurs des bergers ; il a chanté Pan enflant ses chalumeaux : ses vers, consacrés aux forêts, n'ont rien d'agreste; la douceur de ses modulations donne de l'agrément aux lieux les plus champêtres, et les antres, grâce à lui , deviennent le séjour des Muses. Celui-là chante le plumage varié des oiseaux, et les antipathies des animaux ; celui-ci traite des serpents venimeux; cet autre, des herbes et des plantes dont l'usage peut ou donner la mort, ou rappeler à la vie. Il en est même qui évoquent le noir Tartare des ténèbres où il est plongé, le produisent à la lumière, et qui, rompant les liens de l'univers, le déroulent en quelque sorte, pour en bouleverser l'intérieur. Rien n'est resté étranger aux doctes Soeurs; il n'est point de chemin, conduisant à l'Hélicon, qui n'ait été frayé; [2,50] les sources qui en découlent ont donné naissance à des fleuves, dont les eaux réunies ne sont pas encore assez abondantes pour la foule qui s'y précipite. Cherchons quelque prairie dont l'herbe, humectée de rosée, n'ait pas encore été foulée; une fontaine qui murmure paisiblement au fond de quelque antre solitaire, que le bec des oiseaux n'ait point effleurée, et où le feu céleste de Phébus n'ait jamais pénétré. Tout ce que je dirai m'appartient; je n'emprunterni rien d'aucun poète; mes vers ne seront point un larcin, mais une oeuvre; le char qui m'élèvera au ciel est à moi ; c'est sur ma propre nacelle que je fendrai les flots. Je chanterai la nature douée d'une secrète intelligence, et la divinité, qui, vivifiant le ciel, la terre et les eaux, tient toutes les parties de cette immense machine unies par des liens communs. Je décrirai ce tout, qui subsiste par le concert mutuel de ses parties, et le mouvement qui lui est imprimé par la raison souveraine. C'est, en effet, le même esprit qui, franchissant les espaces, anime tout, pénètre toutes les parties du ciel, et donne aux corps des animaux la forme qui leur convient. Si cette vaste machine n'était pas un assemblage de parties convenablement assorties, si elle n'était pas soumise aux lois d'un maître, si une sagesse universelle n'en dirigeait pas tous les ressorts, la terre ne serait pas immobile, les astres ne circuleraient pas autour d'elle, le ciel s'arrêterait, et, en perdant son activité, s'endurcirait par le froid; les signes célestes s'écarteraient de la route qui leur est prescrite; la nuit ne fuirait pas à l'approche du jour, et ne le mettrait pas en fuite à son tour. Les pluies ne féconderaient pas la terre, les vents n'entretiendraient point l'air, la mer ne fournirait point d'aliment aux nuées, les fleuves n'en serviraient pas à la mer, celle-ci ne ferait pas refluer ses ondes aux sources des rivières; l'univers, sans un sage moteur, n'aurait plus, dans ses parties, cette juste proportion qui empêche que les eaux ne tarissent ou qu'elles n'inondent la terre, et que les astres ne précipitent ou ne ralentissent leur course. Le mouvement entretient, mais ne change pas le monde. Tout est donc distribué dans l'univers par la volonté d'une sagesse souveraine. Or ce dieu, cette raison, qui gouverne tout, a voulu que les animaux de la terre dépendissent des signes du ciel. Il tient, il est vrai, ces signes à une distance extrême de nous; mais il nous force de reconnaître par expérience qu'ils décident de la vie et des destinées des nations, des moeurs qui caractérisent tous les êtres. Cette vérité n'exige pas de longs raisonnements. Le ciel agit manifestement sur nos campagnes ; ii fait la stérilité ou la fertilité de nos moissons ; il agite la mer, il la pousse sur nos côtes et l'en retire : ces deux mouvements opposés de l'océan sont dus à l'action de la lune, qui s'approche et s'éloigne, et à celle du soleil , qui, dans l'espace d'une année, fournit sa vaste carrière. Des animaux, plongés au fond de la mer, et comme emprisonnés dans leurs écailles, sont de même sensibles au mouvement de la lune : ils suivent, reine de Délos, les vicissitudes de votre force et de votre faiblesse. Et vous-même, déesse de la nuit, ne perdez-vous pas votre lumière, en vous plongeant dans les rayons de votre frère? ne la recouvrez-vous pas, en vous éloignant de lui? Autant il vous laisse ou vous communique d'éclat, autant vous en renvoyez à la terre, et votre astre est dépendant du sien. Les quadrupèdes même et les autres animaux terrestres, quoique vivant dans une profonde ignorance d'eux-mêmes et des lois de leur existence, [2,100] rappelés toutefois par la nature au souverain auteur de tout ce qui est, semblent s'élever jusqu'à lui, et se régler sur le mouvement du ciel et des astres. Ceux-ci, par une sorte de lustration, se baignent dès que la lune montre son croissant ; ceux-là présagent les tempêtes et le retour de la sérénité. Après ces exemples, qui pourra douter qu'un rapport intime existe entre le ciel et l'homme, à qui la nature a accordé le don de la parole, un esprit étendu, un génie pénétrant, et en qui, par un unique privilége, la divinité descend, habite, et s'étudie elle-même? Je passe sous silence d'autres arts proscrits par les lois, féconds en erreurs, et qui sont d'ailleurs étrangers à mon sujet. Je n'insiste pas sur l'inégalité des dons de la nature. Je n'observerai pas qu'il est impossible de résister au destin, que les ordres en sont irrévocables; que le propre de la matière est d'obéir, celui du ciel de commander. Qui pourrait connaître le ciel, si cette science ne lui venait du ciel? Qui se formerait une idée de la divinité, s'il n'était lui-même une partie de la divinité? Qui pourrait juger de la grandeur de ce globe immense et sans bornes, discerner l'ordre des signes, la voûte de feu qui environne l'univers, la marche des étoiles errantes, éternellement opposée à celle des signes célestes, et renfermer ces connaissances dans tes étroites limites de son intelligence, si la nature n'avait pas donné des yeux perçants à l'esprit de l'homme, si elle ne tournait pas vers elle-même l'attention de l'àme humaine, douée de la même origine qu'elle, si elle ne présidait pas elle-même à ces sublimes recherches, si ce qui nous appelle au ciel, pour y prendre communication des vérités éternelles, (et des lois primordiales que les astres imposent à l'homme naissant,) pouvait venir d'autre part que du ciel? Niera-t-on que ce ne soit un attentat de prétendre se mettre en possession de l'univers malgré l'univers même, et de le montrer aux habitants de la terre, après en avoir fait en quelque sorte notre captif? Mais ne nous arrêtons point à prouver par de longs raisonnements une vérité manifeste: l'expérience seule suffit pour lui donner tout le poids, toute l'autorité qu'elle mérite. La raison ne peut être trompée, et elle ne trompe jamais. Suivons la route qui nous a été frayée d'après des principes certains, et l'événement justifiera toujours la prédiction. Or, qui osera taxer de fausseté ce qui reçoit la sanction du succès? qui se refusera à une telle évidence? Divinement inspiré pour montrer cette énergie des astres je ne ramperai point sur terre, et n'écrirai pas pour la multitude. Porté seul sur mon char, je le ferai rouler librement dans l'étendue de l'Olympe, où je ne crains aucune rencontre, où aucune autre main ne m'aidera à le conduire. Mes chants seront écoutés au ciel, ils seront admirés des astres; le monde se félicitera d'avoir trouvé un poète digne de lui. J'obtiendrai aussi les applaudissements de ce petit nombre de sages que le ciel n'a pas dédaigné d'admettre dans ce séjour sacré, pour qu'ils pussent y puiser la connaissance de ses merveilles. Quant à ceux qui n'ont d'autre passion que celle des richesses, de l'or, de l'autorité, des faisceaux, du luxe, de l'oisiveté, des concerts harmonieux, d'une musique mélodieuse (et le nombre en est grand) , ils dédaigneraient d'employer quelques heures à étudier les décrets du destin ; et c'est encore une faveur du destin, qu'une application . sérieuse à pénétrer ses lois. Il faut d'abord observer la nature variée des signes, et les noms qu'ils portent et qui appartiennent aux deux sexes. Six sont masculins, les six autres sont féminins. Le premier de ceux-ci est le taureau : [2,150] vous le voyez, quand il se lève, reculer, et présenter d'abord la partie postérieure. La différence de sexe est alternative dans toute la suite des signes. Vous remarquerez aussi des signes a figure humaine; ils inspireront des moeurs douces et honnêtes : d'autres, représentant des animaux brutes et féroces, imprimeront un caractère analogue. Il faut, en outre, observer qu'il y a des signes simples; ils sont, dans toute leur étendue, d'une seule et même nature. D'autres sont doubles, et un second associé contribue puissamment à augmenter la force des influences; la réunion altère en des sens opposés l'énergie réciproque ; l'activité de deux figures ainsi appariées peut n'être pas la même : l'une portera au bien, l'autre au mal. Parcourez les signes, vous y voyez deux poissons, vous y voyez deux gémeaux nus; ceux-ci parcourent le ciel, en se tenant tendrement embrassés ; ceux-la, opposés l'un à l'autre, semblent tenir des routes différentes. C'est le même nombre de part et d'autre; mais il faut faire attention aux positions contraires. Au reste, entre les signes doubles, les deux que nous avons nommés possèdent en entier tout ce qui convient à leur nature : ils ne sont point étonnés de se voir surchargés de membres étrangers; ils ne regrettent la perte d'aucun de ceux qui leur sont propres. Il est d'autres signes auxquels il manque quelques membres : leur corps est composé de parties étrangères les unes aux autres. Tel est le capricorne, tel est aussi ce signe qui, empruntant les membres d'un cheval, tient son arc continuellement tendu : celui-ci a des membres humains, et il n'y en a point dans le capricorne. {Il faut de plus observer, dans le grand art dont nous traitons, qu'un signe composé de deux figures entières diffère beaucoup de celui qui n'a qu'une figure composée de deux corps différents.} On met aussi Erigone au nombre des signes doubles : elle l'est, en effet, par sa forme, et par le rapport qu'elle a avec deux saisons : au milieu de la vierge l'été finit, et l'automne commence. Si les signes tropiques du bélier, de la balance, de l'écrevisse et du capricorne sont toujours précédés par des signes doubles, c'est que ces signes réunissent les forces combinées de deux saisons. Ainsi, des deux frères qui précèdent l'écrevisse, celui-ci nous fait jouir de la saison fleurie du printemps, celui-là nous fait éprouver déjà les ardeurs brûlantes de l'été. Ils sont cependant nus l'un et l'autre, parce qu'ils ressentent, l'un la chaleur du printemps qui finit, l'autre celle de l'été qui commence. Le sort du premier est donc le même que celui du second. Le sagittaire est pareillement représenté sous une ligure double ; il annonce l'arrivée prochaine du capricorne qui le suit. La saison tempérée de l'automne s'approprie les parties les plus délicates de ce signe, ses membres humains, tandis que sa croupe, hérissée de poils, est l'apanage de l'hiver et en annonce le commencement. Les poissons, dont le bélier est précédé, sont au nombre de deux, et ont rapport à deux saisons : le premier termine l'hiver, le second commence le printemps. Alors le soleil, accourant vers nous, parcourt des signes humides : les pluies d'hiver se marient avec les rosées du printemps; les unes et les autres revendiquent les poissons, comme leur appartenant. De plus, trois signes consécutifs semblent s'opposer à la marche des neuf autres : on croirait qu'une guerre intestine va diviser le ciel. Observez qu'en se levant le taureau présente d'abord sa croupe, les gémeaux leurs pieds, l'écrevisse sa cuirasse écailleuse, tandis que les autres signes se lèvent dans une position droite et naturelle. Ne soyez donc pas surpris si le soleil, en parcourant ces signes qui lui font obstacle, retarde sa marche, et rend conséquemment les mois de l'été plus longs que les autres. [2,200] Remarquez encore qu'il a des signes nocturnes et des signes diurnes, et appliquez-vous à les bien distinguer. Cette différence ne vient pas de ce que les uns roulent au-dessus de nous pendant le jour, et les autres durant la nuit : autrement il aurait fallu les désigner tous par le même nom, parce qu'il n'est point d'heure qui ne les voie briller successivement : {ils sont sur l'horizon tantôt le jour et tantôt la nuit.} Mais la nature, créatrice de l'univers, a attribué pour toujours à chaque signe des parties du temps absolument invariables. Le titre de signes diurnes est échu en partage au sagittaire, au lion furieux, à celui qui détourne la tête pour contempler l'or de sa toison, aux poissons, à l'écrevisse, au dangereux scorpion : ces signes ou se suivent immédiatement, ou sont séparés par des intervalles égaux. {Les six autres ou contigus, ou, relativement au lieu qu'ils occupent,} espacés comme les premiers, sont appelés nocturnes. D'autres ont donné le nom de diurnes aux six signes consécutifs commençant par le bélier, chef de tous les signes; et celui de nocturnes aux six autres qui se suivent, depuis la balance. Enfin il a plu a quelquesuns de regarder comme diurnes les signes masculins, et de reléguer les féminins dans la paix et les ténèbres de la nuit. Il est des signes qui doivent évidemment leur origine à Neptune : telle est l'écrevisse, qui peuple nos rivières; tels sont les poissons, qui habitent l'océan et les fleuves. D'autres sont censés avoir une nature terrestre, comme le taureau, chef du gros bétail; le bélier, fier de son empire sur les bêtes à laine ; le lion , ennemi et destructeur de l'un et de l'autre; et le scorpion, qui aime à fréquenter les buissons. D'autres signes enfin tiennent une sorte de milieu entre les précédents; ils réunissent en eux les propriétés des deux éléments associés : ainsi le capricorne tient en partie à la terre, le verseau a un même rapport avec les ondes. Nous ne devons pas négliger ici les plus petits détails; tout a sa raison, rien n'a été créé inutilement. La fécondité est une propriété de I'écrevisse, du scorpion âpre à la piqûre, et des poissons, qui peuplent les mers. Mais la vierge est stérile, comme le lion son voisin: le verseau ne conçoit, ou du moins n'engendre aucun fruit. Le capricorne, dont le corps est formé de membres disparates, tient le milieu entre ces deux extrêmes, ainsi que le sagittaire, qui fait briller l'arc dont il est armé. Le bélier est dans la même classe, et y retient avec lui la balance qui égale la nuit au jour, les gémeaux et le taureau. N'allez pas croire que ce soit sans motifs que la nature a donné aux signes différentes attitudes. Les uns sont courants, comme le lion, le sagittaire, et le bélier aux cornes menaçantes. D'autres sont debout, entretenant tous leurs membres dans un juste équilibre, tels que la vierge, les gémeaux et le verseau, qui vide continuellement son urne. Quelques-uns, images naturelles des esprits indolents, sont assis, comme s'ils étaient accablés de lassitude : tels sont le taureau, qui s'assoupit sur le joug dont il est affranchi; la balance, qui se repose de la fatigue d'un long travail; et vous, capricorne, dont un froid glacial contracte tous les membres. Les autres enfin sont couchés, comme l'écrevisse affaissée sur son large ventre, [2,250] comme le scorpion allongé sur la terre, comme les poissons, qui restent toujours obliquement étendus sur le côté. Si vous examinez le ciel avec attention, vous vous apercevrez qu'il y a des signes privés de leurs membres. Le scorpion n'a point de serres; la balance les absorbe : le taureau s'affaisse sur une jambe recourbée qui ne peut le soutenir : l'écrevisse est aveugle : il reste un oeil au sagittaire, qui a perdu l'autre. C'est ainsi que le ciel nous console de nos malheurs; il nous apprend par ces exemples à les supporter patiemment, puisque nous voyons tous les événements dépendre de lui, et les signes célestes eux-mémes n'être point exempts de ces disgrâces. Les signes se distinguent encore par leurs rapports avec les saisons. Les gémeaux donnent naissance à l'été, la vierge à l'automne; l'hiver commence au sagittaire, le printemps aux poissons : trois signes consécutifs sont attribués à chacune des quatre saisons; les signes d'hiver sont opposés aux signes d'été, ceux du printemps à ceux de l'automne. Il ne suffit pas de connaître les qualités propres à chacun des douze signes : ils s'allient ensemble, et nos destinées dépendent de leurs combinaisons; ils se prêtent des forces relatives à leur énergie, et au lieu qu'ils occupent. Suivez la courbure du cercle entier des signes, et portez une même ligne trois fois sur sa circonférence, de manière que la division se termine au point précis où elle a commencé : les signes que déterminera l'extrémité de cette ligne sont nommés trigones, parce que les trois angles formés par l'inflexion de la ligne tombent sur trois signes séparés les uns des autres par trois signes intermédiaires. C'est ainsi que le bélier voit à des intervalles égaux, mais de deux côtés différents, les signes du lion et du sagittaire : le capricorne est dans la même position relativement à la vierge et au taureau : les autres signes trigones sont pareillement espacés à de semblables distances. Mais si la ligne, devenant dans son inflexion perpendiculaire à elle-même, divise le cercle en quatre parties égales, les signes où cette ligne rebrousse sont nommés tétragones. C'est ainsi que le capricorne regarde la balance, et est regardé par le bélier; c'est ainsi qu'à des distances égales l'écrevisse voit le bélier, et est vue de la balance, qui la suit à sa gauche; car tout signe qui précède un autre signe est censé être à sa droite. On peut, sur ce modèle, faire d'autres distributions pareilles, et trouver dans les douze signes trois suites de signes tétragones, qui suivent l'ordre que nous venons de proposer, et qui ont la même énergie. Mais si quelqu'un se contentait de déterminer les tétragones en divisant le ciel de quatre en quatre signes, ou les trigones en étendant la division jusqu'au cinquième signe, il serait fort éloigné de découvrir par ce procédé les forces réunies, les positions heureuses, les aspects favorables, les relations réciproques des astres. En effet, quoiqu'on ait exactement compté cinq signes, celui qui serait né sous l'aspect de ces signes ainsi espacés n'éprouverait pas pour cela l'influence du trigone : ce serait un trine aspect, mais de nom seulement; il n'en aurait ni le nombre, ni la vraie position, ni par conséquent les propriétés. [2,300] Les degrés du cercle des signes parcouru par l'astre brûlant de Phébus sont au nombre de trois cent soixante; le tiers de ce nombre doit former le côté du trigone, puisque le trigone divise le cercle en trois parties égales. Or vous ne trouverez pas cette somme, si vous vous contentez de compter depuis un signe jusqu'à l'autre, au lieu de compter depuis tel degré du premier signe jusqu'à pareil degré du second. La raison en est que, quoique vous ayez deux signes séparés l'un de l'autre par trois intermédiaires, si vous comptez depuis le commencement du premier signe jusqu'à la fin du cinquième, la somme s'étendra jusqu'à cent cinquante degrés; elle sera trop forte, et empiétera sur le second côté du trigone. Donc, quoique les signes soient trigones entre eux, leurs degrés que l'on compare ne le sont pas. On se tromperait également en suivant le même procédé pour les signes tétragones. Trois fois trente degrés sont la quatrième partie de la circonférence du cercle des signes : or, si pour côté du tétragone vous tirez une ligne depuis le premier degré du premier signe jusqu'au dernier degré du quatrième, vous aurez un côté de deux fois soixante degrés. Si, au contraire, on ne compte que depuis le dernier degré du signe précédent jusqu'au premier du signe suivant, la ligne traversera les deux signes intermédiaires, et restera bornée à cette longueur; elle ne sera que de deux fois trente degrés, trop courte d'un tiers : en vain l'on dira qu'on a compté depuis un signe jusqu'au quatrième signe suivant; la valeur d'un signe s'évanouit dans la supputation des degrés. Il ne suffit donc pas de régler le trigone par le nombre de cinq signes, ni de donner quatre signes à chaque côté du tétragone. Si vous voulez obtenir un tétragone régulier, ou un trigone dont les trois côtés soient parfaitement égaux, prenez une étendue de cent degrés, augmentée d'une part de sa cinquième partie, diminuée de l'autre de sa dixième, et vous aurez les mesures précises qu'il faut employer. Alors tous les points du cercle des signes où le trait diviseur formera un angle du tétragone, et tous ceux où la ligne qui détermine les côtés du trigone rebroussera pour former un nouveau côté, ont reçu de la nature une liaison étroite, une association d'activité, un droit réciproque de se seconder. Il s'ensuit que toute nativité ne ressent pas les influences des signes trigones de celui qui la domine; et que deux signes peuvent être en quadrat aspect, sans avoir entre eux la correspondance qui conviendrait à des tétragones. En effet, un aspect qui mesure exactement la circonférence du cercle est fort différent de celui qui se refuse à cette mesure exacte, et qui, répété trois ou quatre fois, s'étend à plus de signes qu'il n'y en a dans toute la circonférence du cercle céleste. Au reste, l'énergie des signes trigones est fort supérieure à celle des tétragones. Le côté de ces derniers est plus élevé, plus voisin du ciel : la ligne, au contraire, qui forme le côté du trigone est plus voisine de nous, plus éloignée du ciel; les signes trigones regardent la terre de plus près, ils nous font respirer un air plus imprégné de leurs influences. On a aussi assigné des rapports, mais moins certains, aux signes qui se suivent alternativement. La liaison réciproque de ces signes est peu constante, [2,350] parce que la ligne qui décrit l'hexagone se laisse courber comme malgré elle, après n'avoir soutendu qu'un petit arc. Cette trace est en effet formée en passant successivement un signe, et en se courbant en angle au signe suivant : elle éprouve en conséquence six rebroussements : du taureau elle passe à l'écrevisse ; de là, après avoir touché la vierge, elle entre dans le scorpion ; elle va vous joindre ensuite, capricorne glacé, et vous quitte pour aller aux poissons : elle termine enfin la division au signe du taureau, où elle l'avait commencée. Le trait du second hexagone doit passer par tous les signes que le premier hexagone n'a pas touchés, et exclure tous ceux qui viennent d'être nommés; il est d'ailleurs, dans sa marche et pour le nombre de ses rebroussements, entièrement semblable au premier. Les signes de l'hexagone ne se voient donc qu'indirectement, ils sont obligés de détourner les yeux, et ne se regardent que de côté; ils voient à peine leur voisin : un aspect direct est bien plus efficace. {Un troisième signe est comme, caché, l'enfoncement des angles étant presque insensible.} D'ailleurs, lorsque la ligne qui joint les signes est si voisine de la convexité du ciel, et qu'elle ne passe alternativement les signes que de deux en deux, elle erre en quelque sorte au plus haut du ciel; son activité s'exerce fort loin de nous, et elle ne peut nous transmettre que de faibles influences. Toutefois ces signes sont amis à titre d'affinité, parce qu'en raison de leur position alternative ils sont tous d'un même sexe: les signes masculins correspondent aux signes masculins, et les féminins entretiennent entre eux un commerce réciproque. Ainsi, quoique ces signes ne soient qu'alternatifs, la nature cède à leur influence; ils ont entre eux des affinités fondées sur la ressemblance du sexe. Les signes qui se touchent ne peuvent former entre eux aucune liaison, l'amitié ne pouvant exister entre ceux qui ne se voient point. Une secrète inclination unit les astres avec les astres éloignés, parce que ceux-ci sont à la portée de leur vue. Les astres voisins sont d'ailleurs de sexe différent : un signe masculin est pressé de part et d'autre par deux féminins: la concorde est impossible entre des signes si disparates. Les signes qui se suivent de six en six ne peuvent se communiquer aucune activité, en ce que la ligne qui les unit étant redoublée ne peut jamais terminer le cercle : elle formera un second côté, le long duquel deux signes extrêmes en renfermeront quatre intermédiaires : mais la circonférence sera complète avant que le troisième côté soit terminé. Quant aux astres qui lancent leurs feux des parties les plus éloignées du monde, et qui, suspendus en des points de l'espace directement opposés, sont séparés les uns des autres de toute l'étendue du ciel ou d'un intervalle de sept signes, leur éloignement, quel qu'il soit, ne nuit pas à leur activité : ils réunissent leurs forces, ou pour allumer la guerre ou pour procurer la paix, suivant les circonstances qui les déterminent; les étoiles errantes pouvant leur inspirer tantôt des pensées de concorde, et tantôt le désir de tout brouiller. Voulez-vous connaître les noms des signes qui sont en opposition, et les lieux qu'ils occupent dans le ciel? Observez que le solstice d'été est opposé aux frimas, l'écrevisse au capricorne, le bélier à la balance; le jour est égal à la nuit dans ces deux signes; Erigone est opposée aux poissons, le lion au verseau et à son urne : quand le scorpion est au haut du ciel, le taureau en occupe le bas; enfin le sagittaire disparaît, lorsque les gémeaux montent sur l'horizon. {Les signes contraires observent réciproquement leurs cours.} [2,400] Quoique les signes contraires soient diamétralement opposés, leur nature les rend souvent amis, et de la ressemblance de sexe naît une mutuelle bienveillance. C'est un signe masculin opposé à un masculin, ou bien les signes opposés sont tous les deux de l'autre sexe. Les poissons et la vierge s'avancent contrairement l'un à l'autre; ils sont cependant disposés à s'entr'aider; la nature agit plus fortement que l'opposition directe; mais cette ressemblance de nature a moins d'énergie que l'opposition des saisons. L'écrevisse , signe féminin, vous est hostile, ô capricorne, quoique vous soyez du même sexe ; mais c'est que l'hiver et l'été diffèrent trop : d'un côté, les glaces, les frimas, les campagnes blanchies par la neige ; de l'autre, la soif ardente, les sueurs, les coteaux arides et desséchés : ajoutez que les nuits froides de l'hiver égalent les jours de l'été. Ainsi la nature paraît se contrarier elle-même, et l'année ne ressemble point à l'année ; il n'est donc pas étonnant que de tels signes ne puissent s'accorder entre eux. Mais ïl n'y a pas une répugnance entière entre le bélier et la balance, quoique le printemps et l'automne soient deux saisons différentes, que l'une produise les fleurs, et que l'autre porte les fruits à parfaite maturité. Ces deux signes ont un rapport commun, l'égalité des jours et des nuits : ils nous procurent deux saisons dont la température est semblable; douce température qu'ils entretiennent de concert, et qui est l'effet de la position de ces deux signes à une égale distance des deux solstices. De tels astres ne peuvent avoir l'un pour l'autre une antipathie déclarée. Tels sont les rapports d'aspect qu'on peut remarquer entre les signes. Après ces observations, notre soin principal doit être de rechercher quels sont les dieux qui président à chaque signe, et quels sont les signes que la nature a mis plus particulièrement sous la protection de chaque dieu, dès le temps où, donnant aux plus augustes vertus le caractère de la divinité, elle nous en a représenté l'énergie sous des noms sacrés, afin que la majesté de la personne nous rendît la chose plus respectable. Pallas protège le bélier, la déesse de Cythère le taureau, Apollon les aimables gémeaux. Vous présidez, Mercure, à l'écrevisse; et vous, Jupiter, vous commandez au lion, avec la mère des dieux. La vierge, avec son épi, appartient de droit à Cérès, et la balance à Vulcain, qui l'a forgée. Le scorpion belliqueux s'attache à Mars; Diane protège le chasseur, moitié homme et moitié cheval. Le capricorne rétréci est attribué à Vesta; le verseau, astre de Junon, est opposé à celui de Jupiter : Neptune revendique au ciel les poissons, comme originaires de son empire. Ces principes peuvent vous être d'un grand secours pour pénétrer dans la science de l'avenir. Lorsque vous promenez votre pensée parmi les étoiles et les signes célestes, vous devez tirer des conséquences de tous leurs rapports, de tous leurs mouvements, afin que les règles de l'art vous fassent découvrir tous les ressorts de la puissance divine, et que votre certitude soit aussi inébranlable que les arrêts du ciel. Remarquez la distribution des parties du corps humain entre les signes célestes, et la dépendance où est chaque membre de son propre signe, qui déploie principalement sur lui toute l'énergie de son pouvoir. Le bélier, chef de tous les signes, a revu la tète en partage : le cou, embelli par les grâces, est celui du taureau : les bras jusqu'aux épaules sont échus par le sort aux gémeaux : la poitrine est placée sous le pouvoir de l'écrevisse : [2,450] les flancs et les épaules appartiennent au lion : les reins sont le propre apanage de la vierge : la balance préside aux parties charnues sur lesquelles on s'assied, le scorpion à celles de la génération : les cuisses sont du ressort du sagittaire : le capricorne commande aux deux genoux : les jambes forment l'empire du verseau ; et les poissons exercent leur empire sur les pieds. Les astres ont de plus entre eux certains rapports particuliers, suivant lesquels ils se forment à eux-mêmes d'autres espèces de correspondance. Ils se regardent, ils s'écoutent les uns les autres; ils s'aiment, ils se haïssent; quelques-uns ne tournent que vers eux-mêmes des regards complaisants. Il arrive de là que des signes opposés se prêtent quelquefois des secours ; que d'autres, liés par des affinités, se font réciproquement la guerre; que quelques-uns, quoique dans des aspects défavorables, versent sur les hommes, à leur naissance, le germe d'une amitié inaltérable; que quelques autres enfin, résistant à l'impulsion et de leur nature et de leur position, s'évitent mutuellement. La cause en est que Dieu, en donnant des lois au monde, inspira diverses affections aux signes célestes; il assortit entre eux les yeux de ceux-ci, les oreilles de ceux-là; il en unit quelques-uns par les liens d'une étroite amitié : de manière que ces signes pussent en voir, en écouter d'autres, aimer ceux-ci, faire à ceux-là une guerre éternelle; que plusieurs même fussent tellement satisfaits de leur sort, qu'ils n'eussent d'inclination que pour eux seuls, qu'ils se portassent une affection exclusive. Nous voyons des hommes de ce caractère; ils le tiennent des astres qui ont présidé à leur naissance. Le bélier est son propre conseil à lui-même, cela convient à un chef; il s'écoute, regarde la balance, et s'abuse en aimant le taureau. Ce dernier lui tend des embûches, et voit plus loin les poissons étincelants, il les écoute : mais son âme est éprise de la vierge. Tel il avait autrefois porté sur son dos la belle Europe, qui de sa main gauche se retenait à ses cornes : il prêtait alors sa forme à Jupiter. L'oreille des gémeaux se porte vers le jeune homme qui fournit aux poissons des eaux intarissables; les poissons sont l'objet de leur complaisance, le lion celui de leur attention. L'écrevisse et le capricorne, diamétralement opposés, se regardent eux-mêmes et se prêtent réciproquement l'oreille : l'écrevisse cherche à faire tomber le verseau dans ses piéges. Le lion dirige sa vue vers les gémeaux, son oreille vers le sagittaire; il aime le capricorne. Erigone regarde le taureau, écoute le scorpion, et cherche à tromper le sagittaire. La balance se consulte elle-même : elle ne voit que le bélier, elle chérit tendrement le scorpion, qui est au-dessous d'elle. Celui-ci voit les poissons, et hait souverainement la balance. Le sagittaire prête habituellement une oreille attentive au terrible lion; il ne détourne pas les yeux de l'urne du verseau; entre tous les signes, il n'affectionne que la vierge. Le capricorne au contraire se contemple lui-même : pourrait-il porter sa vue sur un signe plus noble? Il a eu le bonheur d'éclairer la naissance d'Auguste : [2,500] il écoute l'écrevisse, qui brille à la partie la plus élevée du ciel. Le verseau, toujours nu, écoute attentivement les gémeaux ; il cultive l'amitié de la brûlante écrevisse, et regarde les flèches acérées du sagittaire. Les poissons tournent la vue vers le bouillant scorpion, et désirent entendre le taureau. Telles sont les propriétés que la nature a données aux signes, lorsqu'elle les a placés au ciel : ceux qui naissent sous eux ont les mêmes inclinations; ils écoutent volontiers ceux-ci, voient ceux-là avec plaisir; ils haïssent les uns, et ont la plus tendre amitié pour les autres; ils tendent des piéges à celui-ci, et ils se laissent tromper par celui-là. Il règne même des inimitiés entre les trigones : le trait de la ligne qui les forme, étant alternativement posé, occasionne des guerres entre eux. C'est ainsi que la nature est toujours uniforme dans ses opérations. Le bélier, le lion, le sagittaire, unis pour faire un seul trigone, ne veulent se prêter à aucune alliance avec le trigone formé par la balance, les gémeaux et le verseau. Deux causes nous forcent à reconnaître la réalité de cette inimitié : les trois premiers signes sont en opposition directe avec les trois autres, et de plus il existe une guerre éternelle entre l'homme et la bête. La balance a une figure humaine; le lion en a une différente. Les animaux brutes plient sous l'homme, parce que la raison doit l'emporter sur les plus grandes forces. Le lion brille au ciel , mais après avoir été vaincu; le bélier ne doit cet honneur qu'à sa riche toison, qui lui fut enlevée; le sagittaire même, considéré dans les parties qu'il tient du cheval , est dompté par l'homme. La puissance de l'homme est telle , que je serais fort étonné si le trigone de l'éclatante balance pouvait être vaincu par ces trois animaux brutes. Il est une observation plus simple encore, que l'on peut faire sur les signes célestes. Tous les signes qui brillent sous une forme humaine sont ennemis, et restent vainqueurs de ceux qui n'ont que des figures d'animaux. Mais ils ont chacun des sentiments qui leur sont propres, et ils livrent des combats à leurs ennemis secrets. Ceux à la naissance desquels préside le bélier sont en lutte contre ceux qui naissent sous la vierge ou sous la balance, contre ceux enfin que l'eau des deux poissons a vus naître. Quiconque voit le jour sous le taureau se défendra contre ceux qui doivent leur existence à l'écrevisse, à la balance, au scorpion ardent, et aux poissons. Quant à ceux qu'engendrent les gémeaux , ils sont en guerre avec le bélier et tout son trigone. Ceux qui sont nés sous l'écrevisse sont continuellement harcelés par ceux qui ont vu le jour sous le capricorne, la balance, le signe de la vierge et celui du taureau, dont la marche est contraire à la leur. I.e lion rugissant a les mêmes ennemis que le bélier, les mêmes signes à combattre. Trigone craint les assauts du taureau, du sagittaire armé de son arc, des poissons, et les vôtres aussi, capricorne glacé. La balance a une foule d'ennemis, le capricorne et l'écrevisse, directement opposés l'un à l'autre, et formant avec elle un tétragone; et de plus tous les signes qui composent le trigone du bélier. Les ennemis du scorpion ne sont pas moins nombreux : ce sont le jeune homme épanchant son urne, les gémeaux, le taureau, le lion ; il évite aussi Erigone et la balance, de laquelle il est redouté lui-même. [2,550] Ceux qui naissent sous les gémeaux, la balance, la vierge et le verseau, oppriment, autant qu'il est en eux, ceux que le sagittaire a vus naître; et ces mêmes signes, par une suite nécessaire de leur nature, haïssent ceux que le capricorne a formés. Ceux qui sont, en naissant, arrosés des eaux que le verseau ne cesse de répandre, ont à repousser les attaques du lion de Némée et de tout son trigone, troupe d'animaux brutes, auxquels un jeune homme seul a le courage de résister : le verseau, voisin des poissons, attaque ceux qui leur doivent le jour : il est secondé dans cette guerre par les gémeaux, par ceux qui sont nés sous la vierge, par ceux enfin à la naissance desquels le sagittaire a présidé. Plusieurs causes concourent à inspirer aux hommes des inimitiés réciproques, à faire germer en eux des semences de haine ou d'affection mutuelle, dès l'instant de leur naissance. D'ordinaire les signes pris de trois en trois se haïssent; ils ne se voient qu'obliquement, et cet aspect est mauvais. En quelque lieu du ciel que l'on considère deux signes opposés, placés à sept signes l'un de l'autre, et se jetant par conséquent des regards opposés, on remarquera toujours que les signes qui forment le trigone d'un de ces signes sont troisièmes l'un et l'autre à l'égard de l'autre signe. Or est-il étonnant que des signes ne puissent se concilier avec d'autres signes, qui regardent leur ennemi sous le plus favorable aspect? tant sont nombreuses les combinaisons de signes qui inspirent aux hommes naissants des haines réciproques; tant doivent être fréquents les effets de cette espèce d'influence ! C'est pour cela qu'une tendre et sincère amitié est le plus précieux et le plus rare présent de la nature. On ne cite qu'un seul Pylade, on ne cite qu'un seul Oreste qui ait voulu mourir pour son ami : c'est, dans le cours de plusieurs siècles, le seul exemple que nous ayons d'un semblable débat, l'un se dévouant de grand coeur à la mort, l'autre ne voulant pas le permettre. Ce bel exemple a eu depuis deux imitateurs : le répondant formait des voeux pour que son ami ne pût revenir : celui-ci craignait que le premier ne fût victime de son amitié. Oui, qu'on remonte le cours des années, des âges, des générations; qu'on jette un coup d'oeil sur toutes ces guerres, sur les calamités qui nous affligent, même en temps de paix; on conviendra que, si la fortune cherche la probité, la bonne foi, il s'en trouve à peine quelque vestige. Au contraire, quelle énorme quantité de crimes dans tous les siècles ! sous quel poids de dissensions et de haines la terre s'est vue accablée, sans qu'on pût alléguer aucune raison qui les justifiât ! {Les pères et les mères sont vendus et livrés à la mort par des fils ingrats ; le soleil recule à l'aspect des crimes, et refuse d'éclairer la terre}. Parlerai-je des villes renversées, des temples profanés, des forfaits commis au sein de la paix , des empoisonnements fréquents, des pièges tendus dans le forum, des assassinats dans les villes, des horreurs auxquelles une multitude effrénée se livre sous le voile de l'amitié? Le crime est épidémique, tout regorge de fureurs. Justice, injustice, tout est confondu : la scélératesse se couvre du manteau de la loi pour exercer sa barbarie; les forfaits sont enfin devenus plus grands que les supplices. Si la paix a disparu de la terre, si la bonne foi est devenue si rare, si l'on en voit si peu d'exemples, c'est sans doute parce qu'un trop grand nombre de signes jette dans le coeur des hommes naissants des semences de discorde. Le ciel n'étant pas d'accord avec lui-même, il doit en être de même de la terre : une fatalité impérieuse entraîne les nations à des haines implacables. Si vous désirez cependant connaître les signes amis, ceux qui réunissent les coeurs par de tendres liens et se secondent réciproquement, [2,600] joignez le bélier aux autres signes de son trigone. Toutefois le bélier a plus de générosité : il favorise ceux qui sont nés sous le lion ou sous le sagittaire, avec plus de franchise qu'il n'est favorisé lui-même par ces deux signes. Il est d'un naturel plus traitable; on peut lui nuire impunément, il n'use d'aucun artifice; son caractère est aussi doux que sa toison. Les deux autres signes sont farouches et cupides; leurs inclinations vénales les portent quelquefois à sacrifier la bonne foi à leurs intérêts, et à oublier les bienfaits qu'ils ont reçus. Il faut cependant remarquer que l'influence du sagittaire, signe composé, qui tient en partie de l'homme, est plus efficace que la vôtre, ô lion de Némée, qui n'avez qu'une forme simple! Pour toutes ces raisons, les trois signes vivent en paix, mais non sans quelque mélange de discorde. Le taureau est pareillement uni avec le capricorne, mais cette union n'est pas plus solide que celle des signes précédents. Ceux qui naissent sous le taureau ont une tendre amitié pour ceux que produit la vierge; mais il s'y mêle de fréquents sujets de plainte. Ceux qui voient le jour sous la balance, le verseau et les gémeaux, n'ont qu'un coeur et qu'une âme; leur union est indissoluble ; ils ont aussi l'heureux talent de se faire un grand nombre d'amis. Le scorpion et 1' écrevisse réunissent par les liens d'une amitié fraternelle ceux à la naissance desquels ils président; et cette union s'étend à ceux qui naissent sous les poissons. Mais la ruse vient souvent se mêler à ce commerce ; le scorpion, sous le voile de l'amitié, enfante des querelles. Pour ceux que les poissons éclairent au moment de leur naissance, ils ne sont jamais fermes dans un même sentiment; ils en changent souvent; ils rompent et renouent leurs liaisons : sous un extérieur serein, ils cachent des haines secrètes, mais peu constantes. Telles sont les inimitiés, telles sont les sympathies annoncées par les astres : telles sont les destinées des hommes, prononcées dès l'instant de leur naissance. Il ne faut pas considérer les signes célestes seuls, et comme isolés les uns des autres : leur position altère leurs propriétés ; leurs aspects changent leur influence : le tétragone a ses droits, le trigone a les siens; il en faut dire autant de la ligne qui divise le cercle en six parties égales, et de celle qui traverse diamétralement le ciel. En conséquence, l'état actuel du ciel tantôt augmente et tantôt diminue l'énergie des signes ; ils concevront ici des inimitiés que, transportés ailleurs, ils déposeront : {car leur activité n'est pas la même lorsqu'ils se lèvent, lorsqu'ils montent ou lorsqu'ils descendent sous l'horizon.} Les signes opposés se haïssent le plus souvent : il y a de l'affinité entre les signes d'un tétragone, de l'amitié entre ceux d'un trigone. La raison n'en est pas difficile à concevoir. Les signes que la nature a espacés de quatre en quatre ont entre eux des rapports évidents. Quatre de ces signes divisent le ciel en quatre parties, que Dieu même a établies pour déterminer les quatre saisons de l'année. Le bélier donne naissance au printemps, l'écrevisse aux dons de Cérès, la balance à ceux de Bacchus, le capricorne à l'hiver et aux mois glacés par la rigueur des frimas. Les signes doubles sont pareillement espacés de quatre en quatre : ce sont les deux poissons, les deux gémeaux, la vierge, qui est censée être un signe double, et le sagittaire, composé d'homme et de cheval, ne formant cependant qu'un seul corps. Les signes simples enfin sont pareillement disposés en tétragone : [2,650] le taureau n'a point d'associé; nul n'est le compagnon du terrible lion; le scorpion, sans collègue, ne craint personne; le verseau est au rang des signes simples. Ainsi tous les signes qui dans le ciel sont disposés en tétragone ont entre eux un rapport relatif ou à leur figure ou aux saisons qu'ils président. Ceux-ci sont unis entre eux par une affinité naturelle; ils désignent en conséquence les parents, les alliés, ceux qui tirent leur origine d'une même source : les signes qui les suivent immédiatement exercent leur action sur les voisins, et les quatre autres sur les hôtes : tel est l'ordre de l'influence de ces huit derniers signes, relatif à leur différente distance des quatre signes cardinaux des saisons. Mais quoique ces signes, divisant le ciel en quatre parties égales, forment de vrais tétragones, ils ne possèdent cependant pas toutes les propriétés de cet aspect : l'analogie de leurs figures a moins de force que leur place aux points cardinaux des saisons. Le côté du trigone, parcourant trois signes entiers intermédiaires, est plus long, occupe un plus grand espace que le côté du tétragone. Aussi les signes d'un trigone unissent nos coeurs par le charme d'une tendre amitié, dont la force égale celle du sang et de la nature. Se regardant à de plus grandes distances, ils n'en ont que plus d'activité pour nous faire franchir l'intervalle qui nous tenait séparés. Cette douce affection qui réunit les âmes est sans doute préférable aux liaisons, souvent trompeuses, que la parenté seule a formées. Combinez les signes avec leurs parties, et ces parties avec les signes : car ici rien d'isolé ne peut avoir d'effet ; toutes les parties du ciel sont dans une dépendance réciproque les unes des autres; elles se communiquent mutuellement leur énergie; c'est ce que j'expliquerai bientôt dans un ordre convenable. Dans l'art dont nous traitons, il ne faut négliger aucun de ces détails, si l'on veut distinguer les signes favorables de ceux qui sont pernicieux. Considérez maintenant un objet, bien simple en apparence, mais en réalité très important. Je ne puis le désigner que par un terme grec, celui de dodécatémorie, qui exprime bien la nature de la chose. Chaque signe céleste a trente degrés : on divise cette étendue en douze parties égales; et l'on conçoit facilement que chaque partie comprendra deux degrés et demi. Il est donc certain que telle est la mesure précise de la dodécatémorie, et que dans chaque signe il y a douze dodécatémories, que le créateur de l'univers a attribuées aux douze signes célestes, afin qu'ils se trouvassent tous réunis par des combinaisons alternatives; que le ciel fût partout semblable à lui-même; que tous les signes se renfermassent réciproquement les uns les autres; que, par cette communication mutuelle, tout fùt entretenu en paix, et que l'intérêt, devenu commun, contribuât à la conservation de la machine. Des enfants peuvent donc naître sous un mème signe, et avoir des moeurs différentes, des inclinations opposées. Quelle variété ne voyons-nous pas dans la production des animaux? Après un mâle naît une femelle, et c'est le même signe qui a éclairé les deux naissances. C'est que le signe varie lui-même par l'effet de sa division : sa dodécatémorie change l'influence qu'il devrait naturellement avoir. Mais quelles sont les dodécatémories de chaque signe? à qui faut-il les attribuer? dans quel ordre faut-il les compter? C'est ce que je vais expliquer, pour que vous puissiez éviter toute incertitude, toute erreur dans la pratique de ces divisions. [2,700] La première dodécatémorie d'un signe appartient à ce signe mème, la seconde au signe qui suit immédiatement, les autres aux signes suivants, toujours dans le même ordre, jusqu'au dernier signe, auquel on attribuera la dernière dodécatémorie. Ainsi chaque signe s'attribue successivement deux degrés et demi, et la somme totale rend les trente degrés compris dans l'étendue de chaque signe. Les dodécatémories ne se bornent pas à une seule espèce; il est plus d'un moyen de les déterminer. La nature a lié la vérité à différentes combinaisons; elle a croisé les routes qui conduisent jusqu'à elle, afin que nous la cherchassions partout. Voici donc, sous le même nom de dodécatémorie, une autre espèce de combinaison. Remarquez le degré où se trouve la lune au moment d'une naissance; multipliez ce degré par douze, parce que c'est là le nombre des signes qui brillent au plus haut du ciel. Sur le produit, attribuez au signe où est la lune le nombre de degrés dont elle est avancée dans ce signe, sans oublier les degrés qui lui restent à parcourir dans le même signe, et donnez trente degrés par ordre aux signes suivants. {Lorsqu'il vous restera moins de trente degrés, divisez ce reste en parties égales de deux degrés et demi chacune, et attribuez ces parties au signe sur lequel vous vous êtes arrêté, et à ceux qui le suivent. Le signe où cette distribution sera épuisée sera celui de la dodécatémorie de la lune. Cet astre occupera ensuite les dodécatémories suivantes, conformément à l'ordre des signes célestes. Pour ne pas vous tromper dans toute cette science, remarquez ce qui suit. La dodécatémorie la moins étendue est la plus efficace, parce que c'est dans les parties mêmes de la dodécatémorie qu'on trouve la base d'une nouvelle dodécatémorie. Pour cela divisez la première en cinq parties, parce qu'on voit briller au ciel cinq étoiles errantes : chacune de ces étoiles s'attribuera un demi-degré, et dans ce partage elle acquerra de nouveaux droits, une plus grande activité. Il faut donc observer en quelle dodécatémorie sont les planètes, et le temps où elles s'y trouvent; car la dodécatémorie à laquelle il faut rapporter une planète ne manquera pas de produire un effet proportionné à l'énergie de cette planète. Il ne faut négliger aucune de ces combinaisons, qui sont le fondement de tous les événements. Mais je reviendrai à cet objet, et je le traiterai dans l'ordre convenable. Il me suffit, pour le présent, d'avoir dévoilé plusieurs vérités, en démontrant l'usage qu'on en pouvait faire. Par là l'intelligence des parties séparées facilitera celle du tout; et mes chants pourront plus facilement persuader les vérités générales, lorsque j'aurai fait concevoir les vérités particulières. On apprend d'abord aux enfants à connaître la forme et le nom des lettres; on leur en montre l'usage, on leur enseigne ensuite à les réunir pour en former des syllabes; bientôt la lecture des mots les conduit à la connaissance de leur construction; alors on leur fait concevoir la force des expressions et les règles de l'art; ils parviennent successivement à arranger des pieds, à former des vers : il faut qu'ils aient passé par tous les préliminaires précédents; si on ne les avait pas bien affermis dans ces premières connaissances, si les maîtres s'étaient trop pressés, les préceptes prématurés seraient devenus inutiles, parce qu'on n'aurait pas observé la marche convenable. [2,750] Ainsi, m'étant proposé de parcourir dans mes chants l'univers entier, de dévoiler les secrets les plus impénétrables du destin, d'en assujétir même l'exposition au langage des Muses, de faire descendre la divinité du haut du ciel, où elle a son trône; je dois avancer par degrés vers ce but, et expliquer chaque partie dans l'ordre convenable, afin qu'après les avoir toutes comprises, on puisse en tirer plus facilement la connaissance de leurs différents usages. Lorsque l'on veut construire une ville sur la cime inculte de quelque montagne, le fondateur, après avoir choisi l'éminence qu'il veut entourer de murs, ne commence pas d'abord l'ouverture du fossé : il commence par méditer sur l'ensemble de son projet. Aussitôt le chêne tombe sous des coups redoublés, la foret abattue s'étonne de voir un nouveau soleil et des astres qui lui avaient été si longtemps inconnus; les oiseaux, les bêtes sauvages, chassés de leurs anciennes retraites, sont obligés d'en chercher d'autres. Ici l'on tire de la carrière la pierre qui doit servir à la construction des murs, on arrache des entrailles de la terre le marbre qui décorera les temples; là on donne au fer la trempe qui doit le durcir : tous les arts, tous les métiers concourent à ces préparatifs : ce n'est qu'après tous ces préliminaires qu'on procède à l'exécution du plan projeté; si l'on eût renversé cet ordre, mille obstacles auraient interrompu la construction. De même, avant d'exécuter la haute entreprise que j'ai formée, je dois rassembler d'abord les matériaux, sans entrer dans le détail de leurs usages : grâce à cette marche, les raisons que j'en donnerai ensuite seront plus intelligibles, et le fil de mes raisonnements ne sera pas interrompu par de nouvelles choses qu'il faudrait expliquer. Appliquez-vous donc à bien connaître les cercles cardinaux : ils sont au nombre de quatre, leur position dans le ciel est toujours la même; ils font varier les vertus des signes qui les traversent. Le premier, placé dans la partie où le ciel s'élève sur I'horizon, commence à voir la terre également divisée. Le second répond à la partie du ciel directement opposée; là les astres nous abandonnent, et se précipitent dans le Tartare. Le troisième a sa place au plus haut du ciel, où Phébus fatigué arrête ses chevaux hors d'haleine, s'apprête à faire baisser le jour, et détermine la longueur des ombres méridiennes. Le quatrième occupe le plus bas du ciel, dont il peut s'enorgueillir d'être comme le fondement : c'est là que les astres cessent de descendre, et commencent à remonter vers nous; ce cercle voit leur lever et leur coucher à des distances égales. Ces quatre parties du ciel ont la plus grande activité; elles influent le plus puissamment sur les destinées des hommes, parce qu'elles sont comme les gonds célestes sur lesquels l'univers est inébranlablement appuyé. En effet, si le ciel, emporté par un mouvement circulaire et continuel, n'était retenu par ces cercles, s'il n'était pas fortement retenu tant sur les deux côtés qu'à son point le plus élevé et à sa partie la plus basse, toute la machine croulerait bientôt, et s'anéantirait. Cependant chaque cercle cardinal a une énergie différente, et variée suivant la place et le rang qu'il occupe. Le premier est celui qui domine au plus haut du ciel, et qui, par un trait imperceptible, le divise en deux parties égales : il est le plus noble de tous, à raison de la place éminente où il est élevé. Ce poste sublime exige qu'il ait sous sa protection tout ce qui est grand et relevé, [2,800] qu'il dispense en souverain les honneurs et les distinctions. Il est la source de la faveur et des dignités imposantes, il concilie l'affection du peuple : c'est par lui qu'on brille au forum, qu'on donne des lois à l'univers, qu'on contracte des alliances utiles avec les nations étrangères, et qu'on se fait un nom digne de son rang et de sa condition. Le second cercle occupe, il est vrai , le lien le plus bas; mais il soutient le ciel, appuyé sur lui comme sur une basse solide et éternelle. Les effets en sont moins brillants en apparence, mais en réalité ils sont plus utiles : il procure le fondement de toute félicité; les richesses viennent de lui. {Il comble les voeux des hommes, en arrachant du sein de la terre les métaux, et tout ce qu'elle nous cache de plus précieux.} Le troisième cercle est aussi un des fondements du monde : il occupe le point brillant de l'orient, où les astres se lèvent, où renaît le jour, d'où l'on commence à compter les heures : c'est pour cela que les Grecs l'ont appelé horoscope, nom qui exprime ce qu'il est; les Latins ne lui en ont point donné d'autre. Ce cercle est l'arbitre de la vie; il forme les moeurs, il favorise d'un succès heureux les projets, il donne de l'activité aux arts, il préside aux premières années qui suivent la naissance, et à l'éducation de l'enfant; c'est de lui que ressortit la noblesse de l'extraction. Mais, sur tous ces objets, il faut que l'activité de l'horoscope soit secondée par celle des signes où il se trouve. Le dernier cercle est celui qui reçoit les astres, lorsqu'ils ont fourni leur carrière au-dessus de l'horizon : placé à l'occident, il voit au-dessous de lui la partie de la terre plongée sous les ondes : il préside à la conclusion de toutes les affaires, au terme de nos travaux, au mariage, aux festins, aux derniers moments de la vie, au repos, à la société, au culte des dieux. Il ne suffit pas d'observer les cercles cardinaux, il est essentiel de faire encore attention aux intervalles qui les séparent: ils forment quatre grands espaces, et chaque espace a son énergie particulière. Le premier, qui s'étend depuis le cercle de l'orient jusqu au plus haut du ciel, préside aux premières années, à celles qui suivent immédiatement la naissance. Ce qui suit, en descendant du comble de la voûte céleste jusqu'au cercle de l'occident, succède aux années de l'enfance, et tient sous son pouvoir la tendre jeunesse. L'espace qui se trouve sous le cercle occidental, et qui descend jusqu'au bas du ciel, régi l'âge mûr, que fortifient le passé même et les leçons réitérées de l'expérience. Enfin, l'intervalle qui, pour compléter le ciel entier, commence à remonter, et gravit lentement, avec peine, ce qui reste d'espace jusqu'au cercle oriental, embrasse les dernières années de la vie, son déclin, la tremblante vieillesse. Tout signe, quelle que soit sa figure, reçoit de nouvelles propriétés de la partie du ciel où il se trouve : le lieu domine les astres, et leur imprime des qualités bonnes ou mauvaises. Les signes, roulant successivement par tout le ciel, acquièrent ici une certaine activité; ils la perdent ailleurs. La nature de la maison est plus forte que celle du signe; elle veut que ses lois soient observées dans toute l'étendue de son domaine; elle force ces signes passagers à se plier à son caractère : telle maison dispense les honneurs et les dignités, telle autre est stérile; les signes qui la traversent portent la peine de leur passage. La maison qui est au-dessus du cercle de l'orient, la troisième après le milieu du ciel, [2,850] est une maison funeste qui prépare un fâcheux avenir, et n'annonce que des maux de toute sorte. Ce défaut ne lui est pas particulier; la maison qui est directement opposée n'est pas plus favorable : toutes deux sont abattues, et craignent la chute dont elles sont menacées : on les appelle portes du travail; là il faut toujours monter, et là tomber toujours. Le sort du monde n'est pas plus heureux dans les maisons qui sont immédiatement au-dessus de celle de l'occident ou au-dessous de celle de l'orient; celle-ci est penchée sur le bord du précipice , celle-là est comme suspendue dans l'espace : l'une appréhende d'être écrasée par la maison orientale, l'autre craint de tomber, si le cercle de l'occident vient à manquer sous elle. C'est donc avec beaucoup de raison qu'on les a regardées l'une et l'autre comme les horribles maisons de Typhée. La terre courroucée, produisit ce géant, lorsqu'elle s'arma contre le ciel. On vit naître des enfants monstrueux, dont la taille égalait presque celle de leur mère : mais, frappés de la foudre, ils rentrèrent bientôt dans le sein qui les avait portés, et les montagnes qu'ils avaient entassées retombèrent sur eux. Le même tombeau mit fin à la guerre et à la vie de Typhée ; ce géant, devenu la proie des flammes au fond du mont Etna, fait encore trembler sa mère. La maison qui suit la cime éclatante du ciel le cède à peine à celle dont elle est voisine : mieux fondée dans ses espérances, prétendant à la palme, victorieuse des maisons qui l'ont précédée, elle les surpasse toutes en élévation, elle touche au sommet des cieux : mais ensuite elle ne pourra que déchoir, et ne formera plus que des voeux inutiles. il ne faut donc pas s'étonner si, pour caractériser cette maison, attenante au faîte du ciel, et qui le suit immédiatement, on l'a consacrée à la bonne Fortune; c'est ainsi que notre langue participe de l'énergie de la langue grecque, en traduisant par cette expression le nom que les Grecs ont donné à cette maison. Elle est la demeure de Jupiter; fiez-vous à la fortune qui y préside Sur un point directement opposé, et dans la partie inférieure du ciel, est une maison semblable, contiguë au cercle cardinal du bas du ciel. Elle est comme fatiguée de la carrière qu'elle a parcourue; destinée à une course nouvelle, elle va succéder à la maison cardinale, et à son important office : elle ne porte pas encore le poids du ciel, mais elle espère avoir bientôt cet honneur. Les Grecs l'appellent Démonienne : nous ne pouvons l'exprimer en latin par aucun terme compatible avec la mesure de nos vers. Mais gravez profondément dans votre mémoire que ce lieu est habité par un dieu puissant, qui le tient sous sa protection : ce souvenir vous sera dans la suite de la plus grande utilité. Cette maison est le siége ordinaire de tout ce qui peut entretenir notre santé : elle recèle aussi les maladies qui nous font intérieurement une guerre cruelle. Elle produit ces deux effets opposés, en raison de la double influence des circonstances et du dieu qui y préside, et qui se plaît à varier alternativement son action sur la santé des hommes. Le soleil préfère à tous les lieux du ciel la maison où il entre après l'heure de midi, lorsque, descendant du haut de la voûte céleste, il commence à incliner vers le couchant. Nos corps, par l'action de cet astre, y contractent des qualités bonnes et mauvaises, et y participent aussi aux faveurs de la fortune. Les Grecs ont donné le nom de dieu à cette maison. Celle qui lui est diamétralement opposée, qui du plus bas du ciel s'élève la première et commence à nous ramener les astres, est d'une couleur sombre, et préside à la mort : elle est sous la domination de la lune, qui de ce lieu contemple le brillant séjour de son frère, placé à l'opposite du sien ; {et qui, perdant peu à peu sa lumière vers la fin de sa révolution, est une image des derniers instants de la vie.} [2,900] Cette maison est appelée déesse par les Romains; les Grecs lui donnent un nom dont la signification est la même. Au plus haut du ciel, dans ce lieu où les astres, cessant de monter, commencent à descendre; dans cette maison qui, à égale distance du lever et du coucher des astres, semble tenir le monde dans un parfait équilibre, la déesse de Cythère a établi le trône de son empire : de là elle offre en quelque sorte à l'univers le spectacle de ses charmes ; c'est par eux qu'elle gouverne la terre. La fonction particulière de cette maison est de présider au mariage, au lit nuptial, à la cérémonie des noces : lancer des traits qui aillent jusqu'au coeur est un art digne de Vénus. Ce lieu du ciel s'appelle la Fortune : ne l'oubliez pas, je vous prie, afin que, si mon poëme est long, j'en puisse au moins abréger les détails. Dans la partie du ciel la plus basse, dans cette maison cardinale qui est le fondement de l'univers, et qui voit au-dessus de soi le monde entier; dans ces lieux de ténèbres, Saturne, dépouillé de l'empire des dieux et renversé du trône de l'univers, exerce sa puissance : père, il répand ses influences sur les destinées des pères; celles des vieillards dépendent aussi de lui. Ce dieu est le premier qui, de ce séjour, étende une double protection sur les pères, sur les enfants nouveaux nés. Il est austère et attentif: les Grecs lui ont donné le nom de Démon, nom qui exprime bien le pouvoir qu'on lui attribue. Portez maintenant vos regards sur la partie du ciel qui s'élève vers le premier cercle cardinal, où les astres renaissants recommencent à fournir leur carrière accoutumée, où le soleil, humide encore, sort du sein glacé de l'océan; ses rayons affaiblis reprennent par degrés leur chaleur et leur lumière dorée : il est alors dans le temple qu'on dit vous être consacré, ô Mercure, fils de Maïa ! C'est là que la nature a déposé les destinées des enfants, et suspendu l'espérance des pères. Il reste encore la maison de l'occident : elle précipite le ciel sous la terre ; les astres sont plongés par elle dans l'obscurité des ténebres : elle avait vu le soleil en face, elle ne le voit plus que par derrière. Il n'est pas étonnant qu'on l'ait appelée porte de Pluton, qu'elle préside a la vie, qu'elle soit consacrée à la mort : le jour même vient mourir en cette partie du ciel ; elle le dérobe successivement à la terre, elle enferme le ciel dans les prisons de la nuit. Elle préside d'ailleurs à la bonne foi et aux sages conseils. Telle est l'énergie de cette maison, qui rappelle à elle et nous cache le soleil, qui le reçoit de nous pour le rendre à d'autres peuples, et qui perpétue le jour autour de la terre. Telles sont les observations que vous devez faire sur les temples célestes et sur leurs propriétés. Tous les astres les traversent; ils en reçoivent les influences, ils leur communiquent les leurs. Les planètes les parcourent pareillement, suivant l'ordre que la nature a déterminé; elles en font varier l'énergie lorsqu'elles se trouvent dans un domaine qui n'est pas le leur, et que, comme étrangères, elles s'arrêtent dans un domicile qui ne leur appartient pas. Mais cette matière me fournira d'autres chants, lorsque je traiterai des étoiles errantes. Il me suffit maintenant d'avoir expliqué les distinctions établies entre les diverses parties du ciel, les noms qu'on leur donne, les propriétés de chaque lieu, quels sont les dieux qui y président, [2,950] et à quelle partie le premier auteur de cet art a donné le nom d' "octo topos". L'ordre demande que j'expose maintenant les lois du mouvement des étoiles, lorsque, dans leur course errante, elles traversent ces maisons célestes.